LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 12 décembre 2006), que, par acte du 28 avril 1976, les époux X... ont donné à bail à M. Serge Y... des locaux à usage commercial et d'habitation ; que, par acte du 20 novembre 1976, M. Serge Y... et son épouse, commune en biens, ont acquis des époux Z... un fonds de commerce exploité dans les locaux loués par M. Serge Y... ; que, par acte du 26 mai 1989, M. Serge Y... a fait signifier à la commune de Mimizan (la commune), à qui les époux X... avait vendu l'immeuble, une demande de renouvellement du bail ; que la commune lui ayant signifié un refus de renouvellement du bail sans offre d'indemnité d'éviction, M. Y... l'a assignée pour obtenir la nullité du congé et, subsidiairement, le paiement d'une indemnité d'éviction ; que M. Y... étant décédé le 2 décembre 1992, ses héritiers sont intervenus à la procédure le 4 janvier 1996 ; qu'un jugement du 27 février 1997, confirmé par un arrêt devenu irrévocable du 19 novembre 1998, a déclaré l'instance périmée ; que, par acte du 23 novembre 2001, Mme Y... a fait assigner la commune aux fins de faire constater qu'elle était co-titulaire du bail commercial consenti à son époux et que n'ayant reçu aucun congé, elle était en droit d'occuper les locaux loués dans lesquels elle exploitait le fonds de commerce acquis en commun avec son mari, du vivant de celui-ci ; que la commune a demandé reconventionnellement l'expulsion des lieux de Mme Y... et de tous occupants de son chef ;
Sur les deux premiers moyens, réunis :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt, d'une part, de la déclarer irrecevable en son action engagée à l'encontre de la commune et, d'autre part, statuant sur la demande reconventionnelle de la commune, de la dire sans droit ni titre sur l'immeuble litigieux, d'ordonner son expulsion et de prononcer sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation alors, selon le moyen :
1°/ que le sort du bail commercial est indissociable du fonds de commerce exploité dans le local donné à bail dont il constitue l'accessoire ; qu'il s'ensuit, dans le cas d'époux mariés sous le régime légal de la communauté, que lorsque le fonds de commerce relève de la communauté, le droit au bail en relève également ; que dès lors, le congé délivré à l'un des époux est sans effet à l'égard de l'autre s'il ne lui a pas été pareillement notifié et ne peut donc faire courir un quelconque délai de prescription ou de forclusion ; qu'il s'ensuit qu'en considérant, pour déclarer prescrites les demandes de Mme Y..., formées plus de deux ans après le congé délivré par la commune de Mimizan à M. Y... seul le 23 août 1989, que celle-ci n'était pas co-titulaire du droit au bail qu'elle n'aurait acquis qu'à travers la succession de son époux, tout en constatant que le fonds de commerce relevait de la communauté, la cour d'appel viole l'article 1401 du code civil et les articles L. 141-5, alinéa 2 et L. 142-2, alinéa 3 du code de commerce, ensemble l'article L. 145-60 du même code ;
2°/ que, à moins que le bail ne soit exceptionnellement conclu intuitu personae, le droit au bail acquis pendant le mariage constitue un bien commun ; qu'en considérant que M. Y... était seul titulaire du bail par lui signé le 28 avril 1976, sans constater que les époux Y..., mariés sous le régime de la communauté, ne l'étaient pas encore à cette date, la cour d'appel ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1401 du code civil, ensemble au regard de l'article L. 145-60 du code de commerce ;
3°/ que, le congé délivré par acte d'huissier est soumis au régime des actes de procédure ; qu'il est donc nul, pour irrégularité de fond, s'il a été délivré par un maire dépourvu de la capacité d'agir au nom de la commune ; qu'à défaut de production d'une délibération préalable du conseil municipal, le maire n'a pas la capacité de donner congé au preneur d'un immeuble appartenant à la commune ; qu'en dispensant la commune de Mimizan de produire, dans un tel cas de figure, la délibération préalable en vertu de laquelle son maire en exercice aurait été habile à donner congé à M. Y... le 23 août 1989, la cour d'appel viole l'article L. 2122-21 du code général des collectivités locales, l'article 117 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 145-60 du code de commerce ;
4°/ que le sort du bail commercial est indissociable du fonds de commerce exploité dans le local donné à bail dont il constitue l'accessoire ; qu'il s'ensuit, dans le cas d'époux mariés sous le régime légal de la communauté, que lorsque le fonds de commerce relève de la communauté, le droit au bail en relève également ; que dès lors, le commandement de payer ou le congé délivré à l'un des époux est sans effet à l'égard de l'autre s'il ne lui a pas été pareillement notifié ; qu'il s'ensuit qu'en considérant que Mme Y... n'était pas co-titulaire du droit au bail et qu'elle ne l'aurait acquis qu'à travers la succession de son époux, tout en constatant que le fonds de commerce relevait de la communauté, la cour d'appel viole l'article 1401 du code civil et les articles L. 141-5, alinéa 2 et L. 142-2, alinéa 3 du code du commerce ;
5°/ qu'à moins que le bail ne soit exceptionnellement conclu intuitu personae, le droit au bail acquis pendant le mariage constitue un bien commun ; qu'en considérant que M. Y... était seul titulaire du bail par lui signé le 28 avril 1976, sans constater, que les époux Y..., mariés sous le régime de la communauté, ne l'étaient pas encore à cette date, la cour d'appel ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1401 du code civil ;
6°/ que le congé ou le commandement de payer délivré par acte d'huissier est soumis au régime des actes de procédure ; qu'il est donc nul, pour irrégularité de fond, s'il a été délivré par un maire dépourvu de la capacité d'agir au nom de la commune ; qu'à défaut de production d'une délibération préalable du conseil municipal, le maire n'a pas la capacité de donner congé au preneur d'un immeuble appartenant à la commune ; qu'en dispensant la commune de Mimizan de produire, dans un tel cas de figure, la délibération préalable en vertu de laquelle son maire en exercice aurait été habile à donner congé à M. Y... le 23 août 1989, la cour d'appel viole l'article L. 2122-21 du code général des collectivités locales et l'article 117 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a exactement retenu, par motifs adoptés, que l'article L.2122-21 du code général des collectivités territoriales conférait au maire le pouvoir d'administrer les biens de la commune et spécialement de passer des baux relatifs à ces biens, que le congé délivré le 23 août 1989 n'étant pas une action en justice mais un acte d'administration de la commune, le moyen tiré du défaut de pouvoir du maire pour délivrer ce congé était sans fondement et que l'action engagée par Mme Y..., tendant à faire déclarer inopposable ce congé qui ne lui avait pas été notifié et à faire ainsi reconnaître sa qualité de cotitulaire du bail commercial lui donnant droit de rester dans les lieux, dérivait bien du statut des baux commerciaux et se trouvait prescrite à la date de l'assignation, soit le 23 novembre 2001, dès lors que Mme Y... avait eu nécessairement connaissance du congé litigieux lui faisant grief à compter de sa date d'intervention à l'instance périmée en qualité d'héritière de son mari, soit le 4 janvier 1996 ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que si Mme Y... était irrecevable à agir par voie principale, elle retrouvait le droit de se prévaloir de sa qualité de cotitulaire du bail par voie d'exception à l'action reconventionnelle de la commune en expulsion des locaux loués, mais que, même si elle était copropriétaire du fonds de commerce, elle n'avait pas la qualité de co-preneur du bail commercial, dès lors que son époux était seul titulaire de ce bail qui n'avait fait l'objet d'aucune modification à la date du congé, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a déduit, à bon droit, que le bailleur n'avait d'autre obligation que de signifier le refus de renouvellement du bail au seul titulaire contractuellement désigné dans le bail et que le congé valablement signifié le 23 août 1989 à M. Y... ayant sorti son plein et entier effet, ses ayants cause étaient sans droit ni titre dans les lieux ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le troisième moyen, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme Y... à payer à la commune de Mimizan la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de Mme Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du vingt-hui mai deux mille huit par M. Peyrat conseiller doyen faisant fonction de président, conformément à l'article 452 du code de procédure civile.