Attendu qu'interrogé par Mme X..., avocat au barreau de Paris ayant un bureau secondaire à Senlis, le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Senlis a, après délibération en ce sens du conseil de l'ordre, informé l'intéressée qu'il lui était interdit de postuler dans le ressort du tribunal de grande instance de cette ville ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X... reproche à l'arrêt attaqué (Amiens, 10 avril 2006) d'avoir rejeté l'exception de nullité de la procédure suivie devant le conseil de l'ordre, alors, selon le moyen, qu'en retenant que les autorités ordinales n'étaient pas tenues de convoquer préalablement l'avocat concerné au motif qu'elles s'étaient bornées à répondre à une question posée par l'intéressé, alors que la décision faisant interdiction à un avocat ayant ouvert un cabinet secondaire de postuler porte atteinte au droit civil de cet avocat d'exercer pleinement sa profession, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais attendu que les dispositions de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ne sont pas applicables devant le conseil de l'ordre dans l'exercice de ses attributions administratives, dès lors que satisfait aux exigences du procès équitable le recours de pleine juridiction qui peut être exercé devant la cour d'appel contre les décisions ordinales ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, tel qu'énoncé dans le mémoire en demande et reproduit en annexe au présent arrêt :
Attendu que répondant aux conclusions dont elle était saisie, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a exactement retenu que l'avocat exerçant en bureau secondaire ne peut postuler que dans le ressort de la juridiction auprès de laquelle est implantée sa résidence professionnelle ; que le moyen manque en fait ;
Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir jugé que les dispositions de droit interne relatives à la postulation n'engendraient pas de discrimination à rebours interdite par la Convention européenne des droits de l'homme, alors selon le moyen :
1°/ que se bornant à énoncer que les dispositions applicables aux avocats européens étaient très proches des règles de postulation imposées aux avocats nationaux, sans répondre aux conclusions qui faisaient valoir que l'avocat européen, s'il doit en matière civile élire domicile chez un avocat français établi auprès du tribunal compétent, peut néanmoins postuler seul et se trouve ainsi plus libre que l'avocat français, lequel, pour postuler hors de son ressort, doit avoir recours à un avocat postulant et non à une simple élection de domicile, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
2°/ que l'interdiction de toute discrimination fondée sur l'origine nationale telle que prévue par l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et par l'article 1er du Protocole n° 12 du 4 novembre 2000 concerne dorénavant la jouissance de tout droit reconnu ou prévu par la loi ; qu'elle est en conséquence applicable au droit de postulation reconnu aux avocats par la loi du 31 décembre 1971 modifiée ; qu'en déboutant l'exposante de sa demande tendant à voir dire qu'en sa qualité d'avocat national elle se trouve désavantagée par rapport à un avocat européen aux motifs qu'elle n'établit pas la discrimination dont elle fait l'objet, que le système mis en place au niveau européen ne crée pas de distorsions discriminatoires mais vise au contraire à prévenir de tels errements, qu'elle n'établit pas que la Convention européenne des droits de l'homme ait vocation à primer le Traité des Communautés européennes et qu'il a été jugé par la Cour de cassation qu'aucune règle de droit international ne fait obstacle à ce qu'un État applique à ses nationaux des règles plus sévères que celles qu'il impose sur son territoire à des ressortissants étrangers, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et surtout de l'article 1er au Protocole additionnel n° 12 ;
Mais attendu qu'en matière civile lorsque la représentation est obligatoire devant le tribunal de grande instance, l'avocat ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ou de la Confédération suisse n'est tenu, pour se constituer, d'élire domicile auprès d'un avocat établi près le tribunal saisi que si cette mission de défense est accomplie au titre de la libre prestation de services au sens des articles 202 et 202-1 du décret du 27 novembre 1991 modifié par le décret du 14 octobre 2002 dont les dispositions ne sont pas applicables aux avocats européens exerçant en France à titre permanent sous leur titre professionnel d'origine, lesquels sont tenus de postuler conformément aux règles de droit commun, au même titre que les avocats nationaux pareillement établis en France ; que le moyen est inopérant en ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille sept.