Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Rouen, 22 mars 2005), que le groupe Aspocomp a racheté, en novembre 1998, au groupe Philips, la société Philips circuits imprimés, qui employait cinq cent cinquante personnes sur le site d'Evreux et qui est devenue la société Aspocomp, filiale à 99 % du groupe Aspocomp dont la société de droit finlandais Aspocomp Group OYJ était la holding ; qu'un plan de réduction des effectifs a été présenté au comité d'entreprise de la société Aspocomp, le 18 octobre 2001 ; que cent vingt-deux salariés ont été compris dans un premier plan de licenciement ; que le 21 décembre 2001, la société Aspocomp Group OYJ s'est engagée à verser diverses sommes aux salariés et qu'un accord d'entreprise sur les mesures d'accompagnement du plan de restructuration a été adopté ; que Mme X..., qui a opté pour un départ volontaire le 14 janvier 2002, a été licenciée pour un motif économique le 21 février 2002 ; que le 4 février 2002, le commissaire aux comptes de la société Aspocomp a déclenché une procédure d'alerte ; que le 21 février 2002, la société Aspocomp Groupe OYJ a décidé de ne plus financer sa filiale Aspocomp, ce qui a entraîné le dépôt de bilan de celle-ci, sa mise en redressement judiciaire le 7 mars 2002 et sa liquidation judiciaire le 26 juin 2002 ; que le 28 juin 2002, le mandataire-liquidateur de la société Aspocomp a licencié le personnel restant ; que, n'ayant perçu aucune des sommes prévues par le plan social, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes le 17 mars 2003 et sollicité la condamnation solidaire des sociétés Aspocomp et Aspocomp Group OYJ au paiement de diverses sommes en raison de la rupture du contrat de travail et du non-respect du plan social ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Aspocomp Group OYJ fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'exception d'incompétence qu'elle avait soulevée, alors, selon le moyen :
1°/ que les règles de droit interne ne sont pas applicables pour la détermination de la compétence internationale du juge saisi d'un litige d'ordre international intracommunautaire, soumis aux dispositions du Règlement (CE) n° 44/2001 du 20 décembre 2000 ; que le défendeur domicilié sur le territoire d'un Etat membre de la Communauté européenne attrait devant une juridiction d'un autre Etat membre est donc fondé à revendiquer l'application des seules règles de compétence édictées par le Règlement (CE) n° 44/2001 précité à l'exclusion de toute disposition du droit interne ; que dès lors, en statuant par les motifs précités et en confirmant le jugement ayant retenu la compétence du conseil de prud'hommes d'Evreux en application des articles L. 511-1 et R. 517-1 du code du travail, ainsi que des articles 14 et 15 du code civil, la cour d'appel a violé l'article 1er du Règlement (CE) n° 44/2001 ;
2°/ que le conseil de prud'hommes du lieu d'exécution du travail n'a de compétence, interne ou internationale, pour connaître d'une demande contre un défendeur domicilié hors du ressort, que pour autant que ce défendeur puisse être qualifié d'employeur et soit lié avec le demandeur par un contrat de travail, caractérisé par un lien de subordination, ce qui s'entend d'un travail accompli sous les ordres et selon les directives de l'employeur qui a le pouvoir d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements éventuels ; qu'en statuant par les motifs précités qui ne font pas ressortir que les salariés demandeurs accomplissaient en fait leur travail dans de telles conditions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles 19 du Règlement (CE) n° 44/2001, L. 511-1 et R. 517-1 du code du travail ;
3°/ que ni le contrôle d'une société sur sa filiale, exercé dans le respect des droits et obligations attachés au contrat de société et des prérogatives des organes sociaux, ni son refus de continuer à financer l'activité déficitaire de sa filiale, ni un accord donné ponctuellement à un engagement financier de la filiale, ni l'identité de la personne physique dirigeante dès lors que celle-ci prend soin de préciser dans chaque cas en quelle qualité elle agit, ne peuvent caractériser une confusion d'intérêts, d'activités et de direction et permettre de tenir comme employeur la société mère aux lieu et place de la filiale ou conjointement avec elle ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 19 du Règlement (CE) n° 44/2001, L. 511-1 et R. 517-1 du code du travail ;
4°/ que les règles de compétence édictées par le Règlement (CE) n° 44/2001 doivent être appliquées sur la base de critères uniformes qu'il incombe à la Cour de justice des Communautés européennes de définir, en se fondant sur le système et les objectifs dudit règlement ; que la question de savoir si et à quelles conditions le salarié lié par son contrat de travail à une société filiale qui exécute son travail dans un Etat membre de la Communauté sous la subordination de celle-ci peut, en application de l'article 19 du Règlement (CE) précité, attraire devant la juridiction prud'homale du lieu d'exécution de son travail la société mère établie dans un autre Etat membre, pose une question d'interprétation dudit règlement ; qu'il appartient par conséquent à la Cour de cassation de demander à la Cour de justice des Communautés européennes de statuer sur cette question en application de l'article 68 du Traité instituant la Communauté européenne ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article 19 du Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, que l'employeur ayant son domicile dans le territoire d'un Etat membre peut être attrait dans un autre Etat membre, notamment devant le tribunal du lieu où le travailleur accomplit habituellement son travail ; que selon l'interprétation faite par la Cour de justice des Communautés européennes des dispositions de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, qui est transposable pour l'application de l'article 19 du Règlement (CE) n° 44/2001, l'employeur est défini comme la personne pour le compte de laquelle le travailleur accomplit pendant un certain temps, en sa faveur et sous sa direction, des prestations en contrepartie desquelles elle verse une rémunération ; qu'ainsi, et sans qu'il y ait lieu de poser une question préjudicielle, l'arrêt qui, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par la première branche, après avoir constaté que la salariée avait accompli son travail sous la direction et au profit des sociétés Aspocomp et Aspocomp Group OYJ, dont les intérêts, les activités et la direction étaient confondus, a décidé que la juridiction saisie était compétente, n'encourt pas les griefs du moyen ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le second moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Aspocomp Group OYJ aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 302,78 euros ;
Vu l'article 37, alinéa 2, du 10 juillet 1991, la condamne à payer à la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de Mme X..., la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille sept.