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14/09/2004 | FRANCE | N°04-83754

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 septembre 2004, 04-83754


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller PALISSE, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Virginie, épouse Y...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AMIENS, en date du 2 avril 2004,

qui, dans l'information suivie contre elle pour tentative de meurtre aggravé, a rejet...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller PALISSE, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Virginie, épouse Y...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AMIENS, en date du 2 avril 2004, qui, dans l'information suivie contre elle pour tentative de meurtre aggravé, a rejeté sa requête en annulation d'actes de la procédure ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 24 juin 2004, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;

Vu le mémoire produit ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le 14 juin 2003, Virginie X..., épouse Y..., exerçant la profession d'avoué, et dont le mari est avocat, se trouvait à son domicile où elle exerce également sa profession, lorsqu'elle a été atteinte d'une importante hémorragie vaginale nécessitant l'intervention des sapeurs-pompiers, appelés par son époux ; qu'alors qu'étaient prodigués les premiers soins, un voisin, alerté par des cris, a découvert dans la rue, parmi des ordures ménagères, un enfant nouveau-né, vivant, abandonné à l'intérieur d'un sac poubelle ; que, conduite à l'hôpital, de même que l'enfant, Virginie Y... a déclaré avoir accouché, à l'insu de son mari, d'un enfant adultérin qu'elle a cru mort et dont elle s'est "débarrassé" ; qu'une enquête de crime flagrant ayant été ouverte, un officier de police judiciaire s'est transporté au domicile des époux Y... et y a procédé à diverses constatations en présence du mari ;

qu'ont été saisies et placées sous scellé différentes pièces à conviction et notamment le sac poubelle dans lequel avait été déposé le nouveau-né ;

que Virginie Y..., mise en examen pour tentative de meurtre aggravé, a saisi la chambre de l'instruction d'une requête en annulation d'actes de la procédure sur le fondement de l'article 173 du Code de procédure pénale ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 54, 56, 56-1, 56-3, 593 du Code de procédure pénale, de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler les opérations de transport, perquisition et saisies, ainsi que le procès-verbal y afférent, effectuées le 14 juin 2003 au domicile de Virginie Y...
X..., avoué, et de son mari, avocat, et la procédure subséquente ;

"aux motifs qu'il résulte du procès-verbal critiqué de transport et de constatations qu'il ne s'agit pas d'une perquisition : aucune fouille des locaux ou des meubles n'est effectuée ; que des constatations matérielles ont été effectuées à l'extérieur et à l'intérieur du domicile, des pièces à conviction appréhendées ; que la partie de l'habitation affectée à l'activité professionnelle de Virginie Y...-X... a été parcourue par les enquêteurs : "de même, avec l'accord et en présence de M. Y..., un passage a été effectué dans l'étude de son épouse puis dans le garage servant d'entrée à cette étude ; il a été constaté qu'il n'y avait aucune trace de sang" ;

les diligences sont restées dans le cadre strict de l'article 54 du Code de procédure pénale, et il n'y a pas eu perquisition domiciliaire ayant conduit à une saisie contentieuse au sens de l'article 56 du Code de procédure pénale ; le transport sur les lieux l'a été dans un cadre privé et dans le cas d'un crime flagrant ; l'étude de Virginie Y...-X... a été seulement traversée par les policiers accompagnés de M. Y..., sans aucun acte de contrainte ou appréhension d'objets ;

"alors, d'une part, que la perquisition est le fait, par un officier de police judiciaire, de se rendre dans un lieu normalement clos et dépourvu de tout caractère public, pour y rechercher des indices ;

que le caractère de perquisition n'est pas subordonné à l'exercice de contraintes ou de violences dans le domicile visité, la manière forte, si elle est autorisée dans le cadre de perquisitions, n'en étant cependant pas le critère obligatoire ; que constitue une perquisition, et non un simple transport "sur les lieux ", le fait de se rendre dans un domicile privé et un bureau, pour y rechercher des indices, fût-ce de manière courtoise et avec l'assentiment de l'un des habitants ; que la chambre de l'Instruction a violé les articles précités ;

"alors, d'autre part, que le caractère d'une perquisition n'est pas davantage subordonné à son résultat ni à l'existence de saisies en bonne et due forme ; que la chambre de l'instruction a encore violé lesdits textes ;

"alors, enfin, que les règles établies pour les perquisitions effectuées au domicile ou dans les bureaux d'un professionnel soumis au secret s'appliquent quelle que soit l'infraction en cause (qu'elle ait ou non un lien avec la profession), et même en cas de crime flagrant ; que la chambre de l'instruction a violé les articles 56-1 et 56-3 du Code de procédure pénale" ;

Attendu que, pour écarter l'argumentation de la requérante qui soutenait que les constatations effectuées le 14 juin 2003 au domicile des époux Y... par l'officier de police judiciaire ayant dressé un procès-verbal de transport s'analysaient comme une perquisition effectuée en méconnaissance des dispositions des articles 56-1 et 56-3 du Code de procédure pénale, l'arrêt attaqué retient que les policiers, invités à entrer dans les lieux par le mari, n'ont procédé à aucune fouille et qu'ils se sont bornés, en accord avec celui-ci, à effectuer un passage dans l'étude d'avoué et le garage y donnant accès, où ils ont constaté l'absence de traces de sang ; que la chambre de l'instruction en déduit que ces diligences ont été accomplies dans le strict cadre de l'article 54 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, et dès lors que les opérations critiquées ne constituent pas une perquisition au sens des articles 56 et suivants du Code de procédure pénale, l'arrêt n'encourt pas les griefs allégués ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 54, 56, 97 du Code de procédure pénale, 593 du même Code, violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler les scellés n° 2 d'une part, n S 3, 4, 5, 6, 7, 8 et 9 d'autre part, ainsi que toute la procédure subséquente et notamment les expertises réalisées à partir de ces scellés ;

"aux motifs, s'agissant du scellé n° 2, que l'article 56 du Code de procédure pénale relatif aux perquisitions ne trouve pas à s'appliquer, s'agissant de la saisie d'objets trouvés sur la voie publique par un tiers et remis à l'officier de police judiciaire ultérieurement, et non d'objets appréhendés sur les lieux d'un crime supposé ou au domicile d'un citoyen ;

"et aux motifs, s'agissant des autres scellés, que l'obligation d'inventaire ou de placement sous scellés provisoires prévue par l'article 56 du Code de procédure pénale ne trouve pas à s'appliquer ;

que ces scellés constitués par les différents objets appréhendés pour les nécessités de l'enquête dans le cadre du transport sur les lieux régulier, en la présence de M. Y... qui a participé à la désignation des objets appréhendés, l'ont été régulièrement en dehors de toute violation des droits de la défense ;

"alors, d'une part, que l'obligation d'inventaire et de placement sous scellés des objets et documents placés sous main de justice est imposée par l'article 97 du Code de procédure pénale, dans le but de garantir l'authenticité des preuves et d'en permettre la libre discussion contradictoire ; que cette obligation est donc applicable à l'ensemble des objets et documents saisis, qu'ils soient placés sous scellés ouverts ou fermés, quel que soit le lieu où les objets ont été appréhendés, lieu public ou privé, et le cadre dans lequel ils ont été appréhendés, perquisition ou remise volontaire ; que la chambre de l'instruction a violé les textes ci-dessus cités ;

"alors, d'autre part, que porte atteinte aux droits de la défense, et à l'objectif d'authentification des preuves, le fait que les scellés n'aient été constitués que plus de 24 heures après l'appréhension des objets en cause, sans scellés provisoires immédiatement constitués, de façon non contradictoire et sans représentation à quiconque des objets saisis le jour précédent, et sans possibilité pour l'auteur supposé de l'infraction d'assister à cette opération, la seule présence de son mari lors de la saisie n'étant pas de nature à assurer le respect des droits de la défense, dès lors qu'il n'est pas constaté que les époux pussent avoir un intérêt commun en l'espèce ; que les droits de la défense ont ainsi été violés" ;

Attendu que, pour rejeter la requête en annulation du placement sous scellés d'un sac poubelle, d'un gant de toilette, d'une serviette, d'une paire de ciseaux, d'un rouleau de sacs poubelle, d'une chemise de nuit et d'un gant, l'arrêt attaqué prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces constations et énonciations d'où il résulte qu'aucune atteinte n'a été portée aux intérêts de la requérante, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application de l'article 802 du Code de procédure pénale ;

Qu'ainsi le moyen ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Palisse conseiller rapporteur, M. Joly, Mmes Chanet, Anzani, MM. Beyer, Pometan, Mmes Nocquet, Guirimand conseillers de la chambre, M. Valat, Mmes Ménotti, Degorce conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Chemithe ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-83754
Date de la décision : 14/09/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CRIMES ET DELITS FLAGRANTS - Perquisition - Définition - Portée.

Justifie sa décision la chambre de l'instruction, qui, pour refuser d'annuler un procès-verbal de transport en crime flagrant au domicile d'un avocat où son épouse avoué a son étude, retient que cet acte a été réalisé en application de l'article 54 du Code de procédure pénale, les opérations critiquées ne constituant pas une perquisition au sens des articles 56 et suivants du Code de procédure pénale.


Références :

Code de procédure pénale 54, 56 et suivants, 173, 802

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens (chambre de l'instruction), 02 avril 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 sep. 2004, pourvoi n°04-83754, Bull. crim. criminel 2004 N° 206 p. 737
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2004 N° 206 p. 737

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Chemithe.
Rapporteur ?: Mme Palisse.
Avocat(s) : la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:04.83754
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