AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire SALMERON, les observations de Me ROUVIERE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Roger,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 9ème chambre, en date du 17 décembre 2003, qui, pour abus de confiance, l'a condamné à 4 500 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 314-1, 314-10 du Code pénal, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Roger X... coupable du délit d'abus de confiance et l'a en répression condamné à une amende de 4 500 euros, tout en déclarant recevable la constitution de partie civile de la société Fimag Groupe Ertop et condamnant Roger X... à lui verser une somme de 600 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel ;
"aux motifs qu'il est constant que Roger X... a élaboré la mise au point d'une borne informatique de gestion de station d'épuration destinée à la "SAUR 16", avec les moyens mis à sa disposition par son employeur, le Groupe Ertop, notamment avec les conseils techniques de M. Y..., chef du secteur bornes monétique au sein de cette société, ce projet étant matérialisé par la rédaction d'une offre préliminaire valant devis et dans lequel était décrit d'une manière très minutieuse les fonctions et caractéristiques de cette borne et esquissé le croquis d'installation de celle-ci, Turebo apparaissant sur ce document comme le constructeur de la borne ; qu'il a repris à l'identique ce même devis pour l'adresser, sous couvert de la société Meusonic, alors qu'il était toujours le salarié d'Ertop, au même client la "SAUR 16", Meusonic apparaissant cette fois dans ce document comme le constructeur de la borne ; qu'il apparaît dès lors que Roger X..., alors qu'il était salarié du Groupe Ertop a détourné le devis descriptif de cette borne qui avait été élaborée avec les moyens et pour le compte du Groupe Ertop ; qu'il convient de rappeler que Roger X... avait été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée, avec obligation de travailler exclusivement pour le compte du Groupe Ertop, avec pour mission d'étudier, de développer et de commercialiser des produits pour l'aménagement des stations d'épuration et plus particulièrement pour favoriser la création d'une division dans le domaine de l'eau et de son environnement ; qu'il avait été placé à la tête d'une nouvelle division dénommée Turebo, laquelle apparaît dans le premier devis comme le constructeur de la borne ; que dès lors les produits développés par ses soins devenaient propriété du Groupe Ertop, qu'en conséquence le délit d'abus de confiance est établi en tous ses éléments à l'égard de Roger X... ; que le jugement déféré sera infirmé sur la déclaration de culpabilité ; que compte tenu des circonstances de l'espèce, il convient d'infliger à Roger X... une peine d'amende 4 500 euros ; que sur l'action civile compte tenu de la déclaration de culpabilité intervenue à l'égard du prévenu, la constitution de partie civile de la société Fimag Groupe Ertop est recevable et qu'il convient de lui allouer au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel la somme de 600 euros ;
"alors que Roger X... ayant été poursuivi pour avoir détourné au préjudice de la société Groupe Ertop, le projet de réalisation d'une borne de gestion pour la société "SAUR 16", la cour d'appel ne pouvait considérer le délit constitué par le détournement du devis descriptif de cette borne, un tel devis établi par Roger X... lui-même étant insusceptible de constituer, au sens de la loi, un bien qui lui aurait été remis ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
"alors que, le devis litigieux étant, comme le reconnaît l'arrêt, la reprise d'un projet établi par Roger X... lui-même, il en résultait que le détournement d'un projet oeuvre de l'esprit qui de surcroît n'avait jamais été réalisé, ne pouvait constituer un bien matériel qui aurait été détourné ;
qu'ainsi l'arrêt est à nouveau entaché d'une violation des textes visés au moyen" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, le 1er décembre 1998, Roger X... a été embauché par le groupe Ertop, à titre exclusif, comme cadre technico-- commercial chef de projet, afin, notamment, de développer et commercialiser les produits destinés à l'aménagement des stations d'épuration ; qu'au sein de la division qu'il lui avait été demandé de créer à cet effet, il a mis au point une borne informatique de gestion destinée à la société Saur 16, qui en souhaitait la réalisation pour le mois de juillet 2000 ; qu'il a envoyé une offre préliminaire à cette société, sous sa signature, d'une part, le 26 mai 2000, sur papier à entête du groupe Ertop, d'autre part, le 13 juin suivant, sur papier à entête de la société Meusonic avec laquelle il était entré en contact ; que le 29 juin 2000, la société Saur 16 a passé commande d'une borne à la société Meusonic ; que la borne n'a pas été réalisée ; que le président du groupe Ertop ayant découvert les faits après la démission de Roger X..., le 18 juillet 2000, a déposé plainte le 1er août suivant ;
Attendu que, pour déclarer Roger X... coupable d'avoir détourné au préjudice de la société Ertop le projet de réalisation d'une borne de gestion pour la société Saur 16, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations d'où il résulte qu'il a disposé au profit d'un tiers et comme d'un bien propre d'un projet qui, dès sa réalisation, était propriété de son employeur et dont il n'était devenu que détenteur, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Qu'ainsi le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Salmeron conseiller rapporteur, MM. Pibouleau, Challe, Roger, Dulin, Mmes Thin, Desgrange, MM. Rognon, Chanut conseillers de la chambre, Mme de la Lance, M. Soulard, Mme Guihal conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Launay ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;