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17/05/2006 | FRANCE | N°04-47597

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 mai 2006, 04-47597


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X... a été engagé, à compter du 14 mai 1962, en qualité d'ingénieur cadre confirmé par la société L'Oréal ;

que le contrat de travail comportait, outre le rappel d'une obligation de loyauté et de discrétion, une clause de non-concurrence valable pendant les 12 mois qui suivraient son départ de l'entreprise, quelle qu'en soit la cause ; que, par une lettre du 23 février 1979 formant avenant au contrat, la durée de cet engagement, applicable dans l'ensemb

le des pays du Marché commun, a été portée à 24 mois, la société L'Oréal s'engage...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X... a été engagé, à compter du 14 mai 1962, en qualité d'ingénieur cadre confirmé par la société L'Oréal ;

que le contrat de travail comportait, outre le rappel d'une obligation de loyauté et de discrétion, une clause de non-concurrence valable pendant les 12 mois qui suivraient son départ de l'entreprise, quelle qu'en soit la cause ; que, par une lettre du 23 février 1979 formant avenant au contrat, la durée de cet engagement, applicable dans l'ensemble des pays du Marché commun, a été portée à 24 mois, la société L'Oréal s'engageant de son côté à verser au salarié pendant la même période une indemnité mensuelle égale aux 2/3 de ses appointements mensuels ; que M. X... a été licencié pour faute lourde par une lettre du 5 juillet 1994, prenant effet le lendemain et lui reprochant d'avoir pris, par l'intermédiaire de tiers membres de sa famille ou proches, des brevets pour des produits qui, ayant été créés par lui dans le cadre de son contrat de travail, étaient la propriété de son employeur, ces faits étant analysés comme un manquement à l'obligation de loyauté ; qu'après avoir saisi la formation de référé de la juridiction prud'homale, une première fois le 16 août 1994, puis une seconde fois le 15 février 1996, pour obtenir une condamnation provisionnelle de la société L'Oréal au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, le salarié a contesté devant la juridiction prud'homale son licenciement et réclamé, outre diverses indemnités au titre de son licenciement, le solde de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et les congés payés y afférents ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 21 septembre 2004) de l'avoir condamné à payer une somme à titre d'indemnité compensatrice de non-concurrence, alors, selon le moyen :

1 / que le sursis à statuer doit être ordonné dès lors que la décision à intervenir sur l'action publique est susceptible d'influer sur celle qui doit être rendue par la juridiction civile ; qu'en l'espèce, il était reproché à M. X... d'avoir, en déposant au nom de proches ou de sociétés écrans des brevets correspondant à des recherches, inventions et créations appartenant à la société L'Oréal, et en les exploitant, commis une faute lourde justifiant son licenciement puis, en persistant dans son comportement, violé la clause de non-concurrence ; que dans ses écritures déposées dans le cadre de la procédure pénale auxquelles elle se référait expressément dans ses conclusions d'appel, la société L'Oréal avait souligné que si sa plainte avec constitution de partie civile, déposée le 13 juillet 1994, et l'instruction qui s'en était suivie n'avaient porté que sur les actes de détournement d'information commis par le salarié avant le 13 juillet 1994, elle avait ensuite fait citer directement M. X... pour lui déférer les autres faits commis par ce dernier et notamment ceux postérieurs au licenciement, les deux procédures ayant fait l'objet d'une jonction ; que la cour d'appel a décidé de surseoir à statuer sur la question du bien-fondé du licenciement en raison de l'influence que l'instance pénale portant sur des faits identiques à ceux visés dans la lettre de licenciement était susceptible d'exercer sur ce litige ; qu'en statuant ensuite au fond sur la question de l'indemnité compensatrice de non-concurrence sans rechercher si la procédure pénale en cours ne concernait pas également des faits commis par le salarié postérieurement au licenciement et n'était donc pas de nature à influer sur son droit à percevoir l'indemnité compensatrice de non-concurrence , la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 du Code de procédure pénale ;

2 / qu'en tout état de cause, en se bornant à affirmer, pour conclure à l'absence de preuve d'une violation de la clause de non-concurrence, que si les dépôts de brevets effectués avant le licenciement peuvent constituer un acte de déloyauté ils ne constituent pas par eux-mêmes des infractions à la clause de non-concurrence, sans rechercher, ainsi qu'elle y avait été invitée, si le salarié n'avait pas, après comme avant son licenciement, exploité les brevets correspondant à des recherches, inventions et créations appartenant à la société L'Oréal et qu'il avait déposés au nom de proches ou de sociétés écrans, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel n'était pas tenue de surseoir à statuer sur la demande de contrepartie financière à la clause de non-concurrence dès lors que, conformément aux dispositions de l'article 74 du nouveau Code de procédure civile, aucune demande de sursis à statuer jusqu'à l'issue d'une instance pénale ne lui avait été présentée en ce qui concerne la contrepartie financière ;

Et attendu, ensuite, que la cour d'appel, procédant à la recherche prétendument omise, a relevé que la preuve d'un acte de concurrence illicite n'était pas rapportée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir condamné l'employeur à payer une somme au titre des congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de non-concurrence, alors, selon le moyen, qu'il résulte des articles L. 223-4 et L. 223-11 du Code du travail que seule la rémunération versée en contrepartie du travail effectué sert d'assiette à l'indemnité de congés payés sauf exception prévue par l'article L. 223-11 s'agissant notamment des indemnités afférentes aux périodes assimilées à un temps de travail par l'article L. 223-4 ; que l'indemnité compensatrice de non-concurrence ne constitue pas la contrepartie d'un travail et aucun texte n'assimile la période durant laquelle le salarié est soumis à une telle clause à un temps de travail ;

qu'en affirmant que l'indemnité compensatrice ouvrait droit à congés payés, au seul prétexte qu'elle avait la nature d'une indemnité compensatrice de salaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Mais attendu que la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence ayant la nature d'une indemnité compensatrice de salaires, la cour d'appel a justement décidé qu'elle ouvrait droit à congés payés ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société L'Oréal aux dépens ;

Vu les articles 628 et 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille six.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 04-47597
Date de la décision : 17/05/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Clause de non-concurrence - Validité - Conditions - Contrepartie financière - Nature - Détermination - Portée.

TRAVAIL REGLEMENTATION - Repos et congés - Congés payés - Indemnité - Calcul - Assiette - Rémunération totale - Eléments pris en compte

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Salaire - Indemnités - Indemnités de congés payés - Calcul - Assiette - Rémunération totale - Eléments pris en compte

La contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence ayant la nature d'une indemnité compensatrice de salaires ouvre droit à congés payés.


Références :

Code du travail L223-4, L223-11

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 septembre 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 mai. 2006, pourvoi n°04-47597, Bull. civ. 2006 V N° 177 p. 171
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2006 V N° 177 p. 171

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos.
Avocat général : M. Maynial.
Rapporteur ?: M. Trédez.
Avocat(s) : SCP Gatineau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:04.47597
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