AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X..., engagé le 1er juin 1988 par la société Somege, a été licencié pour faute grave le 14 février 2002 ; que la cour d'appel, jugeant son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, a condamné l'employeur à lui payer diverses sommes, notamment à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents (9 919,18 euros), d'indemnité conventionnelle de licenciement (15 226,52 euros) et de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 324-11-1 du Code du travail (18 036 euros) ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que, pour des motifs tirés de la violation de l'article L. 122-8 du Code du travail, la société Somege fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. X... n'était pas fondé sur une faute grave ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que les faits reprochés au salarié n'avaient pas désorganisé l'entreprise et ne rendaient pas impossible son maintien dans celle-ci pendant la durée du préavis, a pu décider qu'ils n'étaient pas constitutifs d'une faute grave ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Attendu que, pour des motifs tirés de la violation des articles L. 324-10 et L. 324-11-1 du Code du travail, la société Somege reproche à la cour d'appel de l'avoir condamnée à payer au salarié l'indemnité prévue au second de ces textes ;
Mais attendu que les juges du fond apprécient souverainement l'existence du caractère intentionnel de la dissimulation du travail ; que la première branche de ce moyen, qui ne tend qu'à remettre en cause cette appréciation souveraine, ne peut être accueillie ;
Sur les deux moyens réunis du pourvoi incident :
Attendu que, pour des motifs pris d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 122-14-3 du Code du travail et de violation de l'article 1147 du Code civil, M. X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir débouté de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral ;
Mais attendu que sous couvert d'un défaut de base légale ou d'une violation de la loi, non établis en l'espèce, les moyens, qui tendent à instaurer devant la Cour de Cassation une discussion de pur fait, ne peuvent être accueillis ;
Mais sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 324-11-1 du Code du travail :
Attendu qu'après avoir alloué au salarié, l'indemnité conventionnelle de licenciement ainsi qu'une indemnité compensatrice de préavis, la cour d'appel, pour condamner l'employeur à lui verser, en outre, l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 324-11-1 du Code du travail, retient que le caractère intentionnel de la dissimulation totale étant établi, le salarié a droit à cette indemnité ;
Attendu, cependant, que les dispositions de l'article L. 324-11-1 du Code du travail ne font pas obstacle au cumul de l'indemnité forfaitaire qu'elles prévoient avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié à droit en cas de rupture de la relation de travail, à la seule exception de l'indemnité de licenciement légale ou conventionnelle ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que si le salarié pouvait prétendre à une indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité de licenciement légale ou conventionnelle ne se cumule pas avec l'indemnité forfaitaire prévue par le texte susvisé, seule la plus élevée des deux devant être allouée au salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de Cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Somege à payer à M. X... une somme au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'arrêt rendu le 14 janvier 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi du chef de la disposition cassée ;
DIT que M. X... ne peut cumuler l'indemnité forfaitaire et l'indemnité conventionnelle de licenciement et le déboute en conséquence de sa demande en paiement de cette dernière ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze janvier deux mille six.