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25/04/2007 | FRANCE | N°04-17632

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 avril 2007, 04-17632


Attendu que M. Mohammed X...est né le 15 janvier 1945 à Méchéria (Algérie) de Mohammed Y..., né en 1895 en Algérie et de Agha Z..., son épouse ; que le 27 juillet 1964, alors qu'il était âgé de 19 ans, son père a souscrit une déclaration de reconnaissance de la nationalité française en application de l'article 2 de l'ordonnance n° 62-825 du 21 juillet 1962, qui a été enregistrée ; qu'un certificat de nationalité française mentionnant qu'il était français en application des dispositions de l'article 17-1° du code de la nationalité, comme enfant légitime d'un père fran

çais, lui a été délivré le 27 août 1999 ; que, par acte du 19 juillet 2001...

Attendu que M. Mohammed X...est né le 15 janvier 1945 à Méchéria (Algérie) de Mohammed Y..., né en 1895 en Algérie et de Agha Z..., son épouse ; que le 27 juillet 1964, alors qu'il était âgé de 19 ans, son père a souscrit une déclaration de reconnaissance de la nationalité française en application de l'article 2 de l'ordonnance n° 62-825 du 21 juillet 1962, qui a été enregistrée ; qu'un certificat de nationalité française mentionnant qu'il était français en application des dispositions de l'article 17-1° du code de la nationalité, comme enfant légitime d'un père français, lui a été délivré le 27 août 1999 ; que, par acte du 19 juillet 2001, le procureur de la République l'a fait assigner devant le tribunal de grande instance pour voir constater son extranéité au motif qu'originaire d'Algérie, de statut de droit local et âgé de plus de 18 ans lors de la souscription récognitive effectuée par son père, il n'a pas bénéficié de l'effet collectif de la déclaration et a perdu la nationalité française ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. X...fait grief à l'arrêt attaqué (Toulouse,27 mai 2004) d'avoir constaté son extranéité alors, selon le moyen :

1° / que par application de l'article 55 de la Constitution, les dispositions de la Convention internationale pour l'élimination de toutes formes de discrimination raciale du 7 mars 1966 sont intégrées dans le droit positif français avec une force supérieure à celle de la loi ; que sont contraires à ces dispositions, et notamment à l'article 5 d III de ladite Convention dont il résulte qu'est interdite toute discrimination fondée sur les origines notamment ethniques pour attribuer ou retirer leur nationalité aux ressortissants des Etats ayant adhéré à la convention, l'article 2 de l'ordonnance n° 62-825 du 21 juillet 1962 qui renvoie aux articles 152 et 153 du titre VII du code de la nationalité (résultant de la loi n° 60-752 du 28 juillet 1960), et l'article 1er, alinéa 2, de la loi n° 66-945 du 20 décembre 1966, qui imposaient aux seuls Français de statut civil de droit local, c'est-à-dire de souche nord-africaine, d'effectuer une démarche spéciale sous peine de perdre la nationalité française qu'ils avaient auparavant ; qu'en faisant application de ces textes, pour dire que Mohammed X...avait perdu la nationalité française faute d'avoir effectué la déclaration récognitive, l'arrêt attaqué a violé les articles 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 et 5 d III de la Convention internationale du 7 mars 1966 ;

2° / que, conformément à l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne a droit au respect de la vie familiale ; qu'en vertu de l'article 14 de cette convention, aucune distinction dans l'exercice de ce droit ne peut être fondée sur des critères tenant à la race ou à la religion ; que, par ailleurs, l'effet collectif résultant de l'article 153 du titre VII du code de la nationalité vise la protection de la cohésion familiale et doit à ce titre, bénéficier à tous les mineurs, par définition frappés d'incapacité générale d'exercice de leurs droits ; qu'il s'ensuit que l'article 153 du code de la nationalité, précisant que " les enfants mineurs de dix-huit ans, non mariés, des personnes ayant bénéficié des dispositions de l'article 152 suivront la condition : 1° / s'ils sont légitimes, de leur père ou, en cas de prédécès de celui-ci, de leur mère survivante.... " s'interprète nécessairement dans un sens faisant bénéficier les mineurs de dix-huit à vingt et un ans de l'effet collectif attaché à la déclaration récognitive effectuée par leur auteur, toute interprétation leur refusant ce bénéfice constituant une atteinte à leur droit au respect de la vie familiale et une discrimination non fondée " ; qu'en affirmant que Mohammed X..., mineur âgé de dix-neuf ans au moment de la déclaration récognitive de son père ne pouvait bénéficier de l'effet collectif de celle-ci, la cour d'appel a violé les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu, d'une part, que la détermination, par un Etat, de ses nationaux par application de la loi sur la nationalité ne peut constituer une discrimination, même au sens de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme dès lors qu'est assuré le droit à une nationalité, que l'ordonnance du 21 juillet 1962 qui a retenu le critère du statut personnel pour régler les conséquences de l'indépendance de l'Algérie en matière de nationalité et la loi n° 66-945 du 20 décembre 1966 qui a prévu que les personnes de statut civil de droit local originaires d'Algérie conserveraient de plein droit la nationalité française si aucune autre nationalité ne leur était conférée, ne sont pas contraires aux dispositions de la Convention internationale du 7 mars 1966 sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale ; d'autre part, que les dispositions des articles 152 et 153 du code de la nationalité française auxquelles renvoyait l'article 2 de l'ordonnance du 21 juillet 1962 qui prévoyaient que les enfants légitimes, mineurs de 18 ans non mariés, suivaient la condition de leur père ou de leur mère en cas de prédécès de celui-ci et que les déclarations de reconnaissance de nationalité pouvaient être souscrites, sans aucune autorisation dès l'âge de 18 ans, permettaient d'assurer le maintien d'une unité familiale en matière de nationalité ; que la cour d'appel qui a constaté que M. X...était âgé de plus de 18 ans au moment où son père a souscrit la déclaration récognitive de nationalité et qu'il n'avait pas lui-même souscrit une telle déclaration, n'a pu qu'en déduire qu'il n'avait pu bénéficier de l'effet collectif de la reconnaissance paternelle et que le certificat de nationalité du 27 août 1999 avait été délivré à tort ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. X...fait encore grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de sa demande de constatation de la possession d'état de Français alors, selon le moyen ;

1° / que le requérant, se proposant de rapporter la preuve de sa possession d'état de Français conformément aux articles 32-2 et 30-2 du code civil, peut utilement invoquer la possession d'état de français de son auteur ; qu'il est constant que le père de M. X..., né en 1895, a mené jusqu'à son décès la vie d'un citoyen français ; que, en contestant à M. Mohammed X...la possibilité d'invoquer d'état de Français de son père postérieurement à l'indépendance de l'Algérie, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

2° / que le fait de travailler, pendant un certain temps, à l'étranger ou de se marier avec une personne de nationalité étrangère n'est pas incompatible avec la possession d'état de Français ; qu'en se déterminant par ces motifs inopérants pour débouter M. X...de sa demande de constatation de la possession d'état de Français, au lieu de rechercher si les éléments pertinents invoqués par l'intéressé, à savoir sa qualité d'étudiant boursier français, la qualité de fonctionnaire au service du cadastre français ainsi que le fait d'avoir toujours été en possession d'une carte d'identité française et d'un passeport français, ne militaient pas en faveur d'une possession d'état de Français de M. Mohammed X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 32-2 et 30-2 du code civil ;

Mais attendu que M. X...ne pouvait se prévaloir de l'article 32-2 du code civil pour démontrer sa qualité de Français de statut civil de droit commun avant l'indépendance et, comme tel, non soumis à l'obligation de souscrire une déclaration de reconnaissance de la nationalité française puisqu'il est constant que ses parents, qui ont tous deux souscrits une déclaration récognitive de nationalité française, étaient de statut civil de droit local ; que par ce motif de pur droit, substitué dans les conditions de l'article 1015 du nouveau code de procédure civile, à ceux critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X...aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de M. X...;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq avril deux mille sept.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 04-17632
Date de la décision : 25/04/2007
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

NATIONALITE - Nationalité française - Conservation - Conditions - Conditions relatives aux originaires d'Algérie - Personne de statut civil de droit commun - Définition - Exclusion - Cas - Personne ayant souscrit une déclaration récognitive de nationalité française établissant son statut civil de droit local

Une personne née en Algérie en 1945 ne peut se prévaloir de l'article 32-2 du code civil pour démontrer sa qualité de Français de statut civil de droit commun avant l'indépendance et comme tel non soumis l'obligation de souscrire une déclaration de reconnaissance de la nationalité française dès lors qu'il est constant que ses parents, qui ont tous deux souscrit une déclaration récognitive de nationalité française, étaient de statut civil de droit local


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 27 mai 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 25 avr. 2007, pourvoi n°04-17632, Bull. civ. 2007, I, N° 159
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2007, I, N° 159

Composition du Tribunal
Président : M. Ancel
Avocat général : M. Legoux
Rapporteur ?: Mme Trapero
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:04.17632
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