AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 13 novembre 2003), que les époux X... ont donné à bail aux époux Y... trois poulaillers d'une surface totale de 3000 mètres carrés ; que les bailleurs ont assigné les preneurs en résiliation du bail pour défaut de paiement des fermages ; que les époux Y... s'y sont opposés et ont demandé que le montant du fermage soit déclaré nul et qu'un expert soit désigné pour le fixer ; que, par un premier jugement du 15 décembre 1997, le tribunal paritaire des baux ruraux de Châteaulin a dit le montant du fermage illicite et a désigné un expert, puis, par un second jugement du 8 octobre 2001, seul à faire l'objet de l'appel, a fixé le montant du fermage à une certaine somme ;
Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de fixer le montant du loyer à une certaine somme, alors, selon le moyen :
1 / que le juge des baux ruraux peut établir le prix du bail en fonction du barème prévu par un arrêté préfectoral ou, si le type d'exploitation louée n'a pas donné lieu à un arrêté préfectoral, en fonction des données dont il dispose et des usages locaux ; qu'en établissant le montant du loyer dû par M. et Mme Y... au vu d'un arrêté concernant le Morbihan qui ne fixe aucun prix sous forme monétaire, d'un arrêté concernant l'Ille-et-Vilaine dont la date n'est pas mentionnée et enfin d'un arrêté concernant le Finistère intervenu sept ans après la date du bail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-11 du Code rural et de l'article 1134 du Code civil ;
2 / que le bénéfice des dispositions du code rural organisant un contrôle du juge sur le montant des loyers est réservé à celui qui, ignorant les prix administrés en vigueur, a conclu un bail en contrepartie d'un loyer excessif, lesdites dispositions n'ayant en revanche pas pour objet de protéger le locataire qui, par négligence, a mal évalué l'état des locaux qu'il prend à bail ; qu'en fixant la valeur locative des poulaillers à un niveau très bas en considération du fait que ces équipements étaient anciens et en mauvais état, cependant que cet état était nécessairement connu des parties lors de la conclusion du bail initial et qu'il suffisait au preneur d'examiner les poulaillers en question pour se rendre compte de leur état, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 411-11 du Code rural et par refus d'application l'article 1134 du Code civil ;
3 / qu'en toute hypothèse, si le juge procède à une simple révision du prix du bail, sa décision vaut seulement pour l'avenir, de sorte que le nouveau prix est fixé pour la période s'écoulant de la demande à la fin du bail, sans que les excédents versés par le preneur ou les économies par lui réalisées puissent donner lieu à remboursement ; qu'en fixant la révision du montant du loyer à compter de la conclusion du bail et non à compter de la demande des époux Y..., la cour d'appel a violé l'article L. 411-13, alinéa 1er, du Code rural ;
Mais attendu,d'une part, que les époux X... n'ayant pas contesté devant la cour d'appel l'illicéité du montant du prix du bail ni le prononcé de sa nullité par le Tribunal, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit ;
Attendu, d'autre part, que le montant du fermage du type d'exploitation loué n'ayant pas donné lieu à un arrêté préfectoral dans le Finistère à l'époque de la conclusion du bail, la cour d'appel, qui a exactement relevé que la valeur locative devait être déterminée selon les situations locales, les usages professionnels et les minima et maxima applicables à ce type d'exploitation dans un département voisin, a souverainement fixé le montant du loyer en tenant compte de deux arrêtés des préfets du Morbihan et d'Ille-et-Vilaine et d'un arrêté du préfet du Finistère du 11 mars 1997 pour fixer le montant du loyer des poulaillers de la conclusion du bail à sa résiliation amiable ;
D'où il suit que, pour partie irrecevable, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les époux X... à payer aux époux Y... la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille cinq.