AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 544 du Code civil ;
Attendu que si les juridictions de l'ordre judiciaire ne peuvent prescrire aucune mesure de nature à porter atteinte, sous quelque forme que ce soit, à l'intégrité ou au fonctionnement d'un ouvrage public, il en va autrement dans l'hypothèse où la réalisation de l'ouvrage procède d'un acte qui est manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir dont dispose l'autorité administrative et qu'aucune procédure de régularisation appropriée n'a été engagée ;
Attendu que la commune de Cayenne a fait construire une station d'épuration en partie sur la propriété immobilière des consorts X... ; qu'un jugement irrévocable du 13 mai 1998 a constaté l'occupation illégale de ce terrain, constitutive de voie de fait, et après expertise, a ordonné la démolition par un second jugement ;
Attendu que pour refuser d'ordonner la démolition du bâtiment empiétant sur la parcelle appartenant aux consorts X... et pour allouer à ces derniers une certaine somme à titre de dommages-intérêts, l'arrêt attaqué retient que le juge judiciaire ne peut ordonner la destruction d'un ouvrage public mais a le pouvoir d'allouer des dommages-intérêts à celui qui subit un préjudice à la suite d'une voie de fait ;
Qu'en statuant ainsi, après avoir relevé l'existence d'une voie de fait et sans constater qu'une régularisation avait été engagée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 octobre 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;
Condamne la commune de Cayenne aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la commune de Cayenne à payer aux consorts X... la somme totale de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille cinq.