AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu que, selon l'arrêt attaqué, M. X... a été embauché le 1er juin 1989 par la société Computic en qualité d'ingénieur technico-commercial ; qu'il a occupé, à compter du 2 février 1990, les fonctions de gérant directeur commercial ; qu'après sa démission du poste de gérant occupé du 2 février 1990 au 9 avril 1991, l'employeur lui a proposé, le 30 avril 1991, un avenant à son contrat de travail pour occuper à nouveau le poste d'ingénieur commercial ; qu'estimant qu'il s'agissait d'une rétrogradation, il a refusé le 27 mai 1991, demandant à son employeur de mettre en oeuvre la procédure de licenciement ; que l'employeur a fixé sa période de congés à compter du 27 mai et lui a refusé l'accès à son ordinateur et à son bureau ; qu'il a été licencié pour faute lourde au motif suivant :
"utilisation de la période de congés payés pour vous faire embaucher et travail à plein temps dans une société concurrente, violant ainsi votre obligation de fidélité et de confidentialité à l'égard de notre société" ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes afférentes à la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a énoncé, d'une part, que le courrier du salarié du 27 mai 1991 ne pouvait, en lui-même, mettre fin au contrat de travail et, d'autre part, que le salarié entrait au service, le 11 juin 1991, d'une société concurrente ; que l'embauche dans une société concurrente et le démarchage des clients de la société Computic par M. X... pour son nouvel employeur, alors même qu'il se trouvait en période de congés payés, sont constitutifs d'une faute lourde ;
Attendu, cependant, que lorsqu'un salarié refuse la modification de son contrat de travail, l'employeur doit, soit le rétablir dans son emploi, soit tirer les conséquences du refus en engageant la procédure de licenciement ; qu'il ne peut, sans l'avoir rétabli dans son emploi, se prévaloir d'un comportement fautif postérieur au refus pour procéder à un licenciement disciplinaire ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté qu'après le refus, le 27 mai 1991, par le salarié, de la modification de ses fonctions, l'employeur avait maintenu sa décision et enjoint au salarié de prendre ses congés payés, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais uniquement en ses dispositions relatives à la rupture, l'arrêt rendu le 28 février 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne les défendeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Computic ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille quatre.