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02/03/2004 | FRANCE | N°02-30966

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 02 mars 2004, 02-30966


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que Jean-Pierre X... a été salarié de la société Eternit du 4 juin 1956 au 28 avril 1958 ; qu'il a effectué le 19 novembre 1999 la déclaration d'un mésothéliome pleural, maladie professionnelle inscrite au tableau 30 ; qu'après son décès, survenu le 21 novembre 1999, la caisse primaire d'assurance maladie a reconnu le caractère professionnel de la maladie ; que sa veuve et ses enfants ont engagé une procédure en reconnaissance de

la faute inexcusable de la société Eternit ; que l'arrêt attaqué (Lyon, 25 juin 2...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que Jean-Pierre X... a été salarié de la société Eternit du 4 juin 1956 au 28 avril 1958 ; qu'il a effectué le 19 novembre 1999 la déclaration d'un mésothéliome pleural, maladie professionnelle inscrite au tableau 30 ; qu'après son décès, survenu le 21 novembre 1999, la caisse primaire d'assurance maladie a reconnu le caractère professionnel de la maladie ; que sa veuve et ses enfants ont engagé une procédure en reconnaissance de la faute inexcusable de la société Eternit ; que l'arrêt attaqué (Lyon, 25 juin 2002) a dit que la maladie de Jean-Pierre X... était due à la faute inexcusable de son employeur, la société Eternit, fixé la majoration de rente au maximum, fixé les sommes dues au titre du préjudice moral de chacun des consorts X..., et celles dues au titre du préjudice personnel du de cujus, dit que la caisse primaire ferait l'avance des sommes ainsi allouées et l'a déboutée de son recours contre la société Eternit ;

Attendu que la caisse primaire d'assurance maladie fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir statué ainsi, alors, selon le moyen :

1 / que la procédure en reconnaissance du caractère professionnel de la maladie est une procédure distincte de la procédure en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ; que lorsque la Caisse admet le caractère professionnel de la maladie d'un salarié et que l'employeur ne conteste pas cette reconnaissance, le caractère professionnel de la maladie ne peut plus être remis en cause à l'occasion d'une procédure en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ; qu'en l'espèce, il est établi que la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de M. X... a été notifiée par la Caisse à la société Eternit le 13 mai 2000, sans que l'employeur n'élève de contestation sur cette reconnaissance ; qu'aussi, en jugeant que la reconnaissance de la maladie professionnelle du salarié par la Caisse n'était pas opposable à la société Eternit quand l'admission du caractère professionnel de la maladie était devenue définitive, la cour d'appel a violé les articles L.441-1 et suivants et L.452-1 et suivants du Code de la sécurité sociale ;

2 / que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, la Caisse primaire d'assurance maladie de Roanne demandait à recouvrer sur la société Eternit les sommes qu'elle serait amenée à verser aux consorts X... ; que la société Eternit s'y opposait en soutenant que la reconnaissance de la maladie professionnelle par la caisse ne lui serait pas opposable parce qu'elle n'aurait pas été suivie régulièrement et contradictoirement ; que le litige portait donc sur la validité de la procédure en reconnaissance du caractère professionnel de la maladie et non de la procédure en reconnaissance de la faute inexcusable ; qu'en affirmant que "la société Eternit établit que la procédure conduisant à la reconnaissance de la faute inexcusable par la Caisse n'a pas été suivie régulièrement et contradictoirement", ce que l'employeur n'a jamais prétendu, la cour d'appel a modifié les termes du litige dont elle est saisie, violant ainsi l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / que le caractère tardif de l'enquête légale obligatoire ne saurait rendre inopposable la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie dès lors que l'enquête confirme le caractère professionnel de la maladie du salarié ; qu'en prenant en compte le fait que l'enquête légale obligatoire n'avait été effectuée que postérieurement à la notification de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de M. X... pour déclarer la reconnaissance de la maladie professionnelle inopposable à l'employeur, quand l'enquête confirmait l'origine professionnelle de la maladie du salarié, la cour d'appel a violé les articles L.442-1 et suivants du Code de la sécurité sociale ;

4 / que les juges sont tenus d'examiner les éléments de preuves soumis à leur appréciation ; que, pour apporter la preuve que la procédure en reconnaissance de la maladie professionnelle de M. X... avait bien été contradictoire, la caisse primaire versait aux débats un nombre important de pièces (pièces n° 5, 6, 7, 9, 14, 16 et 17) dont il résultait que l'employeur était parfaitement informé tant de la déclaration de maladie professionnelle de son salarié que des diligences de la Caisse dans l'instruction du dossier et de la possibilité de présenter ses observations ; qu'en affirmant néanmoins que la procédure en reconnaissance de la maladie professionnelle n'avait pas été contradictoirement diligentée, sans examiner aucune des pièces produites par la Caisse pour l'établir, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

5 / que les juges du fond ne peuvent, sous couvert d'interprétation, dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; que l'article R.441-13 du Code de la sécurité sociale dispose que le dossier constitué par la caisse primaire, qui doit comprendre les pièces qu'il énumère, peut, à sa demande, être communiqué à l'employeur ; qu'en affirmant que la procédure de reconnaissance de la maladie professionnelle n'avait pas été contradictoire parce que les pièces réclamées par la société Eternit dès le 9 février 2000 ne lui auraient pas été transmises par la Caisse, quand le document du 9 février 2000 n'était pas une demande de pièce mais une attestation de carrière établie par la société Eternit pour l'information de la Caisse, la cour d'appel a dénaturé ce document et violé l'article 1134 du Code civil ;

6 / que les juges du fond ne peuvent, sous couvert d'interprétation, dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; que la caisse primaire d'assurance maladie versait aux débats un avis de clôture d'enquête établissant que l'employeur avait été avisé de la clôture de l'enquête le 27 juin 2000 ; qu'en affirmant que l'avis de clôture d'enquête n'avait pas été porté à la connaissance de la société Eternit quand cet avis démontrait le contraire, la cour d'appel a dénaturé ce document et violé l'article 1134 du Code civil ;

7 / que les sommes allouées à la victime en cas de faute inexcusable de l'employeur sont versées directement au bénéficiaire par la Caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur, conformément à l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale ; que la réparation allouée ne reste définitivement à la charge de la branche accidents du travail et maladies professionnelles que dans l'hypothèse où les droits de la victime ont été rouverts en vertu de l'article 40 II de la loi du 23 décembre 1998 ; qu'en l'espèce, la première constatation médicale de la maladie de M. X... remontait au 10 avril 1999 et la demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur était présentée par ses ayants droit le 5 décembre 2000 ; que cette demande exercée dans le délai légal ne relevait pas de l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998, mais du droit commun ; qu'en jugeant néanmoins que les règles de mutualisation des risques étaient applicables en l'espèce, la cour d'appel a violé les articles L.452-3 du Code de la sécurité sociale et 40 de la loi du 23 décembre 1998 ;

Mais attendu, d'abord, que l'avis donné à l'employeur par la Caisse de sa décision de prendre en charge la maladie à titre professionnel ne rend pas cette décision définitive à son égard et ne le prive pas du droit d'en contester l'opposabilité à l'occasion de la procédure en reconnaissance de la faute inexcusable ;

Attendu, ensuite, qu'il résulte de l'article R.441-1, alinéa 1er, du Code de la sécurité sociale que la caisse primaire d'assurance maladie, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision ;

Et attendu, enfin, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a relevé, appréciant souverainement la valeur des éléments de preuves qui lui étaient soumis, et hors toute dénaturation, qu'il ressortait des pièces versées aux débats que la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de Jean-Pierre X... avait été notifiée dès le 13 mai 2000, alors qu'il n'avait été procédé que postérieurement à l'enquête légale obligatoire, que les pièces réclamées par la société Eternit ne lui avaient pas été transmises, que les éléments recueillis ne lui avaient pas été communiqués et que l'avis de clôture d'enquête n'avait pas été porté à sa connaissance ; qu'elle a ainsi, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

D'ou il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Roanne aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la CPAM de Roanne à payer à la société Eternit la somme de 2 000 euros et la déboute de sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 02-30966
Date de la décision : 02/03/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Procédure - Procédure préliminaire - Appréciation du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie - Décision de la caisse - Absence de réclamation de l'employeur - Portée.

SECURITE SOCIALE, CONTENTIEUX - Contentieux général - Procédure - Procédure gracieuse préalable - Commission de recours amiable - Saisine - Conditions - Réclamation contre une décision d'un organisme de sécurité sociale - Défaut - Applications diverses - Exception d'inopposabilité par l'employeur d'une décision de la caisse

L'avis donné par la caisse primaire d'assurance maladie à l'employeur de sa décision de prendre en charge la maladie à titre professionnel ne rend pas cette décision définitive à l'égard de ce dernier et ne le prive pas d'en contester l'opposabilité à l'occasion de la procédure en reconnaissance de sa faute inexcusable.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 25 juin 2002

A rapprocher : Chambre sociale, 2002-12-19, Bulletin, V, n° 405 (1), p. 404 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 02 mar. 2004, pourvoi n°02-30966, Bull. civ. 2004 II N° 80 p. 70
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2004 II N° 80 p. 70

Composition du Tribunal
Président : M. Ollier, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Mme Barrairon.
Rapporteur ?: Mme Coutou.
Avocat(s) : la SCP Gatineau, la SCP Célice, Blancpain et Soltner.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:02.30966
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