AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu les articles 1382 et 2166 du Code civil ;
Attendu que, suivant acte authentique en date du 30 juillet 1985, la Caisse régionale de Crédit agricole de la Réunion (la banque) a consenti à la SA Centre artistique et de loisirs de l'Eperon (CALE) un prêt d'un montant de 1 200 000 francs garanti par une hypothèque inscrite sur un bien immobilier cadastré CT n° 235 situé commune de Saint-Paul (Réunion) ; qu'ultérieurement, ce bien a fait l'objet d'une division en deux lots nouvellement numérotés CT 718 et 719 et que le second a été vendu par la société CALE suivant acte reçu le 15 octobre 1996 par M. X..., notaire à Saint-Paul ; que, reprochant à ce dernier d'avoir commis une faute en se libérant du prix entre les mains du vendeur malgré l'inscription de l'hypothèque conventionnelle, M. Y..., subrogé dans les droits de la banque, a assigné M. X... pour l'entendre condamner à lui payer la somme de 300 000 francs, correspondant au prix de vente du lot n° CT 719 ;
Attendu qu'après avoir constaté que M. Y... disposait, en vertu de sa créance hypothécaire, du droit de suite sur le lot vendu, l'arrêt attaqué, pour faire droit à sa demande dirigée contre le notaire, considère que son exercice ne présente qu'un caractère théorique dans la mesure où il n'aboutirait qu'à créer de nouvelles victimes ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs alors que M. Y..., qui pouvait obtenir la reconnaissance de sa créance en exerçant son droit de suite contre l'acquéreur de l'immeuble, ne justifiait pas d'un préjudice certain, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le surplus des griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 août 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé conformément à l'article 452 du nouveau Code de procédure civile par M. Bouscharain, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, en remplacement de M. le président Lemontey, en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille quatre.