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15/05/2001 | FRANCE | N°00NC01272;00NC01348

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3e chambre, 15 mai 2001, 00NC01272 et 00NC01348


(Troisième Chambre)
Vu, I - la requête, enregistrée le 2 octobre 2000 au greffe de la cour sous le n 00NC01272, présentée par M. Denis FISCHER, demeurant 17 rue du Duché de Lorraine à Condé-Northen (Moselle) ;
Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 8 décembre 2000, présenté pour M. FISCHER par la SCP Bourgun-Drr, avocats au barreau de Strasbourg ;
M. FISCHER demande à la cour :
1 / de réformer le jugement n 95-1192 du 3 juillet 2000 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a condamné la chambre de métiers de la Moselle à lui verser une indemnit

é de 313 000 francs, qu'il estime insuffisante, en réparation du préjudice sub...

(Troisième Chambre)
Vu, I - la requête, enregistrée le 2 octobre 2000 au greffe de la cour sous le n 00NC01272, présentée par M. Denis FISCHER, demeurant 17 rue du Duché de Lorraine à Condé-Northen (Moselle) ;
Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 8 décembre 2000, présenté pour M. FISCHER par la SCP Bourgun-Drr, avocats au barreau de Strasbourg ;
M. FISCHER demande à la cour :
1 / de réformer le jugement n 95-1192 du 3 juillet 2000 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a condamné la chambre de métiers de la Moselle à lui verser une indemnité de 313 000 francs, qu'il estime insuffisante, en réparation du préjudice subi du fait de l'irrégularité de la décharge de ses fonctions prononcée le 29 novembre 1993, de sa rétrogradation consécutive et de sa mutation à Sarreguemines ;
2 / de condamner la chambre de métiers de la Moselle à lui verser les sommes respectives de 247 582,75 francs au titre de la reconstitution de sa carrière, auxquelless il convient d'ajouter les charges sociales à verser aux institutions de retraite PRECA et AGRR, 50 262,99 francs au titre de l'indemnisation des déplacements vers Sarreguemines, 37 673 francs au titre de la privation de ses congés payés, 90 000 francs au titre de son préjudice moral et 60 000 francs au titre des troubles dans les conditions d'existence, le tout avec intérêts au taux légal à compter du jour de la demande et capitalisation desdits intérêts à la date du présent mémoire ;
3 / de condamner la chambre de métiers de la Moselle à lui verser une somme de 10 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu, II - la requête, enregistrée le 16 octobre 2000 au greffe de la cour sous le n 00NC01348, présentée pour la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE, représentée par son président en exercice, domicilié en cette qualité au siège sis 5 Bd de la Défense à Metz (Moselle), par la SCP M. et R Avocats, avocats au barreau de Strasbourg ;
La CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE demande à la cour :
1 / d'annuler le jugement n 95-1192 du 3 juillet 2000 par lequel le tribunal administratif l'a condamnée à verser à M. Fischer la somme de 313 000 francs avec intérêts à raison du préjudice subi du fait de son éviction des fonctions de secrétaire général ;
2 / de rejeter la requête de M. Fischer devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
3 / de condamner M. Fischer à lui verser la somme de 15 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le statut du personnel administratif de la chambre de métiers de la Moselle ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 avril 2001 :
- le rapport de M. VINCENT, Président,
- les observations de M. FISCHER et de Me RADIUS, avocat de la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE ;
- et les conclusions de M. ADRIEN, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que, par délibération du 29 novembre 1993, l'assemblée plénière de la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE a déchargé M. FISCHER de ses fonctions de secrétaire général ; que l'intéressé a alors été nommé directeur adjoint des affaires économiques dans l'emploi de directeur administratif et financier du Cégeme, organisme associé à la chambre, puis muté à compter du 2 mai 1994 à l'établissement de Sarreguemines de cet organisme jusqu'au 30 avril 1995, date à laquelle il a été réintégré au siège de Metz avec le titre de secrétaire général de la chambre de métiers et l'échelon indiciaire afférent à l'emploi correspondant ; que, par jugement en date du 12 septembre 1994 confirmé par décision du Conseil d'Etat n 162763 du 14 novembre 1997, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la délibération susrappelée du 29 novembre 1993 ; que, par jugements n 94-484 et n 94-1046 du 3 avril 1995 devenus définitifs, le tribunal a également annulé, par voie de conséquence, la nomination de M. FISCHER en tant que directeur adjoint des affaires économiques ainsi que sa mutation à Sarreguemines ; que, consécutivement à ces jugements, M. FISCHER a demandé l'indemnisation des préjudices subis au cours de la période du 29 novembre 1993 au 30 avril 1995 ; que la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE et M. FISCHER relèvent appel du jugement du 3 juillet 2000 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a partiellement fait droit à la requête de ce dernier et évalué son préjudice à la somme de 313 000 francs ;
Sur la jonction :
Considérant que les requêtes susvisées de M. FISCHER et de la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur l'étendue du droit à réparation :
Considérant que les décisions de décharger M. FISCHER de ses fonctions de secrétaire général, directeur des services de la chambre de métiers, puis de le nommer à un emploi comportant de moindres responsabilités et de le muter à Sarreguemines, annulées par le juge de l'excès de pouvoir, sont constitutives d'une faute de nature à engager la responsabilité de la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE ; que la décharge de fonctions ainsi pratiquée n'étant pas au nombre des sanctions disciplinaires susceptibles d'être infligées sur le fondement du statut du personnel administratif de cet établissement, applicable à M. FISCHER, aucune faute de l'intéressé ne saurait en tout état de cause justifier le prononcé d'une telle mesure ; que la responsabilité encourue par la chambre de métiers du fait de l'illégalité de la décharge de fonctions et des mesures consécutives sus-rappelées ne saurait en outre être atténuée à raison d'éventuelles fautes que M. FISCHER aurait commises postérieurement au 30 avril 1995 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les illégalités ainsi relevées par le juge de l'excès de pouvoir sont de nature à ouvrir à M. FISCHER un entier droit à réparation de son préjudice ;
Sur l'évaluation du préjudice :

Considérant, en premier lieu, que M. FISCHER est fondé à obtenir réparation du préjudice matériel résultant de la perte de traitement subie au cours de la période du 1er décembre 1993 au 30 avril 1995 ; que, toutefois la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE est fondée à soutenir, par un moyen soulevé en première instance et non expressément abandonné en appel, que l'intéressé, qui ne saurait revendiquer une indemnité supérieure au préjudice réellement subi, ne serait en tout état de cause en droit de ne réclamer qu'une indemnité correspondant à la différence entre les rémunérations nettes afférentes à l'emploi de secrétaire général et celles correspondant aux emplois qu'il a occupés et non une indemnité calculée sur la base de la différence entre les rémunérations brutes qui lui auraient été attribuées s'il était demeuré titulaire de l'emploi de secrétaire général et celles qui lui ont été dévolues ; que, par suite, il sera fait une juste appréciation des pertes de traitement subies par l'intéressé au titre des périodes du 1er décembre 1993 au 30 septembre 1994, du 1er octobre au 31 décembre 1994 et du 1er janvier au 30 avril 1995 en ramenant respectivement à 80 000 francs, 27 000 francs et 30 000 francs les indemnités accordées à ce titre par le jugement attaqué, qui a suffisamment motivé sa décision sur ce point ; que, par suite, le jugement attaqué doit être réformé en ce sens ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. FISCHER n'est pas fondé à être indemnisé à raison du non-versement de l'indemnité annuelle pour frais et de l'indemnité pour frais de téléphone, qui sont liées à l'exercice effectif des fonctions ; que le requérant n'énonce par ailleurs aucun argument à l'encontre de la motivation du tribunal, qui a regardé l'indemnité annuelle de fonctions qu'il percevait antérieurement comme également liée à l'exercice effectif de ses attributions ;
Considérant, en troisième lieu, que si l'annulation de la mesure de décharge de fonctions prise à son égard implique nécessairement de rétablir M. FISCHER dans ses droits à pension afférents à l'emploi de secrétaire général, en procédant à la régularisation des cotisations relatives à la période ayant couru du 29 novembre 1993 au 30 avril 1995, le requérant ne fait pas état d'un litige né et actuel qui l'opposerait à la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE sur ce point ;

Considérant, en quatrième lieu, que M. FISCHER est fondé à demander à être indemnisé des frais de transport qu'il a exposés pendant un an pour se rendre quotidiennement à Sarreguemines après la mutation dont il a fait l'objet ; que celle-ci ayant été annulée par le juge de l'excès de pouvoir, comme il vient d'être dit, la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE ne saurait opposer à la demande de M. FISCHER la circonstance que cette mutation est survenue antérieurement au jugement annulant la décharge de fonctions, qui a d'ailleurs rétroagi au jour de ladite mesure, lui-même antérieur à la mutation litigieuse ; que, toutefois, le préjudice indemnisable de M. FISCHER n'est pas constitué de l'intégralité de ces frais, mais seulement du surcroît de dépenses résultant de son affectation à Sarreguemines par rapport à celles qu'il aurait exposées pour se rendre de son domicile au siège de la chambre de métiers à Metz ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 30 000 francs ; que la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE, qui a soulevé en première instance le moyen tiré du caractère excessif de l'évaluation de ce chef de préjudice par M. FISCHER, est, dans cette mesure, fondée à demander la réformation du jugement attaqué ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'en admettant même que M. FISCHER, qui établit avoir demandé en avril 1994 l'autorisation de prendre un reliquat de congés payés au titre de la période de référence 1992-1993, n'aurait pas été mis à même de bénéficier de tels congés, il ne résulte en tout état de cause d'aucune disposition ni principe général du droit que l'intéressé serait fondé à obtenir le versement d'une indemnité compensatrice de congé non pris ;
Considérant, en dernier lieu, que les premiers juges ont fait une juste appréciation des troubles de toute nature subis par M. FISCHER dans ses conditions d'existence du fait de sa décharge de fonctions, de sa nomination dans un emploi comportant de moindres responsabilités et de sa mutation à Sarreguemines ainsi que du préjudice moral résultant tant de ces mesures que des circonstances qui les ont accompagnées et des conditions dans lesquelles elles ont été prononcées en évaluant l'ensemble de ces préjudices à la somme de 100 000 francs y compris tous intérêts échus au jour de leur jugement ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation a été demandée le 8 décembre 2000 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande en ce qui concerne les intérêts afférents aux indemnités versées en réparation du préjudice lié aux pertes de traitement et à la mutation à Sarreguemines ; qu'une année d'intérêts ne s'étant pas écoulée depuis la notification du jugement attaqué, il n'y a en revanche pas lieu de faire droit à cette demande en tant qu'elle concerne les intérêts ayant couru depuis lors concernant la somme précitée de 100 000 francs ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à M. FISCHER la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner M. FISCHER à payer à la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE une somme de 5 000 francs au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les sommes de 95 000 francs, 32 000 francs, 36 000 francs et de 50 000 francs que LA CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE a été condamnée à verser à M. FISCHER par le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 3 juillet 2000 au titre des pertes de traitement et de la mutation à Sarreguemines sont ramenées respectivement à 80 000 francs, 27 000 francs, 30 000 francs et 30 000 francs.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 3 juillet 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Les intérêts afférents aux sommes mentionnées à l'article 1er ci-dessus, ayant couru à compter des dates précisées par l'article 1er du jugement attaqué, capitalisés comme indiqué par l'article 2 dudit jugement, et échus le 8 décembre 2000, seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : M. FISCHER versera à la CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE une somme de 5 000 francs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. FISCHER et de LA CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE est rejeté.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. FISCHER et à LA CHAMBRE DE METIERS DE LA MOSELLE.


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