Vu la requête, enregistrée le 8 septembre 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la commune de Douvrin, par Me Tillie, avocat ; la commune demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 11 juillet 2000 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé la délibération du conseil municipal de Douvrin du 22 juin 1998 décidant de préempter une parcelle sise à l'angle des rues ..., et a enjoint à la commune de proposer la cession de l'immeuble à M. Yannick X, acquéreur évincé ;
Elle soutient que le maire avait, dès le 18 mai 1998, et donc dans le délai de deux mois prévu par l'article L. 213-2 du code de l'urbanisme, indiqué de façon non équivoque à l'office notarial chargé de la régularisation de la vente son intention d'exercer le droit de préemption ; que c'est par souci de transparence, malgré la délibération du 30 juin 1995 lui donnant compétence pour exercer le droit de préemption urbain, que le maire de Douvrin a saisi le conseil municipal qui a statué par délibération du 22 juin 1998 ; que la procédure de préemption est, par conséquent, régulière ; que l'utilisation d'un bien dans la perspective d'un équipement social ou sportif est conforme aux finalités visées à l'article L. 201-1 du code de l'urbanisme ; qu'en l'espèce le conseil municipal avait décidé de passer un marché de maîtrise d'oeuvre pour la création d'une salle de sports ; que, compte tenu du nombre de terrains voisins à acquérir pour le mener à bien, un tel projet devait nécessairement s'inscrire dans le temps ; que la commune ayant
Code C Classement CNIJ : 68-02-01-01
décidé de réaliser ailleurs ce projet, elle a décidé la construction d'un foyer logement retraite à loyer modéré sur les terrains préemptés ; que la motivation de l'arrêté de préemption est suffisante ; que la procédure financière n'a pas été viciée ; que le droit de préemption n'a pas été exercé hors délais, M. X ayant exercé un recours gracieux contre la décision de préemption du maire du 18 mai 1998 ; que la condamnation prononcée par le tribunal administratif sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel n'est pas justifiée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le courrier en date du 17 juin 2003 par lequel M. X a été mis en demeure de présenter ses observations en défense ;
Vu le courrier en date du 14 novembre 2003 par lequel les parties ont été informées de ce que la décision de la Cour était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office ;
Vu le mémoire, enregistré le 29 novembre 2003, présenté pour M. X par Me Tillie, avocat, concluant au rejet de la requête et à la condamnation de la commune de Douvrin à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; il fait valoir que la délibération est intervenue en dehors du délai légal ; qu'elle a également été transmise tardivement au contrôle de légalité ; que l'objet pour lequel le droit de préemption est exercé n'est pas défini de façon suffisamment précise ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2003 où siégeaient M. Merloz, président de chambre, Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur et M. Lequien, premier conseiller :
- le rapport de Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur,
- les observations de M. Yannick X, requérant,
- et les conclusions de M. Yeznikian, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-20 du code des communes, devenu l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales : Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou en partie, et pour la durée de son mandat : ... 15° d'exercer au nom de la commune les droits de préemption définis par le code de l'urbanisme (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal de la commune de Douvrin a, par délibération en date du 30 juin 1995, délégué au maire la totalité des attributions énumérées à l'article L. 122-20 précité du code des communes, au nombre desquelles figure l'exercice du droit de préemption urbain ; que s'étant ainsi dessaisi de ce pouvoir, le conseil municipal n'a pu légalement se substituer au maire pour décider comme il l'a fait, par délibération en date du 22 juin 1998, de préempter le terrain cadastré AM 502 et AM 134 dont M. X s'était porté acquéreur ; que la simple mention, apposée par le maire dans le cadre réservé à cet effet dans la déclaration d'aliéner, de l'intention de la commune d'exercer le droit de préemption, ne saurait être regardée comme une décision du maire d'exercer ce droit ; qu'ainsi la délibération en date du 22 juin 1998 est entachée d'incompétence ; qu' en tout état de cause, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, la délibération attaquée est illégale en tant qu'elle a été prise au-delà du délai de deux mois imparti par l'article R. 213-7 du code de l'urbanisme ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Douvrin n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé la délibération du conseil municipal en date du 22 juin 1998 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune de Douvrin à payer à M. X la somme de 500 euros au titre des frais engagés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Douvrin est rejetée .
Article 2 : La commune de Douvrin versera à M. Yannick X la somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Douvrin, à M. Yannick X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
Copie sera transmise au préfet du Pas-de-Calais.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 4 décembre 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.
Prononcé en audience publique le 18 décembre 2003.
Le rapporteur
Signé : M. Merlin-Desmartis
Le président de chambre
Signé : G. Merloz
Le greffier
Signé : B. Robert
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier
B. Robert
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N°00DA01079