La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/10/2002 | FRANCE | N°00-18359

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 octobre 2002, 00-18359


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que le 6 juin 1997, André X..., salarié de la société Ouest Concassage, a été écrasé par l'engin tracto-grue qu'il conduisait alors qu'il l'avait immobilisé sur une pente pour rechercher les causes d'une fuite d'huile ; qu'il a succombé à ses blessures ; que l'arrêt confirmatif attaqué a reconnu l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur ;

Attendu que la

société Ouest Concassage fait grief à la cour d'appel (Saint-Denis de La Réunion, 23 ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que le 6 juin 1997, André X..., salarié de la société Ouest Concassage, a été écrasé par l'engin tracto-grue qu'il conduisait alors qu'il l'avait immobilisé sur une pente pour rechercher les causes d'une fuite d'huile ; qu'il a succombé à ses blessures ; que l'arrêt confirmatif attaqué a reconnu l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur ;

Attendu que la société Ouest Concassage fait grief à la cour d'appel (Saint-Denis de La Réunion, 23 mai 2000) d'avoir statué ainsi, alors, selon le moyen :

1 ) que ne constitue pas une faute inexcusable au sens de l'article L.452-1 du Code de la sécurité sociale celle qui n'a pas été déterminante dans la survenance du dommage ; qu'en l'espèce, la société Ouest Concassage faisait valoir dans ses conclusions que l'engin n'avait pu reculer que parce que le moteur était en marche, levier de vitesse au point mort, alors que les stabilisateurs n'étaient pas posés au sol qui était en pente ; que le procès-verbal de synthèse de la gendarmerie concluait que "il est toutefois évident que si les patins stabilisateurs avaient été positionnés, le PPM n'aurait pas reculé" ; qu'en retenant cependant le caractère inexcusable de la faute de l'employeur du fait du défaut d'entretien du véhicule sans rechercher si, en l'espèce, cette faute était ou non déterminante de l'accident, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.452-1 du Code de la sécurité sociale ;

2 ) que la faute de la victime constitue une cause d'exonération de la responsabilité de l'auteur de la faute inexcusable ;

qu'en ne recherchant pas si le fait, pour la victime, de descendre de l'engin pour venir se placer derrière lui, alors que le terrain est en pente, sans poser les stabilisateurs et en laissant le moteur en marche, ne constituait pas une faute exonérant, au moins partiellement, l'employeur de sa responsabilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.452-1 du Code de la sécurité sociale ;

3 ) que la cour d'appel, comme les premiers juges, se sont contentés d'affirmer l'existence d'une obligation générale de formation en matière de sécurité et qu' il incombait à l'employeur d'apporter la preuve que ses obligations ont été satisfaites ; qu'en ne recherchant, ni ne constatant que la société Ouest Concassage ne démontrait pas avoir respecté cette obligation avant de retenir la faute inexcusable de la société Ouest Concassage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.452-1 du Code de la sécurité sociale ;

4 ) que le procès verbal de synthèse de la gendarmerie concluait que : "de l'enquête effectuée il n'a pas été possible de savoir ce que pouvait faire X... André sous l'engin" ; qu'en affirmant cependant que "les constatations de gendarmerie permettent d'établir (...) le lien de causalité entre la fuite constatée et la position du salarié tentant d'y remédier, réparation qui n'aurait pas été nécessaire en cas d'entretien normal de l'engin", la cour d'appel a dénaturé ce procès verbal et violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, de première part, qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail, et que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L.452-1 du Code de la sécurité sociale lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;

Attendu, de deuxième part, que les énonciations des juges du fond caractérisent le fait que la société Ouest Concassage avait conscience du danger consécutif à l'absence d'entretien de l'engin, notamment en ce qui concerne son dispositif de sécurité, et qu'elle n'avait pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;

Attendu, de troisième part, qu'il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu au salarié mais qu'il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres fautes auraient concouru au dommage ;

Attendu, enfin, comme le fait valoir le mémoire en défense, que le grief tiré des conséquences de la faute qu'aurait commise le salarié, nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;

D'où il suit que l'arrêt, qui n'encourt aucun des griefs du moyen, est légalement justifié ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Ouest Concassage aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la CGSSR ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un octobre deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-18359
Date de la décision : 31/10/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° SECURITE SOCIALE - ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Conditions - Conscience du danger - Risques liés au poste de travail - Mesures de protection nécessaires - Défaut.

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Responsabilité - Faute - Faute inexcusable - Définition 1° SECURITE SOCIALE - ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Définition 1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Responsabilité - Faute - Inexécution par l'employeur de ses obligations - Obligation de sécurité envers les salariés - Accident du travail - Mesures de protection nécessaires - Défaut 1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Obligations - Sécurité des salariés - Accident du travail - Risques liés au poste de travail - Mesures de protection - Nécessité 1° RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Obligation de résultat - Employeur - Sécurité des salariés - Accidents du travail - Risques liés au poste de travail 1° RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Obligation de sécurité - Contrat de travail - Accidents du travail - Risques liés au poste de travail.

1° En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail, et le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. Justifie légalement sa décision retenant qu'un employeur avait commis une faute inexcusable à l'occasion d'un accident mortel survenu à un salarié écrasé par un engin, la cour d'appel dont les énonciations font apparaître que l'employeur avait conscience du danger consécutif à l'absence d'entretien de l'engin, notamment en ce qui concerne son dispositif de sécurité, et qu'il n'avait pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

2° SECURITE SOCIALE - ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Conditions - Lien de causalité - Cause déterminante - Nécessité (non).

2° SECURITE SOCIALE - ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Conditions - Lien de causalité - Cause nécessaire - Condition suffisante 2° RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Dommage - Réparation - Pluralité des responsables - Concours de plusieurs fautes - Faute inexcusable de l'employeur - Cause de l'accident du travail - Cause déterminante - Nécessité (non) 2° RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Dommage - Réparation - Pluralité des responsables - Concours de plusieurs fautes - Faute inexcusable de l'employeur - Cause de l'accident du travail - Cause nécessaire - Condition suffisante.

2° Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident du travail survenu à un salarié ; il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagées, alors même que d'autres fautes auraient concouru au dommage.


Références :

Code de la sécurité sociale L452-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 23 mai 2000

A RAPPROCHER : (1°). Chambre sociale, 2002-06-27, Bulletin 2002, V, n° 224 (1), p. 218 (rejet) et l'arrêt cité ; Chambre sociale, 2002-07-11, Bulletin 2002, V, n° 261, p. 252. EN SENS CONTRAIRE : Chambre sociale, 1993-03-11, Bulletin 1993, V, n° 85, p. 59 (rejet). A RAPPROCHER : Chambre civile 1, 2002-07-02, Bulletin 2002, I, n° 182 (2), p. 140 (en cours de publication (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 oct. 2002, pourvoi n°00-18359, Bull. civ. 2002 V N° 336 p. 324
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 V N° 336 p. 324

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos .
Avocat général : M. Kehrig.
Rapporteur ?: M. Paul-Loubière.
Avocat(s) : la SCP Gatineau, M. Delvolvé.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.18359
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award