Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 mai 2000), que la société Rophipama, propriétaire de locaux à usage commercial, a assigné sa locataire, la société Les Ateliers de Danse, afin que soit réajusté le prix du loyer en raison des sous-locations consenties par le preneur ;
Attendu que la société Rophipama fait grief à l'arrêt de dire qu'elle ne rapporte pas la preuve que la société Les Ateliers de Danse a procédé à des sous-locations justifiant la demande de réajustement de loyer prévue par l'article 21 du décret du 30 septembre 1953 et de la débouter de l'intégralité de ses demandes, alors, selon le moyen :
1° que les obligations du bailleur et du preneur peuvent faire l'objet d'aménagements conventionnels ; qu'ainsi les parties sont libres d'ajouter aux obligations légales du bailleur, toutes prestations accessoires telle une obligation de gardiennage, de nettoyage et de sécurité, dès lors qu'aucune n'est exclusive du louage ; que le bailleur est tenu d'assurer au preneur la jouissance du bien pour l'usage convenu entre les parties ; qu'en l'espèce, la société Rophipama soutenait que la fourniture de prestations accessoires suivantes : équipements spéciaux des espaces, entretien quotidien des espaces, sécurité et gardiennage des locaux, fourniture des consommables et chauffages des espaces ne constituait que l'exécution par le bailleur des diligences auxquelles il s'était engagé et visant à la jouissance paisible des lieux loués et à l'entretien de ceux-ci pour l'usage pour lequel ils ont été loués ; que pour affirmer néanmoins que le contrat en question ne pouvait être qualifié de contrat de location, la cour d'appel a retenu que les nombreuses prestations relatives à l'équipement et à l'entretien des locaux assurés par la société Les Ateliers de Danse ainsi que le contrôle de l'accueil et de la sécurité conservés par cette dernière démontrent que le contrat passé avec l'Institut de formation des enseignants de danse et de musique (Ifedem) ne peut se réduire à une sous-location ; qu'en statuant ainsi, lorsque l'ajout de prestations annexes et accessoires au bail nullement exclusives du louage, ne saurait disqualifier le contrat de bail, la cour d'appel a violé les articles 1714 et suivants du Code civil ;
2° que les juges du fond ne peuvent, sous couvert d'interprétation, dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; qu'aux termes de l'article 1728 du Code civil, le preneur est tenu à deux obligations principales, premièrement d'user de la chose louée en bon père de famille, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée par les circonstances à défaut de convention, deuxièmement de payer le prix du bail aux termes convenus ; qu'en l'espèce, la société Rophipama soutenait que précisément, l'Ifedem remplissait ses deux obligations principales, puisqu'aux termes de la convention litigieuse, elle était tenue, premièrement, d'user des locaux mis à sa disposition en bon père de famille et à n'en pas détourner l'objet ou la vocation, ni la qualité esthétique, d'assurer contre tous les risques tous les objets lui appartenant ou appartenant à son personnel, deuxièmement, de verser annuellement la somme de 2 260 041,60 francs (le règlement étant établi trimestriellement et par avance) (article 7) ; qu'en affirmant, néanmoins, que cette convention ne contenait aucune disposition relative aux obligations courantes du locataire, la cour d'appel a manifestement dénaturé le contrat du 30 juillet 1990 et violé l'article 1134 du Code civil ;
3° que le prix du loyer est un des éléments essentiels du contrat de louage le distinguant notamment de la simple convention d'occupation précaire ; que la société Rophipama soutenait que le fait pour la société Les Ateliers de Danse de réclamer, pour la mise à disposition des locaux, la somme de 2 260 041,60 francs TTC à l'Ifedem, caractérisait l'un des éléments essentiels d'une location, à savoir un loyer non dérisoire ; que, pour considérer néanmoins que le contrat conclu entre l'Ifedem et la société Les Ateliers de Danse ne constituait pas une location, la cour d'appel a affirmé que l'argument tiré de " l'importance de la rémunération n'avait rien de décisif dans la mesure où l'objet social de la société Les Ateliers de Danse est notamment l'exploitation de studios de gymnastique, danse musique, arts plastiques (etc.) et où il est légitime qu'elle en tire des revenus en rapport avec les investissements qu'elle a réalisés dans les lieux et les prestations qu'elle assure " ; qu'en se déterminant ainsi, par un motif inopérant, quand il lui appartenait de rechercher si l'existence d'un loyer sérieux, abstraction faite de sa légitimité, ne caractérisait pas un élément essentiel du contrat de location, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1714 et suivants du Code civil ;
4° que la limitation de jouissance des lieux dans le temps n'est pas exclusive du contrat de bail, dès lors que le bailleur confère au preneur un droit exclusif sur les locaux ; qu'en l'espèce, la société Rophipama invoquait le droit de jouissance exclusif dont la société Les Ateliers de Danse avait doté l'Ifedem sur les locaux, laquelle y avait même installé son siège social ainsi que cela résultait de ses statuts et de son papier en-tête ; qu'en un chapitre intitulé " exclusivité ", la convention litigieuse stipulait que la société Les Ateliers de Danse assurent à l'Ifedem l'usage exclusif des locaux " et que la société Les Ateliers de Danse s'interdisent l'usage de ces locaux, sauf accord préalable écrit de l'Ifedem " ; que, pour affirmer que le contrat litigieux ne pouvait être qualifié de " sous-location ", la cour d'appel s'est contentée de relever que la jouissance des lieux accordée à l'Ifedem était limitée dans le temps ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée si, en dépit de cette limitation de jouissance dans le temps, l'Ifedem ne bénéficiait pas d'un droit de jouissance exclusif sur les locaux caractérisant la sous-location, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1714 et suivants du Code civil ;
5° que les juges ne peuvent statuer par voie de motifs d'ordre général et doivent se déterminer par des constatations concrètes ; qu'en l'espèce, la société Rophipama soulignait que la convention conclue entre la société Les Ateliers de Danse et l'Ifedem ne pouvait être qualifiée ni de contrat d'hôtellerie en ce qu'il ne s'agissait nullement d'une convention d'occupation précaire, ni d'un contrat de location de stand en ce que les parties louées étaient déterminées, si bien que les obligations réciproques des sociétés caractérisaient l'existence d'un contrat de bail ; que, pour affirmer le contraire, la cour d'appel a retenu que " toute convention impliquant la mise à disposition de locaux comporte un minimum d'obligations pour chacune des parties, obligations qui sont communes à toutes les conventions de ce type, sans constituer nécessairement un contrat de bail ou de sous-location, qu'il en est ainsi du contrat passé entre l'hôtelier et son client, des contrats passés dans les salons et expositions avec les demandeurs, et que le seul fait que le bail autorise la sous-location n'implique pas que les conventions de mise à disposition conclues par la locataire soient des sous-locations " ; qu'en se déterminant par des motifs d'ordre général sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si en l'espèce, la convention conclue pouvait être qualifiée de contrat d'hôtellerie ou de location de stand, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
6° que les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties et d'examiner les documents produits au soutien de leur moyen ; qu'en l'espèce, la société Rophipama soutenait que la société Les Ateliers de Danse avait elle-même reconnu que le contrat de mise à disposition litigieux constituait une sous-location, puisque c'était à sa demande expresse que dans l'acte de renouvellement du bail, elle avait été dispensée d'appeler le bailleur à concourir à l'acte de sous-location ; qu'à cet égard, elle produisait en cause d'appel une attestation du notaire établissant qu'en effet, d'après les dires de la société Les Ateliers de Danse, " son activité consistait également en la sous-location de studio de danse pour la journée et c'est dans le cadre de cette activité que la sous-location sans accord préalable du bailleur avait été autorisée " ; que la cour d'appel s'est pourtant abstenue de répondre au moyen invoqué par les parties pris de l'aveu de la société Les Ateliers de Danse ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a manifestement violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
7° qu'en tout état de cause, à supposer la convention précaire ou sui generis établie, les juges doivent rechercher si le contrat litigieux n'a pas pour motif de détourner la législation sur les baux commerciaux ; qu'en l'espèce, la société Rophipama soutenait précisément que la société Les Ateliers de Danse avait baptisé leur contrat de bail conclu avec l'Ifedem de contrats de mise à disposition, afin leurs détourner l'application de l'article 21, alinéa 3, du décret du 30 septembre 1953 ; que si la cour d'appel a retenu qu'il s'agissait d'un contrat de mise à disposition, elle n'a en revanche relevé aucun motif légitime à son instauration ; qu'en s'abstenant de rechercher si ladite convention n'avait pas pour objet d'éluder les dispositions contraignantes de la législation relative au bail commercial en matière de sous-location, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 21 du décret du 30 septembre 1953 (nouvellement article L. 145-31 du Code de commerce) ;
Mais attendu qu'ayant retenu que les limitations à la jouissance des lieux dans le temps, les nombreuses prestations relatives à l'équipement et à l'entretien des locaux assurées par la société Les Ateliers de Danse, ainsi que le contrôle de l'accueil et de la sécurité conservés par cette dernière démontraient que le contrat passé avec l'Ifedem ne pouvait se réduire à une sous-location, la cour d'appel a, sans dénaturation et sans avoir à répondre à des conclusions, ni à procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Par ces motifs :
REJETTE le pourvoi.