Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la société Comptoir icaunais de ventes et de représentations industrielles et agricoles (société CIRIA) était titulaire d'un compte courant ouvert dans les livres de la société Nancéienne de crédit industriel et Varin Bernier, devenue la société Nancéienne Varin Bernier (la banque), qui lui consentait un découvert ; que la banque s'était engagée à renvoyer à la société CIRIA tous les effets, d'un montant supérieur à une somme déterminée, dont la banque aurait été amenée à différer l'escompte ; que cependant, la banque n'a pas rempli cet engagement ; qu'elle a rejeté, au motif qu'ils étaient dépourvus de provision, deux chèques émis par la société CIRIA ; qu'à la suite de ce rejet, le président de la société CIRIA, M. X..., a déclaré la cessation des paiements de cette société, qui a été mise en règlement judiciaire ; que la société CIRIA, assistée de son syndic, et M. X... ont assigné la banque en réparation du préjudice à eux causé par la rupture brutale de la convention de crédit ; que, de leur côté, certains créanciers de la société CIRIA ont assigné la banque en réparation des préjudices qu'ils prétendaient avoir subis ; que le syndic est intervenu volontairement à cette dernière instance, en qualité de représentant de la masse des créanciers, pour demander que la banque soit condamnée à payer l'intégralité du passif vérifié ; que les créanciers n'ont maintenu leurs demandes qu'en tant que celles-ci visaient à obtenir réparation d'un préjudice distinct de celui supporté par la masse ; que la cour d'appel a joint ces deux instances ;
Attendu que, pour accueillir la demande de la société CIRIA, celle de M. X... et celle des créanciers, la cour d'appel relève qu'en ne renvoyant pas à la société CIRIA, comme elle s'y était engagée, les effets dépassant un certain montant, que la banque n'avait pas pris à l'escompte, celle-ci avait laissé sa cliente croire à l'existence d'un solde débiteur de son compte s'établissant à une somme inférieure à celle relevée le jour de la présentation des chèques, que, si le montant des effets remis avait été, comme il aurait dû l'être, inscrit au crédit du compte, le paiement des chèques litigieux aurait porté le solde débiteur à une somme qui aurait dépassé l'autorisation initiale de découvert mais dans une mesure moindre que celle constatée lors des trois semaines précédentes ; quelle a retenu en outre que le paiement des chèques n'aurait pas constitué un accroissement du crédit ouvert mais le maintien de celui-ci et qu'en rejetant les chèques sans aucun préavis, la banque avait mis fin de manière fautive au concours qu'elle accordait à la société CIRIA ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs alors que, pour évaluer le montant du découvert accordé en fait sur lequel la société CIRIA était en droit de compter et en retracer l'évolution pendant la période ayant précédé le rejet des chèques, elle n'avait pas pris en considération le montant des effets dont la banque n'avait pas opéré l'escompte, la cour d'appel, qui a comparé des situations qu'elle a appréciées selon des critères différents, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du premier moyen ni sur le second moyen du pourvoi principal non plus que sur le moyen unique du pourvoi incident formé par le syndic du règlement judiciaire de la société CIRIA :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 novembre 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims