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01/10/2012 | FRANCE | N°343204

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 01 octobre 2012, 343204


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 septembre et 22 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le Syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise, dont le siège est 10 place Léon Blum, à Paris (75011), représenté par son président ; le syndicat demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2010-780 du 8 juillet 2010 adaptant le livre II du code rural et de la pêche maritime à la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marc

hé intérieur ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euro...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 septembre et 22 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le Syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise, dont le siège est 10 place Léon Blum, à Paris (75011), représenté par son président ; le syndicat demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2010-780 du 8 juillet 2010 adaptant le livre II du code rural et de la pêche maritime à la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 septembre 2012, présentée par l'Association de défense des intérêts des vétérinaires dans la transposition de la directive services ;

Vu la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Louis Dutheillet de Lamothe, Auditeur,

- les observations de Me Spinosi, avocat du Syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Spinosi, avocat du Syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise ;

1. Considérant que la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur a pour objet de faciliter l'accès aux activités de service et leur exercice dans le marché intérieur, notamment par la simplification administrative et la suppression d'obstacles injustifiés à la liberté d'établissement et à la libre prestation de services au sein de l'espace communautaire ; qu'aux termes du 1 de l'article 5 de cette directive : " Les Etats membres examinent les procédures et formalités applicables à l'accès à une activité de service et à son exercice. Lorsque les procédures et formalités examinées en vertu du présent paragraphe ne sont pas suffisamment simples, les Etats membres les simplifient. " ; qu'aux termes du 1 de l'article 9 de la même directive : " Les Etats membres ne peuvent subordonner l'accès à une activité de service et son exercice à un régime d'autorisation que si les conditions suivantes sont réunies : / a) le régime d'autorisation n'est pas discriminatoire à l'égard du prestataire visé ; / b) la nécessité d'un régime d'autorisation est justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général ; / c) l'objectif poursuivi ne peut pas être réalisé par une mesure moins contraignante, notamment parce qu'un contrôle a posteriori interviendrait trop tardivement pour avoir une efficacité réelle.(...) " ; qu'aux termes du 1 de l'article 16 de cette directive : " Les Etats membres respectent le droit des prestataires de fournir des services dans un Etat membre autre que celui dans lequel ils sont établis. L'Etat membre dans lequel le service est fourni garantit le libre accès à l'activité de service ainsi que son libre exercice sur son territoire. Les Etats membres ne peuvent pas subordonner l'accès à une activité de service ou son exercice sur leur territoire à des exigences qui ne satisfont pas aux principes suivants : / a) la non-discrimination : l'exigence ne peut être directement ou indirectement discriminatoire en raison de la nationalité ou, dans le cas de personnes morales, en raison de l'Etat membre dans lequel elles sont établies ; / b) la nécessité : l'exigence doit être justifiée par des raisons d'ordre public, de sécurité publique, de santé publique ou de protection de l'environnement ; / c) la proportionnalité : l'exigence doit être propre à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif. (...) " ;

2. Considérant que le décret attaqué du 8 juillet 2010 modifie le livre II du code rural et de la pêche maritime afin d'assurer la transposition de la directive en ce qui concerne l'exercice de la profession de vétérinaire ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :

3. Considérant que le Syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise a pour objet de défendre, en particulier, les intérêts matériels et professionnels de ses membres, lesquels, en plus de leurs activités salariées, exercent habituellement l'art vétérinaire à titre libéral ; que, par suite, le syndicat requérant défend un intérêt lui donnant qualité pour agir contre le décret attaqué qui modifie les conditions d'exercice de l'art vétérinaire à titre libéral, notamment en affectant la possibilité d'exercer à temps partiel ;

Sur l'intervention de l'Association de défense des intérêts des vétérinaires dans la transposition de la directive services :

4. Considérant que cette association a intérêt à l'annulation du décret attaqué ; qu'ainsi, son intervention est recevable ;

Sur le moyen tiré du défaut de la consultation de l'Autorité de la concurrence :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 462-2 du code de commerce, l'Autorité de la concurrence " est obligatoirement consultée par le Gouvernement sur tout projet de texte réglementaire instituant un régime nouveau ayant directement pour effet : / 1° De soumettre l'exercice d'une profession ou l'accès à un marché à des restrictions quantitatives ; (...) " ;

6. Considérant que, contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, il ressort des termes du décret attaqué qu'il n'a pas pour effet d'instaurer un régime nouveau soumettant la profession de vétérinaire à des restrictions quantitatives ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la consultation de l'Autorité de la concurrence était requise en application de l'article L. 462-2 du code de commerce doit être écarté ;

Sur la nouvelle définition du domicile professionnel d'exercice :

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 242-53 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue du 5° de l'article 2 du décret attaqué : " Le domicile professionnel d'exercice est le lieu où se déroule habituellement l'exercice de la médecine et de la chirurgie des animaux ainsi que l'acquisition, la détention et la délivrance des médicaments vétérinaires et où peuvent être reçus les clients. Il peut être confondu avec le domicile professionnel administratif. / (...) Un vétérinaire praticien d'exercice libéral ou un groupe de vétérinaires associés ayant pour but l'exercice professionnel en commun peuvent avoir plusieurs domiciles professionnels d'exercice. Chaque domicile professionnel d'exercice doit comporter un vétérinaire ayant la fonction de vétérinaire administrateur de domicile professionnel d'exercice. (...) " ; qu'en vertu de l'article R. 242-57 du même code, le vétérinaire à domicile est " la personne physique ou morale habilitée à exercer la médecine et la chirurgie des animaux qui, n'ayant pas de domicile professionnel d'exercice, exerce exclusivement sa profession au domicile du client. Le vétérinaire à domicile ne peut exercer cette activité dans le cadre d'une société possédant par ailleurs un ou plusieurs domiciles professionnels d'exercice " ;

8. Considérant que, si le syndicat requérant soutient que la nouvelle rédaction de l'article R. 242-53 du code rural et de la pêche maritime conduit à qualifier de domicile professionnel d'exercice, entraînant l'obligation de respecter la règlementation afférente, certains locaux utilisés par les vétérinaires à domicile, notamment pour entreposer leur matériel, dès lors qu'il leur serait possible de recevoir des clients dans ces locaux, il ressort de la combinaison des dispositions du code rural et de la pêche maritime citées ci-dessus que les vétérinaires à domicile, qui exercent leur art exclusivement au domicile de leurs clients, n'ont pas de domicile professionnel d'exercice au sens de l'article R. 242-53 de ce code ; que, par ailleurs, l'application des dispositions de cet article, qui ne méconnaissent pas l'objectif constitutionnel de clarté et d'intelligibilité de la norme et n'instaurent pas, contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, un nouveau régime d'autorisation, ne saurait conduire à qualifier de domicile professionnel d'exercice des locaux destinés seulement à entreposer le matériel de vétérinaires à domicile ; que, par suite, ces dispositions ne méconnaissent pas le principe de sécurité juridique et sont compatibles avec les objectifs de la directive 2006/123/CE, notamment ceux posés par les dispositions de ses articles 5 et 9 ;

Sur la durée d'ouverture minimale hebdomadaire des domiciles professionnels d'exercice :

9. Considérant qu'aux termes du IV de l'article R. 242-48 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue du 4° de l'article 2 du décret attaqué, le vétérinaire " assure lui-même ou par l'intermédiaire d'un de ses confrères la continuité des soins aux animaux qui lui sont confiés. Chaque domicile professionnel d'exercice déclaré auprès de l'ordre des vétérinaires est ouvert au moins pendant le temps de travail hebdomadaire prévu par la convention collective des vétérinaires salariés. Ce temps de travail tient compte du temps de travail effectué lors des visites à domicile du vétérinaire et peut être réparti entre plusieurs vétérinaires exerçant dans le domicile professionnel d'exercice. La continuité des soins peut également être assurée dans le cadre d'une convention établie entre vétérinaires libéraux et déposée auprès du conseil régional de l'ordre. " ; qu'aux termes de l'article R. 262-64, dans sa rédaction issue de 7° du même article 2 : " Un vétérinaire exerçant seul ou en société peut s'adjoindre les services de vétérinaires salariés ou de collaborateurs libéraux. " ;

10. Considérant que le décret attaqué a autorisé les vétérinaires et les sociétés qu'ils constituent pour exercer leur profession en commun à disposer de plusieurs domiciles professionnels d'exercice, alors qu'auparavant un vétérinaire ne pouvait avoir qu'un seul domicile professionnel et un groupe de vétérinaires associés ne pouvait en avoir plus de trois, mais a prévu en contrepartie une durée minimale d'ouverture de chacun des domiciles professionnels d'exercice, qui peut être assurée par le concours de plusieurs vétérinaires ;

11. Considérant qu'il résulte du 1 de l'article 16 de la directive du 12 décembre 2006 que, si l'exercice libéral de l'activité de vétérinaire peut être subordonné à des exigences tenant à des raisons de santé publique, c'est à la condition qu'elles soient propres à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et qu'elles n'aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif ;

12. Considérant que l'obligation d'ouvrir tout domicile professionnel d'exercice pendant au moins trente-cinq heures par semaine, qui résulte de la combinaison des textes rappelés ci-dessus, interdit, quelles que soient les circonstances locales, à un vétérinaire désirant exercer seul d'ouvrir son domicile professionnel d'exercice moins de trente-cinq heures par semaine et contraint un vétérinaire voulant ouvrir plusieurs domiciles professionnels à s'adjoindre le concours d'un ou plusieurs confrères ;

13. Considérant que, si le ministre soutient que cette atteinte à la liberté de prestation des services vétérinaires se justifie par la nécessité d'assurer la continuité des soins en interdisant à un vétérinaire d'ouvrir plusieurs domiciles professionnels d'exercice sans assurer un temps d'ouverture de chacun de ces domiciles suffisant pour permettre une prise en charge régulière des animaux qui y sont soignés, il ressort des pièces du dossier que dans certains cas, l'intérêt des animaux et de leurs propriétaires, la santé publique et la continuité des soins, qui implique un accès aux soins suffisamment continu dans le temps mais aussi dans l'espace, peuvent justifier l'ouverture d'un domicile professionnel vétérinaire pour une durée inférieure à trente-cinq heures par semaine ; qu'il en va notamment ainsi dans des territoires souffrant d'une pénurie de l'offre de soins vétérinaires, où l'ouverture d'un domicile professionnel trente-cinq heures par semaine ne serait pas économiquement viable ; qu'en outre, cette exigence excède ce qui est nécessaire pour garantir la continuité des soins dans des territoires où l'offre de services vétérinaires est déjà abondante ;

14. Considérant que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens tendant à l'annulation de ces dispositions, le syndicat requérant est fondé à soutenir que les dispositions du IV de l'article R. 242-48 du code rural et de la pêche maritime, résultant du a) du 4° de l'article 2 du décret attaqué, sont incompatibles avec les objectifs de la directive 2006/123/CE et, en particulier, avec les dispositions de son article 16, en tant qu'elles ont pour effet de fixer à trente-cinq heures hebdomadaires la durée minimale d'ouverture des domiciles professionnels d'exercice ;

Sur l'institution de la fonction de vétérinaire administrateur de domicile professionnel d'exercice :

15. Considérant qu'aux termes de l'article R. 242-53 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue du 5° de l'article 2 du décret attaqué : " (...) Un vétérinaire praticien d'exercice libéral ou un groupe de vétérinaires associés ayant pour but l'exercice professionnel en commun peuvent avoir plusieurs domiciles professionnels d'exercice. Chaque domicile professionnel d'exercice doit comporter un vétérinaire ayant la fonction de vétérinaire administrateur de domicile professionnel d'exercice (...) " ; qu'en vertu de l'article R. 242-55 du même code, dans sa rédaction issue du 6° du même article 2, chaque domicile professionnel d'exercice doit comporter un " vétérinaire administrateur ", qui exerce de manière principale au sein de ce domicile professionnel, ne peut exercer cette fonction dans deux domiciles professionnels et a pour mission de coordonner la mise en oeuvre des dispositions prévues par ce code, notamment celles relatives à la déontologie des vétérinaires ;

16. Considérant que ces dispositions interdisent à un vétérinaire désirant exercer seul d'assurer lui-même les missions de vétérinaire administrateur tant dans son domicile professionnel principal que dans un domicile professionnel secondaire, quelles que soient les circonstances locales ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que cette atteinte à la liberté de prestation des services vétérinaires n'est pas, dans certaines circonstances, justifiée par l'objectif de garantir la continuité des soins ou peut excéder ce qui est nécessaire à cette fin ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens dirigés contre ces dispositions, le requérant est fondé à soutenir que les dispositions de l'article R. 242-55 du code rural et de la pêche maritime et celles de l'article R. 242-53 du même code qui sont relatives à la fonction de vétérinaire administrateur, issues du décret attaqué, sont incompatibles avec les objectifs la directive 2006/123/CE, en particulier avec les dispositions de son article 16, et à en demander en conséquence l'annulation ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser au Syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise, au titre de ces dispositions ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'intervention de l'Association de défense des intérêts des vétérinaires dans la transposition de la directive service est admise.

Article 2 : Sont annulés :

- au IV de l'article R. 242-48 du code rural et de la pêche maritime, résultant du a) du 4° de l'article 2 du décret n° 2010-780 du 8 juillet 2010, la phrase " Chaque domicile professionnel d'exercice déclaré auprès de l'ordre des vétérinaires est ouvert au moins pendant le temps de travail hebdomadaire prévu par la convention collective des vétérinaires salariés " ;

- à l'article R. 242-53 du même code, résultant du c) du 5° de l'article 2 du même décret, la phrase " Chaque domicile professionnel d'exercice doit comporter un vétérinaire ayant la fonction de vétérinaire administrateur de domicile professionnel d'exercice. " ;

- l'article R. 242-55 de ce code, issu du 6° de l'article 2 du même décret.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au Syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise, à l'Association de défense des intérêts des vétérinaires dans la transposition de la directive services, au Premier ministre, au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et au Conseil supérieur de l'ordre des vétérinaires.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 343204
Date de la décision : 01/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - RÈGLES APPLICABLES - LIBERTÉ DE CIRCULATION - LIBRE PRESTATION DE SERVICES - INCOMPATIBILITÉ DE DISPOSITIONS DU DÉCRET DU 8 JUILLET 2010 CONCERNANT L'EXERCICE DE LA PROFESSION DE VÉTÉRINAIRE AVEC LA DIRECTIVE SERVICES DU 12 DÉCEMBRE 2006 - 1) OBLIGATION D'OUVRIR TOUT DOMICILE PROFESSIONNEL PENDANT 35 HEURES AU MOINS PAR SEMAINE - 2) INTERDICTION FAITE À UN VÉTÉRINAIRE DÉSIRANT EXERCER SEUL D'ASSURER LUI-MÊME LES MISSIONS DE VÉTÉRINAIRE ADMINISTRATEUR TANT DANS SON DOMICILE PROFESSIONNEL PRINCIPAL QUE DANS UN DOMICILE PROFESSIONNEL SECONDAIRE - QUELLES QUE SOIENT LES CIRCONSTANCES LOCALES.

15-05-01-04 Décret n° 2010-780 du 8 juillet 2010 adaptant le livre II du code rural et de la pêche maritime à la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur ayant autorisé les vétérinaires et les sociétés qu'ils constituent pour exercer leur profession en commun à disposer de plusieurs domiciles professionnels d'exercice, alors qu'auparavant un vétérinaire ne pouvait avoir qu'un seul domicile professionnel et un groupe de vétérinaires associés ne pouvait en avoir plus de trois, mais ayant prévu en contrepartie une durée minimale d'ouverture de chacun des domiciles professionnels d'exercice, qui peut être assurée par le concours de plusieurs vétérinaires.,,1) L'obligation d'ouvrir tout domicile professionnel d'exercice pendant au moins trente-cinq heures par semaine, qui résulte du décret, interdit, quelles que soient les circonstances locales, à un vétérinaire désirant exercer seul d'ouvrir son domicile professionnel d'exercice moins de trente-cinq heures par semaine et contraint un vétérinaire voulant ouvrir plusieurs domiciles professionnels à s'adjoindre le concours d'un ou plusieurs confrères. Si le ministre soutient que cette atteinte à la liberté de prestation des services vétérinaires se justifie par la nécessité d'assurer la continuité des soins en interdisant à un vétérinaire d'ouvrir plusieurs domiciles professionnels d'exercice sans assurer un temps d'ouverture de chacun de ces domiciles suffisant pour permettre une prise en charge régulière des animaux qui y sont soignés, il ressort des pièces du dossier que dans certains cas, l'intérêt des animaux et de leurs propriétaires, la santé publique et la continuité des soins, qui implique un accès aux soins suffisamment continu dans le temps mais aussi dans l'espace, peuvent justifier l'ouverture d'un domicile professionnel vétérinaire pour une durée inférieure à trente-cinq heures par semaine. Il en va notamment ainsi dans des territoires souffrant d'une pénurie de l'offre de soins vétérinaires, où l'ouverture d'un domicile professionnel trente-cinq heures par semaine ne serait pas économiquement viable. En outre, cette exigence excède ce qui est nécessaire pour garantir la continuité des soins dans des territoires où l'offre de services vétérinaires est déjà abondante. Annulation, par conséquent, des dispositions du IV de l'article R. 242-48 du code rural et de la pêche maritime, résultant du a du 4° de l'article 2 du décret attaqué, incompatibles avec les objectifs de la directive 2006/123/CE et, en particulier, avec les dispositions de son article 16, en tant qu'elles ont pour effet de fixer à trente-cinq heures hebdomadaires la durée minimale d'ouverture des domiciles professionnels d'exercice.,,2) Les dispositions du décret interdisent à un vétérinaire désirant exercer seul d'assurer lui-même les missions de vétérinaire administrateur tant dans son domicile professionnel principal que dans un domicile professionnel secondaire, quelles que soient les circonstances locales. Cette atteinte à la liberté de prestation des services vétérinaires n'est pas, dans certaines circonstances, justifiée par l'objectif de garantir la continuité des soins ou peut excéder ce qui est nécessaire à cette fin. Par suite, annulation des dispositions de l'article R. 242-55 du code rural et de la pêche maritime et de celles de l'article R. 242-53 du même code qui sont relatives à la fonction de vétérinaire administrateur, issues du décret attaqué, incompatibles avec les objectifs la directive 2006/123/CE, en particulier avec les dispositions de son article 16.

PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - CONDITIONS D'EXERCICE DES PROFESSIONS - VÉTÉRINAIRES - INCOMPATIBILITÉ DE DISPOSITIONS DU DÉCRET DU 8 JUILLET 2010 CONCERNANT L'EXERCICE DE LA PROFESSION DE VÉTÉRINAIRE AVEC LA DIRECTIVE SERVICES DU 12 DÉCEMBRE 2006 - 1) OBLIGATION D'OUVRIR TOUT DOMICILE PROFESSIONNEL PENDANT 35 HEURES AU MOINS PAR SEMAINE - 2) INTERDICTION FAITE À UN VÉTÉRINAIRE DÉSIRANT EXERCER SEUL D'ASSURER LUI-MÊME LES MISSIONS DE VÉTÉRINAIRE ADMINISTRATEUR TANT DANS SON DOMICILE PROFESSIONNEL PRINCIPAL QUE DANS UN DOMICILE PROFESSIONNEL SECONDAIRE - QUELLES QUE SOIENT LES CIRCONSTANCES LOCALES.

55-03-042 Décret n° 2010-780 du 8 juillet 2010 adaptant le livre II du code rural et de la pêche maritime à la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur ayant autorisé les vétérinaires et les sociétés qu'ils constituent pour exercer leur profession en commun à disposer de plusieurs domiciles professionnels d'exercice, alors qu'auparavant un vétérinaire ne pouvait avoir qu'un seul domicile professionnel et un groupe de vétérinaires associés ne pouvait en avoir plus de trois, mais ayant prévu en contrepartie une durée minimale d'ouverture de chacun des domiciles professionnels d'exercice, qui peut être assurée par le concours de plusieurs vétérinaires.,,1) L'obligation d'ouvrir tout domicile professionnel d'exercice pendant au moins trente-cinq heures par semaine, qui résulte du décret, interdit, quelles que soient les circonstances locales, à un vétérinaire désirant exercer seul d'ouvrir son domicile professionnel d'exercice moins de trente-cinq heures par semaine et contraint un vétérinaire voulant ouvrir plusieurs domiciles professionnels à s'adjoindre le concours d'un ou plusieurs confrères. Si le ministre soutient que cette atteinte à la liberté de prestation des services vétérinaires se justifie par la nécessité d'assurer la continuité des soins en interdisant à un vétérinaire d'ouvrir plusieurs domiciles professionnels d'exercice sans assurer un temps d'ouverture de chacun de ces domiciles suffisant pour permettre une prise en charge régulière des animaux qui y sont soignés, il ressort des pièces du dossier que dans certains cas, l'intérêt des animaux et de leurs propriétaires, la santé publique et la continuité des soins, qui implique un accès aux soins suffisamment continu dans le temps mais aussi dans l'espace, peuvent justifier l'ouverture d'un domicile professionnel vétérinaire pour une durée inférieure à trente-cinq heures par semaine. Il en va notamment ainsi dans des territoires souffrant d'une pénurie de l'offre de soins vétérinaires, où l'ouverture d'un domicile professionnel trente-cinq heures par semaine ne serait pas économiquement viable. En outre, cette exigence excède ce qui est nécessaire pour garantir la continuité des soins dans des territoires où l'offre de services vétérinaires est déjà abondante. Annulation, par conséquent, des dispositions du IV de l'article R. 242-48 du code rural et de la pêche maritime, résultant du a du 4° de l'article 2 du décret attaqué, incompatibles avec les objectifs de la directive 2006/123/CE et, en particulier, avec les dispositions de son article 16, en tant qu'elles ont pour effet de fixer à trente-cinq heures hebdomadaires la durée minimale d'ouverture des domiciles professionnels d'exercice.,,2) Les dispositions du décret interdisent à un vétérinaire désirant exercer seul d'assurer lui-même les missions de vétérinaire administrateur tant dans son domicile professionnel principal que dans un domicile professionnel secondaire, quelles que soient les circonstances locales. Cette atteinte à la liberté de prestation des services vétérinaires n'est pas, dans certaines circonstances, justifiée par l'objectif de garantir la continuité des soins ou peut excéder ce qui est nécessaire à cette fin. Par suite, annulation des dispositions de l'article R. 242-55 du code rural et de la pêche maritime et de celles de l'article R. 242-53 du même code qui sont relatives à la fonction de vétérinaire administrateur, issues du décret attaqué, incompatibles avec les objectifs la directive 2006/123/CE, en particulier avec les dispositions de son article 16.


Publications
Proposition de citation : CE, 01 oct. 2012, n° 343204
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Rapporteur public ?: Mme Gaëlle Dumortier
Avocat(s) : SPINOSI ; SCP BLANC, ROUSSEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:343204.20121001
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