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16/06/2016 | FRANCE | N°14BX00898

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 16 juin 2016, 14BX00898


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SNC Denizart a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mars 2007 et 2008 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er avril 2006 au 31 mars 2008, ainsi que des pénalités et amendes correspondantes.

Par un jugement n° 1003306 du 13 février 2014, le tribunal administratif de Toulous

e a rejeté la demande de la société.

Procédure devant la cour :

Par une requête enr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SNC Denizart a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mars 2007 et 2008 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er avril 2006 au 31 mars 2008, ainsi que des pénalités et amendes correspondantes.

Par un jugement n° 1003306 du 13 février 2014, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de la société.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 mars 2014, la SNC Denizart, représentée par la Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mars 2007 et 2008 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er avril 2006 au 31 mars 2008, ainsi que des pénalités y afférentes ;

3) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Mauny,

- et les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SNC Denizart, qui exploite une activité de bar-tabac et brasserie, a fait l'objet en 2009 d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos les 31 mars 2007 et 2008, en matière d'impôt sur les sociétés, et sur la période du 1er avril 2006 au 31 mars 2008, en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Elle a demandé au tribunal administratif de Toulouse de la décharger des impositions procédant de cette vérification de comptabilité. Sa demande a été rejetée par jugement du 13 février 2014. La société fait appel de ce jugement.

Sur la régularité de la procédure :

2. Aux termes de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contribuable peut satisfaire à l'obligation de représentation des documents comptables mentionnés au premier alinéa de l'article 54 du code général des impôts en remettant, sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget, une copie des fichiers des écritures comptables définies aux articles 420-1 et suivants du plan comptable général. L'administration peut effectuer des tris, classements ainsi que tous calculs aux fins de s'assurer de la concordance entre la copie des enregistrements comptables et les déclarations fiscales du contribuable. (...). / II.-En présence d'une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés et lorsqu'ils envisagent des traitements informatiques, les agents de l'administration fiscale indiquent par écrit au contribuable la nature des investigations souhaitées. Le contribuable formalise par écrit son choix parmi l'une des options suivantes : / a) Les agents de l'administration peuvent effectuer la vérification sur le matériel utilisé par le contribuable ; / b) Celui-ci peut effectuer lui-même tout ou partie des traitements informatiques nécessaires à la vérification. Dans ce cas, l'administration précise par écrit au contribuable, ou à un mandataire désigné à cet effet, les travaux à réaliser ainsi que le délai accordé pour les effectuer. Les résultats des traitements sont alors remis sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget ; / c) Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise. Il met alors à la disposition de l'administration les copies des documents, données et traitements soumis à contrôle. Ces copies sont produites sur tous supports informatiques, répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget. L'administration restitue au contribuable avant la mise en recouvrement les copies des fichiers et n'en conserve pas de double. L'administration communique au contribuable, sous forme dématérialisée ou non au choix du contribuable, le résultat des traitements informatiques qui donnent lieu à des rehaussements au plus tard lors de l'envoi de la proposition de rectification mentionnée à l'article L. 57. / Le contribuable est informé des noms et adresses administratives des agents par qui ou sous le contrôle desquels les opérations sont réalisées.". Aux termes de l'article L. 57 du même livre, dans sa rédaction applicable au litige: "L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) / En cas d'application des dispositions de l'article L. 47 A, l'administration précise au contribuable la nature des traitements effectués. ".

3. En premier lieu, la proposition de rectification du 10 juillet 2009 précise, dans un III intitulé " mise en oeuvre de traitements sur les copies de fichiers informatiques remis à l'administration ", que le vérificateur qui a signé la proposition de rectification a indiqué à la société " vouloir mettre en oeuvre les traitements énoncés par lettre du 05/03/2009. ". La proposition de rectification comporte en outre le nom et l'adresse administrative de cet inspecteur, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'il n'aurait pas réalisé ou au moins contrôlé les opérations de traitement en litige. La SNC Denizart ne peut pas, en outre, se prévaloir utilement des termes d'une instruction administrative du 6 mars 2008, référencée 13 L-2-08, pour contester la régularité de la procédure d'imposition.

4. En second lieu, la proposition de rectification susmentionnée précise, aux pages 3 et suivantes, la nature des traitements qui ont été effectués par le vérificateur, s'agissant en particulier des achats et des ventes des produits les plus caractéristiques, quand bien-même elle ne comporte pas les codes informatiques qui ont été utilisés à cette occasion.

5. Il suit de là que les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 47 A et L. 57 du livre des procédures fiscales doivent être écartés.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires de la société :

6. Il résulte de l'instruction que l'administration a reconstitué la comptabilité de la SNC Denizart au motif que, si sa comptabilité n'était pas irrégulière en la forme, le contrôle effectué révélait cependant son caractère non probant. La société a été mise à même de présenter des observations après réception de la proposition de rectification, auxquelles il a été répondu par courrier du 20 septembre 2009. Ainsi, et alors qu'il résulte de l'instruction que la société ne se trouvait pas en situation de taxation d'office, il appartient à l'administration d'établir le bien fondé des impositions en litige en tant qu'elles procèdent de la reconstitution du chiffre d'affaires de la SNC Denizart.

7. En premier lieu, si la société soutient que sa comptabilité n'était entachée d'aucune irrégularité, et que le vérificateur ne l'a reconstituée qu'au terme de la réalisation d'une comptabilité matière discutable, il est constant cependant que même régulière en la forme, la comptabilité de la société pouvait être écartée au motif qu'elle était dépourvue de sincérité et par suite de valeur probante. Or, il résulte de l'instruction que le vérificateur a constaté, s'agissant de boissons caractéristiques des activités de bar et de brasserie de la société, et après vérification des achats auprès du principal fournisseur de la contribuable, que les quantités de produits achetés additionnées à celles figurant dans les stocks de début d'exercice 2007 et 2008 étaient supérieures aux quantités vendues additionnées aux quantités figurant dans les stocks de sortie, et ce pour des montants significatifs. Si la société, qui ne conteste pas ces écarts, soutient qu'ils correspondent notamment à des consommations offertes, insuffisamment prises en compte par le vérificateur, l'administration relève, sans être contredite, que le pourcentage des offerts retenus par le vérificateur, de plus de 20 % s'agissant des bières en fût, et ce pour chaque exercice, déjà particulièrement favorable au contribuable, a été fixé lors d'un entretien avec le représentant de la société. En outre, la société n'apporte pas d'élément suffisamment probant pour établir, ainsi qu'elle le soutient, que les cafés étaient systématiquement offerts aux clients habituels de la brasserie, ni qu'elle aurait offert, dans le cadre d'une opération promotionnelle, plus de 16 000 bières pour chaque exercice. Ainsi, au regard des éléments relevés par le vérificateur, l'administration doit être regardée comme établissant que la comptabilité de la SNC n'était pas probante, et elle était ainsi fondée à procéder à une reconstitution du chiffre d'affaires de la société réalisé au titre de la vente desdits produits caractéristiques, à savoir les cafés, les bières en fûts et en bouteilles, les principaux sodas et les eaux gazeuses.

8. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que le vérificateur a reconstitué une comptabilité s'agissant des boissons caractéristiques de l'activité de la SNC Denizart, précédemment énumérées. Il a déterminé à cette occasion que les quantités de produits achetés additionnées à celles figurant dans les stocks de début d'exercice 2007 et 2008 étaient supérieures aux quantités vendues additionnées aux quantités figurant dans les stocks de sortie. Il a déterminé ensuite, avec le gérant de la SNC, le taux de produits perdus ou offerts, et, considérant que le surplus correspondait à des omissions de recettes, a imposé ces dernières. D'une part, la méthode suivie par le vérificateur ne peut pas être regardée comme radicalement viciée du seul fait qu'il n'a rehaussé que le chiffre d'affaires procédant de la vente de ces boissons et n'a pas procédé à un contrôle et à une reconstitution de l'ensemble des ventes de la société. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 10 juillet 2009, que le vérificateur se serait mépris en prenant en compte des boissons vendues dans le cadre de l'activité de brasserie alors qu'il aurait entendu reconstituer le seul chiffre d'affaires du bar, dès lors que les catégories de boissons vérifiées distinguent les boissons vendues au bar et de celles vendues au titre de l'activité de brasserie. Il suit de là que la SNC Denizart n'est pas fondée à soutenir que la méthode suivie par l'administration serait radicalement viciée. De surcroît, l'administration fait valoir que les taux de pertes et d'offerts, particulièrement conséquents, qui ont admis par le vérificateur, ont été fixés lors d'un entretien avec le gérant de la société. La société, qui ne conteste pas cette circonstance, soutient que le taux d'offerts retenu est insuffisant, dès lors que plus de 16 000 bières étaient offertes par exercice, notamment dans le cadre d'une activité promotionnelle estivale, et que les cafés étaient systématiquement offerts. Elle n'apporte cependant que des attestations peu circonstanciées pour en justifier et ne contredit pas efficacement, ce faisant, l'administration, qui doit être regardée comme établissant que le montant des impositions mises à la charge de la société n'est pas exagéré.

En ce qui concerne la réintégration d'une charge :

9. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité . Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée.

10. La SNC Denizart soutient qu'elle a inscrit à bon droit, au titre de l'exercice clos le 31 mars 2008, une charge exceptionnelle d'un montant de 97 075 euros correspondant à une perte constatée dans ses stocks de tabac au cours de l'exercice clos en 2007, qui résulterait d'un vol commis entre le 1er avril 2006 et le 31 mars 2007. Toutefois, il est constant que la plainte qu'elle a déposée le 8 septembre 2009 est postérieure à l'engagement des opérations de vérification de comptabilité en litige, et la main courante qu'elle a déposée au commissariat de Cahors le 13 novembre 2007, dans laquelle elle fait état d'une simple incohérence relevée par son comptable dans ses stocks de tabac, sans pouvoir apporter d'explication ni faire état de soupçons, ne permet pas d'établir la réalité d'un vol constaté dans l'établissement. La société ne justifie donc pas le bien-fondé de cette inscription en charge, ni, par suite, que c'est à tort que l'administration a réintégré ce montant aux résultats imposables de l'exercice clos en 2008.

Sur les pénalités :

11. En premier lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a). 40 % en cas de manquement délibéré ; ".

12. La société n'est pas fondée à remettre en cause l'application de la pénalité prévue à l'article 1729 précité au motif que le montant des rectifications ne procède que de l'application d'une méthode de reconstitution erronée, dès lors qu'il résulte de ce qui précède que ladite méthode ne peut être regardée comme radicalement viciée ou aboutissant à des résultats exagérés.

13. En second lieu, aux termes de l'article 1759 du code général des impôts : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées. ".

14. Il résulte de l'instruction, et n'est pas contestée, que le gérant de la SNC Denizart n'a pas répondu à la demande de désignation du bénéficiaire des sommes regardées comme distribuées au terme de la vérification de comptabilité. Il suit de là que l'administration était fondée, de ce seul fait, à appliquer la pénalité prévue à l'article 1729 précité.

15. Il résulte de tout ce qui précède que la SNC Denizart n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées, par voie de conséquence.

DECIDE

Article 1er : La requête de la SNC Denizart est rejetée.

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N° 14BX00898


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX00898
Date de la décision : 16/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Enfants à charge et quotient familial.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : SELARL M. H. ROFFI JURIS CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-06-16;14bx00898 ?
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