Vu l'ordonnance n° 11BX03068 du 30 novembre 2011 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête de Mme C...A...tendant à l'annulation du jugement n° 0500087 et 0500394 du tribunal administratif de Cayenne du 22 septembre 2001 ;
Vu le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 16 décembre 2011, 6 février, 15 mars et 24 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme C... A...; Mme A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 0500087-0500394 du 22 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Cayenne, statuant sur renvoi après cassation, a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 17 mai 2004 par lequel le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Guyane a inscrit au titre de la promotion interne Mme D...B...sur la liste d'aptitude pour l'accès au grade d'attaché territorial pour l'année 2004 et, d'autre part, des arrêtés des 8 octobre 2004 et 25 octobre 2005 du président du conseil général de la Guyane portant, le premier, nomination de cette dernière dans le cadre d'emplois des attachés territoriaux au grade d'attaché stagiaire et, le second, intégration et titularisation de l'intéressée dans le grade d'attaché territorial ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande de première instance et d'enjoindre au président du conseil général de la Guyane de réexaminer ses droits dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision et d'assortir cette injonction d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai ;
3°) de mettre à la charge du département de la Guyane la somme de 3 500 euros à verser à son avocat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 85-643 du 26 juin 1985 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Guillaume Odinet, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de MmeA..., à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat du département de la Guyane et à la SCP Roger, Sevaux, Mathonnet, avocat du centre de gestion de la fonction publique territoriale de Guyane ;
1. Considérant que Mme C...A..., qui exerçait les fonctions de rédactrice en chef au sein du conseil général du département de la Guyane, a sollicité sa promotion au grade d'attaché territorial ; que par arrêté du 17 mai 2004, le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de Guyane a inscrit Mme E... B...sur la liste d'aptitude pour l'accès au grade d'attaché territorial pour l'année 2004 ; que par arrêtés des 8 octobre 2004 et 25 octobre 2005, le président du conseil général de la Guyane a nommé Mme B... au grade d'attaché territorial stagiaire, puis l'a titularisée ; que Mme A...a saisi le tribunal administratif de Cayenne d'une demande tendant à l'annulation de ces trois arrêtés ; que Mme A...se pourvoit en cassation contre le jugement du 22 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif, statuant sur renvoi de l'affaire après l'annulation d'un premier jugement du 27 mars 2008 par décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux du 16 mai 2011, a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu de statuer sur ce pourvoi, qui ne saurait être regardé comme ayant perdu son objet du seul fait que Mme A...a été rétroactivement nommée en qualité d'attaché territorial à compter du 1er avril 2002 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 15 de la loi du 26 janvier 1984 : " Sont obligatoirement affiliés aux centres de gestion les communes et les établissements publics qui emploient moins de 350 fonctionnaires titulaires et stagiaires à temps complet. (...) / Peuvent, en outre, s'affilier volontairement aux centres les communes et leurs établissements publics qui n'y sont pas affiliés à titre obligatoire, (...) les départements et les régions ainsi que leurs établissements publics. (...) / Il peut être fait opposition à cette demande par les deux tiers des collectivités et établissements déjà affiliés représentant au moins les trois quarts des fonctionnaires concernés ou par les trois quarts de ces collectivités et établissements représentant au moins les deux tiers des fonctionnaires concernés. Les mêmes conditions de majorité sont requises pour le retrait des collectivités ou établissements concernés. " ; qu'aux termes de l'article 30 du décret du 26 juin 1985 : " Lorsqu'une collectivité ou un établissement public administratif sollicite son affiliation au centre de gestion à titre volontaire, le président du centre accuse réception de la demande et en informe immédiatement l'ensemble des collectivités et établissements publics affiliés en les invitant à faire valoir auprès de lui, dans un délai de deux mois, leurs droits à opposition dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article 15 de la loi du 26 janvier 1984 précitée. / A l'expiration de ce délai, le président du centre constate que les conditions de majorité prévues par les dispositions législatives précitées sont remplies ou non. La décision par laquelle il est statué sur la demande d'affiliation est notifiée par le président à la collectivité ou à l'établissement public administratif demandeur. Le président en informe les membres du conseil d'administration. " ; que, selon les dispositions de l'article 7 du même décret, sous réserve des dispositions de l'alinéa 2 de l'article 6, l'affiliation volontaire d'une collectivité ou d'un établissement public administratif prend effet le 1er janvier de l'année qui suit la date de notification de la décision prévue à l'article 30 précité ;
3. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le président du centre de gestion accuse réception de la demande d'affiliation formée par une collectivité ou un établissement public à titre volontaire, informe immédiatement l'ensemble des collectivités et établissements publics affiliés en les invitant à faire valoir auprès de lui, dans un délai de deux mois, leurs droits à opposition, et à l'expiration de ce délai, constate que les conditions de majorité prévues par la loi sont remplies avant de notifier la décision au président de la collectivité ou de l'établissement public demandeur, l'affiliation de la collectivité ou de l'établissement prenant alors effet le 1er janvier de l'année qui suit la date de la notification de cette décision ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif que la demande d'affiliation volontaire du département de la Guyane au centre de gestion de la fonction publique territoriale de Guyane a été exprimée par une délibération du conseil général du 29 décembre 2003 ; que, compte tenu du délai de deux mois dont disposaient les autres collectivités et établissements pour faire valoir leurs droits à opposition, la décision constatant le défaut d'opposition à cette demande ne pouvait intervenir qu'au cours de l'année 2004, de sorte que l'affiliation du département de la Guyane ne pouvait, en tout état de cause, prendre effet avant le 1er janvier 2005 ; que, par suite, le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de Guyane n'était pas compétent pour inscrire MmeB..., agent du département de la Guyane, sur la liste d'aptitude pour l'accès au grade d'attaché territorial pour l'année 2004 ; que, faute pour le tribunal d'avoir relevé d'office ce vice de l'arrêté du 17 mai 2004 contesté devant lui, son jugement doit être annulé ;
5. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire " ; qu'il y a lieu, par suite, de régler l'affaire au fond ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 17 mai 2004 du président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Guyane :
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 17 mai 2004 du président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Guyane portant inscription de Mme B...sur la liste d'aptitude pour l'accès au grade d'attaché territorial a été publié par voie d'affichage dans les locaux du centre de gestion de la fonction publique territoriale de Guyane et que Mme A...a adressé le 6 juillet 2004 un recours gracieux contre cet arrêté au président du conseil général de la Guyane ; que les conclusions de Mme A...tendant à l'annulation de cet arrêté ont été présentées dans un mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif de Cayenne le 23 mars 2005 ; que, dès lors, ces conclusions sont tardives et, par suite, irrecevables ;
Sur les conclusions dirigées contre les arrêtés des 8 octobre 2004 et 25 octobre 2005 du président du conseil général de la Guyane :
7. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté du 8 octobre 2004 aurait fait l'objet d'une mesure de publicité par voie d'affichage ; que, dès lors, la fin de non recevoir tirée de la tardiveté des conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté ne peut qu'être écartée ;
8. Considérant que MmeA..., bien qu'elle n'ait pas formé en temps utile de recours contre l'arrêté du 17 mai 2004 par lequel le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de Guyane a inscrit Mme B...sur la liste d'aptitude au grade d'attaché territorial pour l'année 2004, est recevable à contester, par la voie de l'exception, la légalité de cette liste à l'appui de ses conclusions contre l'arrêté du 8 octobre 2004 par lequel le président du conseil général de la Guyane a nommé Mme B...au grade d'attaché territorial stagiaire ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 4, le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de Guyane n'était pas compétent pour inscrire MmeB..., agent du département de la Guyane, sur la liste d'aptitude pour l'accès au grade d'attaché territorial pour l'année 2004 ; que l'arrêté du 8 octobre 2004 du président du conseil général de la Guyane nommant Mme B...au grade d'attaché territorial stagiaire a été pris sur le fondement de l'arrêté du 17 mai 2004 du président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Guyane ; que, dès lors, Mme A...est fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 8 octobre 2004 nommant Mme B...au grade d'attaché territorial stagiaire ;
9 Considérant que l'annulation de l'arrêté du 8 octobre 2004 portant nomination de Mme B...au grade d'attaché territorial stagiaire entraîne, par voie de conséquence, l'annulation de l'arrêté du 25 octobre 2005 par lequel le président du conseil général de la Guyane a titularisé l'intéressée dans le grade d'attaché territorial ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le président du conseil général de la Guyane a nommé Mme A...attaché territorial à compter du 1er avril 2002 et l'a titularisée à compter du 1er février 2003 ; que, dès lors, les conclusions de Mme A...tendant à ce qu'il soit enjoint au département de réexaminer ses droits à promotion sont devenues sans objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;
Sur les autres conclusions :
11. Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'annulation des arrêtés des 8 octobre 2004 et 25 octobre 2005 du président du conseil général de la Guyane aurait, dans les circonstances de l'espèce, des conséquences manifestement excessives ; que, dès lors, il n'y a pas lieu d'en différer les effets ;
12. Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département de la Guyane la somme de 3 500 euros à verser à Mme A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de Mme A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cayenne du 22 septembre 2011 est annulé.
Article 2 : Les arrêtés des 8 octobre 2004 et 25 octobre 2005 du président du conseil général de la Guyane portant, le premier, nomination de Mme B...dans le cadre d'emplois des attachés territoriaux au grade d'attaché stagiaire et, le second, intégration et titularisation de Mme B...dans le grade d'attaché territorial sont annulés.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A....
Article 4 : Le département de la Guyane versera à Mme A...la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la demande de première instance de Mme A...et les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Guyane et le département de la Guyane sont rejetés.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme C...A..., au département de la Guyane, au centre de gestion de la fonction publique territoriale de Guyane et à Mme D...B....