LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° B 18-82.574 F-P+B+I
N° 773
VD1
21 MAI 2019
CASSATION
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :
CASSATION sur le pourvoi formé par la société Atouts prestations, M. Z... P..., contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 4e chambre, en date du 20 mars 2018, qui, pour infractions à la réglementation sur le travail à temps partiel, les a condamnés, la première, à cinquante-huit amendes de 100 euros, le second, à cinquante-huit amendes de 75 euros, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 mars 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Barbier, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Lavaud ;
Sur le rapport de M.le conseiller référendaire BARBIER, les observations de la société civile professionnelle CLAIRE LEDUC et SOLANGE VIGAND, de la société civile professionnelle ROUSSEAU et TAPIE, de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CROIZIER ;
Vu les mémoires, en demande et en défense, et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article L. 8113-7 du code du travail, des articles 7 et 9, dans leurs versions alors applicables, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de prescription de l'action publique pour la période allant du 26 février au 31 mars 2014 ;
"aux motifs que sur la prescription de l'action publique, qu'il résulte des dispositions de l'article 9 du code de procédure pénale que l'action publique des contraventions se prescrit par une année révolue à compter du jour où l'infraction a été commise ; que les procès-verbaux dressés par les inspecteurs du travail dans l'exercice de leurs attributions de police judiciaire conformément aux dispositions des articles L. 611-1 et L. 611-10 du code du travail, à l'effet de constater les infractions, doivent être regardés au sens de l'article 7 du code de procédure pénale, comme des actes d'instruction ou de poursuite par lesquels, en vertu de ce texte et des articles 8 et 9 du même code, se trouve interrompue la prescription ; qu'il résulte du procès-verbal établi le 1er juin 2015 que le contrôleur du travail de la 3e section de l'unité de contrôle Loire Nord du département de la Loire s'est rendu le 26 février 2015 dans les locaux de l'Eurl Atouts prestations pour y constater les contraventions commises entre janvier et mars 2014 ; que la prescription de l'action publique est en conséquence acquise pour la période du 1er janvier au 25 février 2014 pour les deux qualifications retenues, d'avoir fait accomplir par un salarié à temps partiel des heures complémentaires sans respecter les limites fixées par l'article L. 3123-7 du code du travail ou par les conventions ou accords collectifs de travail prévus à l'article L. 3123-23 du même code, et pour s'être abstenu d'accorder la majoration de salaire de 25 % pour chaque heure complémentaire accomplie au-delà du dixième de la durée stipulée au contrat de travail ; que le jugement entrepris sera infirmé de ce chef ;
"alors que seuls les procès-verbaux dressés par les agents de l'inspection du travail interrompent le délai de prescription de l'action publique, à l'exclusion des simples visites précédant leur établissement ; qu'en retenant, pour accueillir l'exception de prescription de l'action publique pour la seule période allant du 1er janvier au 25 février 2014 et la rejeter s'agissant de la période allant du 26 février au 31 mars 2014, que les procès-verbaux dressés par les inspecteurs du travail dans leurs attributions de police judiciaire sont des actes d'instruction ou de poursuite interruptifs de prescription et qu'il résulte du procès-verbal établi le 1er juin 2015 que le contrôleur du travail de la 3e section de l'unité de contrôle Loire Nord du département de la Loire s'est rendu le 26 février 2015 dans les locaux de la société Atouts prestations pour y constater des contraventions commises entre janvier et mars 2014, quand cette seule visite de contrôle ne pouvait avoir interrompu le délai de prescription, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Vu les articles 7 et 9 du code de procédure pénale, dans leur rédaction applicable à l'époque des faits ;
Attendu qu'il se déduit de la combinaison de ces textes, d'une part, que l'action publique se prescrit par une année révolue à compter du jour où la contravention a été commise si, dans cet intervalle, il n'a été fait aucun acte d'instruction ou de poursuite ;
D'autre part, que seul peut être regardé comme un acte d'instruction ou de poursuite le procès-verbal dressé par l'inspecteur du travail, dans l'exercice de ses attributions de police judiciaire et à l'effet de constater les infractions, à l'exclusion des actes de l'enquête administrative qui en ont constitué le prélude ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du procès-verbal de constatation d'infractions établi par l'inspection du travail le 1er juin 2015 que la société Atouts prestations, intervenant dans le secteur des services aux personnes, dont M. Z... P... est le dirigeant social, a employé vingt-neuf salariés, d'une part, à temps partiel en heures complémentaires excédant le maximum légal, d'autre part, à temps partiel pendant les heures complémentaires sans majoration de salaire conforme, infractions de nature contraventionnelle pendant la période du 26 février au 31 mars 2014 ;
Attendu que pour écarter l'exception prise de la prescription des faits, la cour d'appel énonce que les procès-verbaux dressés par les inspecteurs du travail dans l'exercice de leurs attributions de police judiciaire, conformément aux dispositions des articles L. 611-1 et L. 611-10 du code du travail, devenus les articles L. 8112-1 et suivants dudit code, à l'effet de constater les infractions, doivent être regardés, au sens de l'article 7 du code de procédure pénale, comme des actes d'instruction ou de poursuite par lesquels, en vertu de ce texte et des articles 8 et 9 du même code, se trouve interrompue la prescription ; qu'elle ajoute qu'il résulte du procès-verbal établi le 1er juin 2015 que le contrôleur du travail s'est rendu le 26 février 2015 dans les locaux de la prévenue pour y constater des contraventions commises entre janvier et mars 2014, en sorte que la prescription de l'action publique est acquise pour la période du 1er janvier au 25 février 2014 ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que le déplacement de l'inspecteur du travail dans les locaux de la société Atouts prestations n'était pas interruptif de prescription, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre moyen proposé :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Lyon, en date du 20 mars 2018, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un mai deux mille dix-neuf ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.