LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, que la cour d'appel ayant relevé que le désordre trouvait son origine exclusivement dans une préparation inadaptée et insuffisante du support avant l'application de la peinture, le moyen, en ce qu'il soutient que la cour d'appel a retenu que les désordres trouvaient leur cause dans un vice caché du support, manque en fait ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que M. X..., qui ne contestait pas avoir été informé par la société Sabena de ce que les locaux en cause étaient utilisés pour repeindre des avions, se devait de vérifier si la préparation des avions avant mise en peinture et leur décapage éventuel étaient réalisés dans le même hangar, ce qui l'aurait conduit à s'interroger sur l'impact du décapage sur la structure qu'il devait repeindre, la cour d'appel a retenu, sans inverser la charge de la preuve, qu'il ne pouvait être reproché à la société Sabena de ne pas l'avoir informé de la méthode de décapage des avions ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu que la cour d'appel a, abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant relatif à l'absence de production d'un devis par M. X..., souverainement retenu que l'évaluation de l'expert devait être retenue ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de la société Sabena, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que, sollicitées par un professionnel de la peinture en bâtiment pour conseiller un produit compatible avec un bardage métallique, il n'appartenait pas à la société PPG France et à la société PPG distribution de fournir un conseil quant à la préparation du support, la cour d'appel, qui a retenu que ces sociétés n'avaient pas été associées à la phase d'analyse et de préparation des supports et qu'elles n'étaient intervenues que le 8 septembre 2004 alors que les opérations de nettoyage et de préparation des parois du hangar avaient été faites par les salariés de M. X..., a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. Y..., ès qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré un entrepreneur (M. X..., représenté par son liquidateur judiciaire, Me Y..., l'exposant) ayant conclu avec un spécialiste en peinture d'aéronefs (la société SABENA) un contrat aux termes duquel il s'engageait à repeindre, après l'avoir décapé, un hangar dans lequel celui-ci exerçait son activité professionnelle, seul responsable des défauts esthétiques affectant la peinture du local, le déboutant du même coup de ses recours en garantie contre les fabricant et fournisseur de la peinture (les sociétés PPG) ainsi que leur assureur (la société ALLIANZ IARD, venant aux droits de AGF) ;
AUX MOTIFS QUE, selon l'expert, les désordres ne pouvaient être attribués ni au choix d'un produit inadapté, ni à un vice intrinsèque de la peinture, ni à un manquement aux règles de l'art lors de sa mise en oeuvre ; que les analyses chimiques réalisées avaient permis d'établir que le dommage résultait d'une inadéquation entre le support à repeindre et la couche primaire de peinture dès lors qu'un interférent organométallique s'était interposé ; que le support des travaux présentait un vice en ce qu'il possédait en surface des inclusions métalliques indécelables correspondant au dépôt de fragments de peinture et de matières provenant des avions, dépôt occasionné par le procédé de décapage des carlingues utilisé par la société SABENA (un décapage à sec au moyen de projections de microbilles) ; que le désordre trouvait son origine exclusivement dans une préparation inadaptée et insuffisante du support avant l'application de la peinture ; que, pour exécuter son engagement à l'égard du maître de l'ouvrage de lui livrer des travaux exempts de vices, M. X... devait se renseigner sur les conditions exactes d'exploitation du local dans lequel il devait exécuter sa prestation ; qu'il ne contestait pas avoir été informé que les lieux étaient utilisés pour repeindre les avions confiés à la société SABENA ; que, professionnel de la peinture, il ne pouvait ignorer que l'exécution d'une telle prestation supposait la préparation du support, qu'il se fût agi d'un avion ou d'un bâtiment industriel, et se devait de vérifier auprès du maître de l'ouvrage si la préparation des avions avant mise en peinture et leur décapage éventuel étaient réalisés dans ce hangar et selon quelles modalités ; que la recherche d'informations sur la méthode de décapage l'aurait nécessairement conduit à s'interroger sur son impact sur la structure qu'il devait repeindre, et, s'agissant du procédé de décapaqe à sec en cause, lequel entraînait des projections importantes pouvant être puissantes, de percevoir que les résidus projetés dans le local et sur les parois étaient d'une composition plus complexe que de simples projections de peinture, ce qui impliquait de solliciter du fabricant, spécialiste en chimie de la peinture, un avis sur la préparation la plus performante d'un tel support et sur le système de peinture le mieux adapté aux contraintes du local ; que M. X... ne justifiant d'aucune demande de renseignements au maître d'ouvrage sur ces points, il ne pouvait reprocher à la société SABENA de ne pas l'avoir informé spontanément de la méthode de décapage des avions ; que le maître de l'ouvrage ne détenait aucune information susceptible d'échapper à la demande de renseignements méthodique et complète qui incombait à l'entrepreneur ; que le fait que la société SABENA fût spécialisée dans l'exécution de peinture d'avions ne suffisait pas à démontrer qu'elle disposait de compétences poussées en matière de chimie des peintures lui permettant d'avoir conscience de l'interaction de son procédé de décapage avec la peinture des parois de son hangar ; qu'en sa qualité de professionnel M. X... était réputé connaître les règles de base de préparation des supports et il n'apparaissait pas que la peinture choisie nécessitait un traitement du support particulier ; que, s'étant dispensé de se renseigner sur les conditions exactes d'utilisation du local qu'il devait peindre, se privant ainsi d'informations nécessaires pour analyser l'état réel du support et en envisager le traitement puis les relayer ensuite au fabricant et au fournisseur, il était mal fondé à rechercher leur garantie ;
ALORS QUE, de première part, l'entrepreneur ayant exécuté les travaux dans les règles de l'art, avec le produit adapté au support existant et ne comportant aucun vice intrinsèque, ne peut répondre des dommages trouvant leur cause dans un vice caché, en l'occurrence des inclusions métalliques indécelables dans le support qu'il était chargé de peindre, ce vice caché de la chose à travailler constituant pour lui une cause étrangère exonératoire ; qu'en décidant, bien qu'elle ait constaté que les désordres ne pouvaient être attribués ni au choix du produit, qui convenait au support existant, ni à un vice intrinsèque de ce produit, ni à un manquement aux règles de l'art lors de sa mise en oeuvre, que l'entrepreneur était responsable des désordres qui trouvaient leur cause dans un vice du support présentant en surface des inclusions métalliques indécelables, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
ALORS QUE, de deuxième part, l'obligation de conseil et d'information qui pèse sur l'entrepreneur chargé de repeindre un bâtiment ne comprend pas celle de s'enquérir auprès du maître de l'ouvrage de l'existence d'éventuels vices cachés de l'objet à repeindre, lesquels peuvent être des plus divers, et encore moins de procéder systématiquement à des investigations pour s'assurer qu'il n'en existe pas ; qu'en déclarant, après avoir constaté que les travaux avaient été réalisés dans les règles de l'art, avec une peinture adaptée au support et exempte de vice, que l'entrepreneur était seul responsable des désordres qui trouvaient leur cause dans un vice caché du support à repeindre, lui faisant ainsi obligation de rechercher l'existence éventuelle de vices cachés de la chose à lui confiée par le maître d'ouvrage, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1135 et 1147 du code civil ;
ALORS QUE, de troisième part, le maître d'ouvrage qui a chargé un entrepreneur de peinture de repeindre le bâtiment dans lequel il exerce sa profession, supporte seul les conséquences du vice caché de ce bâtiment, en l'espèce des inclusions métalliques indécelables déposées sur les parois à repeindre occasionnées par le décapage à sec des carlingues d'avion, qu'il ait ou non connu ce vice, qu'il ait ou non eu la compétence nécessaire pour en découvrir l'existence ; qu'en retenant, après avoir constaté que les travaux de peinture avaient été réalisés dans les règles de l'art, avec une peinture adaptée au support et exempte de vice, que l'entrepreneur était seul responsable pour n'avoir pas recherché d'informations sur la méthode de décapage utilisée par le maître d'ouvrage, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
ALORS QUE, enfin, le maître d'ouvrage est tenu d'une obligation de renseignement, à l'égard de l'entrepreneur qu'il a chargé de repeindre un bâtiment, sur les conditions d'utilisation de celui-ci, obligation d'autant plus impérative qu'il est un professionnel d'une autre spécialité que celui-ci, et qu'il est lui même tenu par un cahier des charges très précis de la part de ses clients ; qu'en décidant que le maître de l'ouvrage ne détenait aucune information susceptible d'échapper à la demande de renseignement méthodique et complète qui incombait à l'entrepreneur, quand, au contraire, il appartenait au maître de l'ouvrage d'informer l'entrepreneur, non spécialiste en matière de maintenance d'aéronefs, que le local à repeindre était utilisé pour le décapage puis la peinture de carlingues d'avion et que ce décapage, se faisant à sec au moyen de microbilles, entraînait des projections dans le local, ainsi que de lui communiquer le cahier des charges que lui imposaient ses propres clients, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1135 et 1147 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir fixé au passif de la liquidation judiciaire d'un entrepreneur de peinture (M. X..., représenté par son liquidateur judiciaire Me Y..., l'exposant), déclaré seul responsable des désordres affectant les travaux et trouvant leur cause dans un vice caché du support à repeindre, l'indemnité due au maître de l'ouvrage (la société SABENA) à la somme de 258.379 € HT ;
AUX MOTIFS QUE l'expert avait expliqué que les travaux de reprise impliquaient, avant de procéder à l'évaluation d'un nouveau système de peinture qui pût répondre de toutes les fixations d'inclusions à venir, de supprimer les parties non adhérentes et de réaliser un ponçage mécanique des microbulles et macrobulles ; que l'entrepreneur et son mandataire judiciaire étaient mal fondés à critiquer l'évaluation de l'expert pour la raison qu'elle n'était corroborée par aucun devis, puisque le technicien avait laissé le soin à la partie la plus diligente de produire des devis, ayant plus spécialement invité M. X... à chiffrer une réparation, quand aucun devis ne lui avait été transmis ;
ALORS QUE, d'une part, il appartient à la victime d'un dommage, et à elle seule, de justifier de l'existence et du montant du préjudice, et non à la personne déclarée responsable de le faire ; qu'en retenant l'évaluation exorbitante de l'expert, qui n'était étayée par aucun devis, pour la raison que l'entrepreneur n'avait pas chiffré la réparation, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
ALORS QUE, d'autre part, en retenant au titre du préjudice indemnisable la nécessité de réaliser un ponçage mécanique des microbulles et macrobulles, c'est-à -dire la nécessité de supprimer au préalable le vice caché du support à repeindre, suppression dont le coût devait nécessairement rester à la charge de maître de l'ouvrage, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale et l'article 1147 du code civil.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société Sabena technics paintings.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Sabena Technics Painting de ses demandes contre les société PPG AC France et PPG Distribution ;
AUX MOTIFS QUE : S'agissant des sociétés PPG AC France et PPG Distribution, il apparaît qu'elles ont respectivement fabriqué et fourni à M. X... le système de peinture appliqué. La société Sabena sur le fondement de l'article 1382 du code civil et Maître Y... es qualités au titre de sa demande de garantie, leur reprochent des fautes à l'origine du désordre. Or, l'expert, n'a à aucun moment critiqué le produit livré, ni fait de réserve sur sa compatibilité avec le support, si ce dernier avait été correctement préparé c'est-à -dire purgé des inclusions métalliques. Par ailleurs sollicitées par un professionnel de la peinture en bâtiment pour conseiller un produit compatible avec un bardage métallique, il ne leur appartenait pas de fournir un conseil quant à la préparation du support en l'absence de contraintes particulières sur ce point générées par le produit conseillé ou de spécificités rapportées par leur interlocuteur liées au chantier à réaliser ou à son environnement. En effet, M. X..., en sa qualité de professionnel, était réputé connaître les règles de base de préparation des supports et il n'apparait pas que la peinture choisie nécessitait un traitement du support particulier. S'étant dispensé lui-même de se renseigner sur les conditions exactes d'utilisation du local qu'il devait peindre, se privant ainsi d'informations nécessaires pour analyser l'état réel du support et en envisager le traitement puis les relayer ensuite au fabriquant et au fournisseur il est mal fondé à rechercher leur garantie.
Par ailleurs il est effectivement établi que les deux sociétés se sont rendues sur le chantier. Cependant aucun élément ne démontre que les sociétés intimées aient été associées à la phase d'analyse et de préparation de supports. L'attestation d'un salarié de M. X... révèle en effet que leur déplacement a eu lieu le 8 septembre 2004, alors que les opérations de nettoyage et de préparation des parois du hangar accomplies par les seuls salariés de M. X... comme le montre la télécopie de la société Sabena du 4 août 2004, étaient achevées ; que leur intervention s'est limitée à préciser la dilution des produits et le type de matériel à employer pour appliquer la peinture » ;
ET PAR MOTIFS ADOPTES QUE : l'expert estimait dans son rapport que la société Sigmakalon Euridep aurait dû, en sa qualité de professionnel du milieu de la chimie organique du bâtiment, lors de son passage sur le site, prélever des échantillons pour s'assurer de la parfaite adéquation entre son produit conseillé et le support, ce qui aurait pu mettre en évidence la réaction chimique causée par les inclusions. Mais attendu que cette société est intervenue uniquement à la demande de M. X... pour que celle-ci lui prodigue les conseils d'application et d'utilisation de son produit. Que surtout l'expert a retenu que la société Sabena a manqué en sa qualité de professionnelle de l'habillage extérieure des carlingues d'avions, à ses obligations en n'indiquant pas dans le cahier des charges que son activité de décapage des carlingues d'avions entraînait la projection sur les parois de particules de peinture et de particules métalliques. Que faute également d'avoir eu connaissance de ces particularités, elle n'a pas non plus manqué à son devoir de conseil et d'information ;
ALORS QU'en énonçant, pour dire qu'aucun manquement en lien avec le désordre ne pouvait être reproché aux sociétés PPG AC France et PPG Distribution respectivement fabricant et fournisseur de la peinture, qu'elles n'avaient pas été associées à la phase d'analyse et de préparation de supports et qu'il n'existait pas de contraintes particulières sur ce point générées par le produit conseillé ou de spécificités rapportées par leur interlocuteur liées au chantier à réaliser ou à son environnement, tout en constatant que les deux sociétés étaient venues sur le chantier, sollicitées pour conseiller un produit compatible avec le bradage métallique et pour préciser la dilution des produits et le matériel à employer pour appliquer la peinture, ce dont il résultait que les sociétés, qui avaient été en mesure d'apprécier l'adéquation du système de peinture proposé avec le support envisagé, avaient manqué à leur devoir d'information et de conseil envers le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur en s'abstenant d'attirer leur attention sur la nécessité de préparer correctement le support pour que la peinture fournie puisse tenir, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1382 du code civil.