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04/06/2014 | FRANCE | N°362492

France | France, Conseil d'État, 5ème / 4ème ssr, 04 juin 2014, 362492


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 septembre et 6 décembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... D..., demeurant... ; M. D... demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision n° 020-2011 du 2 juillet 2012 par laquelle la chambre disciplinaire de l'ordre national des masseurs-kinésithérapeutes a rejeté son appel contre la décision du 30 août 2011 de la chambre disciplinaire de première instance de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes de Rhône-Alpes prononçant à son encontre la sanction de l'interdict

ion temporaire d'exercer la profession de masseur-kinésithérapeute ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 septembre et 6 décembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... D..., demeurant... ; M. D... demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision n° 020-2011 du 2 juillet 2012 par laquelle la chambre disciplinaire de l'ordre national des masseurs-kinésithérapeutes a rejeté son appel contre la décision du 30 août 2011 de la chambre disciplinaire de première instance de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes de Rhône-Alpes prononçant à son encontre la sanction de l'interdiction temporaire d'exercer la profession de masseur-kinésithérapeute pendant trois ans, dont deux ans et demi avec sursis ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Leïla Derouich, auditeur,

- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gaschignard, avocat de M. D..., à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, avocat de Mme B... et à la SCP Hémery, Thomas-Raquin, avocat du Conseil national de l'ordre des masseurs- kinésithérapeutes ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, le 16 juin 2010 M.D..., masseur-kinésithérapeute, a fait l'objet d'une plainte adressée par l'une de ses patientes, au conseil départemental de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes de Savoie pour des faits d'abus sexuel ; que, par une décision du 9 juin 2011, la chambre disciplinaire de première instance du conseil régional de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes a prononcé à l'encontre de M. D...la sanction de trois ans d'interdiction temporaire d'exercer, dont deux ans et demi avec sursis ; que M. D...se pourvoit en cassation contre la décision du 2 juillet 2012 par laquelle la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, estimant qu'il avait gravement contrevenu aux principes de moralité et de responsabilité indispensables à l'exercice de la masso-kinésithérapie, a confirmé la sanction prononcée par la chambre disciplinaire de première instance ;

Sur la régularité de la décision attaquée :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des trois derniers alinéas de l'article L. 4321-15 du code de la santé publique : " Le Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes comporte, en son sein, une chambre disciplinaire nationale présidée par un magistrat de la juridiction administrative. / La chambre disciplinaire nationale comprend des membres élus, en nombre égal, par le conseil national, parmi, d'une part, les membres de ce conseil, et, d'autre part, les membres et anciens membres des conseils de l'ordre. / Cette chambre est saisie en appel des décisions des chambres disciplinaires de première instance. / Lorsque les litiges concernent les relations entre professionnels et usagers, la chambre disciplinaire s'adjoint deux représentants des usagers désignés par le ministre chargé de la santé " ; qu'aux termes de l'article L. 4321-20 du même code : " Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application des dispositions des articles L. 4321-15 à L. 4321-19, notamment la représentation des professionnels dans les instances ordinales en fonction du mode d'exercice et des usagers dans les chambres disciplinaires ainsi que l'organisation de la procédure disciplinaire préalable à la saisine des chambres disciplinaire " ; qu'il est constant qu'aucun décret n'est intervenu pour prévoir les modalités de désignation des représentants des usagers au sein des chambres disciplinaires, notamment la durée de leur mandat ; que, dès lors, en l'absence d'un tel décret, le dernier alinéa de l'article L. 4321-15 du code de la santé publique n'est pas applicable ; que, par suite, alors même que le litige était au nombre de ceux qui concernent les relations entre professionnels et usagers, c'est sans commettre d'irrégularité que la chambre disciplinaire nationale du conseil de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes a statué dans la composition prévue aux deux premiers alinéas de l'article L. 4321-15 du code de la santé publique ;

3. Considérant, en second lieu, qu'il est constant que M. Hermann, président du conseil régional de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes de Rhône-Alpes, qui a participé au jugement de l'affaire en qualité de membre de la chambre de discipline nationale de l'ordre, n'avait pas siégé au sein de la chambre disciplinaire de première instance du conseil régional de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes dont la décision était déférée à la juridiction d'appel ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ce membre de la formation de jugement aurait eu un intérêt dans l'affaire ou aurait manifesté une animosité notoire à l'égard de M. D... ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut d'impartialité de la chambre disciplinaire nationale ne peut qu'être écarté ;

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

4. Considérant qu'en retenant que M. D... avait développé avec l'une de ses patientes, une relation intime alors qu'il connaissait sa grande fragilité psychologique et qu'il avait abusé de l'autorité qu'il détenait sur elle pour obtenir, dans le cadre d'une consultation, une relation sexuelle qui avait provoqué un état dépressif sévère justifiant une hospitalisation, la chambre de discipline nationale, dont la décision est suffisamment motivée sur ce point, n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui étaient soumis ; qu'en en déduisant que M. D...avait contrevenu aux principes de moralité et de responsabilité indispensables à l'exercice de la masso-kinésithérapie mentionnés à l'article R. 4321-54 du code de la santé publique, elle a exactement qualifié les faits de l'espèce ; qu'en estimant que le manquement ainsi commis justifiait, par sa gravité, la sanction de l'interdiction d'exercer pendant une durée de trois ans, dont deux ans et demi avec sursis, elle a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation ;

Sur les conclusions tendant l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... la somme de 3 000 euros à verser à Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que le conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, qui n'est pas partie à la procédure et n'a été appelé en la cause que pour produire des observations, n'a pas qualité pour demander l'application des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de M. D...est rejeté.

Article 2 : M. D...versera à Mme B...la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Articles 3 : Les conclusions présentées par le conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A...D..., à Mme C...B..., au conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et à la ministre des affaires sociales et de la santé.


Synthèse
Formation : 5ème / 4ème ssr
Numéro d'arrêt : 362492
Date de la décision : 04/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - APPLICATION DANS LE TEMPS - ENTRÉE EN VIGUEUR - ENTRÉE EN VIGUEUR SUBORDONNÉE À L'INTERVENTION DE MESURES D'APPLICATION - CHAMBRES DISCIPLINAIRES DE L'ORDRE DES MASSEURS-KINÉSITHÉRAPEUTES - DISPOSITIONS LÉGISLATIVES RELATIVES À LA COMPOSITION DES CHAMBRES PRÉVOYANT - POUR LES LITIGES CONCERNANT LES RELATIONS ENTRE PROFESSIONNELS ET USAGERS - QUE LES CHAMBRES S'ADJOIGNENT DES REPRÉSENTANTS DES USAGERS - ENTRÉE EN VIGUEUR SUBORDONNÉE - DANS CETTE MESURE - À L'INTERVENTION DE MESURES RÉGLEMENTAIRES D'APPLICATION - EXISTENCE - CONSÉQUENCE - CHAMBRES SIÉGEANT RÉGULIÈREMENT SANS CES REPRÉSENTANTS EN L'ABSENCE DU DÉCRET D'APPLICATION.

01-08-01-02 En l'absence de décret d'application prévoyant les modalités de désignation des représentants des usagers au sein des chambres disciplinaires de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, notamment la durée de leur mandat, le dernier alinéa de l'article L. 4321-15 du code de la santé publique, qui prévoit que les chambres disciplinaires s'adjoignent ces représentants lorsque le litige concerne les relations entre professionnels et usagers, n'est pas applicable. Par suite, les chambres disciplinaires peuvent régulièrement statuer dans la composition résultant des deux premiers alinéas du même article.

PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - DISCIPLINE PROFESSIONNELLE - PROCÉDURE DEVANT LES JURIDICTIONS ORDINALES - CHAMBRES DISCIPLINAIRES DE L'ORDRE DES MASSEURS-KINÉSITHÉRAPEUTES - DISPOSITIONS LÉGISLATIVES RELATIVES À LA COMPOSITION DES CHAMBRES PRÉVOYANT - POUR LES LITIGES CONCERNANT LES RELATIONS ENTRE PROFESSIONNELS ET USAGERS - QUE LES CHAMBRES S'ADJOIGNENT DES REPRÉSENTANTS DES USAGERS - ENTRÉE EN VIGUEUR SUBORDONNÉE - DANS CETTE MESURE - À L'INTERVENTION DE MESURES RÉGLEMENTAIRES D'APPLICATION - EXISTENCE - CONSÉQUENCE - CHAMBRES SIÉGEANT RÉGULIÈREMENT SANS CES REPRÉSENTANTS EN L'ABSENCE DU DÉCRET D'APPLICATION.

55-04-01 En l'absence de décret d'application prévoyant les modalités de désignation des représentants des usagers au sein des chambres disciplinaires de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, notamment la durée de leur mandat, le dernier alinéa de l'article L. 4321-15 du code de la santé publique, qui prévoit que les chambres disciplinaires s'adjoignent ces représentants lorsque le litige concerne les relations entre professionnels et usagers, n'est pas applicable. Par suite, les chambres disciplinaires peuvent régulièrement statuer dans la composition résultant des deux premiers alinéas du même article.


Publications
Proposition de citation : CE, 04 jui. 2014, n° 362492
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Leïla Derouich
Rapporteur public ?: Mme Fabienne Lambolez
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD ; SCP FABIANI, LUC-THALER ; SCP HEMERY, THOMAS-RAQUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:362492.20140604
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