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26/09/2012 | FRANCE | N°11-13333

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 septembre 2012, 11-13333


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur la demande de mise hors de cause :
Dit n'y avoir lieu de mettre la société Xithe hors de cause ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 18 avril 2005 en qualité de consultante senior par la société Ethix, actuellement dénommée la société Xithe ; qu'un avenant au contrat de travail relatif à sa rémunération variable a été conclu le 31 mars 2006 ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale en mars 2007 d'une demande en résiliation judiciaire du contrat de travail

; que la société Ethix a cédé sa clientèle le 1er avril 2007 à la société Econ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur la demande de mise hors de cause :
Dit n'y avoir lieu de mettre la société Xithe hors de cause ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 18 avril 2005 en qualité de consultante senior par la société Ethix, actuellement dénommée la société Xithe ; qu'un avenant au contrat de travail relatif à sa rémunération variable a été conclu le 31 mars 2006 ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale en mars 2007 d'une demande en résiliation judiciaire du contrat de travail ; que la société Ethix a cédé sa clientèle le 1er avril 2007 à la société Economie comptabilité associés devenue la société Ethix (la société) ; que la société Xithe a été ultérieurement placée en liquidation amiable et Mme Y... nommée liquidateur ; que Mme X... a pris acte de la rupture du contrat de travail par lettre du 29 mai 2009 ; qu'elle a dirigé contre la société ses demandes en paiement au titre d'un rappel de salaires et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la société a appelé en garantie la société Xithe ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la salariée en paiement d'un rappel de la prime exceptionnelle du mois de juillet 2007, l'arrêt énonce que l'usage de cette prime a été régulièrement dénoncé ;
Qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant tiré de la dénonciation de l'usage, alors qu'elle avait constaté que l'avenant du 31 mars 2006 stipulait que la rémunération variable de la salariée comprenait " les primes ordinaires ou exceptionnelles et autres éléments liés au statut de salarié d'Ethix ainsi que les primes spécifiques attribués aux membres de la direction d'Ethix ", la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu que, par application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation du chef de la prime entraîne par voie de conséquence la cassation sur les deuxième et troisième moyens ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société Ethix à payer à Mme X... la somme de 1 156, 57 euros avec intérêts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, l'arrêt rendu le 19 janvier 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Ethix aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 2 500 euros à Mme X... et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame X... (salariée) de sa demande tendant à ce que la SAS ETHIX (employeur) soit condamnée à lui verser la somme de 6 440 euros au titre du rappel de la prime du mois de juillet 2007 ;
AUX MOTIFS QUE Madame X... a été engagée par la Société ETHIX le 18 avril 2005 en qualité de consultante senior moyennant un salaire brut mensuel forfaitaire de 5 700 euros ; qu'un avenant au contrat de travail du 31 mars 2006 prévoyait que la salariée était promue consultante manager et membre du comité de direction (le CODIR), et adjointe à la direction de la Société ETHIX et que, classée au coefficient 864 de la Convention collective des cabinets d'experts-comptables et des commissaires aux comptes, elle percevait une rémunération mensuelle brute composée, d'une part, de la somme fixe de 7 200 euros et, d'autre part, des « primes ordinaires ou exceptionnelles et autres éléments liés au statut de salarié d'ETHIX ainsi que les primes spécifiques attribuées aux membres de la direction d'ETHIX » ; que Madame X... a alors conduit et réalisé les missions d'assistance aux comités d'entreprise, et a en outre assuré la responsabilité d'un des pôles d'activité de l'entreprise et le management opérationnel et fonctionnel de la Société ETHIX ; que, par lettre du 20 décembre 2006, elle a demandé à Monsieur Z..., représentant de la société, les raisons pour lesquelles la prime dite de novembre avait été attribuée à tous les salariés à l'exception des trois membres du CODIR, dont elle, puis le 19 janvier suivant, venant d'apprendre que la décision du dirigeant d'exclure du bénéfice de cette prime ceux qui étaient membres du comité de direction, a contesté celle-ci et mis en demeure la société de lui régler une prime de 5 400 brut ; que le 1er avril 2007, la Société ETHIX ayant cédé son droit de présentation de clientèle d'expertise comptable à la Société ECONOMIE COMPTABILITE ASSOCIES, représentée par Monsieur I..., président, est devenue la SAS ETHIX, à laquelle les contrats de travail ont été transférés en application de l'article L. 1224-1 et suivants du code du travail ; que la politique salariale de la Société ETHIX a été modifiée en février 2006 à effet du 1er janvier 2006 ; qu'il était convenu avec la salariée que la part de rémunération variable (primes) était appelée à s'accroître, que l'ensemble du dispositif serait rôdé pour 2007 mais entrerait en application à titre transitoire pour l'année 2006, que la rémunération mensuelle variable individuelle comprendrait la prime versée en juillet adossée à des objectifs individuels et, à titre exceptionnel, pour l'année 2006, une prime supplémentaire versée en fin d'année, sous réserve que le développement attendu soit au rendez-vous ; que le 9 mars 2006, à l'occasion d'une réunion des délégués du personnel, ont été arrêtées les conditions nécessaires à l'obtention de la prime collective (« à partir de 2, 3 milliers d'euros se déclencherait la prime exceptionnelle de novembre/ décembre 2006 ». Pièce 13 de la salariée) ; qu'à la fin du mois de décembre 2006 tous les salariés, à l'exception des membres du comité de direction auquel appartenait Madame X..., ont reçu une prime exceptionnelle d'un montant égal à la moitié de celle perçue en juillet ; qu'elle sollicite de ce chef la somme de 5 400 euros correspondant à la moitié de la prime de 10 800 euros perçue par elle en juillet 2006, ainsi que celle de 6 440 euros, calculée à raison de 1, 5 % de son salaire mensuel pour l'année 2007, en soutenant que, si le 19 juillet 2007, la Société ETHIX a dénoncé l'usage d'une prime en juillet de chaque année, conformément à l'information donnée en réunion le 30 juin 2007, la lettre du 13 juillet et la réunion des délégués du personnel du 19 juillet 2007, cette dénonciation est tardive et partant irrecevable ; que, si les dysfonctionnements allégués du CODIR pouvaient justifier le non versement des primes spécifiques attribuées aux membres de la direction d'ETHIX, l'employeur ne pouvait s'opposer pour l'année 2006 au paiement des « primes ordinaires ou exceptionnelles et autres éléments liés au statut de salarié d'ETHIX » ; que tous les salariés d'ETHIX ayant perçu en juillet 2006 une prime, et en décembre une prime dite exceptionnelle fixée à 50 % de la prime reçue en juillet, Madame X... est fondée à solliciter le paiement de la somme de 5 400 euros, soit 50 % de la somme de 10 800 euros perçue en juillet ; qu'en revanche, elle sera déboutée de sa demande en paiement de la somme de 6 440 euros pour l'exercice 2007 qu'elle n'étaye par aucun élément, l'usage de cette prime ayant été régulièrement dénoncé ;
ALORS QUE la dénonciation par l'employeur d'un usage doit, pour être régulière, être précédée d'un préavis suffisant pour permettre des négociations et être notifiée aux représentants du personnel et à tous les salariés individuellement s'il s'agit d'une disposition qui leur profite ; que la dénonciation ne peut être effective qu'à une date postérieure à ces formalités ; qu'en se bornant à affirmer, sans autre explication, que la dénonciation de l'usage de la prime versée au mois de juillet de chaque année était régulière, sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions d'appel de Madame X..., si cette dénonciation n'était pas tardive dès lors que, d'une part, cette dénonciation n'avait pris effet que le 19 juillet 2007 pour une prime qui aurait dû être versée au mois de juillet 2007 et que, d'autre part, elle n'avait fait l'objet d'une information aux délégués du personnel que ce même 19 juillet, et aux salariés en réunion le 30 juin et par lettre du 13 juillet précédent, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, ensemble les règles régissant la dénonciation des usages d'entreprise ;
ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE l'avenant à un contrat de travail qui incorpore dans la rémunération variable contractuelle du salarié une prime en usage dans l'entreprise, confère à cette prime un caractère contractuel ; qu'ayant relevé que l'avenant du 31 mars 2006 au contrat de travail de Madame X... avait prévu que sa rémunération variable comprendrait « les primes ordinaires ou exceptionnelles et autres éléments liés au statut de salarié d'ETHIX », ce dont il résultait, ainsi que l'avait soutenu la salariée dans ses conclusions d'appel, que les primes versées chaque année au mois de juillet avaient un caractère contractuel depuis la conclusion de l'avenant précité, la Cour d'appel, qui a considéré de façon inopérante que cette prime avait été supprimée du fait de la dénonciation de l'usage, a violé, par refus d'application, l'article 1134 du Code civil ;
ET ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE les constatations de l'arrêt ne permettent pas à la Cour de Cassation de contrôler si les primes versées au mois de juillet de chaque année résultaient d'une disposition contractuelle, auquel cas elles ne pouvaient être supprimées sans l'accord de chacun des salariés, ou si au contraire elles résultaient d'un usage de l'entreprise que l'employeur pouvait dénoncer en avertissant, outre chacun des intéressés, les institutions représentatives du personnel, dans un délai suffisant pour permettre des négociations ; que la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 1221-1 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame X... (salariée) de sa demande tendant à ce que la SAS ETHIX (employeur) soit condamnée à lui verser la somme de 56 453, 15 euros à titre de réparation du préjudice moral subi par la salariée du fait de l'attitude de l'employeur ;
AUX MOTIFS QUE, s'agissant de la politique « harcèlement et de dénigrement systématique » de Monsieur Z... à son encontre, Madame X... justifie avoir saisi l'inspection du travail de ces faits et produit des certificats médicaux pour établir la dégradation de son état de santé en relation directe, d'après elle, avec l'attitude de l'employeur à son égard ; qu'elle verse aux débats un certificat de son médecin traitant qui, le 30 juin 2008, a certifié qu'elle « présente depuis 2006 des troubles anxieux dépressifs constants ayant nécessité dans un premier temps un avis cardiologique (troubles du rythme cardiaque, essoufflements croissants) puis des troubles majorés franchement dépressifs dans le contexte d'un conflit de travail (…). Son état de santé a justifié un arrêt depuis le 6/ 02/ 2007 et en soin conjoint avec un médecin psychiatre qui gère le traitement », un certificat médical du docteur B..., mandaté par l'employeur qui, le 13 novembre 2008, a confirmé que « le patient est en arrêt justifié » dont « une prolongation est à envisager » dans la mesure où il présente un « état dépressif réactionnel lié au contexte conflictuel professionnel », un certificat médical du docteur C..., assistante dans un centre médico-psychologique à Paris (20ème), du 26 mars 2009, qui certifie la suivre régulièrement en consultation depuis le 2 janvier 2007, qu'elle « présente un trouble anxio-dépressif secondaire à un important conflit professionnel ayant débuté en mars 2007 pour lequel elle est en cours de procédure juridique. La patiente exprime le souhait de reprendre des activités professionnelles qui semble être un levier indispensable à son rétablissement psychique. Toute mesure permettant d'abréger les délais d'attente de la procédure serait bénéfique à sa santé » ; que Madame X... ajoute que Madame D..., inspecteur du travail intervenu à sa demande dans l'entreprise, a confirmé que les méthodes de gestion employées avaient pu entraîner une dégradation des conditions de travail et des conséquences préjudiciables pour laquelle elle écrivait le 24 juillet 2007 : « Il ne fait aucun doute que de gros dysfonctionnements et des choix douteux en matière de management peuvent être reprochés à l'entreprise. Cela a pu vous causer des préjudices pour lesquels vous pouvez demander réclamation auprès du conseil de prud'hommes … Il semble que la nouvelle équipe dirigeante d'ETHIX est disposée à vous rendre justice, c'est en tout cas ce que j'ai pu comprendre de mon entretien avec M. I... (…) » ; qu'elle fait valoir que, le 12 juin 2007, sous la nouvelle direction de M. I..., Mesdames D... et E..., contrôleurs du travail, ont mis les dirigeants en garde contre l'évidente dégradation des conditions de travail au sein de l'entreprise, constatant la poursuite des mauvaises pratiques antérieures et l'absence de toute solution, et qu'en outre, la SAS ETHIX a poursuivi la politique initiée par son précédent employeur en s'abstenant de lui verser la prime conventionnelle, en l'accusant sans aucun fondement de s'être octroyée des jours de congés indus dans le cas d'une procédure de référé engagée devant le conseil de prud'hommes de PARIS, en multipliant les contre visites médicales, en usant de moyens de pression grossiers pour la contraindre à renoncer au bénéfice de l'arrêt maladie, et en mettant en doute la réalité de son état de santé et son intégrité professionnelle, en produisant en justice une lettre de condoléances qu'à l'occasion de la mort de son beau-père, elle avait adressée à M. I... et abordé en toute intimité la mort de sa propre mère ; que si la dégradation de l'état de santé de Madame X... est établie à partir du 6 février 2007, il résulte du mail de l'inspectrice du travail du 24 mai 2007 que l'enquête à la suite de la plainte de l'appelante et de Madame F... à l'encontre de Monsieur Z..., ne permettait pas de mettre en évidence des faits tangibles de harcèlement moral susceptibles d'être portés à la connaissance du Procureur de la République, même si l'inspectrice ajoutait que « il ne fait aucun doute que de gros dysfonctionnements et des choix douteux en matière de management peuvent être reprochés à l'entreprise. Cela a pu vous causer des préjudices pour lesquels vous pouvez demander réclamation auprès du conseil de prud'hommes. Mais le délit spécifique de harcèlement n'est pas établi » ; que l'appelante ne peut se prévaloir utilement de ce qu'elle aurait été victime de ces méthodes de management dès lors que, d'une part, elle participait en tant que membre du comité de direction au management global de l'entreprise, M. G..., délégué du personnel attestant que : « Si les relations humaines n'ont pas toujours été très simples et tranquilles au sein d'ETHIX jusqu'à fin 2005, une dégradation sensible s'est produite à partir de la mise en oeuvre du comité de direction dont la constitution a été initiée en janvier 2006 … de nombreuses critiques portant sur les modalités de fonctionnement du comité de direction ont été exprimées », d'autre part, la salariée n'a été l'objet ni d'une modification de son contrat de travail ni d'un quelconque retrait de ses prérogatives de la part de Monsieur Z... auquel elle reproche « calomnies et tortures » sans énoncer de faits précis ; que, quant à la SAS ETHIX, à laquelle son contrat de travail a été transféré à partir du 1er avril 2007, étant rappelé que Madame X... a été placée en arrêt maladie à compter du 6 février 2007, l'appelante ne saurait qualifier de harcèlement moral le fait que l'intimée se soit défendue dans les procédures par elle initiées et ait entendu faire contrôler ses arrêts de travail à trois reprises en vingt sept mois d'arrêt ; que, s'agissant de Madame F..., qui a tenté de se suicider sur son lieu de travail, elle ne peut établir un parallèle entre leurs deux situations ;
ALORS, DE PREMIERE PART, QUE ne lie pas le juge un courriel d'un inspecteur du travail indiquant à une salariée que les dysfonctionnements et les choix douteux de l'entreprise en matière de management qui ont pu dégrader les conditions de travail ne caractérisent pas le délit de harcèlement moral ; qu'en considérant que le courriel de l'inspectrice du travail qui contenait les indications précitées ne lui permettait pas de retenir l'existence d'un harcèlement moral, la Cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs résultant des dispositions de l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an III ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE l'employeur est tenu, à l'égard de son personnel, d'une obligation de sécurité de résultat qui lui impose de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, et que l'absence de faute de sa part ne peut l'exonérer de sa responsabilité ; qu'il lui est interdit, dans l'exercice de son pouvoir de direction, de prendre des mesures qui auraient pour objet ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité des salariés ; que le salarié doit établir la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement ; que le juge est tenu d'examiner ces faits ; qu'en se bornant à affirmer, de façon inopérante, que Madame X..., qui n'avait fait l'objet, ni d'une modification de son contrat de travail, ni d'un quelconque retrait de ses prérogatives de la part de Monsieur Z..., ne pouvait se plaindre des choix de la direction en matière de management dès lors qu'elle faisait partie du comité de direction, sans s'expliquer sur les conclusions d'appel de la salariée qui avait soutenu, en premier lieu, que l'avenant à son contrat de travail du 31 mars 2006, qui lui avait confié la responsabilité contractuelle du pôle d'activité dit « autres secteurs » destiné à réaliser des missions auprès de tous établissements autres que ceux du secteur « Banques et Finances », pôle qui nécessitait un travail supplémentaire de prospection et de production avec des moyens budgétaires et humains spécifiques, avait été méconnu par l'employeur qui avait retiré de ce pôle l'un des consultants, ce qui avait contraint l'exposante à multiplier les interventions dans les tâches de production, à côté de ses tâches de soutien de la direction et d'organisation interne de l'entreprise, de sorte qu'en réalité, tout développement de ce pôle était devenu impossible, en deuxième lieu, qu'alors que l'avenant précité à son contrat de travail avait prévu qu'elle devait participer étroitement au management opérationnel et fonctionnel de la société au sein de la direction, de sorte qu'elle devait avoir un rôle dans l'organisation interne en veillant à la mise en place et à la cohérence des procédures, l'employeur avait cessé de la convoquer au comité de direction à partir du mois d'octobre 2006 et avait chargé un autre salarié de réaliser à sa place le planning et les prévisions d'activité de l'entreprise, l'exposante devant uniquement lui donner les informations nécessaires à la réalisation du planning et, en troisième lieu et par voie de conséquence, que Madame X... avait perdu tout rôle en matière de management opérationnel et fonctionnel, l'ancien employeur ayant de fait préparé le terrain pour le nouvel employeur qui avait ainsi indiqué par un mail du 30 janvier 2007 avoir décidé de mettre en place les méthodes de direction qui prévalaient dans son cabinet, ce qui, selon l'exposante, caractérisait des agissements de harcèlement, la Cour d'appel, qui a par ailleurs constaté la dégradation de l'état de santé de la salariée et les arrêts de travail dont elle avait fait l'objet, ainsi que la dégradation des conditions de travail relevée par les contrôleurs du travail, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du Code du travail, ensemble l'article L. 4121-1-1° et 3° du même Code ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE le fait par un employeur de faire procéder à des contrôles médicaux systématiques en vue de vérifier le bien fondé des arrêts de travail d'un salarié caractérise une présomption de harcèlement moral qui doit être justifiée par l'employeur ; qu'en écartant la qualification de harcèlement moral que caractérisait le fait par la Société ETHIX d'avoir fait contrôler à trois reprises en vingt sept mois les arrêts maladie de la salariée, la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations de fait, a violé, par fausse application, les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du Code du travail ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, le juge est tenu d'examiner ces faits dans leur ensemble et de vérifier s'ils font présumer un harcèlement et, dans l'affirmative, d'exiger de l'employeur qu'il les justifie par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en se bornant à affirmer que ne constituait pas une présomption de harcèlement moral le fait par l'employeur de s'être défendu comme il l'avait fait devant le Conseil de prud'hommes dans une procédure antérieure, sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions d'appel de Madame X... si, au cours d'une procédure de référé devant le Conseil de prud'hommes de PARIS, la Société ETHIX ne l'avait pas accusée « sans aucun fondement » de s'être octroyée des jours de congés indus et de lui avoir ainsi causé un préjudice de plus de 13 000 euros, ce qui avait profondément affecté la salariée, celle-ci ayant travaillé sans compter ses heures de travail, la Cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du Code du travail ;
ALORS, DE CINQUIEME PART, QUE Madame X... avait également soutenu, dans ses conclusions d'appel, d'une part, que l'employeur avait mis en doute la réalité de la dégradation de son état de santé en déclarant qu'il s'agissait d'un caprice, qu'en outre, son attitude n'était ni loyale ni digne d'un cadre dirigeant et qu'enfin, il n'était pas question de lui réserver un régime de faveur, alors même que ses arrêts de travail avaient tous été validés par les experts mandatés par l'employeur et par la Sécurité sociale, d'autre part, que l'employeur avait produit en justice une lettre de condoléances qu'à l'occasion de la mort de son beau-père, l'exposante (à une époque où elle avait encore confiance en Monsieur I...) lui avait adressée et dans laquelle elle abordait, en toute intimité, la mort de sa propre mère, lettre strictement personnelle, sans relation avec le litige, et enfin, que ces agissements, cumulés avec les autres agissements qu'elle dénonçait, avaient entraîné un syndrome dépressif, lequel avait provoqué les arrêts maladie précités ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, invoquant des faits précis et vérifiables caractérisant des présomptions de harcèlement moral, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE SIXIEME PART, QU'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que le non paiement d'une prime constitue un manquement de l'employeur susceptible de faire présumer un agissement de harcèlement moral, nonobstant le règlement de cette prime à la suite d'un jugement ayant condamné l'employeur à ce versement ; qu'en écartant le harcèlement moral invoqué de ce chef au motif que le seul grief imputable à l'employeur est le non paiement de la prime exceptionnelle de décembre 2006, versée en exécution du jugement entrepris, quand cet agissement, cumulé avec les autres agissements invoqués par la salariée, faisait présumer un harcèlement, la Cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du Code du travail, ensemble l'article 1147 du Code civil ;
ET ALORS, ENFIN, QUE le non paiement d'une prime constitue un manquement de l'employeur susceptible de faire présumer un agissement de harcèlement moral ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation relatif au manquement de l'employeur à son obligation de verser à Madame X... la prime du mois de juillet 2007 entraînera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt sur le présent moyen, en application de l'article 625, alinéa 2, du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame X... (salariée) de sa demande tendant à ce que la SAS ETHIX (employeur) soit condamnée à lui verser les sommes de 73 600 euros au titre de l'indemnité contractuelle de rupture, 2 381 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 24 840 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 3 105 euros au titre des congés payés afférents, 184 680 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE Madame X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre du 29 mai 2009 aux torts exclusifs de l'employeur « compte tenu des modifications unilatérales qui ont, sans motif, altéré les éléments essentiels de celui-ci » ; que dans cette lettre, Madame X... se prévaut du non paiement de la prime de décembre 2006 versée à tous les salariés, à l'exception de ceux du comité de direction de la société à laquelle elle appartenait, et du fait que le dirigeant de cette société, Monsieur Z..., avait rendu impossible tout développement du nouveau pôle d'activité de l'entreprise qui relevait de sa responsabilité, selon les termes de l'avenant à son contrat de travail du 31 mars 2006, soit les « autres secteurs que la banque », l'avait dépouillée des prérogatives attachées à ses fonctions au sein du comité de direction, et fait preuve à son encontre de harcèlement moral et de dénigrement systématique ; que Madame X... se prévaut des atteintes commises par l'employeur à sa rémunération conventionnelle par le non paiement des primes qui avaient été, d'après elle, l'un des instruments utilisés pour la motiver « en vue de participer sans relâche et avec un rôle majeur à la restructuration de l'entreprise » ; que si la prime exceptionnelle de décembre 2006 était due, la Société ETHIX fait valoir sans être contredite qu'elle avait été versée à la date à laquelle l'appelante a pris acte de la rupture de son contrat de travail puisqu'elle avait exécuté le jugement déféré ; que le seul grief imputable à l'employeur soit le non paiement de la prime exceptionnelle de décembre 2006, versée en exécution du jugement antérieurement à la prise d'acte de la rupture, n'est pas suffisamment grave pour justifier la rupture de ce dernier aux torts de la Société ETHIX ; que cette prise d'acte de la rupture produit les effets d'une démission ;
ET QUE le fait que l'employeur rendait impossible tout développement du pôle dont elle avait la responsabilité résulte des seules affirmations de la salariée ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le non paiement d'une prime constitue un manquement de l'employeur suffisamment grave pour justifier la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, et faire produire à cette prise d'acte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation relatif au refus de l'employeur de verser à Madame X... la prime du mois de juillet 2007 entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt sur le présent moyen, en application de l'article 625, alinéa 2, du Code de procédure civile, en ce que la Cour d'appel a de façon implicite mais nécessaire retenu que le refus de paiement de cette prime ne caractérisait aucun manquement de l'employeur, justifiant la prise d'acte par la salariée de la rupture de son contrat de travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail puis, en cours de procédure, prend acte de la rupture de ce contrat, le juge doit prendre en compte l'ensemble des manquements invoqués à l'appui de la demande de résiliation judiciaire ; qu'il doit se placer à la date de cette demande de résiliation pour déterminer si ces manquements sont suffisamment graves pour justifier la rupture aux torts exclusifs de l'employeur ; que le non paiement d'une prime constitue un manquement suffisamment grave pour justifier la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur ; qu'en retenant que le seul grief imputable à l'employeur est le non paiement de la prime exceptionnelle de décembre 2006 mais qu'il ne justifie pas la prise d'acte de la rupture dès lors qu'elle a été versée en exécution du jugement entrepris, soit antérieurement à la prise d'acte par la salariée de la rupture de son contrat de travail, quand Madame X... avait invoqué le non paiement de cette prime à l'appui de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, de sorte que la Cour d'appel, qui devait se placer à la date de cette demande pour déterminer si ce manquement était suffisamment grave pour justifier une rupture aux torts exclusifs de l'employeur, ne pouvait opposer à la salariée le fait que le paiement était intervenu antérieurement à la prise d'acte, a violé, par refus d'application, les articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1232-1 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
ET ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE des agissements de harcèlement moral constituent des manquements suffisamment graves pour justifier la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur ; que la cassation à intervenir sur le deuxième moyen de cassation entraînera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt sur le présent moyen, en application de l'article 625, alinéa 2, du Code de procédure civile, en ce que la Cour d'appel a retenu qu'aucun agissement de harcèlement moral n'était constitué comme pouvant justifier la prise d'acte par Madame X... de la rupture de son contrat de travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-13333
Date de la décision : 26/09/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 janvier 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 sep. 2012, pourvoi n°11-13333


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.13333
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