Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 6 décembre 1996 et 4 avril 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la VILLE DE MARSEILLE, représentée par son maire ; la VILLE DE MARSEILLE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 3 octobre 1996 de la cour administrative d'appel de Lyon en tant que, après avoir annulé le jugement du 25 mars 1994 du tribunal administratif de Marseille rejetant la demande de M. X... tendant à l'annulation de la décision du 8 février 1991 par laquelle le maire de Marseille a refusé de le dégrever des sommes représentant le montant majoré de la taxe locale d'équipement, de la taxe départementale d'espaces verts et de la taxe départementale pour les conseils d'architecture, d'urbanisme et d'environnement à raison d'une construction sise ..., il a accordé à M. X... la décharge des suppléments et des majorations de taxe locale d'équipement dont s'agit et rejeté les conclusions de la ville requérante relatives aux frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Sauron, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Coutard, Mayer, avocat de la VILLE DE MARSEILLE et de Me Pradon, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis au juge du fond que la SARL Sogevalmo a été autorisée, par un permis de construire accordé par le maire de Marseille le 20 janvier 1982, modifié les 22 mars 1983 et 26 novembre 1985, à édifier une villa sur un terrain sis ... ; que, par acte notarié du 27 avril 1984, la SCI "l'Eléphant blanc", dont M. X... est le gérant, a acquis ladite villa en état futur d'achèvement et en a poursuivi la construction, une convention du même jour ayant déchargé la SARL Sogevalmo de son obligation d'achèvement de ladite construction ; qu'ayant constaté par procès-verbaux dressés le 21 février 1985, puis le 3 février 1986, que les surfaces hors oeuvre nettes effectivement construites étaient supérieures à celles autorisées, le maire de Marseille a notifié à M. X... les rehaussements de taxe locale d'équipement, de taxe départementale d'espaces verts et de taxe pour le financement des dépenses des conseils d'architecture, d'urbanisme et d'environnement, ainsi que les majorations y afférentes, dus à raison des travaux réalisés en infraction au permis de construire ; que la VILLE DE MARSEILLE se pourvoit contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 3 octobre 1996 en tant que, après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Marseille rejetant la demande de M. X... qui tendait à l'annulation de la décision du maire de Marseille refusant de lui accorder le dégrèvement des suppléments de taxe et majorations ainsi mises à sa charge, il a accordé à celui-ci la décharge des suppléments et des majorations de taxe locale d'équipement dont s'agit ;
Sur la recevabilité du pourvoi de la VILLE DE MARSEILLE :
Considérant qu'en ce qui concerne la taxe locale d'équipement les autorités administratives agissant au nom de l'Etat, qui sont seules compétentes pour la recouvrer pour le compte de la personne morale de droit public qui en est le bénéficiaire légal, ont seules qualité pour agir dans ceux des litiges auxquels peuvent donner lieu son assiette et son recouvrement ; que la VILLE DE MARSEILLE n'a, par suite, pas d'intérêt lui donnant qualité pour agir dans le litige qui l'oppose à un redevable de cette imposition ; que toutefois, l'irrecevabilité du pourvoi de ladite commune a été couverte par l'appropriation des conclusions de la VILLE DE MARSEILLE par le secrétaire d'Etat au logement qui est recevable à demander l'annulation de l'arrêt attaqué, dans la limite des conclusions présentées initialement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1723 quater du code général des impôts "I. La taxe locale d'équipement visée à l'article 1585 A est due par le bénéficiaire de l'autorisation de construire" ; qu'aux termes des dispositions du II de cet article 1723 quater : "En cas de construction sans autorisation ou en infraction aux obligations résultant de l'autorisation, la base de la taxe locale d'équipement ou du complément de taxe éventuellement exigibles est notifiée au service des impôtspar le directeur départemental de l'équipement ou par le maire. Le recouvrement de la taxe ou complément de taxe, augmenté de l'amende fiscale prévue à l'article 1836, est immédiatement poursuivi contre le constructeur" ; que le "constructeur" au sens de ces dispositions, que celles-ci désignent comme redevable de la taxe locale d'équipement, ne peut être autre que l'organisme responsable de la construction sans autorisation ou en infraction aux obligations résultant de l'autorisation ; que, par suite, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'une erreur de droit en jugeant que les suppléments de taxe locale d'équipement ne pouvaient pas être mis à la charge de M. X..., responsable des travaux réalisés en infraction au permis de construire délivré à la SARL Sogevalmo en tant qu'il n'était pas le bénéficiaire du permis de construire ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le secrétaire d'Etat au logement est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué, en ce qu'il accorde à M. X..., décharge des suppléments et des majorations de la taxe locale d'équipement ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987 et de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus le "constructeur", au sens de l'article 1723, quater II du code général des impôts, d'un bâtiment édifié en infraction ne peut être autre que l'organisme responsable de la construction édifiée en violation de l'autorisation de construire ; que même si le supplément et les majorations de taxe locale d'équipement ont été adressés à M. X..., gérant de la société civile immobilière l'Eléphant blanc, ils doivent être regardés comme ayant été établis au nom de ladite société qui est le redevable légal du supplément et des majorations mis à sa charge ;
Considérant que si, à la suite de la condamnation prononcée à l'encontre de M. X... par le juge pénal sur le fondement de l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme, un permis de construire a néanmoins été délivré le 18 août 1989 et un certificat de conformité établi le 6 juillet 1990, cette double circonstance est sans influence sur l'obligation au paiement immédiat de la taxe locale d'équipement qui était née à la date de chacun des procès-verbaux constatant les infractions successives, le 21 février 1985 et le 3 février 1986 ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 317 sexies de l'annexe II du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, que la valeur taxable était de mille francs par mètre carré pour les locaux à usage d'habitation principale et leurs annexes bénéficiant d'un prêt conventionné ou remplissant les conditions nécessaires à l'octroi d'un tel prêt et de 1 900 F par mètre carré pour les autres constructions soumises à la réglementation du permis de construire ; que la société civile immobilière l'Eléphant blanc ne justifie nullement qu'elle remplissait les conditions nécessaires à l'octroi d'un prêt conventionné ; que c'est dès lors à bon droit que l'administration a retenu la valeur de 1 900 F par mètre carré pour le calcul du complément de la taxe locale d'équipement et des majorations y afférentes ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société civile immobilière l'Eléphant blanc, représentée dans l'instance par son gérant M. X..., n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement rendu le 25 mars 1994, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 8 février 1991 par laquelle le maire de Marseille a refusé de la dégrever des sommes mises à sa charge au titre de la taxe locale d'équipement ;
Sur l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 fontobstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante soit condamné à verser à M. X..., agissant au nom de la société civile immobilière l'Eléphant blanc, la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce et eu égard aux conditions dans lesquelles le secrétaire d'Etat au logement s'est approprié les conclusions de la requête introduite par la VILLE DE MARSEILLE, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de ladite requête tendant à ce que M. X... soit condamné à allouer à l'Etat la somme réclamée au titre des frais exposés par la VILLE DE MARSEILLE et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 3 octobre 1996 en tant qu'il accorde décharge du supplément de taxe locale d'équipement et des majorations afférentes à cette taxe est annulé.
Article 2 : Est rejeté l'appel interjeté par M. X... à l'encontre du jugement du tribunal administratif de Marseille, en tant que ledit jugement a rejeté la demande de l'intéressé relatif au refus du maire de Marseille d'accorder à la société civile immobilière "l'Eléphant blanc" décharge du supplément de taxe locale d'équipement et des majorations y afférentes.
Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de M. X... présentées sur le fondement de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X..., en sa qualité de gérant de la SCI l'Eléphant blanc, à la VILLE DE MARSEILLE et au secrétaire d'Etat au logement.