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19/06/2013 | FRANCE | N°352182

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 19 juin 2013, 352182


Vu, 1° sous le n° 352182, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 août et 22 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...M'A... demeurant... ; M. M'A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10PA00507 du 30 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, d'une part, annulé le jugement n° 0708948/1 du 6 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de la société DHL Solutions-DHL Fashion tendant à l'annulation de la décision du 26 juill

et 2007 par laquelle le ministre de l'écologie, du développement et de l...

Vu, 1° sous le n° 352182, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 août et 22 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...M'A... demeurant... ; M. M'A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10PA00507 du 30 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, d'une part, annulé le jugement n° 0708948/1 du 6 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de la société DHL Solutions-DHL Fashion tendant à l'annulation de la décision du 26 juillet 2007 par laquelle le ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables a refusé d'autoriser le licenciement de M. M'A... après avoir annulé la décision de l'inspectrice du travail des transports de Melun du 28 novembre 2006 autorisant le licenciement de l'intéressé et, d'autre part, annulé ladite décision du ministre ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société DHL Solutions-DHL Fashion ;

3°) de mettre à la charge de la société DHL Solutions-DHL Fashion la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 2° sous le n° 352652, le pourvoi, enregistré le 13 septembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10PA00507 du 30 juin 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, d'une part, annulé le jugement n° 0708948/1 du 6 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de la société DHL Solutions-DHL Fashion tendant à l'annulation de la décision du 26 juillet 2007 par laquelle le ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables a refusé d'autoriser le licenciement de M. M'A... après avoir annulé la décision de l'inspectrice du travail des transports de Melun du 28 novembre 2006 autorisant le licenciement de l'intéressé et, d'autre part, annulé ladite décision du ministre ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société DHL Solutions-DHL Fashion ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Benjamin de Maillard, Auditeur,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Blanc, Rousseau, avocat de M. M'A... et à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société DHL Solutions-DHL Fashion ;

1. Considérant que les pourvois de M. M'A... et du ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement sont dirigés contre le même arrêt ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un courrier du 23 octobre 2006, la société DHL Solutions-DHL Fashion a demandé l'autorisation de licencier pour faute M. M'A..., délégué syndical, délégué du personnel et membre du comité d'entreprise ; que, par une décision du 28 novembre 2006, l'inspectrice du travail des transports de Melun a autorisé le licenciement de l'intéressé ; que, sur recours hiérarchique du syndicat Force Ouvrière formé pour le compte de M. M'A..., le ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables a, après avoir annulé la décision de l'inspectrice du travail, refusé d'autoriser le licenciement de l'intéressé par une décision du 26 juillet 2007 au motif que les faits ayant été commis dans le cadre des fonctions représentatives, le licenciement ne pouvait être autorisé sur un fondement disciplinaire ; qu'à la suite d'un jugement du tribunal administratif de Melun du 6 novembre 2009 rejetant la demande de la société DHL Solutions-DHL Fashion tendant à l'annulation de la décision du ministre, la cour administrative d'appel de Paris a, par l'arrêt attaqué du 30 juin 2010, annulé le jugement du tribunal ainsi que la décision du ministre du 26 juillet 2007 ; que M. M'A... et le ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement se pourvoient en cassation contre cet arrêt ;

3. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ;

4. Considérant que l'autorité administrative ne peut autoriser le licenciement d'un salarié protégé pour un motif distinct de celui invoqué par l'employeur à l'appui de sa demande ; que la société DHL Solutions-DHL Fashion s'étant borné à invoquer un motif disciplinaire à l'appui de sa demande d'autorisation de licenciement de M. M'A..., le ministre ne pouvait se prononcer qu'eu égard à ce motif, sans pouvoir rechercher si le comportement de M. M'A... ne rendait pas impossible son maintien dans l'entreprise ; que, par suite, en jugeant que le ministre avait commis une erreur de droit en ne recherchant pas si le licenciement aurait été possible sur un autre motif tiré de ce que, même non fautif, le comportement de M. M'A... ne rendait pas impossible son maintien dans l'entreprise, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit ; que par, suite, son arrêt doit être annulé ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu'en jugeant que le ministre était fondé à rejeter la demande de licenciement de l'employeur au titre de la faute, dès lors que les faits incriminés ne relevaient pas du pouvoir disciplinaire de celui-ci, le tribunal administratif a nécessairement écarté le moyen tiré de ce que l'impossibilité du maintien du salarié dans l'entreprise aurait dû fonder la décision du ministre ; que le jugement attaqué n'est donc entaché d'aucune omission de statuer sur ce moyen ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-547 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) " ; qu'aux termes de l'article 18 de la même loi : " Sont considérées comme des demandes au sens du présent chapitre, les demandes et les réclamations, y compris les recours gracieux ou hiérarchiques, adressées aux autorités administratives. (...) " ;

8. Considérant que si, en excluant les décisions prises sur demande de l'intéressé du champ d'application de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, le législateur a entendu dispenser l'administration de recueillir les observations de l'auteur d'un recours gracieux ou hiérarchique, il n'a pas entendu pour autant la dispenser de recueillir les observations du tiers au profit duquel la décision contestée par ce recours a créé des droits ; qu'il suit de là qu'il ne peut être statué sur un tel recours qu'après que le bénéficiaire de la décision créatrice de droits a été mis à même de présenter ses observations, notamment par la communication du recours ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par une lettre du 26 février 2007, l'employeur a reçu communication du recours hiérarchique formé auprès du ministre par le syndicat Force Ouvrière pour le compte de M. M'A... ; que c'est, dès lors, à bon droit que le tribunal administratif de Melun a estimé que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 manquait en fait ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que c'est également à bon droit que le tribunal administratif a jugé que si la décision du ministre mentionne, à tort, que M. M'A... a fait l'objet d'une mise à pied, cette erreur est sans incidence sur la légalité de la décision, par ailleurs suffisamment motivée ;

10. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que c'est sans commettre d'erreur de droit que le ministre s'est abstenu de rechercher si le maintien de M. M'A... dans l'entreprise était impossible au regard des répercussions de son comportement dans l'entreprise, dès lors que la demande d'autorisation de licenciement reposait non pas sur le motif tiré du trouble objectif dans le fonctionnement de l'entreprise mais sur un motif disciplinaire ;

11. Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le ministre, eu égard aux faits et au motif invoqués par l'employeur, a à bon droit refusé le licenciement, sans substituer lui-même un autre motif de licenciement dans sa décision ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société DHL Solutions-DHL Fashion n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre du 26 juillet 2007 ;

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. M'A... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société DHL Solutions-DHL Fashion la somme de 3 000 euros à verser à M. M'A... au titre de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 30 juin 2010 est annulé.

Article 2 : La requête présentée par la société DHL Solutions-DHL Fashion devant la cour administrative d'appel de Paris est rejetée.

Article 3 : La société DHL Solutions-DHL Fashion versera à M. M'A... la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la société DHL Solutions-DHL Fashion présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B...M'A..., à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et à la société DHL Solutions-DHL Fashion.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 352182
Date de la décision : 19/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2013, n° 352182
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Benjamin de Maillard
Rapporteur public ?: Mme Gaëlle Dumortier
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER ; SCP BLANC, ROUSSEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:352182.20130619
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