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29/09/2016 | FRANCE | N°15-22372

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 29 septembre 2016, 15-22372


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 5 février 2015), que la société Ricci, aux droits de laquelle vient la société Vinal, a été chargée des travaux de rénovation de bâtiments anciens par la SCI La Mamma et par la SCI Les Greniers, sous la maîtrise d'oeuvre du cabinet SECB ; que la SCI Les Greniers, se plaignant d'un abandon de chantier pour les lots n° 125 et n° 126, a, après expertise, assigné en indemnisation la société Ricci et son assureur ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé

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Attendu que la société Vinal fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 5 février 2015), que la société Ricci, aux droits de laquelle vient la société Vinal, a été chargée des travaux de rénovation de bâtiments anciens par la SCI La Mamma et par la SCI Les Greniers, sous la maîtrise d'oeuvre du cabinet SECB ; que la SCI Les Greniers, se plaignant d'un abandon de chantier pour les lots n° 125 et n° 126, a, après expertise, assigné en indemnisation la société Ricci et son assureur ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que la société Vinal fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la SCI Les Greniers la somme de 147 578,97 euros au titre de la perte locative ;
Mais attendu qu'ayant relevé que, pour les travaux du lot n° 126, la société Ricci, avisée de la reprise du chantier en septembre 2005 après l'obtention du permis de construire modificatif, avait refusé de reprendre les travaux malgré les demandes de l'architecte des 10 et 18 octobre 2005 l'informant de la reprise à venir et que, le lot n° 125 n'étant pas concerné par la demande de permis de construire modificatif, les travaux commencés pour le plancher avaient été interrompus et n'avaient pas été repris malgré les demandes formulées les 27 juillet et 12 octobre 2005, alors que tous les corps de métier auraient pu se succéder normalement sur ce chantier, la cour d'appel a pu en déduire que le refus par la société Ricci de reprendre les travaux engagés par la SCI Les Greniers n'était pas justifié par un retard de paiement de la SCI La Mamma, dont le chantier était sans relation juridique avec celui de la SCI Les Greniers, ni par un changement de projet ou par des difficultés de planning interne, et que la faute de la société Ricci ayant abandonné le chantier de la SCI Les Greniers était caractérisée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Vinal aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour la société Vinal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR condamné la société exposante à payer à la SCI Les Greniers la somme de 147.578,97 euros au titre de la perte locative ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il est constant que la société Ricci a abandonné le chantier le 1er septembre 2005, sur le lot 125, après demande de reprise des travaux interrompus, formulée le 27 juillet 2005 et le 12 octobre 2005, sur le lot 126, après obtention du permis modificatif et notification à l'entreprise du croquis modificatif le 12 octobre 2005 ; que la société Ricci affirme que l'interruption du chantier est imputable au changement de projet du maître de l'ouvrage qui a sollicité un permis de construire modificatif et qu'il ne lui était pas possible de le reprendre d'une part et d'autre part que son intervention n'était possible qu'après l'intervention des autres corps de métier ; que l'expert judiciaire a très clairement déterminé, ce sur quoi Ricci ne s'explique pas, que les travaux sur le lot 125, qui n'était pas concerné par les modifications du permis de construire, n'avaient été commencés qu'en ce qui concerne le plancher, alors que tous les corps de métier auraient pu se succéder sur ce chantier tandis que les travaux sur le lot 126 étaient interrompus ; qu'en outre, après examen des procès-verbaux de chantier et courriers échangés, l'expert judiciaire pour répondre à la société Ricci qui invoquait la non livraison des pierres nécessaires pour pouvoir continuer le chantier, a mis en évidence que l'entreprise a été préavisée le 27 mai 2005 de la reprise du chantier en septembre après obtention du permis de construire modificatif, a reçu le 12 octobre suivant le croquis modifié de l'encadrement de la porte d'entrée, et qu'en réalité c'est bien la société Ricci qui a refusé de reprendre la chantier à la suite formulée les 10 et 18 octobre 2005 par la SECB aux motifs que les factures dues par la SCI La Mamma devaient être au préalable acquittées et que se poseraient des problèmes de planification interne à l'entreprise du fait du retard administratif occasionné du fait du maître de l'ouvrage ; que si l'expert admet que les travaux sur la couverture sur le lot 126 ne pouvaient être entrepris qu'une fois terminés la casquette et les encadrements de porte, il affirme qu'aucune difficulté n'empêchait la reprise de ceux sur le lot 125 ; qu'ainsi la société Ricci qui reprend l'argumentaire développé devant l'expert judiciaire n'apporte aucun élément probant de nature à contredire utilement l'analyse faite par ce dernier, et dès lors il convient de retenir, ainsi que l'a fait exactement le premier juge que l'abandon du chantier et le refus de le reprendre ne peut être validé par un retard de paiement de la SCI La Mamma, société distincte à l'égard d'un chantier sans relation juridique avec celui engagé par la SCI Les Greniers, ni justifié par des prétendues difficultés de planning interne, alors que dès juillet 2005 l'entreprise avait été informée de la reprise à venir du chantier ; que c'est donc à bon droit que la faute de la société Ricci a été reconnue et qu'il a été jugé qu'elle emportait la responsabilité des conséquences dommageables de cette faute ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'expert retient qu'il y a eu abandon du chantier concernant la partie droite (lot 125) à compter du 1er septembre 2005 suite à la demande de reprise de travaux cf. PV n° 31/27 de réunion de chantier du 27 mai 2005, et concernant la partie gauche (lot 126) à compter du 12 octobre 2005 suite à l'accord du permis de construire modificatif ; qu'en ne respectant pas ses obligations contractuelles d'exécution du marché de travaux la SA Ricci a engagé sa responsabilité sauf à démontrer que l'interruption du chantier était imputable au maître d'ouvrage et non de son fait ; que le litige qui l'opposait à la SCI La Mamma dans le cadre du chantier La Mamma sur le règlement de trois factures, ne pouvait la dispenser de ses engagements envers la SCI Les Greniers. Les deux chantiers étaient indépendants même si l'interlocuteur de la SA Ricci était le même avec les deux sociétés (M. X...) ; qu'il sera enfin fait observer que le marché La Mamma s'est poursuivi jusqu'à son terme et qu'il était possible à la SA Ricci de contester le non-paiement des factures, ce qu'elle n'a fait que dans le cadre de l'instance initiée par la SCI De Chansard La Mamma et la SCI Les Greniers ; que de même, la modification du projet et du permis de construire ont certes stoppé le chantier mais la délivrance finale du permis de construire modificatif en a permis la reprise ; que si la SA Ricci était en droit d'accepter pendant l'intervalle de temps d'arrêt du chantier d'autres marchés de travaux, il ne la dispensait pas de terminer celui précédemment signé et non résilié avec la SCI Les Greniers ; qu'enfin, elle ne démontre pas que le fait que d'autres corps de métier ne soient pas intervenus ensuite l'a empêchée de poursuivre ; qu'elle a ainsi commis une faute et sera ainsi déclarée responsable des conséquences dommageables de l'abandon du chantier ;
ALORS D'UNE PART QUE si le débiteur peut être condamné au payement de dommages intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, c'est à la condition que l'inexécution ne provienne pas d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que les travaux sur la couverture sur le lot 126 ne pouvaient être entrepris qu'une fois terminés la casquette et les encadrements de porte ; qu'en considérant néanmoins que la société Ricci avait fautivement abandonné le chantier, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1147 du code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité et que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; que pour retenir une faute de la SAS Ricci dans l'exécution du chantier, la cour d'appel a relevé d'une part, au regard des conclusions de l'expert, que la SAS Ricci avait abandonné le chantier du lot 126 et d'autre part que l'expert admet que les travaux sur la couverture sur le lot 126 ne pouvaient être entrepris qu'une fois terminés la casquette et les encadrements de porte ; qu'en statuant ainsi par des motifs contradictoires impropres à caractériser un abandon de chantier par l'exposante sur le lot 126, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que la SAS Ricci faisait valoir, s'agissant du lot 125, que le reste de sa prestation ne pouvait se poursuivre sans que les autres corps de métiers ne soient intervenus et qu'il était surprenant qu'il ne soit aucunement tenu compte de l'absence à la procédure des autres entrepreneurs, ni de leurs carences dans l'arrêt du chantier (conclusions, p. 13) ; que pour retenir une faute de la SAS Ricci pour ne pas avoir repris le chantier, la cour d'appel relève que l'expert a très clairement affirmé que tous les corps de métier auraient pu se succéder sur ce chantier tandis que les travaux sur le lot 126 étaient interrompus ; qu'en statuant ainsi par un motif dubitatif, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT CONFIRMATIF ATTAQUÉ D'AVOIR condamné la SAS Ricci à payer à la SCI Les Greniers la somme de 147.578,97 euros au titre de la perte locative ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le montant du préjudice pour perte de loyers évalué par l'expert n'est contesté par aucune partie et doit être approuvé ; que le premier juge, par ailleurs, a refusé à bon droit, d'y ajouter le montant forfaitaire pour charges réclamés par la SCI, dès lors qu'elle ne justifie pas avoir assumé cette dépense, sauf à bénéficier d'un enrichissement sans cause ; que le jugement sera donc confirmé à ce titre ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le préjudice locatif existe incontestablement compte tenu de l'arrêt du chantier par la SA RICCI et dont il a été jugé ci-dessus qu'elle en supporte entièrement la responsabilité. Il n'a pas de lien avec l'absence d'établissement du décompte partiel ou définitif du cabinet d'architecte. La SA RICCI sera seule tenue de la réparer ; que l'expert évalue à la somme de 147.578,97 € le montant des sommes dues à ce titre en limitant la période d'indemnisation à 36 mois ; que la SCI Les Greniers ne s'oppose pas à cette évaluation mais sollicite à titre complémentaire le montant des charges locatives qu'elle estime à 15 % des loyers ; que d'évidence un immeuble non encore habité ne peut produire l'appel de charges locatives ; qu'il sera par conséquent alloué la somme de 147.578,97 € de ce chef » ;
ALORS D'UNE PART QUE la réparation du préjudice doit s'effectuer sans perte ni profit pour le créancier ; qu'en retenant le calcul de l'expert, au titre du préjudice pour absence de revenus locatifs du fait de l'abandon du chantier, qui avait retenu une période d'indemnisation allant de l'arrêt du chantier pour chaque lot au jour de la conclusion de son rapport, auquel il ajoutait une période de 36 mois correspondant aux délais de la procédure au fond, d'exécution et de paiement, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit ;
ALORS D'AUTRE PART QUE la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable constitue une perte de chance réparable ; que la réparation de la perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée ; que le préjudice locatif résultant pour le maître de l'ouvrage de l'arrêt du chantier avant l'achèvement des travaux n'est qu'une perte de chance résultant de l'impossibilité de donner l'immeuble à bail et d'en percevoir les fruits ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui n'a pas indemnisé une fraction de la perte de revenus locatifs, a violé l'article 1147 du code civil ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE le fait du créancier à l'origine de son propre préjudice exonère à due concurrence le débiteur de sa responsabilité ; que la société Ricci exposait que la perte de revenus locatifs alléguée par la SCI Les Greniers ne lui était pas imputable mais résultait de l'inertie de la SCI Les Greniers à faire reprendre le chantier et que cette dernière ne saurait faire supporter sa carence sur la SAS Ricci qui ne dispose pas du pouvoir d'initiative quant à la reprise des travaux (conclusions, p. 14, in fine et p. 15, 1er §) ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire des conclusions, la cour d'appel a privé de sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS ENFIN QUE l'expert, dans son rapport, a retenu, pour le calcul de la perte de loyer une période d'indemnisation sur le lot 126 de 71.5 mois et sur le lot 125 de 73 mois (rapport, p. 121) ; qu'en retenant que pour évaluer le préjudice locatif à la somme de 147.578,97 € l'expert a limité la période d'indemnisation à 36 mois, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du rapport d'expertise et violé l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 15-22372
Date de la décision : 29/09/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 05 février 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 29 sep. 2016, pourvoi n°15-22372


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.22372
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