LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
BD4
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 13 septembre 2023
Cassation partielle
Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 863 F-D
Pourvoi n° D 22-10.763
Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme [O].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 21 juin 2022.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 2023
Mme [V] [G], domiciliée [Adresse 7], agissant en qualité d'ayant droit d'[K] [H], décédée, a formé le pourvoi n° D 22-10.763 contre l'arrêt rendu le 19 novembre 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-6), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [M] [O], domiciliée [Adresse 1],
2°/ à Mme [J] [H], épouse [I], domiciliée [Adresse 4], prise en qualité d'ayant droit d'[K] [H], décédée,
3°/ à Mme [P] [H], épouse [Y], domiciliée [Adresse 6], prise en qualité d'ayant droit d'[K] [H], décédée,
4°/ à Mme [R] [A], domiciliée [Adresse 3], prise en qualité d'ayant droit d'[K] [H], décédée,
5°/ à M. [D] [H], domicilié [Adresse 8] (Suisse), pris en qualité d'ayant droit d'[K] [H], décédée,
6°/ à M. [Z] [F], domicilié [Adresse 5], pris en qualité d'administrateur judiciaire de l'indivision successorale [H],
7°/ à l'association Union départemantale des associations familiales du Var, dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Mme [O] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chiron, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mme [G], de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de Mme [A], de la SCP Marc Lévis, avocat de Mme [O], après débats en l'audience publique du 20 juin 2023 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Chiron, conseiller référendaire rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à Mme [G] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. [F] en sa qualité d'administrateur provisoire de la succession [H].
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 novembre 2021), Mme [O] a effectué des prestations de travail en qualité d'auxiliaire de vie à compter de 2010 au profit d'[K] [H], majeure protégée placée sous tutelle le 21 juin 2007 par un juge des tutelles, l'Union départementale des associations familiales (UDAF) du Var, ayant été désignée en qualité de tutrice.
3. Soutenant qu'elle exerçait cette mission au profit de la fille d'[K] [H], Mme [G], la salariée a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la résiliation aux torts de celle-ci du contrat de travail les liant, puis a fait appeler en intervention forcée l'UDAF du Var, ès qualités.
4. [K] [H] est décédée le 30 décembre 2015 et Mme [O] a fait appeler en intervention forcée ses héritiers, dont Mme [G].
Sur le moyen du pourvoi principal et le troisième moyen du pourvoi incident
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen du pourvoi incident
Enoncé du moyen
6. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de rappel de salaire au titre de la période postérieure au mois de janvier 2011, alors « qu'il incombe à l'employeur, qui se prétend libéré de ses obligations de fournir du travail et de payer la rémunération convenue, d'établir que le salarié a refusé d'exécuter son travail ou ne s'est pas tenu à sa disposition ; qu'en retenant, pour débouter Mme [O] de ses demandes de rappel de salaire au titre de la période postérieure au mois de janvier 2011, que celle-ci ne justifiait de l'existence d'une prestation de travail au domicile d'[K] [H] qu'entre les mois de mars 2010 et janvier 2011, sans constater que sur la période ultérieure, l'employeur démontrait que la salariée avait refusé d'exécuter son travail ou ne s'était pas tenue à sa disposition, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1315, devenu 1353 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1221-1 du code du travail et 1315, devenu 1353 du code civil :
7. Il appartient à l'employeur de fournir un travail au salarié qui se tient à sa disposition et de payer la rémunération.
8. Pour débouter la salariée de sa demande de rappel de salaire au titre de la période postérieure au mois de janvier 2011, l'arrêt, après avoir retenu que la salariée était fondée à se prévaloir d'un contrat à durée indéterminée, relève que le témoignage de M. [X] se rapporte à l'année 2010, que les déclarations de l'employeur devant les services de police se réfèrent à l'exécution d'une prestation de travail au cours de l'année 2010 et que le calendrier produit à l'instance par la salariée ne porte que sur l'année 2010 et le mois de janvier 2011, et retient que la salariée ne peut justifier de l'existence d'une prestation de travail au domicile d'[K] [H] qu'entre les mois de mars 2010 et janvier 2011.
9. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que l'employeur démontrait que la salariée avait refusé d'exécuter son travail ou ne s'était pas tenue à sa disposition, a inversé la charge de la preuve et violé les textes susvisés.
Et sur le deuxième moyen du pourvoi incident, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
10. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et de ses demandes subséquentes en paiement de diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, indemnité compensatrice de congés payés afférente, indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et indemnité légale de licenciement, alors « que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, qui remettra en cause les dispositions de l'arrêt ayant rejeté la demande de rappel de salaire formée au titre de la période postérieure au mois de janvier 2011, entraînera, par voie de conséquence, en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt ayant débouté Mme [O] de sa demande de résiliation judiciaire, en considération de l'ancienneté du grief tiré défaut de paiement des salaires, limité par la cour d'appel à une période courant jusqu'en janvier 2011. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 624 du code de procédure civile :
11. En application de ce texte, la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions de la décision cassée ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
12. La cassation prononcée sur le premier moyen du pourvoi incident entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs du dispositif déboutant la salariée de sa demande aux fins de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail liant les parties aux torts exclusifs de l'employeur et de ses demandes au titre de l'indemnité de préavis, de congés payés sur préavis, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité compensatrice de congés payés et rappel de congés payés sur le préavis et de remise sous astreinte d'un certificat de travail, de bulletins de salaire de janvier 2010 à la date de résiliation et d'attestation Pôle emploi, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
Portée et conséquences de la cassation
13. La cassation prononcée n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
REJETTE le pourvoi principal ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme [O] du surplus de ses demandes en paiement au titre des rappels des salaires à compter de février 2011, outre les congés payés correspondants, de la somme de 2 996,50 euros bruts au titre des salaires pour l'année 2012 et jusqu'au 30 juin 2012 outre les congés payés correspondant soit 299,65 euros, de la somme de 1 014,20 euros au titre de l'indemnité de préavis outre 101,42 euros au titre du rappel des congés payés sur le préavis, de la somme de 5 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de la somme de 1 014,20 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés outre 101,42 euros bruts à titre de rappel de congés payés sur le préavis, de la somme de 200 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement, et tendant à ordonner à Mme [G] de lui remettre au besoin sous astreinte de 100 euros par jour de retard, le certificat de travail, les bulletins de salaire de janvier 2010 à la date de résiliation et l'attestation Pôle emploi, l'arrêt rendu le 19 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;
Condamne Mme [G] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [G] et la condamne à payer à la SCP Lévis et Mme [A], en qualité d'ayant droit d'[K] [H], la somme de 3 000 euros chacune ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille vingt-trois.