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06/07/2022 | FRANCE | N°21-25538

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 06 juillet 2022, 21-25538


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

SG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 juillet 2022

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 666 F-D

Pourvoi n° T 21-25.538

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de [H] [K].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 mars 2022.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
___

______________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 6 JUILLET 2022

1°/ M. [R] [D], domicilié [Adresse 1],

2°/ M. [S...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

SG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 juillet 2022

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 666 F-D

Pourvoi n° T 21-25.538

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de [H] [K].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 mars 2022.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 6 JUILLET 2022

1°/ M. [R] [D], domicilié [Adresse 1],

2°/ M. [S] [K],

3°/ Mme [N] [K],

tous deux domiciliés [Adresse 3],

4°/ M. [U] [F], domicilié [Adresse 4],

ont formé le pourvoi n° T 21-25.538 contre l'arrêt rendu le 27 octobre 2021 par la cour d'appel de Montpellier (2e chambre de la famille), dans le litige les opposant :

1°/ à [H] [K], domiciliée [Adresse 7], mineure,

2°/ au président du conseil départemental de l'Hérault, domicilié service de l'ASE, [Adresse 6],

3°/ à Mme [B] [C], domiciliée [Adresse 5], en qualité d'administrateur ad hoc de [H] [K],

4°/ au procureur général près la cour d'appel de Montpellier, domicilié en son [Adresse 8],

5°/ à M. [X] [A],

6°/ à Mme [P] [A],

domiciliés tous deux [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

M. et Mme [A] ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Beauvois, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de MM. [D] et [F], de M. et Mme [K] et de M. et Mme [A], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de [H] [K], mineure, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat du président du conseil départemental de l'Hérault, après débats en l'audience publique du 28 juin 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Beauvois, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Recevabilité du mémoire déposé au nom de la mineure, relevée d'office

1. [H] [K], mineure, n'étant pas partie à l'instance, ne tire d'aucune disposition légale la faculté de déposer un mémoire.

2. Le mémoire déposé en son nom par la société Boré, Salve de Bruneton et [E] est donc irrecevable.

Faits et procédure

3. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 27 octobre 2021), le 24 août 2020, [Z] [K] a, en raison de son état de santé, contractualisé avec le conseil départemental de l'Hérault, l'accueil de sa fille, [H] [K], née le 3 juin 2009.

4. Après son décès, survenu le 13 décembre 2020, et en l'absence de titulaire de l'autorité parentale, le juge des tutelles des mineurs a ouvert la tutelle de [H] [K], constaté sa vacance, déféré celle-ci au président du conseil départemental de l'Hérault et nommé un administrateur ad hoc chargé de représenter la mineure dans les opérations de liquidation de la succession, d'administrer ses fonds et ses biens, de lui ouvrir un compte et de faire le point s'agissant d'éventuels retours des biens meubles.

Examen des moyens

Sur le moyen, pris en ses deux premières branches, du pourvoi principal et le moyen, pris en ses deux premières branches, du pourvoi incident, rédigés en des termes identiques, réunis

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses trois dernières branches, du pourvoi principal et le moyen, pris en ses trois dernières branches, du pourvoi incident, rédigés en des termes identiques, réunis

Enoncé des moyens

6. MM. [D] et [F], M. et Mme [K] et M. et Mme [A] font grief à l'arrêt de constater la vacance de la tutelle de la mineure, de la déférer au président du conseil départemental, de désigner un administrateur ad hoc chargé de la représenter dans la liquidation de la succession de sa mère, d'administrer ses fonds et ses biens jusqu'à sa majorité, de lui ouvrir un compte et le cas échéant de faire le point s'agissant des éventuels retours des biens meubles, alors :

« 3°/ qu'aux termes de l'article 391 du code civil, si la tutelle est ouverte, le juge des tutelles convoque le conseil de famille car en principe, la tutelle est organisée avec le conseil de famille, conformément à l'article 398, dont le juge désigne les membres pour la durée de la tutelle ; qu'en affirmant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 399 et 411 du code civil « qu'il appartient au juge des tutelles de décider s'il est de l'intérêt de l'enfant de composer un conseil de famille composé des proches de l'enfant ou si la tutelle doit plutôt être administrée par la collectivité publique », les juges du fond qui avaient pourtant constaté que l'ensemble des proches de [H] sollicitaient la possibilité de prendre des décisions dans son intérêt, et qui ont néanmoins affirmé que « il apparaît que la constitution d'un conseil de famille telle que prévue par l'article 399 du code civil paraît impossible comme contraire à l'intérêt de [H] », n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations, ont excédé leurs pouvoirs et ont violé l'ensemble des textes susvisés ;

4°/ que la tutelle d'Etat a un caractère subsidiaire et exige que soit constatée la carence de la famille du mineur protégé ; que le juge, qui prononce la vacance de la tutelle, doit s'appuyer sur des faits certains et précis de nature à caractériser la carence familiale ; qu'en l'espèce, l'accord des consorts [K], [F] et [D] en faveur de la prise en charge de [H] [K] existait puisqu'ils avaient demandé à faire partie du conseil de famille et que M. [R] [D], parrain de [H], avait manifesté la volonté d'assumer la charge de la tutelle de [H], et ce de manière constante ; qu'en se bornant à énoncer qu'il était impossible à l'ensemble des personnes qui contestait la décision du juge des tutelles d'offrir à l'enfant une prise en charge quotidienne pour des raisons honorables, sans indiquer pour quelles raisons aucune de ces personnes qu'elle a visées de manière générale et impersonnelle n'était en mesure d'assurer la charge de la tutelle de [H], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 399 et 411 du code civil ;

5°/ que la tutelle n'est vacante que si nul n'est en mesure d'en assumer la charge ; que le juge ne peut déclarer la vacance de la tutelle sans avoir tenté de réunir un conseil de famille et constaté que cette réunion était impossible ; qu'en l'espèce, M. [D], les époux [K] et M. [F] faisaient valoir qu'ils souhaitaient faire partie du conseil de famille, qu'il était de l'intérêt de l'enfant [H] [K] à ce qu'ils soient présents au sein du conseil de famille afin de pouvoir l'accompagner au mieux dans les décisions importantes ; qu'en se bornant à énoncer qu'il était impossible à l'ensemble des personnes qui contestait la décision du juge des tutelles d'offrir à l'enfant une prise en charge quotidienne pour des raisons honorables et qu'il ne pouvait donc être constitué un conseil de famille, sans avoir ni tenté de réunir un conseil de famille, ni constaté que cette réunion était impossible, la cour d'appel a violé les articles 399 et 411 du code civil et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et excédé ses pouvoirs. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel a relevé, par motifs propres et adoptés, que le rapport des services éducatifs mettait en évidence un contexte familial complexe ne permettant pas d'envisager l'accueil de [H] au sein de sa famille, dès lors, d'une part, que, si tous les proches contactés indiquaient avoir des liens affectifs avec l'enfant et vouloir prendre des décisions dans son intérêt, ils n'avaient, depuis le décès de sa mère, manifesté par aucun acte l'intention de s'investir auprès de [H] et n'étaient pas en mesure de s'occuper d'elle, d'autre part, qu'il existait des non-dits et des conflits intra-familiaux qui rendaient impossible tout dialogue entre eux.

8. Elle a retenu, par motifs adoptés, que le placement administratif, sollicité par les proches de l'enfant, n'était pas de l'intérêt de celle-ci qui, après avoir vécu comme des abandons les décès successifs de sa mère biologique et de sa mère adoptive, avait besoin d'un cadre stable et sécurisant jusqu'à sa majorité.

9. La cour d'appel, qui a pris en considération l'intérêt de la mineure, a pu en déduire qu'il était impossible de constituer un conseil de famille et qu'en l'absence de toute personne en mesure de la prendre en charge, la tutelle était vacante.

10. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne MM. [D] et [F], M. et Mme [K] et M. et Mme [A] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen identique aux pourvois principal et incident produit par la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour MM. [D] et [F] et M. et Mme [K], demandeurs au au pourvoi principal, et M. et Mme [A], demandeurs au pourvoi incident.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé l'ordonnance du juge des tutelles en ce qu'elle a constaté la vacance de la tutelle de la mineure [H] [K] née le 3 juin 2009 à Bangui, a déféré la tutelle de la mineure à Monsieur le président du conseil départemental et désigné Madame [C] en qualité d'administrateur ad hoc chargé de représenter [H] [K] née le 3 juin 2009 à Bangui (République Centrafricaine) dans les opérations de liquidation de la succession de [Z] [K] décédée le 13 décembre 2020, percevoir et placer les fonds en provenant, les administrer jusqu'à la majorité ainsi que les biens, et ouvrir un compte courant au nom de la mineure le cas échéant, de faire le point s'agissant d'éventuels retours des biens meubles ;

1°) ALORS QUE tout jugement, même en procédure orale, doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens ; qu'en n'exposant pas, ne serait-ce que sommairement, les moyens et prétentions des parties et particulièrement des exposants, la cour d'appel, qui a énoncé, au surplus à tort, qu'ils étaient non comparants et que leur avocate, Me [M], était elle-même non comparante s'agissant des consorts [D] et [K] (p 1) avant d'ajouter qu'elle représentait M. [U] [F] et que le « magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour » n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle et n'a pas satisfait aux exigences des articles 454, 455 et 458 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE dans toutes les procédures le concernant, lorsque son intérêt le commande et en particulier lorsqu'il s'agit d'organiser sa tutelle, le juge doit s'assurer que le mineur été informé de son droit à être entendu et à être assisté d'un avocat et, quand il est capable de discernement, l'entendre lui-même; qu'en l'espèce, en déférant la tutelle de [H] [K] à M. le président du conseil départemental plutôt qu'à la famille de la mineure qui s'était pourtant mobilisée unanimement devant la cour, sans même mentionner ni s'assurer elle-même que la procédure suivie a permis à [H] [K] d'être présente, représentée, et d'être assistée d'un avocat, c'est-à-dire sans garantir que la décision qu'elle a prise l'a été après que [H] [K] ait été mise en mesure d'être entendue, de donner son avis et de participer utilement et effectivement à un débat contradictoire sur des mesures aussi déterminantes de sa personne, la cour d'appel a été pris irrégulièrement cette mesure, sans respecter les droits essentiels susvisés en violation des articles 388-1 et 388-1-1, 394 du code civil, ensemble les articles 3-1 et 12-2 de la Convention internationale des droits de l'enfant, d'applicabilité directe et l'article 6 § 1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ;

3°) ALORS QU'aux termes de l'article 391 du code civil, si la tutelle est ouverte, le juge des tutelles convoque le conseil de famille car en principe, la tutelle est organisée avec le conseil de famille, conformément à l'article 398, dont le juge désigne les membres pour la durée de la tutelle ; qu'en affirmant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 399 et 411 du code civil « qu'il appartient au juge des tutelles de décider s'il est de l'intérêt de l'enfant de composer un conseil de famille composé des proches de l'enfant ou si la tutelle doit plutôt être administrée par la collectivité publique », les juges du fond qui avaient pourtant constaté que l'ensemble des proches de [H] sollicitaient la possibilité de prendre des décisions dans son intérêt, et qui ont néanmoins affirmé que « il apparaît que la constitution d'un conseil de famille telle que prévue par l'article 399 du code civil paraît impossible comme contraire à l'intérêt de [H] », n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations, ont excédé leurs pouvoirs et ont violé l'ensemble des textes susvisés ;

4°) ALORS QUE la tutelle d'Etat a un caractère subsidiaire et exige que soit constatée la carence de la famille du mineur protégé ; que le juge, qui prononce la vacance de la tutelle, doit s'appuyer sur des faits certains et précis de nature à caractériser la carence familiale ; qu'en l'espèce, l'accord des consorts [K], [F] et [D] en faveur de la prise en charge de [H] [K] existait puisqu'ils avaient demandé à faire partie du conseil de famille et que Maître [R] [D], parrain de [H], avait manifesté la volonté d'assumer la charge de la tutelle de [H], et ce de manière constante ; qu'en se bornant à énoncer qu'il était impossible à l'ensemble des personnes qui contestait la décision du juge des tutelles d'offrir à l'enfant une prise en charge quotidienne pour des raisons honorables, sans indiquer pour quelles raisons aucune de ces personnes qu'elle a visées de manière générale et impersonnelle n'était en mesure d'assurer la charge de la tutelle de [H], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 399 et 411 du code civil ;

5°) ALORS QUE la tutelle n'est vacante que si nul n'est en mesure d'en assumer la charge ; que le juge ne peut déclarer la vacance de la tutelle sans avoir tenté de réunir un conseil de famille et constaté que cette réunion était impossible ; qu'en l'espèce, Monsieur [D], les époux [K] et Monsieur [F] faisaient valoir qu'ils souhaitaient faire partie du conseil de famille, qu'il était de l'intérêt de l'enfant [H] [K] à ce qu'ils soient présents au sein du conseil de famille afin de pouvoir l'accompagner au mieux dans les décisions importantes ; qu'en se bornant à énoncer qu'il était impossible à l'ensemble des personnes qui contestait la décision du juge des tutelles d'offrir à l'enfant une prise en charge quotidienne pour des raisons honorables et qu'il ne pouvait donc être constitué un conseil de famille, sans avoir ni tenté de réunir un conseil de famille, ni constaté que cette réunion était impossible, la cour d'appel a violé les articles 399 et 411 du code civil et 8 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et excédé ses pouvoirs.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 21-25538
Date de la décision : 06/07/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 27 octobre 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 06 jui. 2022, pourvoi n°21-25538


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SARL Cabinet Munier-Apaire, SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.25538
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