Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. G...D...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner solidairement la communauté de communes du canton de Laissac, la société ABTP et M. B... à lui verser la somme totale de 90 168,67 euros en réparation des préjudices subis du fait des désordres affectant l'immeuble lui appartenant situé à Coussergues (Aveyron) et de mettre solidairement à leur charge une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, outre les dépens de l'instance.
Par un jugement n° 1203216 du 29 décembre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a, premièrement, condamné solidairement la communauté de communes du canton de Laissac, la société ABTP et M. B... à verser à M. D...la somme de 8 318,67 euros, deuxièmement, condamné la communauté de communes à garantir la société ABTP et M. B...à hauteur de 50 % des condamnations prononcées à leur encontre, troisièmement, condamné la société ABTP et M. B...à se garantir mutuellement à hauteur de 25 % des condamnations prononcées à leur encontre et, quatrièmement, mis à la charge de la communauté de communes du canton de Laissac, la société ABTP et M. B... les sommes respectives de 600 euros, 300 euros et 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 mars 2016, complétée par un mémoire enregistré le 14 mai 2018, M. D..., représenté par MeF..., demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 29 décembre 2015 ;
2°) de condamner solidairement la communauté de communes du canton de Laissac, la société ABTP et M. B... à lui verser la somme de 8 318,67 euros, en indexant cette somme sur l'indice des prix à la construction ;
3°) de condamner solidairement la communauté de communes du canton de Laissac, la société ABTP et M. B... à lui verser la somme de 73 644 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de jouissance ;
4°) de condamner solidairement les mêmes à lui payer les frais d'expertise judiciaire qu'il a engagés ;
5°) de mettre à la charge de la communauté de communes du canton de Laissac, la société ABTP et M. B... les dépens et la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la cour devra confirmer la responsabilité du maitre d'oeuvre et des entreprises chargées des travaux à raison des dommages causés à des tiers par l'exécution de travaux publics ;
- les travaux permettant de rendre son logement habitable n'ont pu être réalisés après le dépôt du rapport d'expertise, d'une part, pour les nécessités de la procédure, si jamais une contre-enquête venait à être décidée et, d'autre part, en raison du fait qu'il était retraité ;
- le tribunal administratif n'a pas procédé à la réévaluation de la somme de 8 318,67 euros au paiement de laquelle les défendeurs ont été condamnés ; il convient de procéder à cette réévaluation en référence à l'indice du coût de la construction au mois d'octobre 2007 ;
- contrairement à ce qu'a indiqué le tribunal administratif, il s'est trouvé dans l'impossibilité de louer son bien immobilier ; son préjudice de jouissance, résultant de l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé de louer son immeuble doit être évalué à la somme de 73 644 euros, correspondant à une valeur locative mensuelle de 361 euros sur une période de 204 mois.
Par des mémoires enregistrés le 23 juin 2016, le 5 juin 2017 et le 22 juin 2017, la société Aveyron Bâtiment Travaux Publics (ABTP), représentée par MeC..., conclut :
1°) à titre principal, au rejet de la requête et au rejet de toute demande en garantie qui pourrait être présentée contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, à la réformation du jugement attaqué en tant que le tribunal n'a pas condamné la communauté de commune du canton Laissac et M. B...à la garantir de la totalité des condamnations prononcées à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de M. D...ou, à défaut, de la communauté de communes des causses à l'Aubrac, venant aux droits de la communauté de communes du canton de Laissac et de M.B..., la somme de 4 000 euros à titre de frais de procès.
Elle soutient que :
- les conclusions de M. D...tendant à la réévaluation de la somme de 8 318,76 euros doivent être rejetées, dès lors que celui-ci n'a jamais indiqué au tribunal le montant de la réévaluation espérée ni même le mode d'évaluation souhaité ; ainsi, les conclusions à fin de réévaluation présentées par M. D...sont nouvelles en appel et, comme telles, irrecevables ; les premiers juges n'étaient pas tenus d'appliquer d'office indexation ;
- les conclusions à fin d'indemnisation d'un préjudice de jouissance doivent être rejetées, dès lors qu'il n'est pas établi que le logement en question était inhabitable et que M. D... n'a jamais eu l'intention de louer ce logement ; celui-ci, qui a attendu cinq ans après le dépôt du rapport d'expertise pour saisir la juridiction compétente, est en grande partie responsable de la période durant laquelle son logement serait resté vacant ; en outre, il n'a jamais effectué les travaux qui auraient été nécessaires pour remédier aux désordres ;
- la communauté de commune est irrecevable en appel à présenter des conclusions d'appel en garantie à son encontre, dès lors qu'elle ne l'avait pas fait en première instance ;
- si la cour devait faire droit, même partiellement, à l'appel principal, elle devrait accueillir ses conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a limité l'appel en garantie qu'elle avait présenté à l'encontre de la communauté de communes et de M.B... ; à cet égard, elle est fondée à se prévaloir de la réception définitive prononcée sans réserve, qui a mis fin aux rapports contractuels ; de même, la carence du maitre d'ouvrage justifie que la communauté de communes garantisse en totalité la société ABTP des condamnations prononcées à son encontre ; enfin, la carence de l'architecte justifie également que celui-ci garantisse en totalité la société ABTP des condamnations prononcées à son encontre.
Par des mémoires, enregistrés le 6 avril 2017 et le 22 juin 2017, et des pièces enregistrées le 18 avril 2018, la communauté de communes des Causses à l'Aubrac, venant aux droits de la communauté de communes du canton de Laissac, représenté par MeH..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à la réformation du jugement attaqué ;
3°) au rejet des appels en garantie dirigés contre elle et à ce que M. B...et la société ABTP la garantissent de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre ;
4°) à ce que soit mise à la charge de M. D...la somme de 4 000 euros à titre de frais de procès.
Elle soutient que :
- les conclusions de M. D...tendant à la réévaluation, par indexation sur l'indice des prix, de la somme de 8 318,76 euros sont nouvelles en appel et, comme telles, irrecevables ;
- le préjudice de jouissance allégué n'est pas établi ; ce préjudice ne saurait être évalué sur la base d'une période de 17 années ; M. D...est à l'origine du préjudice qu'il allègue dès lors qu'il n'a pas mis en oeuvre les travaux qui lui aurait permis de rendre son logement habitable ;
- les désordres trouvent leur origine exclusive dans des fautes de l'architecte et de la société ABTP ; la communauté de communes ne saurait donc supporter une quelconque condamnation ;
- ses conclusions d'appel en garantie sont recevables ; le tribunal administratif a considéré, à tort, qu'elle n'avait pas présenté de conclusions d'appel en garantie, alors que, par son mémoire du 16 novembre 2015, elle avait demandé de rabattre l'ordonnance de clôture d'instruction en formulant une demande d'appel en garantie à l'encontre de M. B...et de la société ABTP.
Par un mémoire enregistré le 4 mai 2017, M. B..., représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de M. D...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la condamnation de 8 318,67 euros prononcée en première instance ne saurait être réévaluée en appel, dès lors que les travaux de confortation ont été immédiatement réalisés par le maître d'ouvrage ;
- le préjudice de jouissance allégué n'est justifié ni dans son principe, ni dans son montant.
Par ordonnance du 15 mai 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 19 juin 2018 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. David Katz,
- et les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. En 2005, la communauté de communes du canton de Laissac, aux droits de laquelle vient dans la présente instance la communauté de communes des Causses à l'Aubrac, a fait procéder à la démolition de deux bâtiments mitoyens d'un immeuble appartenant à M.D..., cadastré sous le n° 387 section B sur le territoire de la commune de Coussergues (Aveyron). Ces travaux ont entrainé l'effondrement partiel du mur pignon de cet immeuble. Après avoir saisi la juridiction judiciaire d'une demande d'expertise en référé puis, à la suite du dépôt du rapport de l'expert, le 5 octobre 2007, d'une demande indemnitaire, M. D...a demandé au tribunal administratif de Toulouse, le 13 juillet 2012, de condamner solidairement la communauté de communes du canton de Laissac, maitre d'ouvrage, M.B..., maître d'oeuvre, et la société ABTP, entreprise chargée des travaux, à lui verser la somme totale de 90 168,67 euros en réparation de ses préjudices. Par un jugement du 29 décembre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a condamné solidairement la communauté de communes du canton de Laissac, la société ABTP et M. B... à verser à M. D...la somme de 8 318,67 euros, a condamné la communauté de communes à garantir la société ABTP et M. B... à hauteur de 50 % des condamnations prononcées à leur encontre, a condamné la société ABTP et M. B...à se garantir mutuellement des condamnations prononcées à leur encontre à hauteur de 25 %, et enfin, a mis à la charge de la communauté de communes du canton de Laissac, la société ABTP et M. B... les sommes respectives de 600 euros, 300 euros et 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. D...relève appel de ce jugement et demande à la cour, d'une part, que la condamnation prononcée en première instance soit réévaluée en référence en fonction de l'indice du coût de la construction, d'autre part, que les constructeurs soient solidairement condamnés à lui verser la somme de 73 644 euros en réparation de son préjudice de jouissance. La communauté de communes des Causses à l'Aubrac, venant aux droits de la communauté de communes du canton de Laissac, conclut au rejet de la requête et demande la réformation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamné à garantir, à hauteur de 50 %, M. B... et la société ABTP des condamnations prononcées à leur encontre. La communauté de communes demande à la cour de condamner M. B... et la société ABTP à la garantir en totalité des condamnations prononcées par les premiers juges. La société ABTP conclut, à titre principal, au rejet de la requête et de toute demande en garantie qui pourrait être présentée contre elle et, à titre subsidiaire, à la réformation du jugement attaqué en tant que le tribunal n'a pas condamné la communauté de commune du canton Laissac et M. B...à la garantir de la totalité des condamnations prononcées. M. B...conclut au rejet de la requête de M.D....
Sur les conclusions de M.D... :
2. En premier lieu, M. D...demande que la somme de 8 318,67 euros au paiement de laquelle ont été condamnés les constructeurs par le jugement attaqué, et qui correspondait au coût de réparation des désordres tels qu'évalués par l'expert en 2007, soit revalorisée en appliquant l'indice des prix à la construction. Il résulte de l'instruction que, si des travaux destinés à conforter l'immeuble de M. D... ont été réalisés immédiatement après le dépôt du rapport d'expertise, il restait à effectuer des travaux afin que ce logement soit de nouveau habitable. M. D...fait valoir que ces travaux n'ont pu être réalisés, d'une part, " pour les nécessités de la procédure, si jamais une contre-enquête venait à être décidée " et, d'autre part, en raison de sa situation économique induite par le fait qu'il était retraité. Toutefois, ces seules circonstances, qui ne sont étayées par aucun autre élément ni aucun justificatif, ne démontrent pas que les travaux en cause auraient été retardés en raison de l'impossibilité dans laquelle se serait trouvé M. D...d'en assurer le financement et ne permettent pas de remettre en cause la pertinence de l'évaluation du coût des travaux effectuée par les premiers juges à la date du dépôt du rapport d'expertise, soit au 5 octobre 2007. Par conséquent, les conclusions tendant à la revalorisation de la somme de 8 318,67 euros doivent être rejetées, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir qui leur est opposée par la société ABTP et la communauté de communes des Causses à l'Aubrac.
3. En second lieu, M. D...demande l'indemnisation d'un préjudice de jouissance résultant de l'impossibilité dans laquelle il se serait trouvé de louer son logement durant une période de 17 années. Il évalue ce préjudice à la somme de 73 644 euros, correspondant à une valeur locative mensuelle de 361 euros sur une période de 17 ans. Toutefois, en se bornant à faire état des circonstances mentionnées au point 2 et à produire devant la cour la copie d'une annonce diffusée sur internet proposant son logement à la location, le requérant n'établit pas avoir été dans l'impossibilité, pendant la période considérée, de réaliser les travaux nécessaires à rendre ce logement habitable. Les conclusions d'indemnisation à ce titre doivent donc être rejetées.
4. Il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a limité à la somme de 8 318,67 euros la condamnation prononcée à son profit.
Sur les conclusions de la communauté de communes des Causses à l'Aubrac :
5. Aux termes de l'article R. 613-1 du code de justice administrative : " Le président de la formation de jugement peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close. Cette ordonnance n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours (...) ". L'article R. 613-3 du même code précise : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication, sauf réouverture de l'instruction ". Enfin, selon l'article R. 613-4 de ce code : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours ".
6. Il résulte de l'instruction que le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a, par une ordonnance du 12 octobre 2015, fixé au 2 novembre 2015 la clôture de l'instruction dans l'instance n° 1203216. Il est constant que la communauté de commune du canton de Laissac n'a présenté, pour la première fois, des conclusions d'appel en garantie contre M. B...et la société ABTP que dans un mémoire daté du 16 novembre 2015, enregistré au greffe du tribunal administratif par télécopie le 17 novembre 2015. En vertu des dispositions précitées, ces conclusions n'avaient pas à être examinées par le tribunal administratif, lequel n'était pas tenu de rouvrir l'instruction, quand bien même la communauté de communes le lui demandait. Il suit de là que les conclusions d'appel en garantie présentées par la communauté de communes, dirigées contre M. B...et la société ABTP, doivent être regardées comme nouvelles en appel et sont, comme telles, irrecevables.
7. Par le jugement attaqué, le tribunal a condamné la communauté de communes du canton de Laissac, aux droits de laquelle vient la communauté de communes des Causses à l'Aubrac, à garantir M. B...et la société ABTP à hauteur de 50% des condamnations prononcées à leur encontre. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que le maître d'oeuvre a proposé au maître d'ouvrage de lui confier une mission de diagnostic et de confier à un bureau de contrôle une mission de contrôle des avoisinants, ce que la communauté de communes n'a pas souhaité faire. Si celle-ci soutient que cette recommandation n'a pas été formulée par écrit, elle n'a jamais contesté, lors des opérations d'expertise, le fait que cette recommandation, qui a été prise en compte par l'expert pour arrêter ses conclusions, ait effectivement été émise par l'architecte. Par conséquent, la communauté de communes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a mis à sa charge la moitié des condamnations solidaires prononcées à l'encontre des constructeurs.
8. Il résulte de tout ce qui précède que ni M.D..., ni la communauté de communes des Causses à l'Aubrac ne sont fondés à demander la réformation du jugement attaqué. Par voie de conséquence, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions subsidiaires de la société ABTP.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté de communes des Causses à l'Aubrac sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. B... et la société Aveyron Bâtiment Travaux Publics au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M.G... D..., à la communauté de communes des Causses à l'Aubrac, à M. E... B...et à la société Aveyron Bâtiment Travaux Publics.
Délibéré après l'audience du 11 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Aymard de Malafosse, président,
M. Laurent Pouget, président-assesseur,
M. David Katz, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 15 novembre 2018.
Le rapporteur,
David KATZLe président,
Aymard de MALAFOSSELe greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX00855