La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/05/1994 | FRANCE | N°02912

France | France, Tribunal des conflits, 16 mai 1994, 02912


Vu, enregistrée à son secrétariat le 23 novembre 1993, l'expédition du jugement du 21 octobre 1993 par lequel le tribunal administratif de Limoges, saisi d'une demande des consorts X... tendant à faire déclarer la commune de Malemort-sur-Corrèze responsable du préjudice qu'ils ont subi du fait de l'effondrement entre avril et mai 1983 de la voie desservant le lotissement les Hauts de Lacan dans ladite commune et à faire organiser une expertise, étendue à M. Z... et à la société Miane et Vinatier, pour déterminer les causes du glissement de terrain et le montant des dommages, a r

envoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret ...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 23 novembre 1993, l'expédition du jugement du 21 octobre 1993 par lequel le tribunal administratif de Limoges, saisi d'une demande des consorts X... tendant à faire déclarer la commune de Malemort-sur-Corrèze responsable du préjudice qu'ils ont subi du fait de l'effondrement entre avril et mai 1983 de la voie desservant le lotissement les Hauts de Lacan dans ladite commune et à faire organiser une expertise, étendue à M. Z... et à la société Miane et Vinatier, pour déterminer les causes du glissement de terrain et le montant des dommages, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;
Vu l'arrêt du 5 janvier 1987, frappé d'un pourvoi rejeté par arrêt de la Cour de Cassation du 6 décembre 1988, par lequel la cour d'appel de Limoges s'est déclarée incompétente pour connaître de ce litige ;
Vu, enregistré le 2 février 1994, le mémoire présenté par le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire tendant à ce que la juridiction judiciaire soit déclarée compétente ;
Vu, enregistré le 16 mars 1994, le mémoire par lequel la société Miane et Vinatier s'en rapporte à la justice ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des Conflits a été notifiée à M. Z... et au maire de la commune de Malemort-sur-Corrèze qui n'ont pas produit de mémoires ; Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Saintoyant, membre du Tribunal,
- les observations de Me Delvové, avocat des consorts X... et de Me Odent, avocat de la société Miane et Vinatier,
- les conclusions de M. Y.... Martin, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les consorts X..., autorisés à lotir un terrain sis sur la commune de Malemort-sur-Corrèze, ont chargé M. Z..., géomètre, de l'étude du projet, de l'établissement des plans et de la direction des travaux et ont confié leur exécution à la société Miane et Vinatier ; que le 11 mars 1983 le préfet de la Corrèze a délivré le certificat prévu par l'article R. 315-36 du code de l'urbanisme ; que les 24 et 25 avril 1983 s'est produit un effondrement d'une voie desservant les terrains du lotissement entraînant une masse de terre dans des propriétés situées en contrebas ;
Considérant que par arrêt du 5 janvier 1987, devenu irrévocable, la Cour d'appel de Limoges a confirmé le jugement par lequel le tribunal de grande instance de Brive s'est déclaré incompétent pour connaître d'une demande formée contre les consorts X... par l'une des propriétaires des terrains affectés par l'effondrement ainsi que des demandes en garantie et déclaration de responsabilité dirigées par les consorts X... contre M. Z... et la société Miane et Vinatier, en présence de la commune de Malemort-sur-Corrèze, appelée en cause ; que statuant sur la requête des consorts X... tendant à faire déclarer la commune de Malemort-sur-Corrèze responsable du préjudice qu'ils ont subi et faire organiser une expertise, étendue à M. Z... et à la société Miane et Vinatier, pour déterminer les causes de l'effondrement, le tribunal administratif de Limoges a, par jugement du 21 octobre 1993, renvoyé au Tribunal le soin de décider sur la question de compétence ;
Considérant, en premier lieu, qu'une voie privée, même ouverte à la circulation publique, n'est pas un élément du domaine public de la commune où elle est située ; que la circonstance qu'une délibération du conseil municipal de Malemort-sur-Corrèze du 17 octobre 1969 ait prévu de classer dans le domaine public communal les voies desservant les lotissements qui seront exécutés sur le territoire de la commune et que la prise en charge interviendrait dès que les travaux d'aménagement de ces lotissements seraient réalisés conformément aux dispositions de l'arrêté préfectoral approuvant le projet, ne peut suffire, en l'absence soit d'une décision de transfert d'office prise par l'autorité administrative dans les conditions prévues par les articles L. 318-3 et R. 318-10 et suivants du code de l'urbanisme soit de l'acquisition par la commune, suivie du classement, à incorporer ces voies dans le domaine public ; qu'il résulte des éléments du dossier qu'un tel transfert de propriété n'était pas intervenu à la date du glissement de terrain ;
Considérant, en second lieu, que la commune n'avait pas décidé de prendre en charge des travaux d'aménagement ou d'entretien d'une voie demeurant privée et n'a pas, en fait, accompli dans la voie en cause des travaux à des fins d'intérêt général ;
Considérant qu'ainsi la voie du lotissement ne faisait pas partie du domaine public communal lors de son effondrement et n'avait pas fait l'objet de travaux publics réalisés par la commune ou pour son compte ; qu'il s'ensuit que le litige relève de la compétence de la juridiction judiciaire ;
Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant les consorts X... à M. Z... et la société Miane et Vinatier, en présence de la commune de Malemort-sur-Corrèze.
Article 2 : L'arrêt de la cour d'appel de Limoges du 5 janvier 1987 est déclaré nul et non avenu en ce qu'il a pour objet les demandes dirigées par les consorts X... contre M. Z... et la société Miane et Vinatier. La cause et les parties sont renvoyées devant cette cour d'appel.
Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Limoges est déclarée nulle et non avenue, à l'exception du jugement rendu le 21 octobre 1993 par ce tribunal.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice qui est chargé de son exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 02912
Date de la décision : 16/05/1994
Sens de l'arrêt : Déclaration de compétence judiciaire
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Conflit sur renvoi juridictionnel

Analyses

COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPETENCE DETERMINEE PAR UN CRITERE JURISPRUDENTIEL - TRAVAUX PUBLICS - DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - Notion de dommages de travaux publics - Absence - Dommages résultant de travaux privés sur une voie privée.

24-01-01-01-02 Une voie privée, même ouverte à la circulation publique, n'est pas un élément du domaine public de la commune où elle est située. La circonstance qu'une délibération du conseil municipal ait prévu de classer dans le domaine public communal l'ensemble des voies desservant des lotissements ne peut suffire, en l'absence d'une acquisition suivie de classement ou d'une décision de transfert d'office prise dans les conditions prévues aux articles L.318-3 et R.318-10 et suivants du code de l'urbanisme, à incorporer ces voies au domaine public.

DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - CONSISTANCE ET DELIMITATION - DOMAINE PUBLIC ARTIFICIEL - BIENS NE FAISANT PAS PARTIE DU DOMAINE PUBLIC ARTIFICIEL - Voies privées ouvertes à la circulation publique.

17-03-02-06-01, 67-01-01-02 Travaux sur une voie privée desservant les terrains d'un lotissement. La commune n'ayant ni décidé de prendre en charge les travaux d'aménagement ou d'entretien de la voie, ni accompli en fait, dans la voie en cause, des travaux à des fins d'intérêt général, la voie du lotissement n'a pas fait l'objet de travaux publics réalisés par la commune ou pour son compte.

TRAVAUX PUBLICS - NOTION DE TRAVAIL PUBLIC ET D'OUVRAGE PUBLIC - TRAVAIL PUBLIC - TRAVAUX NE PRESENTANT PAS CE CARACTERE - Travaux n'impliquant pas de personne publique - Travaux privés réalisés sur une voie privée.


Références :

Code de l'urbanisme R315-36, L318-3, R318-10


Composition du Tribunal
Président : M. Lemontey
Rapporteur ?: M. Saintoyant
Rapporteur public ?: M. Martin
Avocat(s) : Mes Delvolvé, Odent, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:1994:02912
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award