Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 août 1992 et 14 décembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la commune de Buchères (10800), représentée par son maire en exercice habilité par une délibération du conseil municipal du 28 juillet 1992 ; la commune de Buchères demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 juin 1992 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a, d'une part, annulé l'arrêté du 18 mai 1990 par lequel son maire a prononcé l'exclusion temporaire pour deux jours les 20 et 21 juin 1990 de M. Michel X..., d'autre part, condamné la commune requérante à verser à ce dernier la somme de trois cents francs en réparation du préjudice résultant de ladite décision ;
2°) le rejet de la demande de M. X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Keller, Auditeur,
- les observations de Me Blanc, avocat de la commune de Buchères et de Me Roger, avocat de M. Michel X...,
- les conclusions de M. Gaeremynck, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du 4ème alinéa de l'article 89 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " ... Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité territoriale après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline. Ce pouvoir est exercé dans les conditions prévues à l'article 19 du titre Ier du statut général. L'autorité territoriale peut décider, après avis du conseil de discipline, de rendre publics la décision portant sanction et ses motifs ..." ; qu'aux termes de l'article 19 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : "Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier ..." ;
Considérant que pour l'application de ces dispositions, le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux a pu légalement prescrire, à son article 4, que : "L'autorité investie du pouvoir disciplinaire informe par écrit l'intéressé de la procédure disciplinaire engagée contre lui, lui précise les faits qui lui sont reprochés et lui indique qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel au siège de l'autorité territoriale et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix ..." ; que, dès lors, le moyen tiré par voie d'exception de ce que ces dispositions seraient illégales doit être écarté ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'avant que ne fût infligée à M. X..., le 18 mai 1990, la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions, ce dernier n'a été informé ni de son droit à obtenir la communication intégrale de son dossier ni de la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix ; que, contrairement à ce que soutient la commune requérante, cette méconnaissance des dispositions précitées présente le caractère d'un vice substantiel ; qu'ainsi, et sans que la commune puisse utilement soutenir ni que la communication du dossier était inutile en raison de son inconsistance ni que M. X... aurait eu connaissance des motifs de la sanction, la sanction infligée à M. X... a été prise sur une procédure irrégulière et était pour ce motif illégale ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Buchères n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a annulé ledit arrêté ;
Article 1er : La requête de la commune de Buchères est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune de Buchères, à M. Michel X... et au ministre de l'intérieur.