LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 13 octobre 2015), qu'en 2004 et 2006, la société Banque postale (la banque) a consenti à M. et Mme X... (les emprunteurs) quatre prêts immobiliers garantis par le cautionnement de la société Crédit logement (la caution) ; que les emprunteurs ont adhéré à l'assurance de groupe souscrite par la banque auprès de la société CNP assurances (l'assureur) ; qu'à la suite de leur défaillance, la caution les a assignés en paiement, après avoir désintéressé la banque ; que M. X... a assigné l'assureur afin de voir condamner celui-ci à le garantir des éventuelles condamnations prononcées à son encontre au profit de la caution ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que sont abusives les clauses qui instaurent un déséquilibre significatif entre l'assureur et l'assuré non-professionnel ; qu'est nécessairement abusive une clause faisant cesser la garantie du risque d'incapacité à l'échéance de prêt suivant la mise à la retraite de l'emprunteur, quelle qu'en soit la cause, et donc y compris dans le cas où c'est le risque garanti (l'incapacité) qui a provoqué la mise à la retraite ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction résultant de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 ;
2°/ qu'il était constant que l'emprunteur était dans sa 55e année au moment de l'adhésion à l'assurance ; qu'il faisait valoir, en outre, qu'il recevait une pension de retraite inférieure à 600 euros par mois, avec laquelle il devait vivre, ce qui rendait totalement impossible le remboursement des échéances du prêt et que cette situation avait été créée, précisément, par l'incapacité physique de travailler, risque contre laquelle le contrat d'assurance était censé le protéger ; qu'en décidant que la clause susvisée n'était pas abusive, la cour d'appel a, de plus fort, violé l'article L.132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction résultant de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 132-1, alinéa 1er, devenu L. 212-1, alinéa 1er, du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; que, selon l'alinéa 7 du même article, devenu l'alinéa 3 de l'article L. 212-1, l'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ; que la cour d'appel a constaté que M. X... invoquait le caractère abusif de la clause prévoyant la cessation de la garantie « incapacité temporaire totale » à l'échéance de prêt suivant la mise à la retraite ou à la préretraite de l'assuré, quelle qu'en soit la cause ; qu'il en résulte qu'une telle clause, qui définissait de manière claire et précise l'objet principal du contrat, ne pouvait donner lieu à l'appréciation d'un éventuel caractère abusif ; que, par ce motif de pur droit, substitué, selon les modalités de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux que critique le moyen, l'arrêt se trouve légalement justifié de ce chef ;
Sur la dernière branche du moyen, ci-après annexé :
Attendu que M. X... fait le même grief à l'arrêt ;
Attendu que, contrairement à ce qui est soutenu, la clause litigieuse ne concerne pas le risque « invalidité », mais le risque « incapacité temporaire totale » ; que le moyen manque en fait ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour M. X....
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué
D'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande en garantie formée à l'encontre de la société CNP Assurances
AUX MOTIFS QUE les deux emprunteurs (Monsieur X... et Madame Y...) avaient adhéré au contrat d'assurance de groupe souscrit auprès de la CNP et destiné à les garantir contre les risques décès, perte totale et irréversible d'autonomie et ITT, et ce à un taux de 100 % ; que Monsieur X... avait été victime, le 19 janvier 2010, d'un accident l'ayant conduit à cesser son activité professionnelle ; qu'il bénéficiait depuis le 1er novembre 2010 d'une retraite pour inaptitude ; qu'il était stipulé dans la notice d'assurance : « la garantie ITT cesse à l'échéance de prêt qui suit la mise à la retraite ou préretraite (qu'elle qu'en soit la cause) » ; que la CNP avait opposé cette clause du contrat à Monsieur X... ; que se fondant sur un arrêt de la Cour de cassation en date du 22 mai 2008, Monsieur X... soutenait que la garantie restait due lorsque la mise à la retraite procédait d'une décision de la caisse concernée et que c'était la survenance du risque qui générait ladite décision ; que l'interprétation de Monsieur X... était manifestement extensive ; que la Cour de cassation avait simplement relevé que deux interprétations de la clause étaient possibles et qu'il fallait retenir l'interprétation la plus favorable à l'assuré ; que dans la présente espèce, la clause critiquée était dépourvue de toute ambiguïté et ne pouvait supporter qu'une seule interprétation, celle retenue par la CNP ; que Monsieur X... soutenait ensuite qu'il s'agissait d'une clause abusive ; que cependant, il admettait lui-même dans ses écritures qu'une telle clause était prévue par le contrat parce que la retraite mettait fin à l'aléa de perte de revenus ; que ces observations suffisaient à dire qu'au jour de la signature du contrat d'assurance par Monsieur X..., la clause litigieuse ne créait aucun déséquilibre manifeste ne faveur de l'assureur ; que ce n'était donc pas une clause abusive ; que la clause litigieuses énonçait une circonstance dans laquelle la garantie cessait et n'avait donc pas à être mentionnée en caractères gras ; qu'il résultait d'une attestation de la Banque Postale que les échéances du 19 avril au 20 novembre 2010 avaient effectivement été prises en charge par la CNP ; qu'il convenait d'infirmer le jugement, qui avait accordé à Monsieur X... le remboursement de ces échéances ;
1) ALORS QUE sont abusives les clauses qui instaurent un déséquilibre significatif entre l'assureur et l'assuré non-professionnel ; qu'est nécessairement abusive une clause faisant cesser la garantie du risque d'incapacité à l'échéance de prêt suivant la mise à la retraite de l'emprunteur, qu'elle qu'en soit la cause, et donc y compris dans le cas où c'est le risque garanti (l'incapacité) qui a provoqué la mise à la retraite ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article L 132-1 du code de la consommation (dans sa rédaction résultant de la loi n° 95-96 du 1er février 1995) ;
2) ALORS QU'il était constant que Monsieur X..., l'emprunteur, était dans sa 55ème année au moment de l'adhésion à l'assurance ; qu'il faisait valoir en outre qu'il recevait une pension de retraite inférieure à 600 euros par mois, avec laquelle il devait vivre, ce qui rendait totalement impossible le remboursement des échéances du prêt et que cette situation avait été créée, précisément, par l'incapacité physique de travailler, risque contre laquelle le contrat d'assurance était censé le protéger ; qu'en décidant que la clause susvisée n'était pas abusive, la Cour d'appel a, de plus fort, violé l'article L 132-1 du code de la consommation (dans sa rédaction résultant de la loi n° 95-96 du 1er février 1995) ;
3) ALORS QUE, en tout état de cause, la clause litigieuse du contrat CNP a été déclarée abusive, en raison de l'imprécision du risque « invalidité » garanti ; que la Cour d'appel aurait dû, au besoin, le relever d'office ; qu'elle a, pour cette raison encore, violé l'article L 132-1 du code de la consommation (dans sa rédaction résultant de la loi n° 95-96 du 1er février 1995).