LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 724 du code civil ;
Attendu que le conjoint survivant, investi de la saisine sur l'universalité de l'hérédité, dispose des droits et actions du défunt ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après le prononcé du divorce de Mme X... et de Philippe Y..., qui étaient mariés sous le régime de la séparation de biens, un litige est né quant au partage de leurs intérêts patrimoniaux ; que Philippe Y... est décédé au cours de l'instance d'appel, laissant pour lui succéder Mme Z..., son épouse commune en biens, et trois enfants issus de sa première union, Aurélie, Gilles et Jean (les consorts Y...) ; que M. A... a été désigné en qualité de mandataire successoral ; que Mme Z... est intervenue volontairement et a repris l'instance ;
Attendu que, pour la déclarer irrecevable à agir, l'arrêt retient que les comptes doivent être faits entre les parties à l'occasion d'un partage de la succession, et non au cours de l'instance en liquidation du régime matrimonial ;
Qu'en statuant ainsi, alors que Mme Z..., conjoint survivant de Philippe Y..., était recevable, en sa qualité d'héritière, à poursuivre l'instance en liquidation du régime matrimonial de l'union de son époux avec Mme X..., la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 août 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne M. A..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à Mme Z... la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour Mme Z...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'intervention volontaire en cause d'appel et la reprise d'instance effectuée par Mme Christine Z... veuve de Philippe Y..., décédé au cours de l'instance d'appel et d'avoir dit que les comptes doivent être faits entre les parties désormais en leur qualité d'héritiers dans le cadre d'un partage successoral et non dans le cadre d'une instance en liquidation du régime matrimonial des ex-époux Philippe Y...- Sylvie X..., « reprise » par Mme Christine Z... en qualité de conjointe survivante héritière de Philippe Y... ;
AUX MOTIFS QUE Mme Z... veuve Y... demande à la cour de lui donner acte en sa qualité de conjoint survivant commune en biens de Philippe Y..., de sa reprise volontaire d'instance et de son assignation en intervention forcée de Mlle Aurélie Y..., et M. Gilles Y... et M. Jean Y..., en leur qualité d'héritiers de Philippe Y.... Mme Christine Z..., seconde épouse de Philippe Y..., prétend pouvoir intervenir volontairement à l'instance dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial des ex-époux Philippe Y...- Sylvie C... et pouvoir reprendre à son compte « en sa qualité de conjoint survivant commune en biens » les conclusions que Philippe Y... avait formulées dans le cadre de la liquidation de son régime matrimonial. Il apparaît que son intervention volontaire a pour objet de formuler des demandes en qualité d'héritière de Philippe Y.... Mais dans ce cadre l'intervention de Mme Z... est irrecevable en cause d'appel dans la mesure où le litige, objet de la présente instance, opposant les ex époux Y.../ C... concernait la liquidation de leur communauté, laquelle ne peut être liquidée désormais que dans le cadre plus large des opérations de partage de la succession de Philippe Y.... Les comptes doivent être faits entre les parties désormais en leur qualité d'héritiers, ce qui relève soit d'un partage successoral amiable soit d'une action en partage judiciaire et en aucun cas de l'instance en liquidation du régime matrimonial des ex-époux Y... « reprise » par Mme Christine Z..., sous peine de voir verser au seul profit de cette dernière des sommes devant être intégrées dans la succession de Philippe Y.... A cet égard, Mme Sylvie X... a conclu au rejet de la demande de Mme Z... « tendant à ce que les sommes devant revenir à la succession lui soient directement versées » ;
1) ALORS QUE le conjoint survivant est, au même titre que les autres héritiers, saisi de plein droit des biens, droits et actions du défunt ; qu'à ce titre, l'épouse en seconde noces de commune en biens du défunt a qualité pour reprendre l'action engagée par son époux prédécédé en liquidation du régime matrimonial ayant existé lors de sa première union et à poursuivre, au bénéfice de la succession, le recouvrement de la part à revenir à son époux dans ce régime matrimonial ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, Mme Z... veuve Y... se prévalait de sa qualité d'héritière de son mari, à concurrence d'un quart en pleine propriété et de trois quarts en usufruit, en se référant expressément à l'acte de notoriété, produit aux débats, reçu le 12 juillet 2012, par Me B..., notaire, aux termes duquel, elle avait opté pour la quotité disponible la plus large en vertu de la donation entre époux consentie par M. Y... ; que dès lors, en la déclarant irrecevable à intervenir volontairement et à reprendre l'instance engagée par son défunt époux en liquidation de la communauté ayant existé entre lui et Mme X..., bien que l'épouse survivante eût, en tant qu'héritière de son mari, qualité à agir en liquidation du régime matrimonial ayant existé lors de la première union de celui-ci et à poursuivre, au bénéfice de la succession, le recouvrement de la part à revenir à son époux, la cour d'appel a violé l'article 724 du code civil ;
2) ALORS QU'est conjoint successible le conjoint survivant non divorcé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a explicitement constaté que le divorce de M. Philippe Y... et de Mme Sylvie X... avait été prononcé le 23 mai 2002 et qu'elle était saisie de la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux ; que dès lors, en retenant que les comptes relatifs à la liquidation du régime matrimonial ayant existé entre les ex époux Y.../ C... devaient être faits entre les parties désormais en leur qualité d'héritiers dans le cadre d'un partage successoral et non dans le cadre de l'instance en liquidation du régime matrimonial Y.../ C... reprise devant elle par Mme Z... en qualité de conjoint survivant de M. Philippe Y..., bien que Mme X..., épouse divorcée du défunt, n'avait pas la qualité d'héritière de celui-ci et était, par là-même, exclue du partage successoral, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 732 du code civil ;
3) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, Mme Z... Veuve Y..., qui avait attrait à l'instance les trois autres héritiers de son époux décédé, sollicitait, à titre subsidiaire, la condamnation de Mme X... et de l'indivision Y.../ C... à payer à la succession de M. Philippe Y... les sommes dues dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial ; que dès lors en retenant que « les comptes doivent être faits entre les parties désormais en leur qualité d'héritiers, ce qui relève soit d'un partage successoral amiable soit d'une action en partage judiciaire et en aucun cas de l'instance en liquidation du régime matrimonial des ex-époux Y... « reprise » par Mme Christine Z..., sous peine de voir verser au seul profit de cette dernière des sommes devant être intégrées dans la succession de Philippe Y... », la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile.