LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Rejette la demande de mise hors de cause de l'association syndicale libre Domaine de la quiétude ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 691 du code civil ;
Attendu que les servitudes continues non apparentes et les servitudes discontinues, apparentes ou non apparentes ne peuvent s'établir que par titre ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 janvier 2010), que les époux X..., propriétaires d'un terrain traversé par une canalisation d'assainissement privée desservant les maisons de la copropriété mitoyenne Les Hauts de Caucours, située en amont, et, au-delà, les habitations dépendant de l'association syndicale libre Domaine de la quiétude (l'ASL), ont assigné le syndicat des copropriétaires Les Hauts de Caucours (le syndicat) en suppression de l'installation litigieuse ; que le syndicat a appelé l'ASL en la cause ;
Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient que la canalisation n'a pas été installée par le syndicat et ne lui appartient donc pas ; que les époux X... qui lui reprochent d " avoir commis une voie de fait en édifiant sur leur terrain la canalisation litigieuse forment à l'encontre de ce seul syndicat des demandes qui sont mal dirigées ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le syndicat avait raccordé en 1987 son propre réseau à la canalisation existante, la cour d'appel, qui n'a pas recherché à quel titre ce syndicat pouvait se raccorder à la canalisation existante, a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne le syndicat des copropriétaires Les Hauts de Caucours aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le syndicat des copropriétaires Les Hauts de Caucours à payer aux époux X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande du syndicat des copropriétaires Les Hauts de Caucours et celle de l'association syndicale libre Domaine de la quiétude ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour les époux X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté toutes les demandes formées par les époux X..., y compris celle en suppression de la canalisation d'évacuation des eaux ayant son emprise sur leur propriété ;
AUX MOTIFS QUE « les pièces versées aux débats par le syndicat des copropriétaires LES HAUTS DE CAUCOURS montrent que la canalisation d'évacuation des eaux vannes litigieuses a été construite en 1971 par la SCI DU HAUT DE CAGNES aux droits de laquelle vient l'Association SYNDICALE LIBRE DOMAINE DE LA QUIETUDE ; cette canalisation traverse, l'accord de leurs propriétaires ayant été préalablement obtenu, différentes parcelles dont celle de Z..., auteur de la SCI LES HAUTS DE CAUCOURS, qui a ensuite fait édifier la copropriété LES HAUTS DE CAUCOURS et de Jeanne Y..., auteur des époux X... ; par ailleurs, la copropriété LES HAUTS DE CAUCOURS s'est limitée à raccorder en 1987 son propre réseau à la canalisation existante ; il en découle comme le relève utilement le syndicat des copropriétaires LES HAUTS DE CAUCOURS que la canalisation incriminée n'a pas été installée par ses soins et ne lui appartient donc pas ; or, les époux X... qui reprochent au syndicat des copropriétaires LES HAUTS DE CAUCOURS d'avoir commis une voie de fait en édifiant sur leur terrain la canalisation litigieuse forment à l'encontre du seul syndicat des copropriétaires des demandes qui mal dirigées doivent en conséquence être rejetées de sorte que la décision déférée sera infirmée » (arrêt pp. 4 et 5) ;
ALORS QUE les propriétaires du fonds servant bénéficient d'une présomption de la pleine propriété de leurs fonds, de sorte qu'il appartient à celui qui se prétend bénéficiaire d'une servitude de rapporter la preuve de l'existence de la servitude qu'il revendique ; que la cour d'appel a constaté que le syndicat des copropriétaires avait l'usage de la canalisation traversant le fonds des époux X..., à laquelle il avait raccordé son propre réseau d'évacuation des eaux ; qu'il résultait de cette constatation qu'il devait établir l'existence à son profit d'une servitude lui octroyant le droit d'user de cette canalisation et qu'à défaut, les époux X... n'étaient pas tenus d'en supporter l'existence ; qu'en rejetant leur demande en suppression de la canalisation, au motif inopérant que le syndicat des copropriétaires n'était pas propriétaire de ladite canalisation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 691 du code civil et de l'article 1er du protocole additionnel n° 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
ALORS QUE les servitudes discontinues, apparentes ou non apparentes, ne peuvent s'établir que par titres ; que le titre constitutif de la servitude ne peut être remplacé que par un titre recognitif de la servitude, et émané du propriétaire du fonds asservi ; qu'en se bornant, pour rejeter la demande des époux X... en suppression de la canalisation d'évacuation des eaux provenant de la copropriété des HAUTS DE CAUCOURS et du DOMAINE DE LA QUIETUDE, et traversant leur propriété, à relever qu'en 1971, la SCI DU HAUT DE CAGNES aux droits de laquelle vient l'ASL, avait obtenu l'accord des propriétaires des parcelles sur lesquelles passait la canalisation litigieuse, et notamment l'accord de Z..., auteur de la SCI LES HAUTS DE CAUCOURS qui avait ultérieurement fait édifier la copropriété LES HAUTS DE CAUCOURS, et l'accord de Jeanne Y..., auteur des époux X..., sans constater l'existence d'un titre recognitif relatif à la servitude litigieuse, et opposable aux propriétaires du fonds servant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 691 et 695 du code civil.