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26/06/2019 | FRANCE | N°18-10096

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 juin 2019, 18-10096


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 31 octobre 2017), que M. U..., engagé en qualité de conducteur par la société Alsace tourisme transports Marques, devenue la société des exploitations des Etablissements R. Marques, puis la société Transports Marques (la société Marques), en contrat d'insertion puis à durée indéterminée à compter du 17 juillet 2009, et affecté au transport des usagers de l'IEM Les Acacias à Pfastatt, a été informé le 7 juillet 2014 par la société GIHP Lorraine Transports, de

venue la société Synergihp grand est, que le marché du transport des usagers a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 31 octobre 2017), que M. U..., engagé en qualité de conducteur par la société Alsace tourisme transports Marques, devenue la société des exploitations des Etablissements R. Marques, puis la société Transports Marques (la société Marques), en contrat d'insertion puis à durée indéterminée à compter du 17 juillet 2009, et affecté au transport des usagers de l'IEM Les Acacias à Pfastatt, a été informé le 7 juillet 2014 par la société GIHP Lorraine Transports, devenue la société Synergihp grand est, que le marché du transport des usagers auquel il était affecté était attribué à cette dernière à compter du 26 août 2014 ; qu'estimant que l'avenant au contrat de travail proposé par le repreneur modifiait tant le salaire que la durée du travail et lui imposait une clause de mobilité non prévue, le salarié a refusé de le signer ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes formulées, à titre principal à l'encontre de la société Synergihp grand est, et à titre subsidiaire, de la société Marques ;

Sur le second moyen, pris en ses deux premières branches :

Attendu que la société Marques fait grief à l'arrêt de juger que la rupture du contrat de travail de M. U... lui est imputable, de prononcer la résiliation judiciaire de ce contrat de travail à la date de la décision, de condamner en conséquence la société à verser à M. U... diverses sommes
au titre de cette rupture, outre des rappels de salaire pour la période de septembre 2014 à octobre 2017 et des dommages-intérêts pour préjudice financier, de déclarer la société Synergihp grand est hors de cause, de débouter la société Marques de son appel en garantie formé contre la société Synergihp grand est, alors selon le moyen :

1°/ que, d'une part, qu'aux termes de l'article 2-7 de l'accord du 7 juillet 2009 relatif au changement de prestataire dans le transport interurbain de voyageurs, étendu par arrêté du 22 juillet 2010, annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires, il appartient au salarié concerné par le transfert envisagé de son contrat de travail de prévenir expressément, dans les meilleurs délais, l'entreprise entrante comme l'entreprise sortante de son refus de transfert et il reste alors salarié de l'entreprise sortante ; que le salarié, qui manque à cette obligation conventionnelle en n'informant pas la société sortante de son refus opposé au transfert de son contrat de travail vers la société entrante, ne met pas la société sortante en mesure de poursuivre la relation de travail avec lui, de sorte que l'absence de transfert du contrat de travail est inopposable à celle-ci ; qu'en l'espèce, quand il est constant que le salarié n'a pas informé la société sortante du refus du transfert de son contrat de travail vers la société entrante, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si ce manquement du salarié à ses obligations conventionnelles n'avait pas rendu inopposable à la société sortante l'absence de transfert du contrat de travail, n'a pas donné de base légale au regard du texte précité ;

2°/ qu'il est constant que, par un courrier du 26 août 2014, la société entrante a informé la société sortante du transfert du contrat de travail du salarié ; que la cour d'appel, qui s'est abstenue de rechercher si cette information erronée n'avait pas fait pas naître chez la société sortante la croyance légitime que le contrat de travail de l'intéressé avait été transféré, de sorte que l'absence de transfert lui était inopposable, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2 de l'accord du 7 juillet 2009 relatif au changement de prestataire dans le transport interurbain de voyageurs, étendu par arrêté du 22 juillet 2010, annexé à la Convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires ;

Mais attendu, que s'il résulte de l'article 2-7 de l'accord du 7 juillet 2009 relatif au changement de prestataire dans le transport interurbain de voyageurs, étendu par arrêté du 22 juillet 2010, annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport du 21 décembre 1950, que le salarié dispose d'un délai de 10 jours pour formaliser son accord sur le projet d'avenant au contrat de travail qui lui a été proposé par le nouveau prestataire et qu'en cas de désaccord il lui appartient de prévenir expressément, dans les meilleurs délais, les deux sociétés de son refus de signer l'avenant qui a pour effet de le maintenir dans les liens de subordination à l'égard de l'ancien prestataire, la carence du salarié, qui n'a pas prévenu l'ancien prestataire de ce refus, ne peut entraîner la rupture du contrat de travail à son égard, compte tenu de l'objectif de garantie de l'emploi assigné à cet accord ;

Attendu qu'ayant relevé que le salarié avait refusé de signer l'avenant au contrat de travail qui lui avait été proposé par le nouveau prestataire, la cour d'appel en a exactement déduit que la société Marques restait l'employeur du salarié, même si ce dernier avait omis de la prévenir de son refus qui faisait obstacle au transfert de son contrat de travail ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen pris en ses troisième et quatrième branches :

Attendu que la société Marques fait les mêmes griefs à l'arrêt, alors, selon le moyen :

1°/ que la société sortante peut agir contre le nouveau titulaire du marché dont la carence a fait obstacle au changement d'employeur et rechercher, dans la mesure où il est tenu de l'indemniser à raison de la faute commise, sa garantie pour toutes les sommes dont elle serait tenue à l'égard du salarié qui n'a pas été transféré ; qu'en l'espèce, en décidant de mettre hors de cause la société entrante du seul fait de l'absence de transfert du contrat de travail, sans constater qu'elle n'avait pas commis une faute envers la société sortante en ne la mettant pas en mesure de reprendre l'exécution du contrat de travail non-transféré en lui ayant délivré une information erronée actant ce transfert, en sorte qu'elle aurait dû garantir la société sortante des condamnations prononcées contre elle, la cour d'appel a violé l'article 1382 ancien du code civil ;

2°/ que le salarié avançait qu'il avait refusé de signer l'avenant à son contrat de travail avec la société entrante en raison des manquements de celle-ci à ses obligations découlant de l'article 2-4 de l'accord du 7 juillet 2009 relatif au changement de prestataire dans le transport interurbain de voyageurs, étendu par arrêté du 22 juillet 2010, annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires, et, notamment, des modifications apportées par celle-ci à sa rémunération, et que la société sortante, qui n'avait pas été destinataire de cet avenant, faisait valoir que ces manquements qui avaient fait obstacle au transfert du contrat de travail justifiaient que la société entrante soit condamnée à la garantir des condamnations prononcées contre elle au bénéfice du salarié ; qu'en se bornant à constater, pour rejeter cette demande de la société entrante, qu'elle ne caractérise pas les manquements de la société entrante au regard de ce texte, tout en ayant pourtant relevé que le salarié a refusé de signer l'avenant qui lui a été transmis en faisant valoir que ce dernier
emportait des modifications de son contrat de travail contraire à ces stipulations, la Cour d'appel, qui n'a pas recherché si la société entrante n'avait pas ainsi commis une faute ayant généré un préjudice pour la société sortante, s'est prononcée par un motif inopérant et n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte précité ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la société Marques ne caractérisait pas les manquements à l'origine de l'absence de transfert du contrat de travail à la société GIHP Lorraine transports devenue la société Synergihp grand est, la cour d'appel a, par ce seul motif, justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Marques fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié à la date de la décision, de la condamner en conséquence à verser à ce dernier diverses sommes au titre de cette rupture, ainsi que des rappels de salaire pour la période de septembre 2014 à octobre 2017 et des dommages-intérêts pour préjudice financier, alors, selon le moyen :

1°/ que l'employeur n'est tenu de payer sa rémunération et de fournir un travail au salarié que pour autant que celui-ci se tient à sa disposition pour effectuer ce travail ; qu'en jugeant, en l'espèce, que la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. U... est justifiée et doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans avoir constaté que celui-ci avait fait savoir à son employeur qu'il se tenait à sa disposition pour exécuter son travail, si ce n'est postérieurement au jugement du conseil de prud'hommes qui avait jugé que la rupture était imputable au salarié et s'analysait en une démission, de sorte que l'employeur n'était alors plus tenu de lui fournir un travail et de lui payer un salaire, la cour d'appel a violé les articles L.1231-1 du code du travail et 1184 ancien du code civil ;

2°/ qu'en condamnant l'employeur à payer au salarié des rappels de salaires depuis septembre 2014 jusqu'à la date de résiliation du contrat de travail, quand celui-ci n'avait pas fait savoir à son employeur qu'il se tenait à sa disposition, la cour d'appel a violé les articles L.1221-1 et 1134 ancien du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, ayant constaté que le salarié reprochait à la société Marques de ne pas lui avoir fourni de travail, a pu décider, sans avoir à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, que ce manquement aux obligations de l'employeur rendait impossible la poursuite du contrat de travail et en justifiait la résiliation judiciaire ; que le moyen ne saurait dès lors être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Transports Marques aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Transports Marques à payer à Me Haas la somme de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la société Transports Marques

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que la rupture du contrat de travail de M. U... est imputable à la société Etablissements R. MARQUES, d'avoir prononcé la résiliation judiciaire de ce contrat de travail à la date de la décision, d'avoir condamné en conséquence la société Etablissements R. MARQUES à verser à M. U... diverses sommes au titre de cette rupture, outre des rappels de salaire pour la période de septembre 2014 à octobre 2017 et des dommages et intérêts pour préjudice financier, d'avoir déclaré la société SYNERGIHP GRAND EST hors de cause, débouté la société Etablissements R. MARQUES de son appel en garantie formé contre cette dernière et condamné la société Etablissements R. MARQUES à payer à M. U... et à la société SYNERGIHP GRAND EST la somme de 1.200 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civil ;

Aux motifs que « En l'espèce, il est acquis aux débats que par courrier en date du 5 août 2015, adressé à la société GIHP, annexe 5, M. U... a refusé de signer l'avenant qui lui a été transmis en faisant valoir que ce dernier emportait des modifications de son contrat de travail qu'il n'acceptait pas.

Il est de jurisprudence établie que sauf application éventuelle de l'article L.1124-1 du code du travail (qui n'est pas invoqué en l'espèce), le changement d'employeur prévu et organisé par voie conventionnelle suppose l'accord exprès du salarié.

M. U... faute d'avoir signé l'avenant proposé n'a pas été transféré à la société GIHP et il ne peut solliciter judiciairement un tel transfert au motif que l'entreprise entrante aurait manqué à ses obligations en ne lui proposant pas un avenant conforme à son contrat de travail.

Aux termes de l'accord du 7 juillet 2009 applicable, la protection du salarié qui refuse ou est amené à refuser l'avenant de la société entrante réside dans le fait qu'il demeure salarié de l'entreprise sortante, sauf à envisager éventuellement l'engagement de la responsabilité extra-contractuelle de l'entreprise entrante.

La société sortante soutient toutefois que le salarié ne l'a pas informé de son refus de signer l'avenant et se prévaut d'un courrier de la société entrante daté du 26 août 2014, actant mais prématurément de la reprise de M. U.... Il est constant que ce courrier était erroné puisque M. U... n'a jamais signé son avenant et a refusé son transfert.

M. U..., qui n'a en effet jamais informé par écrit la société R. MARQUES de son refus de transfert, se prévaut par ailleurs d'une attestation d'un proche qui affirme, sans en avoir été témoin direct, que ce dernier s'est présenté en date du 18 septembre 2014 auprès de la société sortante qui s'est défendue d'être restée son employeur en se prévalant du courrier erroné de la société GIHP précité.

Toutefois, il convient d'admettre, en tout état de cause, que l'absence de signature de l'avenant entraînant le transfert du contrat de travail, a incontestablement laissé perduré le contrat de travail initial, qui ne saurait être considéré comme rompu du seul fait que le salarié n'a pas informé la société sortante de son refus de transfert.

Il convient d'en déduire que conformément à l'article 2-7 de l'accord précité, compte-tenu du désaccord de M. U..., celui-ci est bien resté salarié de la société sortante R. MARQUES.

Il s'ensuit que la mise hors de cause de la société GIHP s'impose.

Sur la demande de résiliation judiciaire

Par application de l'article 1184 du code civil, un salarié peut solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur en cas de manquement de ce dernier à ses obligations contractuelles. Ces manquements doivent être suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

En l'espèce, M. U... reproche à la société R. MARQUES de ne pas lui avoir fourni de travail et ne pas l'avoir rémunéré.

Ces manquements avérés et graves et justifient la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société R. MARQUES et celle-ci emporte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

M. U... est par conséquent en droit de prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui sera évaluée eu égard à son ancienneté, par application de l'article L.1235-3 du code du travail, à un montant de 7.100 euros.

Il est également en droit de réclamer une indemnité légale de licenciement par application de l'article L.1234-9 du code du travail équivalent à un montant de 1.810 euros.

Sur la demande de rappel de salaires

Le salarié auquel il n'a pas été fourni de travail mais qui s'est tenu à la disposition de son employeur est en droit de percevoir les salaires impayés (M. U... NE S'EST PAS TENU A LA DISPO DE LA SOCIETE MARQUES PUISQU'IL NE L'A PAS INFORME DE SON REFUSER DE SIGNER L'AVENANT A SON CONTRAT DE TRAVAIL).

M. U... justifie avoir par courrier adressé en date du 5 novembre 2015 fait savoir à la société R. MARQUES qu'il était toujours à disposition pour travailler (annexe Il est en droit de prétendre aux salaires impayés à compter du mois de septembre 2014 au mois d'octobre 2017, date de la résiliation judiciaire du contrat. Il convient de faire droit à la demande au titre des salaires dus de septembre 2014 à septembre 2017 inclus à hauteur de 36.276,85 euros indemnités de congés payés incluses, mais à l'exclusion des indemnités spéciales non justifiées et 835,36 euros au titre du salaire dû pour le mois d'octobre 2017 jusqu'à la résiliation.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice subi

M. U... réclame réparation du préjudice subi du fait de l'absence de salaire depuis août 2014, il fait valoir qu'il a eu des difficultés financières qui l'ont contraint à solliciter l'aide de sa mère, qu'il a puisé dans ses économies et qu'il a dû solliciter un dégrèvement pour le paiement de la taxe d'habitation.

Son préjudice sera évalué à un montant de 500 euros et mis à la charge de la société d'exploitation R. MARQUES.

Sur l'appel en garantie de la société MARQUES à l'égard de la société GIHP

La société MARQUES soutient tout à la fois qu'elle ne peut se prononcer sur l'avenant refusé par M. U... dont elle n'a pas été partie prenante et que c'est par la faute de la société GIHP que le contrat de ce dernier n'a pas pu être transféré et qu'elle doit être condamnée à la garantir de toutes ses condamnations.

Ce faisant elle ne caractérise pas les manquements de la société GIHP au regard de l'accord du 7 juillet 2009 dans l'absence de reprise du contrat de M. U... et qui justifierait qu'il soit fait droit à cet appel en garantie. Elle sera par conséquent déboutée de ses prétentions de ce chef » ;

1/ Alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 2-7 de l'accord du 7 juillet 2009 relatif au changement de prestataire dans le transport interurbain de voyageurs, étendu par arrêté du 22 juillet 2010, annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires, il appartient au salarié concerné par le transfert envisagé de son contrat de travail de prévenir expressément, dans les meilleurs délais, l'entreprise entrante comme l'entreprise sortante de son refus de transfert et il reste alors salarié de l'entreprise sortante ; que le salarié, qui manque à cette obligation conventionnelle en n'informant pas la société sortante de son refus opposé au transfert de son contrat de travail vers la société entrante, ne met pas la société sortante en mesure de poursuivre la relation de travail avec lui, de
sorte que l'absence de transfert du contrat de travail est inopposable à celle-ci ; qu'en l'espèce, quand il est constant que le salarié n'a pas informé la société sortante du refus du transfert de son contrat de travail vers la société entrante, la Cour d'appel, qui n'a pas recherché si ce manquement du salarié à ses obligations conventionnelles n'avait pas rendu inopposable à la société sortante l'absence de transfert du contrat de travail, n'a pas donné de base légale au regard du texte précité ;

2/ Alors, de plus, qu'il est constant que, par un courrier du 26 août 2014, la société entrante a informé la société sortante du transfert du contrat de travail du salarié ; que la Cour d'appel, qui s'est abstenue de rechercher si cette information erronée n'avait pas fait pas naître chez la société sortante la croyance légitime que le contrat de travail de l'intéressé avait été transféré, de sorte que l'absence de transfert lui était inopposable, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2 de l'accord du 7 juillet 2009 relatif au changement de prestataire dans le transport interurbain de voyageurs, étendu par arrêté du 22 juillet 2010, annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires ;

3/ Alors, d'autre part, que la société sortante peut agir contre le nouveau titulaire du marché dont la carence a fait obstacle au changement d'employeur et rechercher, dans la mesure où il est tenu de l'indemniser à raison de la faute commise, sa garantie pour toutes les sommes dont elle serait tenue à l'égard du salarié qui n'a pas été transféré ; qu'en l'espèce, en décidant de mettre hors de cause la société entrante du seul fait de l'absence de transfert du contrat de travail, sans constater qu'elle n'avait pas commis une faute envers la société sortante en ne la mettant pas en mesure de reprendre l'exécution du contrat de travail non-transféré en lui ayant délivré une information erronée actant ce transfert, en sorte qu'elle aurait dû garantir la société sortante des condamnations prononcées contre elle, la Cour d'appel a violé l'article 1382 ancien du code civil ;

4/ Alors, de même, que le salarié avançait qu'il avait refusé de signer l'avenant à son contrat de travail avec la société entrante en raison des manquements de celle-ci à ses obligations découlant de l'article 2-4 de l'accord du 7 juillet 2009 relatif au changement de prestataire dans le transport interurbain de voyageurs, étendu par arrêté du 22 juillet 2010, annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires, et, notamment, des modifications apportées par celle-ci à sa rémunération, et que la société sortante, qui n'avait pas été destinataire de cet avenant, faisait valoir que ces manquements qui avaient fait obstacle au transfert du contrat de travail justifiaient que la société entrante soit condamnée à la garantir des condamnations prononcées contre elle au bénéfice du salarié ; qu'en se bornant à constater, pour rejeter cette demande de la société entrante, qu'elle ne caractérise pas les manquements de la société entrante au regard de ce texte, tout en ayant pourtant relevé que le salarié a refusé de signer l'avenant qui lui a été transmis en faisant valoir que ce dernier emportait des modifications de son contrat de travail contraire à ces stipulations, la Cour d'appel, qui n'a pas recherché si la société entrante n'avait pas ainsi commis une faute ayant généré un préjudice pour la société sortante, s'est prononcée par un motif inopérant et n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte précité.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. U... à la date de la décision, d'avoir condamné en conséquence la société Etablissements R. MARQUES à verser à M. U... diverses sommes au titre de cette rupture, ainsi que des rappels de salaire pour la période de septembre 2014 à octobre 2017 et des dommages et intérêts pour préjudice financier, et d'avoir condamné la société Etablissements R. MARQUES à payer à M. U... et à la société SYNERGIHP GRAND EST la somme de 1.200 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civil ;

Aux motifs que : « Sur la demande de résiliation judiciaire

Par application de l'article 1184 du code civil, un salarié peut solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur en cas de manquement de ce dernier à ses obligations contractuelles. Ces manquements doivent être suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

En l'espèce, M. U... reproche à la société R. MARQUES de ne pas lui avoir fourni de travail et ne pas l'avoir rémunéré.

Ces manquements avérés et graves et justifient la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société R. MARQUES et celle-ci emporte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

M. U... est par conséquent en droit de prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui sera évaluée eu égard à son ancienneté, par application de l'article L.1235-3 du code du travail, à un montant de 7.100 euros.

Il est également en droit de réclamer une indemnité légale de licenciement par application de l'article L.1234-9 du code du travail équivalent à un montant de 1.810 euros.

Sur la demande de rappel de salaires

Le salarié auquel il n'a pas été fourni de travail mais qui s'est tenu à la disposition de son employeur est en droit de percevoir les salaires impayés.

M. U... justifie avoir par courrier adressé en date du 5 novembre 2015 fait savoir à la société R. MARQUES qu'il était toujours à disposition pour travailler (annexe 21).

Il est en droit de prétendre aux salaires impayés à compter du mois de septembre 2014 au mois d'octobre 2017, date de la résiliation judiciaire du contrat. Il convient de faire droit à la demande au titre des salaires dus de septembre 2014 à septembre 2017 inclus à hauteur de 36.276,85 euros indemnités de congés payés incluses, mais à l'exclusion des indemnités spéciales non justifiées et 835,36 euros au titre du salaire dû pour le mois d'octobre 2017 jusqu'à la résiliation » ;

Alors que l'employeur n'est tenu de payer sa rémunération et de fournir un travail au salarié que pour autant que celui-ci se tient à sa disposition pour effectuer ce travail ; qu'en jugeant, en l'espèce, que la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. U... est justifiée et doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans avoir constaté que celui-ci avait fait savoir à son employeur qu'il se tenait à sa disposition pour exécuter son travail, si ce n'est postérieurement au jugement du Conseil de prud'hommes qui avait jugé que la rupture était imputable au salarié et s'analysait en une démission, de sorte que l'employeur n'était alors plus tenu de lui fournir un travail et de lui payer un salaire, la Cour d'appel a violé les articles L.1231-1 du code du travail et 1184 ancien du code civil ;

Alors, de même, qu'en condamnant l'employeur à payer au salarié des rappels de salaires depuis septembre 2014 jusqu'à la date de résiliation du contrat de travail, quand celui-ci n'avait pas fait savoir à son employeur qu'il se tenait à sa disposition, la Cour d'appel a violé les articles L.1221-1 et 1134 ancien du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-10096
Date de la décision : 26/06/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 31 octobre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jui. 2019, pourvoi n°18-10096


Composition du Tribunal
Président : M. Cathala (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.10096
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