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04/11/2010 | FRANCE | N°09-69918

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 04 novembre 2010, 09-69918


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales de son intervention dans ses rapports avec les consorts X... ;
Donne acte à l'Etablissement français du sang de ce qu'il se désiste de son pourvoi en tant que dirigé contre Mme X..., prise en tant que partie à l'instance d'appel ;
Donne acte à Mme veuve X..., agissant tant à titre personnel qu'en qualité d'administratrice légale des biens de son fils mineur Jules X...

, de ce qu'en tant que seuls héritiers de Joël X..., décédé le 12 janvier...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales de son intervention dans ses rapports avec les consorts X... ;
Donne acte à l'Etablissement français du sang de ce qu'il se désiste de son pourvoi en tant que dirigé contre Mme X..., prise en tant que partie à l'instance d'appel ;
Donne acte à Mme veuve X..., agissant tant à titre personnel qu'en qualité d'administratrice légale des biens de son fils mineur Jules X... , de ce qu'en tant que seuls héritiers de Joël X..., décédé le 12 janvier 2010, ils reprennent l'instance introduite contre lui ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Joël X..., hémophile, a reçu des produits sanguins délivrés par le centre de transfusion sanguine de Biarritz (le centre) ; qu'il a été déclaré contaminé par le virus de l'hépatite C en 1989 ; qu'il a assigné le centre en réparation en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne (la caisse) ; qu'un arrêt confirmatif de la cour d'appel de Pau du 26 juin 2002 a déclaré le centre responsable de cette contamination ; qu'une expertise médicale et une expertise comptable ont été ordonnées ; qu'une aggravation du préjudice corporel a été établie ; que par jugement du 26 novembre 2007, le tribunal de grande instance a condamné l'Etablissement français du sang (EFS), venu aux droits du centre, à payer diverses sommes à Joël X..., à son épouse et à la caisse ;
Attendu que le premier moyen, pris en sa seconde branche et le second moyen ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1147 du code civil, ensemble l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 et le principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime ;
Attendu, selon le second de ces textes, que la réparation d'un poste de préjudice d'agrément temporaire ou permanent distincte de celle du poste de préjudice du déficit fonctionnel temporaire ou permanent ne peut viser qu'à l'indemnisation du préjudice lié à l'impossibilité de pratiquer régulièrement une activité sportive ou de loisirs ;
Attendu que pour condamner l'EFS à payer à Joël X... à titre de dommages-intérêts la somme de 871 126,01 euros, incluant celle de 15 000 euros au titre d'un préjudice d'agrément, et augmentée des intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2004, l'arrêt, après avoir alloué à Joël X... une indemnité de 320 000 euros en réparation du poste de préjudice extrapatrimonial du déficit fonctionnel permanent, énonce, quant au poste de préjudice extrapatrimonial permanent dénommé "préjudice d'agrément permanent", que celui-ci est défini comme le préjudice subjectif de caractère personnel résultant des troubles ressentis dans les conditions d'existence, qu'il concerne les activités sportives, ludiques ou culturelles devenues impossibles ou limitées en raison des séquelles de l'accident ; que Joël X... n'a jamais fait état d'aucun préjudice d'agrément devant l'expert judiciaire et ne justifie pas de la pratique antérieure d'activités spécifiques et particulières rendue impossible par les séquelles de la contamination transfusionnelle ; que dans ces conditions, considérant cependant que l'intimé ne peut en toute hypothèse, du fait des séquelles de cette contamination, se livrer à une quelconque activité physique d'agrément, même non officiellement encadrée, la cour d'appel considère que l'existence d'un préjudice d'agrément est certaine ;
Qu'en statuant ainsi, tout en excluant l'existence d'un préjudice d'agrément indemnisable, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'EFS à payer à Joël X... au titre d'un préjudice d'agrément une indemnité de 15 000 euros incluse dans la somme globale de 871 126,01 euros dont à déduire le montant des provisions déjà versées et augmentée des intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2004, l'arrêt rendu le 1er juillet 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette toutes les demandes présentées de ce chef ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour l'Etablissement français du sang
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'E.F.S. à payer à M. X... la somme de 871.126,01 euros à titre de dommages et intérêts, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2004,
AUX MOTIFS QUE le préjudice d'agrément est défini comme le préjudice subjectif de caractère personnel résultant des troubles ressentis dans les conditions d'existence ; qu'il concerne les activités sportives, ludiques ou culturelles devenues impossibles ou limitées en raison des séquelles de l'accident ; qu'en l'espèce, M. X... n'a fait état d'aucun préjudice d'agrément devant l'expert judiciaire et ne justifie pas de la pratique antérieure d'activités spécifiques et particulières rendues impossibles par les séquelles de la contamination transfusionnelle ; que, dans ces conditions, considérant cependant que l'intimé ne peut en toute hypothèse du fait des séquelles de sa contamination transfusionnelle, se livrer à une quelconque activité physique d'agrément, même non officiellement encadrée, la cour considère que l'existence d'un préjudice d'agrément est certaine ; qu'elle sera réparée par l'octroi d'une indemnité de 15.000 euros ;
ET QUE la nécessité de l'assistance d'une tierce personne, en lien direct de causalité avec l'aggravation de l'état de santé de M. X... imputable à sa contamination transfusionnelle, a été constatée dans le rapport du 24 mai 2004 au terme duquel l'expert Y... conclut que l'état de santé de M. X... impose la présence à ses côtés d'une aide à raison de trois heures par jour pour la toilette et l'habillage, la préparation des repas et les transferts ; qu'il convient de rappeler que la victime est en droit de solliciter l'indemnisation de ce poste de préjudice par l'octroi d'un capital plutôt que d'une rente et qu'elle est en droit de voir rémunérer ce type d'aide, même si elle est assurée par un proche ; que, dans ses dernières conclusions, M. X... indique que sa demande de ce chef, tendant à la confirmation de la décision entreprise en ce qu'elle lui a alloué un capital de 250.000 euros, ne concerne que l'avenir, afin de décharger son épouse du fardeau que représente cette charge par elle assurée depuis plusieurs années ; que le jugement déféré sera confirmé en ce que la somme de 250.000 euros allouée de chef n'est pas supérieure à la capitalisation, à compter du présent arrêt et en application du coût de l'euro de rente évalué par le décret précité du 29 octobre 2004, de la dépense annuelle exposée pour l'assistance d'une tierce personne à concurrence de trois heures quotidiennes et sur la base du S.M.I.C. horaire de droit commun ;
1°/ ALORS QUE , pour l'indemnisation du préjudice corporel, la réparation des postes de préjudice dénommés déficit fonctionnel temporaire et déficit fonctionnel permanent inclut, le premier, pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, le second, pour la période postérieure à cette date, les atteintes aux fonctions physiologiques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiales et sociales ; qu'il s'ensuit que la réparation d'un poste de préjudice personnel distinct dénommé préjudice d'agrément vise exclusivement à l'indemnisation du préjudice lié à l'impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs, dont il doit être justifié ; qu'ayant constaté que M. X... n'avait fait état d'aucun préjudice d'agrément devant l'expert judiciaire et qu'il ne justifiait pas de la pratique antérieure d'activités spécifiques et particulières rendues impossibles par les séquelles de la contamination transfusionnelle, la cour d'appel, qui a néanmoins indemnisé un préjudice d'agrément, motif pris, d'une part, de ce que le préjudice d'agrément est défini comme le préjudice subjectif de caractère personnel résultant des troubles ressentis dans les conditions d'existence et, d'autre part, de ce que M. X... ne pouvait plus, en toute hypothèse, se livrer à une quelconque activité physique d'agrément, a violé l'article 1147 du code civil et le principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit ;
2°/ ALORS QUE , sauf à consacrer la réparation d'un dommage éventuel, le préjudice résultant de la nécessité de recourir à l'assistance d'une tierce personne ne peut être indemnisé que par l'allocation d'une rente, versée au fur et à mesure de sa réalisation ; qu'en affirmant, au contraire, pour condamner l'E.F.S. à payer à M. X... la somme de 250.000 euros, sous la forme d'un capital représentatif, au titre de l'assistance d'une tierce personne, que la victime est en droit de solliciter l'indemnisation de ce poste de préjudice par l'octroi d'un capital plutôt que d'une rente, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 1147 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'E.F.S. à payer à la C.P.A.M. de Bayonne la somme de 530.956,66 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2004,
AUX MOTIFS QU' au vu des pièces versées aux débats, la C.P.A.M. sera accueillie en son recours subrogatoire à concurrence des sommes de : (…) 248.152,96 euros au titre du capital représentatif de la rente invalidité servie à M. X... dont le lien exclusif de causalité avec la contamination transfusionnelle dont l'E.F.S. a été déclaré responsable s'évince de ce qui précède, étant précisé que cette indemnité s'imputera sur le poste "perte de gains professionnels futurs" et que l'E.F.S., dans ses dernières conclusions, ne s'est opposé qu'au paiement immédiat du capital représentatif des dépenses de santé futures ;
ALORS QUE, sauf accord du tiers responsable sur le paiement d'un capital, les caisses de sécurité sociale ne peuvent prétendre au remboursement de leurs dépenses qu'au fur et à mesure de leur engagement, et des arrérages de rente versés qu'à compter de leur échéance ; que la condamnation du tiers responsable à payer un capital représentatif des dépenses futures est subordonnée à la constatation de son accord ; qu'en retenant, pour condamner l'E.F.S. au remboursement anticipé du capital représentant les arrérages non échus de la rente d'invalidité servie à M. X..., qu'il ne s'était pas opposé à un paiement immédiat en capital, sans constater son accord à cet égard, la cour d'appel a violé l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 30 de la loi du 5 juillet 1985.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-69918
Date de la décision : 04/11/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 01 juillet 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 04 nov. 2010, pourvoi n°09-69918


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : Me Copper-Royer, SCP Didier et Pinet, SCP Piwnica et Molinié, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.69918
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