La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/10/2015 | FRANCE | N°14-25044

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 28 octobre 2015, 14-25044


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, suivant convention du 12 décembre 2006, assortie d'une garantie de passif, M. X... (le cédant) a cédé à la société EM construction (la cessionnaire) un certain nombre d'actions qu'il détenait dans le capital social de la société X... ; que le solde du prix, garanti par le cautionnement de la Société générale (la banque), n'ayant pas été réglé aux échéances convenues, le cédant et son épouse ont assigné en paiement la banque et la cessionnaire ; que cette

dernière a invoqué la nullité de la vente, sollicité, à titre subsidiaire, la...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, suivant convention du 12 décembre 2006, assortie d'une garantie de passif, M. X... (le cédant) a cédé à la société EM construction (la cessionnaire) un certain nombre d'actions qu'il détenait dans le capital social de la société X... ; que le solde du prix, garanti par le cautionnement de la Société générale (la banque), n'ayant pas été réglé aux échéances convenues, le cédant et son épouse ont assigné en paiement la banque et la cessionnaire ; que cette dernière a invoqué la nullité de la vente, sollicité, à titre subsidiaire, la compensation entre le solde du prix de cession des actions et le montant des créances de la société X... couvertes par la garantie de passif, et demandé, à titre infiniment subsidiaire, de donner force exécutoire aux accords transactionnels intervenus le 3 mars 2009 entre elle-même et le cédant ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu les articles 1134 et 2044 du code civil ;
Attendu que, pour donner force exécutoire à la convention du 3 mars 2009, qui stipulait que les accords intervenus entre le cédant et la cessionnaire devraient être régularisés par la rédaction d'un acte ultérieur restant à rédiger et à valider par les conseils respectifs, l'arrêt retient que les parties n'avaient pas la volonté de faire de la rédaction d'un protocole ultérieur une condition de validité de leur accord, dès lors que cette convention présente un caractère complet et prévoit toutes les conséquences, à l'exception, éventuellement, de l'intervention de la banque, qui est étrangère à leurs relations ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la ratification des accords conclus entre le cédant et la cessionnaire par leurs conseils respectifs ne constituait pas une condition de validité de la transaction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa première branche :
Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour condamner la banque solidairement avec la cessionnaire à verser au cédant et à son épouse la somme de 50 000 euros en exécution de la transaction du 3 mars 2009, l'arrêt retient qu'elle serait fondée à faire valoir que la transaction lui est inopposable, mais que le juge ne peut faire application d'office des dispositions de l'article 1165 du code civil qui n'ont aucun caractère d'ordre public ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, dans leurs conclusions, aucune des parties n'avait sollicité la condamnation de la banque à verser au cédant et à son épouse une somme en vertu de l'accord intervenu le 3 mars 2009, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal et du pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il donne force exécutoire à la convention datée du 3 mars 2009, condamne la Société générale solidairement avec la société EM construction à payer à M. et Mme X... la somme de 50 000 euros en exécution de ladite convention et condamne la société EM construction à garantir la Société générale de cette condamnation, l'arrêt rendu le 20 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société EM construction aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit octobre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir donné force exécutoire à la transaction datée du 3 mars 2009 et d'avoir condamné la société EM CONSTRUCTION, solidairement avec la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, à payer aux époux X... la somme de 50. 000 ¿ seulement, en exécution de ladite transaction, en condamnant la société EM CONSTRUCTION à garantir la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE de cette condamnation et d'avoir débouté les époux X... du surplus de leurs demandes en paiement ;
AUX MOTIFS QUE, sur le protocole du 19 février 2009, ce document porte en réalité la date du 3 mars 2009, qu'il s'agit d'une simple erreur de plume puisque la société EM CONSTRUCTION ne communique aucune pièce portant la date du 19 février 2009 tandis qu'elle communique une pièce n° 8 datée du 3 mars 2009 dont le contenu correspond à ses explications ; que cette pièce est ici intégralement reproduite : « La SAS X... cède à M Salvatore X..., qui s'engage à en assumer toutes les conséquences, la créance qu'elle détient envers la SARL SAM pour un montant de 164. 397, 22 euros TTC (relevé ci-joint) dû, à ce jour, à la SAS X.... Les dossiers litigieux (Z...-A...-B...) dont la convention de garantie de passif faisait référence (sic), seront supportés par la SAS X... tant dans leur bénéfice que leur charge. En parallèle, la société EM CONSTRUCTION, représentée par M. Pascal Y..., s'engage à verser la somme de 50. 000 euros (cinquante mille euros) pour solde de tout compte à M Salvatore X.... Ce dernier versement mettra fin au litige né entre les deux parties dans le cadre de la convention de cession de parts de la SARL X... intervenue le 12 décembre 2006. Les présents accords devront être régularisés par un protocole d'accord ultérieur restant à rédiger et à valider par les conseils respectifs. Fait le 03 mars 2009 à 8h00 ». Recto RELEVÉ DES FACTURES IMPAYÉES AU 14 septembre 2007 SARL SAM-VEIGY FONCENEX Montant en euros TTC Fact n° 1677 du 05/ 07/ 06 chantier LES HUCHES 43. 265, 84 Fact n° 1680 du 10/ 07/ 06 chantier IRIS (reste dû) 70. 394, 31 Fact n° 1729 du 22/ 01/ 07 chantier IRIS 21. 811, 45 Fact n° 1730 du 22/ 01/ 07 chantier IRIS 11. 403, 86 Fact n° 1735 du 12/ 02/ 07 chantier IRIS 3. 001, 96 Fact n° 1637 du 30/ 03/ 06 chantier THONON 960, 75 Fact n° 1767 du 15/ 07/ 07 chantier VEIGY 1. 937, 52 Fact n° 1784 du 06/ 07/ 07 chantier VEIGY-THONON 11. 621, 53 TOTAL TTC 164. 397, 22 Verso ; que selon les époux X..., cet acte ne pourrait produire aucun effet dès lors que le protocole d'accord ultérieur qu'il prévoyait n'a pas été rédigé ; mais que les parties n'avaient pas la volonté d'en faire une condition de validité de leur accord dès lors que l'acte présente un caractère complet, qu'il prévoit toutes les conséquences, sauf éventuellement, l'intervention de la SOCIETE GENERALE, qui est étrangère à leurs relations ; qu'il convient de donner force exécutoire à la transaction ainsi conclue ; que si la banque serait fondée à faire valoir qu'elle lui est inopposable, le juge ne peut faire application d'office des dispositions de l'article 1165 du code civil qui n'ont pas un caractère d'ordre public ; qu'il convient donc de la condamner solidairement avec EM CONSTRUCTION à payer la somme de 50. 000 ¿ aux époux X..., l'article 2305 du code civil lui ouvrant un recours contre le débiteur principal ;

ALORS en premier lieu QUE la cour d'appel a constaté que le document du 3 mars 2009 stipulait que « les présents accords devront être régularisés par un protocole d'accord ultérieur restant à rédiger et à valider par les conseils respectifs » ; que les époux X... soutenaient dans leurs conclusions, que compte tenu de ces termes, il ne s'agissait que « d'une étape dans la négociation amiable qui n'a finalement pas abouti entre les parties, les conseils respectifs n'ayant pas validé l'accord ¿ » et que « la Cour ne saurait donc « donner force exécutoire » à une simple lettre d'intention qui n'a pas débouché sur une transaction validée par les conseils respectifs » ; qu'en se bornant à relever, pour donner force exécutoire à cet acte, que les parties n'avaient pas eu la volonté de faire de la rédaction ultérieure d'un protocole d'accord une condition de validité de leur convention, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la ratification de leurs accords par leurs conseils respectifs n'en était pas, en revanche, pour les parties, une condition de validité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 2044 du code civil ;
ALORS en second lieu QUE constitue une transaction un contrat ayant pour objet de mettre fin à un différend entre les parties à cette convention et qui comporte des concessions réciproques ; que la réciprocité suppose que les concessions soient faites par les cocontractants et en leur faveur, et non par un tiers ou au profit d'un tiers ; que comme le faisaient valoir les époux X..., la convention du 3 mars 2009 qui avait pour objet de mettre fin au différend opposant M. Salvatore X... à la société EM CONSTRUCTION, et était conclue par ces deux parties, la société EM CONSTRUCTION étant représentée par M. Y...(lequel ne représentait qu'elle et non la société X... dont il n'était d'ailleurs pas le représentant légal), prévoyait pourtant que la société X..., qui n'était donc pas partie à l'accord, céderait à M. X... sa créance sur un client et qu'elle « supporterait » les dossiers litigieux « tant dans leur bénéfice que leur charge » ; qu'en considérant toutefois cet acte comme une transaction valable, la cour d'appel a violé l'article 2044 du code civil. Moyen produit, au pourvoi incident, par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils pour la Société générale
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société Générale, solidairement avec la société EM Construction, à verser la somme de 50. 000 euros aux époux X... en exécution de la transaction datée du 3 mars 2009 ;
AUX MOTIFS QUE « sur le protocole du 19 février 2009 : Attendu que ce document porte en réalité la date du 3 mars 2009 ; Attendu cependant qu'il s'agit d'une simple erreur de plume puisqu'en effet, la société EM Construction ne communique aucune pièce portant la date du 19 février 2009 alors au contraire qu'elle communique une pièce n° 8 datée du 3 mars 2009 dont le contenu correspond à ses explications ; Attendu que cette pièce est ici intégralement reproduite (recto-verso) : La SAS X... cède à M. Salvatore X..., qui s'engage à en assumer toutes les conséquences, la créance qu'elle détient envers la SARL SAM pour un montant de 164. 397, 22 euros TTC (relevé ci joint) dû, à ce jour, à la SAS X.... Les dossiers litigieux (Z...-A...-B...) dont la convention de garantie de passif faisait référence, seront supportés par la SAS X... tant dans leur bénéfice que leur charge. En parallèle, la Société EM Construction, représentée par M Pascal Y... s'engage à verser la somme de 50 000 euros (cinquante mille euros) pour solde de tout compte à M Salvatore X... Ce dernier versement mettra fin au litige né entre les deux parties dans le cadre de la convention de cession de parts de la SARL X... intervenue le 12 décembre 2006. Les présents accords devront être régularisés par un protocole d'accord ultérieur restant à rédiger et à valider par les conseils respectifs. Fait le 03 Mars 2009 à 8H00. Recto RELEVÉ DES FACTURES IMPAYÉES AU 14 septembre 2007 SARL SAM-VEIGY FONCENEX

Montant en euros TTC
Fact n° 1677 du 05/ 07/ 06 chantier les HUCHES 43. 265, 84 Fact n° 1680 du 10/ 07/ 06 chantier IRIS (reste dû) 70. 394, 31 Fact n° 1729 du 22/ 01/ 07 chantier IRIS 21. 811, 45 Fact n° 1730 du 22/ 01/ 07 chantier IRIS 11. 403, 86 Fact n° 1735 du 12/ 02/ 07 chantier IRIS 3. 001, 96 Fact n° 1637 du 30/ 03/ 06 chantier THONON 960, 75 Fact n° 1767 du 15/ 07/ 07 chantier VEIGY 1. 937, 52 Fact n° 1784 du 06/ 07/ 07 chantier VEIGY-THONON 11. 621, 53

TOTAL TTC 164. 397, 22 16 Verso
que selon les époux X..., cet acte ne pourrait produire aucun effet dès lors que le protocole d'accord ultérieur qu'il prévoyait n'a pas été rédigé ; Mais attendu que les parties n'avaient pas la volonté d'en faire une condition de validité de leur accord dès lors que l'acte présente un caractère complet, qu'il prévoit toutes les conséquences, sauf éventuellement, l'intervention de la Société Générale, qui est étrangère à leurs relations ; Attendu qu'il convient de donner force exécutoire à la transaction ainsi conclue » ;
ET QUE « Attendu que la Société Générale serait fondée à faire valoir que la transaction lui est inopposable, que toutefois, le juge ne peut faire application d'office des dispositions de l'article 1165 du Code civil qui n'ont aucun caractère d'ordre public, qu'il convient donc de la condamner solidairement avec la société EM Construction à payer aux époux X... la somme de 50. 000 euros, que l'article 2305 du Code civil lui ouvre un recours contre le débiteur principal auquel il convient de faire droit » ;
ALORS QUE le juge est tenu de respecter l'objet du litige tel que défini par les conclusions respectives des parties ; qu'en l'espèce aucune des parties n'avaient demandé la condamnation de la Société Générale à verser aux époux X... la somme de 50. 000 euros en exécution du protocole du 3 mars 2009 ; qu'en condamnant la banque à verser cette somme aux époux X..., la Cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE le juge est tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; que le cautionnement, qui est d'interprétation stricte, ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ; qu'en l'espèce, la Société Générale n'était pas partie au protocole transactionnel ; que son cautionnement avait par ailleurs été donné exclusivement en garantie de paiement du prix de cession ; qu'amenée à condamner la Société Générale, solidairement avec la société EM Construction, à régler aux époux X... la somme de 50. 000 euros en exécution du protocole d'accord du 3 mars 2009, il appartenait à la Cour d'appel de vérifier si les conditions d'une telle condamnation étaient réunies et de vérifier si ces sommes entraient dans l'objet du cautionnement octroyé par la banque ou si elle s'était engagée, dans l'acte de transaction du 3 mars 2009, à les verser entre les mains des époux X... ; qu'en condamnant la Société Générale à verser aux époux X... la somme de 50. 000 euros en exécution du protocole d'accord du 3 mars 2009, au seul motif que « le juge ne peut faire application d'office des dispositions de l'article 1165 du Code civil qui n'ont aucun caractère d'ordre public » sans vérifier si les conditions d'une telle condamnation étaient réunies, la Cour d'appel a méconnu son office et violé l'article 12 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-25044
Date de la décision : 28/10/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 20 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 28 oct. 2015, pourvoi n°14-25044


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Copper-Royer, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Monod, Colin et Stoclet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.25044
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award