LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que, se prévalant d'un contrat de prêt immobilier souscrit le 13 janvier 1999 au nom de Mme X..., la caisse de crédit mutuel agricole et rural de Cavaillon devenue la caisse de crédit mutuel Agriculture de Cavaillon (la Caisse) a assigné celle-ci, en 2005, en paiement des sommes lui restant dues à ce titre ; que Mme X..., soutenant que sa signature avait été imitée par M. Y..., avec lequel elle avait vécu, a appelé ce dernier en intervention forcée ;
Attendu que pour écarter les prétentions de Mme X... et la condamner à payer à la caisse les sommes que celle-ci lui réclamait, la cour d'appel a estimé que Mme X... était bien la signataire de l'acte de prêt litigieux ;
Qu'en statuant ainsi sans répondre aux conclusions par lesquelles Mme X... invoquait les incohérences du dossier de prêt en faisant en particulier valoir que celui-ci mentionnait qu'elle était domiciliée à l'adresse de M. Y..., dont elle était séparée depuis 1997, et faisait état d'un apport personnel de 120 000 francs qu'elle soutenait n'avoir pas versé, que les échéances de remboursement avaient été assurées par des virements de M. Y..., qui recevait à son domicile les relevés de compte tandis qu'il n'était pas démontré qu'elle ait demandé l'ouverture de comptes pour le déblocage des fonds et le prélèvement des échéances, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 mars 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble, autrement composée ;
Condamne la Caisse de crédit mutuel Agriculture de Cavaillon aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AvoIR condamné Madame Carole X... à verser à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL AGRICOLE ET RURAL DE CAVAILLON les sommes de 44. 846, 87 euros augmentée des intérêts au taux contractuel majoré de 8, 90 % à compter du 10 décembre 2004 et jusqu'à complet paiement, et de 3. 139, 28 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement et de l'AVOIR déboutée de ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'en application des articles 287 et 288 du nouveau code de procédure civile, si l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée, le juge procède à la vérification de l'écrit contesté au vu des éléments dont il dispose ; qu'en l'espèce, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL AGRICOLE ET RURAL DE CAVAILLON produit à l'appui du contrat de prêt dont elle se prévaut, un courrier daté du 11 (lire 12) mars 2003 dont Carole X... ne conteste pas qu'il émane bien d'elle ; sur les deux documents, l'écriture part tantôt à gauche, tantôt à droite ; le " a ", les deux " p " et le " r " de " approuvé " et de " appris " sont écrits et attachés de la même manière, le mot " Francs " est identique dans les deux documents ; le " r " est fuyant tant sur " appris ", " approuvé " que sur " Francs " et chaque " t " lorsqu'il termine un mot, ressemble à un " v " autant sur l'acte de prêt contesté que sur la lettre du 12 mars 2003 ; enfin la mention " lu et approuvé " figurant sur l'acte de prêt est en tous points identiques à celle qui est apposée sur le compromis du 27 juin 1997 signé entre Michel Y..., en qualité de vendeur, et Carole X..., en qualité d'acheteur ; il convient d'ajouter que si cette dernière pour les besoins de sa défense conteste avoir signé ce compromis, Maître Z..., notaire à CAVAILLON, a certifié le même jour, soit le 27 juin 1997, par une attestation non mise en cause par l'appelante, que Michel Y... s'était engagé à vendre à Carole X... une maison d'habitation édifiée sur une parcelle dont il a donné la désignation ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE pour s'opposer au paiement de la créance de la CMAR DE CAVAILLON d'un montant de 44. 846, 87 euros augmentée de la clause pénale de 3. 139, 28 euros Madame X... qui ne conteste pas le quantum se contente de prétendre que Monsieur Michel Y..., son ancien compagnon avec qui elle a eu un enfant, aurait imité sa signature ; que cette accusation a pris la forme d'une plainte contre Monsieur Y... le 24 février 2003 auprès de Monsieur le Procureur de Gap qui a été transféré auprès du Parquet d'Avignon lequel l'a classée ; que la signature
portée sur l'offre de prêt présente de fortes similitudes avec la signature de Madame X... figurant sur l'accusé de réception du 28 octobre 2004 adressé par la CAISSE FEDERALE DU CREDIT MUTUEL DAUPHINE VIVARAIS et qu'il n'appartient pas de suppléer à la carence de la partie dans l'administration de la preuve, il n'y a pas lieu d'ordonner l'organisation d'une mesure d'expertise graphologique que d'ailleurs elle n'a pas sollicitée ;
1° / ALORS, D'UNE PART, QUE lorsqu'une partie désavoue formellement sa signature, la vérification doit être ordonnée par le juge d'office ; qu'en l'espèce, pour dire que Madame X... était bien le signataire du prêt litigieux, la cour d'appel ne pouvait, sans comparer ni vérifier si la signature apposée au bas de l'acte de prêt du 13 janvier 1999 correspondait aux spécimens que Madame X... versait aux débats (pièce 10), se borner à comparer l'écriture — et non la signature — de cet acte avec celles d'une lettre du 12 mars 2003 et d'un compromis du 27 juin 1997, et affirmer, de manière inopérante, qu'un notaire certifiait que Monsieur Y... s'engageait à lui vendre sa maison, et que la signature au bas du prêt présentait « de fortes similitudes » avec celle figurant sur l'accusé de réception en date du 28 octobre 2004 versé aux débats par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL AGRICOLE, circonstance qui n'était pas de nature à caractériser qu'elle était, de manière certaine, celle de Madame X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1315, 1323 et 1324 du code civil, ensemble les articles 287 et 288 du code de procédure civile ;
2° / ALORS, D'AUTRE PART, QU'il appartient au juge, saisi d'un incident de vérification d'un écrit nécessaire à la solution du litige, lorsqu'il estime que les documents versés aux débats ne lui permettent pas d'affirmer avec certitude que l'acte dont une partie dénie l'écriture émane bien de cette partie, de lui enjoindre de produire tout document de comparaison lui paraissant nécessaire, et, s'il y a lieu, de lui faire composer, sous sa dictée, des échantillons d'écriture, ainsi que d'ordonner toutes autres mesures prévues en cas d'incident de vérification ; qu'en énonçant, pour condamner Madame X... à verser les sommes de 44. 846, 87 € et de 3. 139, 28 € à la Caisse de Crédit Mutuel Agricole, que la signature apposée au bas de l'acte de prêt en date du 13 janvier 1999 présentait « de fortes similitudes » avec celle figurant sur l'accusé de réception en date du 28 octobre 2004 versé aux débats par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL AGRICOLE, la cour d'appel a violé les articles 1323 et 1324 du code civil, ensemble les articles 287 et 288 du code de procédure civile ;
3° / ALORS, AUSSI, QU'il incombe à celui qui invoque un acte sous seing privé argué de faux d'en établir sa sincérité ; qu'en énonçant, pour considérer comme sincère l'acte de prêt du 13 janvier 1999 que Madame X... contestait avoir signé, et après avoir simplement retenu qu'il existait de fortes similitudes entre la signature figurant sur cet acte et celle apposée sur l'accusé de réception du 28 octobre 2004, qu'il ne lui appartenait pas de suppléer à la carence de la Madame X... dans l'administration de la preuve, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les articles 1315, 1323, 1324 du code civil, ensemble les articles 287 et 288 du code de procédure civile ;
4° / ALORS, ENCORE, QUE, dans ses conclusions délaissées, Madame X... dénonçait les incohérences du dossier de prêt qui la domiciliait à l'Isle sur la Sorgue chez Monsieur Y..., quand elle justifiait être séparée de celui-ci et habiter depuis 1997 à Cabrières d'Avignon (p. 7) ; que l'offre de prêt non datée (p. 6) faisait état d'un apport personnel de 120 000 F. quand elle justifiait n'avoir jamais versé une telle somme (p. 10) et que les échéances du prêt avaient été réglées par virement par Monsieur Y..., qui recevait à son domicile les relevés de compte (p. 8), la banque ne rapportant ni la preuve d'une demande, par Madame X..., d'ouverture de comptes pour le déblocage des fonds et pour le prélèvement des échéances, ni celle de l'envoi de courriers lui signalant des incidents de paiement (p. 8) sur le prêt qu'elle contestait, ni le moindre acte notarié servant de cause au prêt bancaire litigieux quand de son côté, elle justifiait à la fois de ce que la propre soeur de Monsieur Y... attestait qu'il avait déjà falsifié des signatures, dont celle de l'exposante pour obtenir un prêt bancaire (p. 11) et surtout, qu'il n'y avait jamais eu de vente par Monsieur Y... de sa maison, et a fortiori, aucune cession à son profit, comme l'établissaient une ordonnance du juge commissaire du 31 juillet 2002 et un courrier du 17 juillet 2008 de Maître C..., notaire à l'Isle sur la Sorgue ; qu'en omettant de répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
5° / ALORS, ENFIN, QUE, dans ses conclusions délaissées (p 11 et s), Madame X... avait démontré que là carence de ses adversaires à produire le moindre acte notarié de vente immobilière s'expliquait par le fait qu'en réalité il n'y avait jamais eu de vente par Monsieur Y... de sa maison, et a fortiori, aucune cession à son profit, de sorte que le prêt immobilier était en tout état de cause privé d'objet puisque cette somme avait en réalité été débloquée pour les besoins personnels de Monsieur Y..., sans que Madame X... n'en perçoive le moindre montant, et alors qu'elle n'est jamais devenue propriétaire de la maison, que Monsieur Y... a fini par céder à sa propre fille ; qu'en omettant de répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'Avoir condamné Madame Carole X... à verser à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL AGRICOLE ET RURAL DE CAVAILLON les sommes de 44. 846, 87 euros augmentée des intérêts au taux contractuel majoré de 8, 90 % à compter du 10 décembre 2004 et jusqu'à complet paiement et de 3. 139, 28 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement et de l'AVOIR déboutée de ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur la nullité du prêt pour défaut d'objet, il convient de rappeler que l'objet du contrat de prêt est la remise des fonds par le prêteur et non pas l'existence du bien qui doit être financé au moyen de ce prêt ; aucune nullité n'est encourue par le fait que le prêt a été consenti au vu d'un compromis de vente de la maison d'habitation de Michel Y..., sise ... confirmé par une attestation notariée, et que les fonds ont été versés directement sur le compte de l'emprunteur ;
1° / ALORS, D'UNE PART, QUE l'offre de crédit immobilier faite à un consommateur est toujours acceptée sous la condition résolutoire de la non-conclusion, dans un délai de quatre mois à compter de son acceptation, du contrat pour lequel le prêt est demandé ; qu'en retenant que l'objet d'un contrat de prêt serait la remise des fonds par le prêteur et non l'existence du bien qui doit être financé, pour débouter Madame X... de sa demande d'anéantissement du contrat prêt pour non réalisation de l'acquisition de la maison d'habitation de 140 m2 sise à L'Isle sur la Sorgue, opération destinée à être financée par ce prêt, la cour d'appel a violé l'article 312-12 du code de la consommation ;
2° / ALORS, D'AUTRE PART EN TOUTE HYPOTHESE, QUE la preuve de la réalisation effective d'une vente immobilière au sens de l'article L. 312-12 du code de la consommation ne saurait résulter de la seule signature d'une promesse synallagmatique de vente ; qu'en retenant, pour débouter Madame X... de sa demande d'anéantissement du contrat de prêt pour défaut de réalisation de son objet, que le prêt aurait été consenti au vu du compromis de vente de la maison d'habitation dont l'acquisition était l'objet, sans rechercher si la vente avait été réitérée par acte authentique, ce que Madame X... contestait et ce qui n'était pas justifié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1589 du code civil et du texte précité.
3° / ALORS QUE, dans ses conclusions délaissées, Madame X..., qui déniait la signature figurant sur le compromis de vente, avait fait valoir et démontré que celui-ci était nécessairement caduc, puisque soi-disant signé en juin 1997 quand l'offre de prêt datait de décembre 1998, qu'il n'était pas justifié de la signature d'un acte authentique de vente et qu'elle démontrait n'avoir jamais acheté, ni avoir été propriétaire de la maison litigieuse (p. 9, 10 et 11) ; elle contestait avoir jamais sollicité l'ouverture du compte sur lequel le montant du prêt avait été débloqué ni bénéficié de ces sommes qui avaient servi aux besoins personnels de Monsieur Y..., seul et véritable emprunteur, et elle faisait observer que la banque ne justifiait d'aucune demande ni d'aucune pièce à ce titre (p. 7, 10 et 11) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4° / ALORS ENFIN QUE l'attestation établie par Maître Z... le 27 juin 1997 énonce que Monsieur Y... se serait engagé à vendre à Madame X... une maison d'habitation sise sur la commune de l'Isle sur la Sorgue moyennant un prix de 550. 000 F ; qu'en déduisant de cette attestation, qui ne faisait pourtant état que d'une promesse unilatérale, la sincérité de la signature et de la mention « lu et approuvé » prétendument apposées par Madame X... sur le compromis de vente du 27 juin 1997 et, par voie de conséquence, la sincérité de l'acte de prêt du 13 janvier 1999 portant une signature et une mention similaires, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis et a, ce faisant, violé l'article 1134 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de dommages et intérêts formulée par Madame X... à l'encontre de la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL AGRICOLE DE CAVAILLON ;
AUX MOTIFS QUE pour faire reconnaître la responsabilité de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL AGRICOLE ET RURAL DE CAVAILLON DANS L'OCTROI DU prêt, il appartient à Carole X... d'établir une faute de la banque, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le préjudice ; en l'état, elle n'établit pas que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL AGRICOLE ET RURAL DE CAVAILLON ait manqué à ses obligations et ne démontre pas les éléments du préjudice résultant pour elle de l'octroi du prêt qu'elle a utilisé et remboursé en partie jusqu'en 2004 ;
ALORS QUE Madame X... faisait valoir, dans ses écritures d'appel signifiées le 5 février 2009, qu'elle n'avait jamais signé de convention d'ouverture de compte avec la CAISSE DE CREDIT MUTUEL AGRICOLE permettant le versement des fonds empruntés et le remboursement des échéances, qu'elle ignorait l'existence de ce compte, que les sommes ayant permis de rembourser le prêt provenaient de virements réalisés par Monsieur Y..., que les courriers étaient adressés par la banque à l'adresse de ce dernier à laquelle elle ne résidait pourtant plus depuis 1997, ce qui n'était pas contesté, et qu'enfin, contrairement à l'obligation de domiciliation prévue dans l'acte de prêt, son salaire n'était pas versé sur le compte litigieux, mais entre les mains d'un autre établissement bancaire (p. 7-9), circonstances dont elle déduisait que banque avait commis une faute dans l'octroi et la gestion du prêt litigieux, engageant sa responsabilité à son égard dès lors qu'elle avait vu son compte bancaire saisi, qu'elle avait été inscrite a la Banque de France comme mauvais payeur, et qu'elle avait été tenue de défendre à une procédure qui n'aurait pas dû la concerner (p. 13) ; qu'en affirmant que Madame X... n'établissait pas l'existence d'une faute de la banque, ni l'existence d'un préjudice puisqu'elle aurait utilisé les sommes versées sur le compte ouvert à son nom dans les livres de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL AGRICOLE et qu'elle les auraient remboursées jusqu'en 2004, la cour d'appel a méconnu les termes clairs et précis de ses écritures d'appel et a, ce faisant, violé l'article 4 du code de procédure civile.