LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 novembre 2008), que M. X... a été engagé le 1er janvier 1974 par contrat de travail en qualité de directeur comptable et financier par la société BML ; qu'en novembre 1991, lors du rachat de l'entreprise par les salariés, il a été nommé président de la société BML jusqu'au 19 juillet 2004, date de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de l'entreprise ; que dans le cadre de la procédure collective, le fonds de commerce de la société BML a été cédé à la société Brossette qui a repris les contrats de travail de ses 16 salariés et qu'il a été proposé aux trois mandataires sociaux de la société BML, dont M. X..., la conclusion d'un contrat de travail ; que ce dernier a conclu à compter du 1er novembre 2004 un contrat de travail avec la société Brossette avec une période d'essai de trois mois, en qualité de cadre administratif; que la société Brossette a mis fin le 16 mai 2005 à la période d'essai qui avait été prolongée ; que soutenant que son contrat originaire avec la société BML était toujours en cours, qu'il avait été transféré à la société Brossette et que celle-ci ne pouvait lui imposait une période d'essai, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de la rupture ;
Attendu que la société Brossette fait grief à l'arrêt d'accueillir ces demandes alors, selon le moyen, qu'en considérant que la rupture du contrat de travail de M. X... en date du 15 novembre 2004 a eu pour effet de le replacer dans ses fonctions antérieures occupées au titre d'un précédent contrat de travail conclu le 1er janvier 1974 avec la société BML, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, si M. X..., qui s'est abstenu pendant treize années de faire état de l'existence de ce précédent contrat de travail, puis, lors des négociations qu'il a personnellement conduites, a dressé la liste des salariés de la société BML, sans s'y inscrire puis a négocié et accepté d'elle en sa qualité de repreneur la conclusion d'un contrat de travail, n'a pas, par ce comportement positif et dénué d'équivoque, renoncé au premier contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a relevé que le contrat de travail initial de M. X... avec la société BML avait été suspendu pendant la durée de son mandat social et que la preuve de l'existence d'une renonciation du salarié à son bénéfice au cours de la négociation du plan de cession du fonds de commerce de la société BML à la société Brossette et de la signature d'un contrat de travail avec cette dernière n'était pas rapportée, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Brossette aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par de Me Luc-Thaler, avocat aux Conseils pour la société Brossette
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le contrat de travail de Monsieur X... n'est pas entaché de nullité, d'AVOIR dit que la rupture de ce contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la Société BROSSETTE à payer à Monsieur X... les sommes de 24.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec les intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, de 68.759, 10 € d'indemnité conventionnelle de licenciement, de 12.119, 70 € d'indemnité de préavis, de 1.211, 97 € pour les congés payés afférents, de 7.439, 40 € de rappel de salaires et de 743, 94 € de congés payés afférents, l'ensemble avec les intérêts au taux légal à compter de la réception de la convocation devant le bureau de conciliation et d'AVOIR ordonné le remboursement par la Société BROSSETTE à l'ASSEDIC des indemnité de chômage dans la limite des six mois ;
AUX MOTIFS QU' il est constant que le contrat de travail de Monsieur X... a été de plein droit suspendu lorsque le lien de subordination juridique a disparu du fait de sa nomination aux fonctions de président du conseil d'administration de la Société BML, peu important la qualité d'actionnaire majoritaire qui n'est pas incompatible avec la qualité de salarié ; que la preuve de l'existence d'une convention contraire entre Monsieur X... et la Société BML ne saurait être suffisamment établie par le seul comportement de l'intéressé lors des négociations et la signature d'un nouveau contrat ; qu'il s'ensuit que le contrat initial de Monsieur X... a repris tous ses effets lors de la cessation de son mandat social au moment de la cession du fonds de commerce ; que par jugement du 18 octobre 2004 le tribunal de commerce de Meaux a ordonné le transfert de tous les contrats de travail ; qu'en l'occurrence, à défaut de preuve de la novation permettant de considérer que le contrat de travail avait disparu avec tous ses effets, le contrat de travail initial de Monsieur X... a été transféré ; que la Société BROSSETTE ne peut alléguer avoir été trompée par Monsieur X... au cours des négociations sur son statut de salarié ainsi que cela résulte de l'attestation non contredite de M. Z... et du jugement du tribunal de commerce du 18 octobre 2004, arrêtant le plan de cession, qui fait état du rachat de l'entreprise par les salariés ; que Monsieur X..., ayant été à l'origine chef comptable, a conclu le 15 novembre 2004 un second contrat de travail pour exercer les fonctions de cadre administratif ; que ce faisant, Monsieur X... n'a pas pour autant renoncé à son statut de salarié dont il bénéficiait au sein de la Société BML et que par ailleurs, ce nouveau contrat n'est pas entaché de nullité ; qu'il en résulte que si la Société BROSSETTE est en droit de tester les capacités de M. X... à ses nouvelles fonctions, et quelle que soit la terminologie retenue par les parties pour qualifier cette période, il ne peut s'agir que d'une période probatoire dont la rupture a pour effet de replacer le salarié dans ses fonctions antérieures ; qu'il s'ensuit que la Société BROSSETTE ne peut se prévaloir d'une rupture en période d'essai ; que par conséquent, en l'absence d'énonciation de motifs, la rupture du 16 mai 2005 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il convient d'infirmer le jugement et de déclarer qu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse est intervenu ; qu'en vertu de l'article L.1235-3 du code du travail dont les conditions d'application sont réunies, il convient d'accorder le montant de 24.000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui suffit à assurer la réparation de l'entier préjudice subi par Monsieur X... du fait de la perte de son emploi eu égard à son ancienneté, à sa prise en charge par l'ASSEDIC et à ses recherches infructueuses d'un nouvel emploi, outre les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, et ce conformément à l'article 1153-1 du code civil s'agissant d'une indemnité ; qu'en application de l'article L.1235-4 de ce code, il convient d'ordonner le remboursement par la société fautive à l'ASSEDIC des indemnités de chômage services à Monsieur X... dans la limite de 6 mois ; qu'il ressort du jugement du tribunal de commerce du 18 octobre 2004 que l'ensemble de l'effectif a été repris par la société BROSSETTE et que ce tribunal a ordonné le transfert de tous les contrats de travail ; que dans ces circonstances, la société BROSSETTE ne pouvait réduire le salaire de M. X... ; que l'indemnité de licenciement du salarié dont ni les modalités de calcul ni le montant ne sont contestés doit donc être fixée à la somme de 68.759, 10 € outre les intérêts au taux légal à compter de la date de réception pour la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation ; qu'il s'agit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la demande concernant le préavis est justifiée pour la somme de 12.119, 70 € ainsi que celle de 1.211, 97 € pour les congés payés afférents, montants non contestés, outre les intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation ; que la société BROSSETTE avait réduit à tort le salaire de Monsieur X... et que donc ce dernier est en droit d'obtenir le rappel de son salaire, à savoir la somme de 7.439, 40 € ainsi que celle de 743, 94 € dont les montants ne sont pas contestés, outre les intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation ;
ALORS QU' en considérant que la rupture du contrat de travail de Monsieur X... en date du 15 novembre 2004 a eu pour effet de le replacer dans ses fonctions antérieures occupées au titre d'un précédent contrat de travail conclu le 1er janvier 1974 avec la Société BML sans rechercher, comme elle y était pourtant expressément invitée (conclusions récapitulatives d'appel de la Société BROSSETTE, p.10 et suivantes), si Monsieur X..., qui s'est abstenu pendant treize années de faire état de l'existence de ce précédent contrat de travail, puis, lors des négociations qu'il a personnellement conduites, a dressé la liste des salariés de la Société BML sans s'y inscrire puis a négocié et accepté de la Société BROSSETTE, le repreneur, la conclusion d'un contrat de travail, n'a pas, par ce comportement positif et dénué d'équivoque, renoncé au premier contrat de travail, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du code civil.