Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 octobre 1985), qu'après la mise en liquidation des biens de la société à responsabilité limitée cabinet Y... (le cabinet Y...) ayant pour gérant M. Y..., les contrats en cours ont été cédés à la société à responsabilité limitée IEC, puis " apportés " à la société à responsabilité limitée société nouvelle cabinet Y... (la société nouvelle), ces dernières ayant pour gérante Melle X..., alors en relations avec M. Y... ; que la société nouvelle ayant à son tour été mise en liquidation des biens, le syndic a assigné ce dernier, comme dirigeant de fait, sur le fondement des articles 99 et 106 à 109 de la loi du 13 juillet 1967 ; .
Sur le premier moyen pris en ses trois branches :
Attendu que M. Y... reproche à l'arrêt de l'avoir condamné au paiement d'une partie des dettes sociales et d'avoir prononcé à son encontre l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler toute personne morale alors, selon le pourvoi, d'une part, que les juges du fond ne pouvaient considérer que M. Y... avait été gérant de fait de la société nouvelle sans, en méconnaissance des dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, s'expliquer sur les moyens des conclusions d'appel faisant valoir que celui-ci percevait seulement un salaire mensuel de 10 000 francs auquel s'ajoutaient des commissions pour tout nouveau contrat, ce que le tribunal correctionnel n'avait pas trouvé excessif, compte tenu de son niveau de compétence ; qu'il ne détenait aucun pouvoir de gestion, ni aucune signature, et ne disposait d'aucune part du capital social ; qu'il était constamment en voyage, d'un chantier à l'autre, en particulier au Moyen-Orient ; qu'il ne disposait d'aucun moyen de pression sur Mlle X..., qui l'a d'ailleurs licencié ; que, dès mai 1979, il avait cessé toute liaison sentimentale avec celle-ci ; que s'il avait été véritablement un dirigeant de fait, de façon préméditée et autrement que par l'effet de son envergure personnelle, il se serait ménagé un moyen de contrôle sur la gérante, et que Mlle X... assumait la gestion avec un comptable, alors, d'autre part, que la condamnation prononcée par arrêt du 18 décembre 1979, ayant été amnistiée en vertu de l'article 6 de la loi du 4 août 1981, c'est en méconnaissance de l'article 25 de cette même loi que l'arrêt attaqué en a fait le rappel, et alors, enfin, que ledit arrêt du 18 décembre 1979 n'ayant condamné M. Y... qu'à 3 000 francs d'amende ne figurerait pas au bulletin n° 2 du casier judiciaire, la cour d'appel avait relevé l'intéressé de toute incapacité de gérer, de sorte que c'est en méconnaissance des dispositions de l'article 1351 du Code civil que l'arrêt attaqué a énoncé que M. Y... n'aurait pu être nommé gérant de la société nouvelle ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'en vertu de l'article 23 de la loi du 4 août 1981 et dans le but d'assurer la sauvegarde, au profit des tiers intéressés, des preuves déjà acquises au moyen d'une procédure pénale, ladite procédure concernant une infraction amnistiée peut être versée aux débats d'une instance portant sur les intérêts civils liés à cette infraction ; qu'il s'ensuit que, saisie contre M. Y... d'une demande en paiement des dettes de la société nouvelle et dès lors qu'elle retenait que celui-ci avait exercé les mêmes activités d'abord au sein du cabinet Y... puis sous le couvert de la société IEC et de la société nouvelle, c'est à bon droit que la cour d'appel s'est appuyée sur la déclaration de culpabilité du juge pénal dans la procédure suivie contre M. Y... à raison de faits commis dans le cadre du cabinet Y... ;
Attendu, en deuxième lieu, que pour retenir que M. Y... ne pouvait être nommé gérant de la société nouvelle, constituée en 1978, la cour d'appel s'est fondée, non pas sur la condamnation pénale prononcée le 18 décembre 1979, mais sur le fait que le cabinet Y... dont il avait été gérant statutaire était alors en liquidation des biens et qu'à la même époque il faisait l'objet de poursuites pour délits assimilés à la banqueroute à raison de cette même gestion ;
Attendu, enfin, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel, par une décision motivée répondant aux conclusions invoquées, a retenu que M. Y... avait dirigé en fait la société nouvelle ;
Que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen pris en ses trois branches :
Attendu que M. Y... reproche encore à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors, selon le pourvoi, d'une part, que, ni de simples difficultés de trésorerie, ni une activité déficitaire ne constituent légalement la cessation des paiements, de sorte qu'en relevant seulement, au moment où M. Y... était encore dans l'entreprise, des difficultés de trésorerie et une activité déficitaire, sans vérifier si la situation qui a abouti à l'existence d'une insuffisance d'actif était survenue tandis que celui-ci était encore en fonctions, c'est en méconnaissance des dispositions de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 que l'arrêt attaqué a condamné M. Y... sur le fondement de ce texte, alors, d'autre part, qu'en tout état de cause, rien, dans l'arrêt attaqué, n'explicite à partir de quels éléments la cour d'appel avait pu déclarer que M. Y... avait " poursuivi l'activité déficitaire de la société ", de sorte que la cour d'appel a aussi méconnu les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile pour manque de base légale, la Cour de Cassation se trouvant dans l'impossibilité d'exercer son contrôle sur ce point, et alors, enfin, qu'après avoir constaté que M. Y... avait quitté la société nouvelle à la fin du mois de juillet 1980, la cour d'appel ne pouvait reprendre à son compte le reproche fait par le jugement du 3 juillet 1984 à M. Y... d'une absence de comptabilité conforme du fait que " les registres légaux n'ont plus été tenus à dater de fin 1980 ", sans méconnaître ainsi les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, pour contradiction de motifs, et celles de l'article 1351 du Code civil, le tribunal de grande instance de Paris, chambre correctionnelle, ayant constaté, par jugement du 12 juillet 1983, que les lacunes de la comptabilité ne
pouvaient être reprochées à M. Y..., qui avait été licencié le 30 avril 1980 ;
Mais attendu, d'une part, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel a constaté que la situation ayant conduit à l'insuffisance d'actif existait alors que M. Y... dirigeait encore la société nouvelle, pouvant dès lors lui faire application des dispositions de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel n'a fait qu'user de ce même pouvoir souverain d'appréciation en retenant que M. Y... avait poursuivi abusivement une exploitation déficitaire ne pouvant conduire l'entreprise qu'à la cessation de ses paiements ;
Attendu, enfin, qu'ayant relevé que M. Y... avait cessé ses activités le 30 juillet 1980, la cour d'appel n'a pas adopté les motifs du jugement retenant à son encontre l'absence de comptabilité régulière à partir de fin 1980 ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa troisème branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi