AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que, le 14 juillet 1987, Mme X..., qui aidait sa soeur à s'installer dans un train en partance, a glissé en descendant de ce train alors qu'il commençait à rouler et a eu les deux jambes coupées ; que Mme X... et son époux, M. Y..., ont assigné la SNCF en réparation de leur préjudice, sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, en présence de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Seine-et-Marne ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu que la SNCF fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à indemniser Mme X... alors, selon le moyen, qu'un comportement aberrant ou très dangereux de la victime, même s'il est prévisible dans l'absolu, constitue une cause d'exonération pour le gardien de la chose, qu'il résulte des constatations des juges du fond que Mme Y... est volontairement descendue d'un train en marche et qu'elle est tombée, se blessant ainsi, qu'en estimant que cet acte, seul à l'origine du dommage subi par la victime, n'exonérait pas la SNCF de sa responsabilité, la cour d'appel a violé l'article 1384 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que le système de fermeture des portes du train rend possible la descente d'un voyageur pendant un court laps de temps entre les 5 à 6 secondes suivant le départ et le moment où le train parvient à la vitesse de 7 km/h, l'arrêt retient que le fait pour la victime d'être descendue du train en marche ne constituait pas pour la SNCF un fait imprévisible qui, compte tenu du système mis en place, demeurait possible, bien que dangereux ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a justement déduit que la SNCF n'était pas totalement exonérée de sa responsabilité ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu l'article 784 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt attaqué condamne la SNCF à payer à la CPAM de Seine-et-Marne la somme de 828 788,79 francs ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la CPAM en date du 2 février 2000 qui, modifiant l'objet de ses demandes, demandait également la révocation de l'ordonnance de clôture, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qui concerne la responsabilité de la SNCF, l'arrêt rendu le 28 février 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes respectives de la Société nationale des chemins de fer français et de la Caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne ;
condamne la Société nationale des chemins de fer français à payer aux époux Y... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille trois.