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08/06/2017 | FRANCE | N°393003

France | France, Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 08 juin 2017, 393003


Vu la procédure suivante :

La SAS Grand Casino de Bandol a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 mars 2012 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a autorisé l'ouverture au public d'un casino et la pratique des jeux de hasard à Sanary-sur-Mer (Var). Par un jugement n° 1201353 du 6 février 2014, le tribunal administratif a annulé cet arrêté.

Par un arrêt n° 14MA01548 du 26 juin 2015, la cour administrative d'appel de Marseille, saisie d'un appel d

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Vu la procédure suivante :

La SAS Grand Casino de Bandol a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 mars 2012 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a autorisé l'ouverture au public d'un casino et la pratique des jeux de hasard à Sanary-sur-Mer (Var). Par un jugement n° 1201353 du 6 février 2014, le tribunal administratif a annulé cet arrêté.

Par un arrêt n° 14MA01548 du 26 juin 2015, la cour administrative d'appel de Marseille, saisie d'un appel de la commune de Sanary-sur-Mer, a annulé ce jugement et rejeté la demande de première instance.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et trois mémoires en réplique, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 26 août 2015, 26 novembre 2015, 19 octobre 2016, 30 décembre 2016 et 10 avril 2017, la SAS Grand Casino de Bandol demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la commune de Sanary-sur-Mer ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, de la commune de Sanary-sur-Mer et de la société d'exploitation du casino de Sanary-sur-Mer une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- le décret n° 59-1489 du 22 décembre 1959 ;

- le décret n° 2011-252 du 9 mars 2011 ;

- l'arrêté du 14 mai 2007 relatif à la réglementation des jeux dans les casinos ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Leforestier, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de la SAS Grand Casino de Bandol, à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de la commune de Sanary-sur-Mer et à Me Le Prado, avocat de la société d'exploitation du casino de Sanary-sur-Mer.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier du dossier soumis aux juges du fond que, par deux arrêtés du 26 mars 2012, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a autorisé l'ouverture au public d'un casino sur le territoire de la commune de Sanary-sur-Mer (Var), voisine de la commune de Bandol (Var), où la société requérante exploite un casino, ainsi que celle d'un autre casino sur le territoire de la commune de La Seyne-sur-Mer (Var), située à une dizaine de kilomètres ; que la société SAS Grand Casino de Bandol a formé un recours pour excès de pouvoir contre l'arrêté autorisant l'ouverture à Sanary-sur-Mer devant le tribunal administratif de Toulon, qui l'a annulé par un jugement du 6 février 2014 ; que, par l'arrêt attaqué du 26 juin 2015, la cour administrative d'appel de Marseille, saisie d'un appel de la commune de Sanary-sur-Mer, a annulé ce jugement et rejeté la demande de première instance ;

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société requérante n'avait pas expressément soulevé dans ses écritures de première instance ni d'appel de moyen de légalité externe tiré de ce que l'étude d'impact économique produite à l'appui de la demande d'autorisation du casino de Sanary-sur-Mer aurait été insuffisante faute d'avoir pris en considération le projet d'ouverture d'un casino à La Seyne-sur-Mer, et n'avait évoqué cette question qu'au soutien d'un moyen de légalité interne pris de l'erreur d'appréciation qu'aurait commise le ministre en délivrant l'autorisation contestée ; que, dans ces conditions, la cour administrative d'appel n'a pas omis de répondre à un moyen ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-1 du code de la sécurité intérieure : " Par dérogation aux articles L. 324-1 et L. 324-2 et, s'agissant du 1° du présent article, à l'article L. 133-17 du code du tourisme, une autorisation temporaire d'ouvrir au public des locaux spéciaux, distincts et séparés où sont pratiqués certains jeux de hasard peut être accordée, sous les conditions énoncées au présent chapitre, aux casinos, sous quelque nom que ces établissements soient désignés : / 1° Des communes classées stations balnéaires, thermales ou climatiques antérieurement au 3 mars 2009 ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 321-2 du même code : " Les communes dans lesquelles les dispositions de l'article L. 321 1 sont applicables ne peuvent en bénéficier que sur l'avis conforme du conseil municipal. Les autorisations sont accordées par le ministre de l'intérieur, après enquête, et en considération d'un cahier des charges établi par le conseil municipal et approuvé par le ministre de l'intérieur (...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 3 du décret du 22 décembre 1959 portant réglementation des jeux dans les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques, alors applicable et dont les dispositions sont désormais codifiées à l'article R. 321-3 du code de la sécurité intérieure pour l'enquête publique et au deuxième alinéa de l'article R. 321-4 du même code pour l'avis de la commission consultative : " L'autorisation est accordée sur demande adressée au ministre de l'intérieur par l'intermédiaire du préfet après enquête de commodo et incommodo et après avis de la commission consultative des jeux de cercles et de casinos prévue par le décret n° 2011-252 du 9 mars 2011 " ; que selon l'article 6 de l'arrêté du 14 mai 2007 relatif à la réglementation des jeux dans les casinos : " Dès qu'il a reçu les pièces de l'enquête citée à l'article précédent, le sous-préfet communique le dossier au préfet, qui le transmet, avec son avis motivé, au ministre en charge de l'intérieur (direction des libertés publiques et des affaires juridiques). / Le dossier comprend les pièces suivantes, en double exemplaire : /(...) 3° Pour les demandes d'ouverture, une étude d'impact économique montrant l'existence d'une demande de jeux non satisfaite et permettant de mesurer les conséquences de l'ouverture d'un nouvel établissement de jeux sur les casinos voisins existants, ainsi qu'un bilan prévisionnel d'activité sur 5 ans montrant la viabilité économique du projet (...) " ;

4. Considérant, d'une part, que pour écarter le moyen tiré de ce que le ministre de l'intérieur aurait délivré l'autorisation litigieuse sans tenir compte de l'incidence de l'ouverture concomitante de deux nouveaux casinos, situés l'un à Sanary-sur-Mer et l'autre à La Seyne-sur-Mer, sur la viabilité économique des établissements implantés dans la même zone de chalandise, et censurer le jugement du tribunal administratif qui avait accueilli ce moyen, la cour administrative d'appel de Marseille s'est fondée sur la circonstance que l'administration avait, à dessein, organisé l'instruction simultanée des deux demandes d'autorisation devant la commission consultative des jeux de cercles et de casinos et qu'il ressortait des écritures en défense du ministre qu'il avait pris en compte la situation économique résultant de l'ouverture concomitante des deux casinos ; qu'elle a, ce faisant, porté sur les pièces du dossier qui lui était soumis une appréciation souveraine, exempte de dénaturation, et, n'a pas commis d'erreur de droit ;

5. Considérant, d'autre part, que c'est par une appréciation souveraine, exempte de dénaturation, et sans erreur de droit que la cour a écarté les moyens tirés d'une violation de l'article 1er de l'arrêté du 14 mai 2007 et d'une erreur manifeste d'appréciation en se fondant notamment sur l'offre de jeux locale, c'est-à-dire sur le nombre d'établissements autorisés dans le Var rapporté à la population du territoire de référence, qui était inférieur à la moyenne nationale, y compris après l'ouverture des casinos de Sanary-sur-Mer et de La Seyne-sur-Mer, sur l'augmentation de la fréquentation hôtelière dans le Var en 2011 et sur le délai pour parcourir en voiture la distance qui sépare les trois casinos ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SAS Grand Casino de Bandol n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que son pourvoi doit, par suite, être rejeté, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SAS Grand Casino de Bandol le versement à la commue de Sanary-sur-Mer et à la société d'exploitation du casino de Sanary-sur-Mer de la somme de 3 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la SAS Grand Casino de Bandol est rejeté.

Article 2 : La SAS Grand Casino de Bandol versera une somme de 3 000 euros à la commune de Sanary-sur-Mer et une somme de même montant à la société d'exploitation du casino de Sanary sur-Mer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SAS Grand Casino de Bandol, à la commune de Sanary-sur-Mer, à la société d'exploitation du casino de Sanary-sur-Mer et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5ème - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 393003
Date de la décision : 08/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 2017, n° 393003
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guillaume Leforestier
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion
Avocat(s) : LE PRADO ; SCP COUTARD, MUNIER-APAIRE ; SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:393003.20170608
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