VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 8 novembre 1999, présentée pour M. et Mme Z..., demeurant ..., Mme Veuve DA Y..., demeurant ... et M. et Mme de ANDRADE, demeurant ... ; les époux Z... et autres demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9515240/4 en date du 14 juin 1999 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la condamnation in solidum de l'Etat et de la commune de Noisy-le-Grand à verser aux époux Z... la somme de 1.350.000 F, à Mme Veuve DA Y..., celle de 1.200.000 F et aux époux de ANDRADE la somme de 950.000 F en raison des exactions perpétrées par des nomades en voie de sédentarisation ;
Classement CNIJ : 49-02-03
C+ 49-02-04
49-03-02
49-04-01
49-04-01-02
49-05-03
2°) de condamner in solidum l'Etat et la commune de Noisy-le-Grand à verser aux époux Z... la somme de 600.000 F, à Mme Veuve DA Y... celle de 1.150.000 F et aux époux de ANDRADE la somme de 500.000 F, avec les intérêts de droit à compter de leur réclamation préalable ;
3°) de condamner in solidum l'Etat et la commune de Noisy-le-Grand à leur verser la somme de 20.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des collectivités territoriales ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2003 :
- le rapport de M. RATOULY, président,
- les observations de Me X..., avocat, pour M. Z..., Mme veuve DA Y... et M. et Mme de ANDRADE,
- et les conclusions de Mme FOLSCHEID, commissaire du Gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la responsabilité de l'Etat et de la commune de Noisy-le-Grand en matière d'urbanisme :
Sur la responsabilité des services de police :
Considérant qu'aux termes de l'article 2212-2 du code général des collectivités territoriales : « La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : … 2° Le soir de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes … les bruits, y compris les bruits de voisinage… et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique… « et qu'aux termes de l'article 2215-1 du même code : « La police municipale est assurée par le maire, toutefois : 1°) Le représentant de l'Etat dans le département peut prendre, pour toutes les communes du département ou plusieurs d'entre elles, et dans tous les cas où il n'y aurait pas été pourvu par les autorités municipales, toutes mesures relatives au maintien de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité publiques … » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les requérants ont fait l'objet d'un harcèlement continu de la part de nomades occupant la rue du vieux chemin de Gournay à Noisy-le-Grand et ayant installé des caravanes sur des terrains avoisinants ; que, fréquemment, la possibilité de sortir de chez eux leur est interdite en raison du stationnement abusif des véhicules appartenant aux nomades ; qu'ils sont victimes de tapages diurnes et nocturnes, de menaces physiques, de dégradations de leurs biens mobiliers et immobiliers, de jets d'immondices et de détritus par dessus les clôtures de leurs propriétés ; que les personnes leur rendant visite craignent d'être agressés ;
Considérant que s'il est vrai, comme le soutiennent l'Etat et la commune de Noisy-le-Grand, qu'il appartient à la juridiction répressive seule de statuer sur les nombreuses plaintes pénales déposées par les requérants, il appartenait, tant à l'Etat, en vertu de son pouvoir de substitution, qu'au maire de Noisy-le-Grand de faire usage des pouvoirs de police qu'ils détiennent des articles 2212-2 et 2215-1 précités du code général des collectivités territoriales pour faire cesser les atteintes à la sûreté et à la tranquillité publique - y compris les troubles de voisinage - perpétrées par les nomades à l'encontre des requérants ; qu'en se bornant à dresser des contraventions, dont la réalité ne ressort d'ailleurs pas des pièces du dossier, sans prendre aucune autre mesure de nature à faire cesser les troubles ci-dessus décrits, le maire de Noisy-le-Grand et l'Etat ont commis une faute lourde de nature à engager leur responsabilité ;
Sur les préjudices :
En ce qui concerne M. et Mme Z... :
Considérant qu'en raison des exactions des nomades ci-dessus décrites, M. et Mme Z... ont dû vendre leur maison à un prix inférieur à sa valeur ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice qu'ils ont subi en raison de la perte de la valeur vénale de leur habitation ainsi que des frais liés à leur changement de résidence, en condamnant in solidum l'Etat et la commune de Noisy-le-Grand à leur verser à ce titre la somme de 30.000 euros, tous intérêts compris à la date du présent arrêt ; que la somme de 8.000 euros tous intérêts compris, leur sera attribuée, en outre, en réparation des troubles de toute nature qu'ils ont subis dans leurs conditions d'existence ;
En ce qui concerne M. et Mme de ANDRADE :
Considérant que M. et Mme de ANDRADE, qui ne sont arrivés dans la zone litigieuse qu'en 1991, alors que les nomades étaient déjà en partie installés, ont dû, eux aussi, vendre leur habitation dans des conditions de prix défavorables ; qu'ils sera fait une juste appréciation de la perte de la valeur vénale de leur bien, ainsi que des frais liés à leur changement de résidence, en condamnant in solidum l'Etat et la commune de Noisy-le-Grand à leur verser à ce titre la somme de 12.300 euros, tous intérêts compris à la date du présent arrêt ; que la somme de 4.000 euros tous intérêts compris leur sera allouée, en outre, en réparation des troubles de toute nature qu'ils ont subi dans leurs conditions d'existence ;
En ce qui concerne Mme veuve DA Y... :
Considérant qu'en l'absence de la vente de son pavillon, Mme veuve DA Y... ne peut prétendre à une indemnité au titre de la perte de la valeur vénale de son bien, le préjudice allégué étant sur ce point incertain ; qu'en revanche, et compte tenu de ce qu'elle a dû quitter son habitation, il sera fait une juste appréciation de l'ensemble des troubles de toute nature qu'elle subit dans ses conditions d'existence en condamnant in solidum l'Etat et la commune de Noisy-le-Grand à lui verser à ce titre la somme de 15.000 euros, tous intérêts compris à la date du présent arrêt ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner in solidum l'Etat et la commune de Noisy-le-Grand à payer aux époux Z..., à Mme DA Y... et aux époux de ANDRADE, ensemble, la somme de 2.250 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 9515240/4 en date du 14 juin 1999 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : L'Etat et la commune de Noisy-le-Grand sont condamnés in solidum à payer aux époux Z... la somme de 38.000 euros, aux époux de ANDRADE celle de 16.300 euros et à Mme veuve DA Y... la somme de 15.000 euros, tous intérêts compris à la date du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat et la commune de Noisy-le-Grand sont condamnés in solidum à payer aux époux Z... et de ANDRADE et à Mme veuve DA Y... ensemble, la somme de 2.250 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des époux Z... et de ANDRADE et de Mme DA Y... est rejeté.
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N° 99PA03697