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03/04/2007 | FRANCE | N°06LY00561

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 3ème chambre, 03 avril 2007, 06LY00561


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 16 mars 2006, présenté par LE PREFET DE L'YONNE ;

LE PREFET DE L'YONNE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502761 en date du 17 février 2006 par lequel le président du Tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 10 novembre 2005 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Dijon ;

LE PREFET DE L'YONNE soutient que les stipulations de

l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des lib...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 16 mars 2006, présenté par LE PREFET DE L'YONNE ;

LE PREFET DE L'YONNE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502761 en date du 17 février 2006 par lequel le président du Tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 10 novembre 2005 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Dijon ;

LE PREFET DE L'YONNE soutient que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues, dès lors que M. X ne justifie pas être isolé dans son pays d'origine ; que l'intéressé est entré en France irrégulièrement ; que le frère et la soeur de l'intéressé sont également en situation irrégulière sur le territoire national ; que l'intéressé s'est vu refuser la délivrance d'un certificat de nationalité au motif que la filiation n'est pas établie à l'égard de sa loi personnelle ; qu'étant majeur il ne peut bénéficier de la procédure de regroupement familial ; qu'il ne peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour ; qu'une mesure d'éloignement a également été prise à l'encontre de son frère ;
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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2007 :

- le rapport de M. Fontanelle, président ;

- et les conclusions de M. Aebischer, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité camerounaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 19 mars 2005, de la décision du PREFET DE L'YONNE du 14 mars 2005 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 10 novembre 2005, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du PREFET DE L'YONNE du 10 novembre 2005 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X au motif de la violation par ledit préfet des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;
Considérant que si M. X fait valoir que sa mère, ses frères et soeurs vivent en France, son frère aîné ayant même acquis la nationalité française, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est majeur, célibataire et sans enfant ; qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales au Cameroun où il a vécu jusqu'à l'âge de 18 ans ; que son frère, également en situation irrégulière en France, fait lui aussi l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions d'entrée et de séjour en France de l'intéressé, et eu égard aux effets d'une mesure d'éloignement, l'arrêté du PREFET DE L'YONNE du 10 novembre 2005 n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, c'est à tort que le président du Tribunal administratif de Dijon a annulé, pour ce motif, l'arrêté litigieux ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X tant devant le Tribunal administratif de Dijon que devant la Cour ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions des articles L. 111-1 et L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que seules peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière les personnes qui, à la date de cette mesure, n'ont pas la nationalité française, soit qu'elles aient une nationalité étrangère, soit qu'elles n'aient pas de nationalité ;

Considérant que M. X fait valoir qu'étant de nationalité française, il ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que, selon l'article 30 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité française incombe à celui dont la nationalité est contestée, sauf s'il est titulaire d'un certificat de nationalité française ; qu'il ressort des pièces du dossier que le tribunal d'instance d'Auxerre, par une décision du 17 décembre 2004, a refusé de lui délivrer le certificat de nationalité française dont il avait sollicité la délivrance ; que ce refus a été confirmé par une décision du Garde des Sceaux, ministre de la justice le 8 décembre 2005 ; qu'ainsi, M. X ne peut se prévaloir de la possession de la nationalité française à l'encontre de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, la circonstance qu'une juridiction camerounaise ait ordonné la transcription de l'acte de reconnaissance de M. X par le mari français de sa mère, par une décision postérieure audit arrêté de reconduite, étant sans influence sur la légalité de celui-ci ;

Considérant, en second lieu, que M. X fait valoir qu'il n'a pas atteint l'âge de la majorité au Cameroun et qu'en cas de retour dans son pays d'origine, il se heurterait à des difficultés inhérentes à sa minorité ; que, toutefois, l'intéressé ne justifie pas ne pas disposer d'une autonomie personnelle lui permettant de retourner au Cameroun en compagnie de son frère, également éloigné, pour y vivre normalement ; que, dès lors, en ordonnant la reconduite à la frontière de M. X, le PREFET DE L'YONNE n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit de M. X, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0502761 du Tribunal administratif de Dijon en date du 17 février 2006 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Dijon est rejetée.
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N° 06LY00561


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY00561
Date de la décision : 03/04/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guy FONTANELLE
Rapporteur public ?: M. AEBISCHER
Avocat(s) : GUITTEAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-04-03;06ly00561 ?
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