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28/05/2003 | FRANCE | N°99PA02264

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre, 28 mai 2003, 99PA02264


VU la requête, enregistrée le 15 juillet 1999 au greffe de la cour sous le numéro n° 99PA02264, présentée pour M. Michel X demeurant ... par Me CHAPUIS-HINI ; M. X demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 9516920 et 9608687 du tribunal administratif de Paris en date du 9 février 1999 en ce qu'il a rejeté sa demande de décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1988 ;

2°) de lui accorder la décharge sollicitée ;

3°) de lui allouer 10.000 F au titre des frais irrépétib

les ;

4°) d'accorder le sursis à exécution du jugement ;

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VU la requête, enregistrée le 15 juillet 1999 au greffe de la cour sous le numéro n° 99PA02264, présentée pour M. Michel X demeurant ... par Me CHAPUIS-HINI ; M. X demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 9516920 et 9608687 du tribunal administratif de Paris en date du 9 février 1999 en ce qu'il a rejeté sa demande de décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1988 ;

2°) de lui accorder la décharge sollicitée ;

3°) de lui allouer 10.000 F au titre des frais irrépétibles ;

4°) d'accorder le sursis à exécution du jugement ;

......................................................................................................

Classement CNIJ : 19-02-03-02

C 19-04-01-02-03

19-04-01-02-05-01

II) VU enregistré le 10 août 1999 au greffe de la cour sous le n° 99PA2653 le recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui demande l'annulation de l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Paris en date du 9 février 1999 et que M. X soit rétabli au rôle de l'impôt sur le revenu et au prélèvement social à concurrence des droits et pénalités dont la décharge a été indûment accordée par le tribunal ;

.......................................................................................................

VU les autres pièces du dossier ;

VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

VU le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mai 2003 :

- le rapport de Mme DE ROCCA, premier conseiller,

- et les conclusions de M. BOSSUROY , commissaire du Gouvernement ;

Considérant que M. X, qui au cours des années 1988, 1989 et 1990, exerçait les fonctions de président directeur général de la S.A. SAGES, sise 241 boulevard St Germain à Paris 7ème, a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle (ESFP) pour 1989 et 1990 et d'un contrôle sur pièces pour 1988 ; que pour les trois années, la comptabilité de la S.A. SAGES a également été vérifiée ; que des redressements ont été mis à la charge du requérant pour les années en cause au titre des revenus distribués qui procédaient exclusivement des constatations faites lors de la vérification de comptabilité de la S.A. SAGES ; que devant la cour, M. X conteste l'imposition maintenue par le tribunal administratif de Paris dans son jugement du 9 février 1999 pour l'année 1988 ; que, par ailleurs, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie demande que soit infirmé le jugement du tribunal en ce qu'il a accordé à M. X la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 1989 et 1990 ;

Sur la jonction

Considérant que la requête de M. X et le recours du ministre tendent à demander la réformation du jugement en date du 9 février 1999 du tribunal administratif de Paris ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par un seul arrêt ;

Sur le moyen tiré de la recevabilité du recours du ministre :

Considérant que M. X se prévaut de la tardiveté du recours du ministre résultant de ce que le jugement querellé a été notifié le 15 avril 1999 et que la direction générale des impôts a déposé son recours le 10 août 1999, à l'expiration du délai de deux mois visé à l'article R. 811-2 du code de justice administrative ;

Considérant que le délai de deux mois rappelé par le requérant ne s'applique pas aux recours déposés par l'administration qui relèvent des dispositions de l'article L. 200-18 du livre des procédures fiscales, le délai de quatre mois prévu par ce texte s'appliquant à l'espèce ;

Sur le moyen tiré de la régularité du jugement de première instance :

Considérant que M. X soutient que le jugement n'a pas répondu au moyen qu'il avait développé concernant la compétence du vérificateur ; qu'il résulte de l'instruction que le moyen dont fait état le requérant concernait l'incompétence du service ayant procédé à la vérification de la comptabilité de la société SAGES ; que ce moyen étant inopérant au regard de la contestation de l'imposition personnelle de M. X, le tribunal administratif n'étant pas tenu d'y répondre ;

Sur le recours du Ministre :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément sous peine de nullité que le contribuable peut se faire assister par un conseil de son choix ;

Considérant que M. X soutenait dans sa requête de première instance qu'avaient été méconnues ces dispositions pour les années 1989 et 1990, la notification du redressement en date du 13 octobre 1993 établie à l'issue des opérations de contrôle effectuées dans le cadre de l'examen de l'ensemble de sa situation fiscale personnelle mentionnant que celui-ci avait débuté le 20 octobre 1992 pour se terminer le 18 octobre 1993 ; que, devant la cour, le ministre fait valoir que M. X avait bénéficié d'un délai suffisant au regard de l'article L.47 au livre des procédures fiscales précité dans la mesure où il avait remis à l'administration une partie de ses relevés bancaires le 20 novembre 1992 à l'occasion du premier entretien avec le service intervenu dans le bureau du vérificateur ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'un avis de vérification a été adressé à M. X le 15 octobre 1992 et a été réceptionné par ce dernier le 20 octobre 1992 ; qu'une correspondance de l'administration reçue par le requérant le 27 octobre indiquait que les opérations menées par le service dans le cadre de la vérification de l'ensemble de sa situation fiscale personnelle débuteraient le 6 novembre, cette date ayant été reportée ultérieurement au 20 novembre 1992, jour où M. X s'est rendu dans le bureau du vérificateur et a remis une partie de ses relevés bancaires ; que la vérification portant sur l'ensemble de sa situation fiscale personnelle doit être regardée comme ayant débuté à cette date, qui laissait au contribuable un délai suffisant pour se faire assister d'un conseil et que les mentions de la notification de redressements relatives aux dates de vérification ne suffisent pas à établir à elles seules la réalité de ces dates ; qu'ainsi le ministre est fondé à soutenir que les garanties visées à l'article L. 47 du livre des procédures fiscales précitées n'ont pas été méconnues ; qu'il suit de là que le jugement du 9 février 1999 doit être annulé en tant qu'il porte sur les années 1989 et 1990 ; que par l'effet dévolutif de l'appel, il appartient à la cour d'examiner les autres moyens soulevés en première instance relatifs aux années 1989 et 1990 ;

Sur la requête de M. X relative à l'impôt sur le revenu de l'année 1988 et sur les moyens soulevés devant le tribunal administratif et dirigés contre les impositions afférentes à 1989 et 1990 :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

- Sur la méconnaissance de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ;

Considérant que M. X a fait l'objet en 1988 d'un contrôle sur pièces ; que s'agissant d'un contrôle sur pièces, les dispositions de l'article L.48 du livre des procédures fiscales prévoyant qu'à l'issue d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle ou d'une vérification de comptabilité l'administration doit porter à la connaissance du contribuable le montant de droits et pénalités, ne trouve pas à s'appliquer ; qu'ainsi M. X ne peut utilement se prévaloir d'une irrégularité de la notification de redressements en date du 11 décembre 1991 pour ce motif ;

- Sur l'incompétence du vérificateur :

Considérant que le requérant soutient que la Direction Nationale des vérifications de situations fiscales était incompétente pour procéder à la vérification de la S.A. SAGES ; qu'en raison de l'indépendance des procédures, un tel moyen, se rapportant à la vérification de la S.A. SAGES, est inopérant sur la solution du litige concernant l'imposition personnelle de M. X ; que le requérant ne saurait ainsi non plus se prévaloir d'irrégularités de la vérification de la comptabilité de ladite société pour contester la régularité de la procédure suivie à son encontre ;

- Sur le respect du caractère contradictoire de la procédure et l'accès aux documents comptables de la S.A. SAGES

Considérant que M. X fait valoir qu'il a été privé de la possibilité de contester le redressement qui lui a été notifié au titre des revenus distribués le 11 décembre 1991, les pièces utiles à sa défense ayant été saisies par l'autorité judiciaire ; qu'il résulte de l'instruction que ce moyen manque en fait, les pièces ayant été saisies le 14 janvier 1992, alors que le requérant avait, le 13 janvier 1992, fait parvenir au service ses observations sur la notification de redressement du 11 décembre 1991 ; qu'il n'établit pas de plus ni même n'allègue avoir été dans l'impossibilité d'accéder aux documents comptables de la société ; qu'il a, d'ailleurs, par lettre en date du 31 janvier 1992, confirmé à l'administration la possibilité qui lui avait été offerte par la chambre d'accusation de Rennes de consulter sur place les pièces dont le vérificateur avait besoin ; que ce dernier a, également, proposé de consulter contradictoirement au greffe de la cour d'appel, l'ensemble des pièces comptables ; qu'ainsi M. X n'est pas fondé à se prévaloir de ce que le caractère contradictoire de la procédure a été méconnu ;

- Sur la violation des droits de la défense et de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme :

Considérant que M. X soutient que la circonstance qu'une partie des pièces comptables saisie par l'autorité judiciaire ait été détruite par un incendie l'a privé des garanties concernant les droits de la défense ainsi que des garanties prévues par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Considérant que la destruction des pièces intervenue postérieurement à la vérification de la comptabilité de la S.A. SAGES n'a pas pour effet d'entacher rétroactivement d'irrégularité la procédure de redressement suivie à l'encontre du requérant et n'a pas non plus porté atteinte au caractère contradictoire de la procédure devant le tribunal ni aux droits de la défense dès lors, qu'ainsi il a été dit ci-dessus, M. X n'a pas établi que l'accès aux documents en cause lui a été refusé et qu'au surplus les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ne sont applicables qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur les droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale ;

- Sur la durée de l'examen de sa situation fiscale personnelle :

Considérant que M. X fait valoir que l'examen de sa situation fiscale personnelle a excédé la durée d'un an prévue par les dispositions de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ; que ce moyen manque en fait, l'avis de vérification ayant été reçu le 20 octobre 1992 et la notification des redressements ayant été adressée le 18 octobre 1993 au requérant ;

En ce qui concerne le bien fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : sont considérés comme revenus distribués : 1°) tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital. 2°) toutes le sommes ou valeurs mises à la dispositions des associés, actionnaires, ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ; que seuls peuvent être regardées comme déductibles du bénéfice net, en vertu de l'article 39 - 1 applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, les frais généraux supportés dans l'intérêt de l'exploitation ;

Considérant qu'au cours des opérations de contrôle, le service a constaté que la société avait supporté des charges étrangères à son intérêt propre, exposées dans l'intérêt de son président directeur général qui a été, en application des dispositions de l'article 109-1-2° du code général des impôts précité, regardé comme le bénéficiaire des revenus distribués à concurrence de 112.961 F pour 1988, 505.770 F pour 1989 et 825.002 F pour 1990, correspondant à des dépenses relatives à un appartement qu'il occupait rue Fabert à Paris 7ème et à des frais de déplacements ;

Considérant que M. X ayant indiqué le 13 janvier 1992 dans sa réponse à la notification de redressements du 11 décembre 1991 accepter les redressements afférents aux frais en cause, supporte devant la cour, en application de l'article L. 194 du livre des procédures fiscales, la charge de prouver leur caractère exagéré ;

Considérant que le requérant soutient en premier que la S.A. SAGES réimputait sur ses bulletins de salaires le montant des frais personnels dont elle s'était acquittée pour son compte, mais n'en apporte pas la preuve ;

Considérant, en deuxième bien, que s'agissant de l'appartement, dont le contrat indiquait qu'il était affecté au seul usage de l'habitation, le requérant soutient, sans en justifier, qu'il était utilisé à des fins professionnelles ; que la circonstance qu'une précédente vérification de comptabilité de la S.A. SAGES portant sur les exercices clos en 1984, 1985 et 1986 n'ait donné lieu à aucun redressement lié a l'utilisation de ces mêmes locaux à des fins professionnelles n'a aucune incidence sur la légalité des redressements en litige dans le cadre de la présente instance ; qu'il en est de même de dépenses personnelles prises en charge par la S.A. SAGES telles que des achats de biens domestiques ou de matériel livrés au domicile privé du contribuable ou de membres de sa famille, des achats d'ouvrages littéraires, des factures émanant d'EDF GDF se rapportant à des abonnements souscrits pour le domicile personnel, de même que des frais de déplacement ou de restaurant dont le caractère professionnel n'est étayé par aucune pièce du dossier ; qu'à cet égard, si le requérant fait valoir que les dépenses engagées par la S.A. SAGES étaient réfacturées à ses clients, il est constant que lors des opérations de vérification de la S.A. SAGES aucune refacturation des prestations litigieuses n'a pu être constatée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à demander la réformation du jugement du 9 février 1999 et à ce que son article 2 soit annulé ; que M. X n'est par contre pas fondé à demander l'annulation dudit jugement ;

Sur la demande de remboursement des frais irrépétibles :

Considérant que l'Etat n'étant pas la partie perdante, aucune indemnité ne saurait être allouée à ce titre à M. X, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1 : L'article 2 du jugement en date du 9 février 1999 est annulé.

Article 2 : M. X est rétabli dans les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1989 et 1990.

Article 3 : les conclusions de la requête de M. X sont rejetées.

N°s 99PA02264 - 99PA02653 7


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 99PA02264
Date de la décision : 28/05/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés FARAGO
Rapporteur ?: Mme DE ROCCA
Rapporteur public ?: M. BOSSUROY
Avocat(s) : BA-DANG DESAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2003-05-28;99pa02264 ?
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