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08/02/2018 | FRANCE | N°16BX01031,16BX01627

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 08 février 2018, 16BX01031,16BX01627


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1301481 du 21 janvier 2016, le tribunal administratif de Toulouse lui a accordé une réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011 et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :>
I / Par une requête, enregistrée le 24 mars 2017 sous le n° 16BX01031, M.A..., représenté par...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1301481 du 21 janvier 2016, le tribunal administratif de Toulouse lui a accordé une réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011 et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

I / Par une requête, enregistrée le 24 mars 2017 sous le n° 16BX01031, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 5 du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 21 janvier 2016 ;

2°) de rectifier l'imposition de ses revenus de l'année 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il est fondé à invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, en ce qui concerne l'année 2009, le bénéfice de la réponse ministérielle D...du 4 juin 2013 ainsi que l'instruction BOI 5 B-2-07.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 septembre 2016, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'année 2009 n'avait pas donné lieu à recouvrement et, s'agissant des années 2010 et 2011, le contribuable n'avait adressé aucune réclamation à l'administration ; la demande de M. A... enregistrée le 4 avril 2013 était donc irrecevable ;

- le jugement est irrégulier en ce que le tribunal n'a pas soulevé d'office cette irrecevabilité ;

- au fond, aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 16 mai 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 juin 2016 à 12 heures.

II / Par un recours enregistré le 13 mai 2016 sous le n° 16BX01627, et un mémoire enregistré le 23 mai 2017, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 21 janvier 2016 dans la mesure où, par ses articles 2 et 3, il a fait droit à la demande de M. A...;

2°) de remettre à la charge de M. A...les cotisations d'impôt sur le revenu dont il a obtenu la décharge devant le tribunal.

Il soutient que :

- l'année 2009 n'avait pas donné lieu à recouvrement et, au titre des années 2010 et 2011, le contribuable n'avait adressé aucune réclamation à l'administration ; la demande de M. A... enregistrée le 4 avril 2013 était donc irrecevable ;

- l'administration n'a pas introduit un nouveau motif de rehaussement dans une nouvelle proposition de rectification du 31 janvier 2013, mais a partiellement rejeté la réclamation du contribuable au titre de 2009 ; il n'y a donc pas eu de nouvelle procédure qui aurait privé M. A...de faire valoir ses droits en application des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; pour 2009, M. A...a été suffisamment informé des motifs de la rectification et il a pu utilement présenter ses observations ; ces dispositions ne trouvent pas à s'appliquer pour les années 2010 et 2011, en l'absence de réclamation du contribuable ;

- au titre de 2010 et 2011, en tout état de cause, les impositions ont fait l'objet de dégrèvements.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2017, M.A..., représenté par Me C..., conclut au rejet du recours et à l'annulation de l'article 5 du jugement, ainsi qu'à la rectification de l'imposition de ses revenus de l'année 2009. Il demande que soit mise à la charge de l'administration la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il est fondé à invoquer sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, en ce qui concerne l'année 2009, la réponse ministérielle D...du 4 juin 2013 ainsi que l'instruction BOI 5 B-2-07.

Par une ordonnance du 23 mai 2016, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 29 mai 2017 à 12h00.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laurent Pouget,

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., associé des sociétés en nom collectif (SNC) Sunenergy 004, Sunenergy 005 et Sunenergy 006, gérées par la société Diane, a imputé sur le montant de son impôt sur le revenu au titre de l'année 2009, sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies du code général des impôts, une réduction d'impôt afférente à des investissements réalisés à La Réunion par l'intermédiaire de cette société, consistant en l'acquisition de centrales photovoltaïques données en location à des sociétés tierces en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique. L'administration fiscale a remis en cause cette réduction d'impôt au titre de l'année 2009. En réponse aux observations du contribuable, elle en a, en revanche, admis le bénéfice au titre des années 2010 et 2011, sur la base toutefois d'un coût d'investissement minoré par rapport à celui déclaré par celui-ci. Saisi par M.A..., le tribunal administratif de Toulouse, par un jugement du 21 janvier 2016, lui a accordé une réduction des cotisations d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 2010 et 2011, et a rejeté sa demande tendant à la décharge du rehaussement d'impôt assigné au titre de 2009. M. A..., sous le n° 16BX01031, relève appel de ce jugement en ce qu'il a partiellement rejeté sa demande, s'agissant de l'année 2009. Le ministre de l'action et des comptes publics, pour sa part, relève appel du jugement, sous le n° 16BX01627, en ce qu'il a accordé à M. A...une décharge partielle de ses impositions sur le revenu au titre des années 2010 et 2011.

2. La requête et le recours enregistrés respectivement sous les numéros 16BX01031 et 16BX01627 sont dirigés contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le litige relatif à l'année 2009 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

3. Aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant (...) une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 / (...) La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) ". Aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II au même code, dans sa version applicable au litige: " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée, sous réserve des dispositions de la deuxième phrase du vingtième alinéa du I du même article au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...) ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer. Dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. Par suite, s'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques données en location à des sociétés en nom collectif en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et par suite productives de revenus qu'à compter de cette date.

5. En l'espèce, il ne résulte pas de l'instruction que le raccordement des investissements acquis par les SNC Sunenergy 004, 005 et 006, dont M. A...est associé et pour lesquels il revendique une réduction d'impôt au titre de l'année 2009, serait intervenu avant le 31 décembre 2009, ni d'ailleurs qu'un dossier complet de demande de raccordement aurait été déposé et un certificat de conformité délivré par le comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité (Consuel) avant cette date. Le requérant n'est, par suite, pas fondé à prétendre à une réduction d'impôt au titre de l'année 2009 sur le fondement des dispositions précitées du code général des impôts et de son annexe II.

En ce qui concerne l'application de la doctrine administrative :

6. Aux termes du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. ".

7. M. A..., pour contester le bien-fondé des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujettis au titre de l'année 2009, invoque en appel, sur le fondement des dispositions précitées, le paragraphe 148 de l'instruction référencée 5 B-2-07 du 30 janvier 2007, aux termes duquel : " Conformément aux dispositions du vingtième alinéa du I de l'article 199 undecies B, la réduction d'impôt est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. Le premier alinéa de l'article 95 Q de l'annexe II prévoit que l'année de réalisation de l'investissement s'entend de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée, c'est-à-dire achevée, par l'entreprise ou lui est livrée au sens de l'article 1604 du code civil, ou est mise à disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail. ". Toutefois, ces énonciations ne donnent pas une interprétation du dispositif légal différente de celle prévue par la loi en ce qui concerne le fait générateur de la réduction d'impôt, subordonné à la condition tenant à l'exploitation effective de l'immobilisation, et dont le tribunal a fait une exacte application. Le requérant ne peut davantage se prévaloir utilement de la réponse faite à M. E...D..., député, publiée au Journal Officiel du 4 juin 2013, dès lors que cette réponse est postérieure tant à l'établissement des impositions primitives qu'au terme du délai légal de déclaration des revenus de l'année 2009.

Sur le litige relatif aux années 2010 et 2011 :

8. Aux termes de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial, (...), de l'administration des impôts (...) dont dépend le lieu d'imposition ". Ces dispositions font obstacle à la recevabilité devant le tribunal administratif d'une demande qui n'a pas été précédée d'une réclamation à l'administration des impôts.

9. Il résulte de l'instruction qu'à la date à laquelle M. A...a introduit sa demande devant le tribunal administratif, le 5 avril 2013, il n'avait adressé à l'administration aucune réclamation en contestation du bien-fondé des cotisations primitives d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011. Par suite, et alors au demeurant que cette demande ne portait en réalité contestation que du rehaussement d'impôt sur le revenu qui lui avait été assigné au titre de l'année 2009, M. A...ne pouvait en tout état de cause être regardé comme recevable à porter directement devant le juge de l'impôt un litige afférent à l'imposition de ses revenus des années 2010 et 2011 sans en avoir préalablement saisi l'administration fiscale, en application des dispositions précitées de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales.

10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de son recours, que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a accordé à M. A... une réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011. M.A..., en revanche, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que ce même jugement a rejeté sa demande aux fins de décharge du rappel d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 2009, et des pénalités y afférentes.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 1301481 du 21 janvier 2016 sont annulés.

Article 2 : M. A...est rétabli au rôle de l'impôt sur le revenu au titre des années 2010 et 2011, à hauteur des réductions procédant des articles 2 et 3 du jugement du 21 janvier 2016.

Article 3 : Les conclusions de la requête n° 16BX01031 de M. A...sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 8 février 2018.

Le rapporteur,

Laurent POUGETLe président,

Aymard DE MALAFOSSELe greffier,

Christophe PELLETIER La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 16BX01031,16BX01627


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01031,16BX01627
Date de la décision : 08/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-05-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Réductions et crédits d`impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : ALEFELD ; ALEFELD ; ALEFELD

Origine de la décision
Date de l'import : 10/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-02-08;16bx01031.16bx01627 ?
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