Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Société financière Locabanque (le crédit-bailleur) a conclu avec la société Baby relax (le crédit-preneur) un contrat de crédit-bail immobilier, la société Barclays Bank (la caution) se portant caution solidaire envers le crédit-bailleur des engagements du crédit-preneur ; qu'après la mise en redressement judiciaire de ce dernier, l'administrateur de la procédure collective a renoncé, par lettre du 1er juillet 1988, à la continuation du contrat de crédit-bail, auquel il a été, ensuite, mis fin par un acte authentique du 14 octobre 1988, passé entre le crédit-bailleur et l'administrateur ; que le crédit-bailleur a alors déclaré au passif sa créance au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation, prévue en cas de résiliation à l'initiative du crédit-preneur ou consécutive à sa faute, et a été admis par un arrêt de la cour d'appel du 24 janvier 1990, qui a fait l'objet d'un pourvoi en cassation rejeté par arrêt du 4 février 1992 de la chambre commerciale, financière et économique ; que la caution a contesté cette admission ;
Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que le crédit-bailleur fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable la réclamation de la caution, alors, selon le pourvoi, que la décision irrévocable d'admission au passif d'une créance constitue une décision dotée de l'autorité de la chose jugée qui s'impose à la caution solidaire du débiteur ; qu'en énonçant le contraire, pour procéder à l'initiative de la caution à un nouvel examen de la créance et conclure qu'il n'y avait pas lieu de l'admettre au passif du crédit-preneur, la cour d'appel a violé l'article 1351 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement énoncé qu'en application de l'article 103 de la loi du 25 janvier 1985, la caution solidaire du débiteur peut, comme toute personne intéressée, à l'exclusion de celles mentionnées à l'article 102 de la même loi, contester l'état des créances déposé au greffe dans les conditions prévues par les articles 103 précité et 83 du décret du 27 décembre 1985 ; qu'elle en a justement déduit, dès lors qu'il n'est pas allégué que la caution ne se trouvait pas dans le délai légal de réclamation contre cet état, que l'arrêt du 24 janvier 1990, rendu sur un recours exercé, en vertu de l'article 102, contre la décision du juge-commissaire statuant sur l'admission de la créance du crédit-bailleur, n'avait pas acquis, quant à l'existence et au montant de cette créance, l'autorité de la chose jugée à l'égard de la caution, à qui un tel recours n'était pas ouvert ; que le moyen, pris en sa seconde branche, n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que le crédit-bailleur fait encore grief à l'arrêt d'avoir déclaré bien fondée la réclamation de la caution, alors, selon le pourvoi, qu'il résulte des propres termes de l'arrêt que le " syndic " a déclaré qu'il ne poursuivrait pas le contrat de crédit-bail et que la résiliation du contrat de crédit-bail a fait l'objet d'un acte authentique dressé par un notaire en date du 14 octobre 1988 entre l'administrateur du redressement judiciaire et le crédit-bailleur ; qu'en énonçant qu'il n'avait pas été mis fin à la convention de crédit-bail dans des conditions permettant au crédit-bailleur de revendiquer l'indemnité contractuelle de résiliation, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences qui en résultaient, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé à bon droit que, selon l'article 37, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985, la renonciation de l'administrateur à la poursuite du contrat de crédit-bail en cours n'avait pas entraîné, par elle-même, la résiliation de la convention à son initiative, l'arrêt relève que l'administrateur et le crédit-bailleur sont convenus, dans un acte ultérieur, de " constater la résiliation " de ce contrat, ce dont il résulte qu'il a été mis fin à celui-ci par résiliation amiable, et non à la seule initiative du crédit-preneur ou par sa faute ; que la cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision de rejeter, dans les rapports de la caution et du crédit-bailleur, l'admission de la créance de ce dernier au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 1351 du Code civil et 102 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu qu'après avoir déclaré la réclamation de la caution contre l'état des créances recevable et bien fondée, l'arrêt a décidé, en conséquence, qu'il n'y avait pas lieu à admission au passif de la créance du crédit-bailleur et a ordonné la modification de l'état des créances ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que si la décision d'admission du 24 janvier 1990 était, aux termes de son arrêt, inopposable à la caution, l'accueil de la réclamation de celle-ci ne pouvait avoir pour effet de remettre en cause la chose jugée par la décision d'admission dans les rapports du crédit-bailleur et du crédit-preneur, débiteur principal, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à admission au passif de la société Baby relax de la créance déclarée par la Société financière Locabanque et ordonné la modification, en conséquence, de l'état des créances de la société Baby relax, l'arrêt rendu le 9 juin 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DECLARE inopposable à la seule société Barclays Bank, prise en sa qualité de caution, la décision d'admission, pour un montant de 4 880 000 francs à titre chirographaire, de la créance de la Société financière Locabanque au passif de la société Baby relax prise par arrêt de la cour d'appel de Pau rendu le 24 janvier 1990 ;
DIT, en conséquence, que la société Barclays Bank, en sa qualité de caution, ne peut être tenue de payer le montant de la créance ainsi admise.