Attendu que, par décision de la cour d'appel de Turin du 27 novembre 1981, admise à exequatur par jugement du 8 août 1984, Mme X..., Française, demeurant en France, a été condamnée à restituer à la Compagnie d'assurance intercontinentale (CAI), domiciliée à Rome, la somme de 20 170 000 lires perçues au titre d'un jugement assorti de l'exécution provisoire puis réformé ; que la CAI, par assignation du 5 mars 1993, a demandé la réévaluation de sa créance à 75 551 381 lires pour raison de dépréciation de la monnaie italienne, outre 54 562 645 lires à titre d'intérêts moratoires, calculés du 8 août 1984 au 31 décembre 1994 ; que l'arrêt attaqué a dit Mme X... débitrice de la somme de 20 170 000 lires, et d'intérêts légaux au taux en vigueur en Italie pour la période du 8 août 1984 au 23 mars 1990 ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la CAI reproche à la cour d'appel d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1° que, sauf à violer l'article 1243 du Code civil et les règles gouvernant les paiements effectués en monnaie étrangère, une condamnation libellée dans celle-ci et dépréciée depuis son exigibilité ouvre droit au créancier d'obtenir l'équivalent réévalué de ce qui aurait dû lui être payé à cette date ;
2° que, même à conférer à la demande de revalorisation un fondement indemnitaire, l'on ne peut, sans violer les articles 1153 et 1243 du Code civil et les règles de la responsabilité quasi-délictuelle, dénier le préjudice qu'apporte une dévaluation au créancier non payé, et son imputabilité exclusive au débiteur lorsque celui-ci ne s'est pas acquitté à l'échéance ;
Mais attendu, qu'il n'appartient pas au juge français de modifier les termes d'une condamnation à somme fixe, prononcée par un juge étranger dans sa monnaie nationale et sans autre indication de sa part ; qu'ainsi que l'a relevé la cour d'appel, la réparation du préjudice éventuellement tiré du retard d'un débiteur de somme d'argent à s'exécuter dans une monnaie dévaluée depuis l'exigibilité de sa dette constitue une demande distincte dont elle n'était pas saisie ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1257 du Code civil ;
Attendu que, lorsque le créancier refuse de recevoir son paiement, le débiteur peut lui faire des offres réelles et, au refus du créancier de les accepter, consigner la somme offerte ; que les offres réelles ne libèrent le débiteur et ne tiennent lieu, à son égard de paiement que lorsqu'elles sont suivies de la consignation de la somme offerte ;
Attendu que, pour interrompre non au jour de sa décision mais au 23 mars 1990 le cours des intérêts moratoires de la somme de 20 170 000 lires au paiement desquelles elle a condamné Mme X..., la cour d'appel a retenu qu'à cette date la débitrice avait assigné la CAI en donné acte de ce qu'elle était prête à s'acquitter de cette somme ; qu'en statuant ainsi, elle a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fait cesser au 23 mars 1990 le cours des intérêts légaux, l'arrêt rendu le 6 juillet 1998, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.